CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 11 décembre 2013, n° 11-20120
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Putzmeister France (SARL)
Défendeur :
Hypermat (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Cocchiello
Conseillers :
Mmes Nicoletis, Luc
Avocats :
Mes Bodin Casalis, Merrien, Teytaud, Redon
La société Hypermat, qui exploite une activité d'achats, ventes, réparation, entretien et location de tout matériel, appareils, pièces détachées destinés au bâtiment, aux travaux publics et à l'agriculture, commercialisait depuis l'année 2000 les produits Putzmeister de la société de droit allemand Putzmeister Mörtelmaschinen GmbH, qui fabrique et vend auprès de revendeurs professionnels des machines pour l'extraction, la construction et le génie civil, notamment des pompes à béton et des machines à mortier.
Par jugement du Tribunal de commerce de Perpignan, en date du 22 février 2006, la société Hypermat a été placée en redressement judiciaire.
Par courrier du 17 mai 2006 la société Putzmeister France a informé la société Hypermat qu'elle avait pris la décision de mettre fin à leurs relations commerciales.
Par courrier en réponse à un courrier du 9 juin 2006 de M. André Samson, administrateur judiciaire de la société Hypermat, la société Putzmeister France a indiqué que la société Hypermat n'avait pas la qualité de concessionnaire et que désormais les ventes ne se feraient que comptant ou avec garantie.
Par courrier du 26 juillet 2007, l'avocat de la société Hypermat a mis en demeure la société Putzmeister Mörtelmaschinen GmbH de faire bénéficier la société Hypermat "des conditions de vente normales telles qu'elles résultent de vos conditions générales de vente, des usages antérieurs au redressement judiciaire et conformément à celle que vous pratiquez avec vos propres concessionnaires" et rappelé les dispositions des articles L. 441-6 et L. 442-6-I 1° du Code de commerce.
Par courrier du 11 janvier 2008, la société Putzmeister Mörtelmaschinen GmbH a confirmé sa volonté de poursuivre les relations commerciales sur la base des conditions de vente en vigueur.
Par courrier du 21 septembre 2009, la société Putzmeister Mörtelmaschinen GmbH a informé la société Hypermat de sa décision de "mettre un terme à notre collaboration dès la fin de l'année 2009" et précisé "Aussi, à compter du 1er janvier 2010 votre compte sera soldé et fermé".
Par acte du 1er juillet 2010, la société Hypermat a assigné la société Putzmeister France devant le Tribunal de commerce de Marseille, en lui reprochant d'avoir pratiqué jusqu'au mois d'août 2008, des délais de paiement, des conditions de vente et des modalités de vente discriminatoires et non justifiées, de l'avoir soumise à compter du 4 août 2008 à des conditions de règlement manifestement abusives contraires aux bonnes pratiques et usages commerciaux, de ne pas avoir respecté un préavis suffisant pour dénoncer le contrat de concession et de distribution, et d'avoir refusé de lui vendre du matériel.
Par jugement du 29 septembre 2011, le Tribunal de commerce a :
- condamné la société Putzmeister France à payer à la société Hypermat :
* la somme de 50 000 euro à titre de dommages et intérêts tous préjudices confondus
* la somme de 7 000 euro au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- débouté la société Hypermat de ses autres demandes ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- condamné la société Putzmeister France aux dépens.
Le 4 novembre 2011, la société Putzmeister France a interjeté appel devant la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du jugement signifié le 12 octobre 2011.
Le 9 novembre 2011, la société Putzmeister France a interjeté appel du même jugement devant la Cour d'appel de Paris.
Par arrêt du 12 septembre 2013 la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a déclaré irrecevable l'appel formé par la société Putzmeister France contre le jugement du Tribunal de commerce de Marseille du 29 septembre 2011, en application des dispositions de l'article D. 442-3 du Code de commerce.
Vu les dernières conclusions, notifiées et déposées les 21 et 22 octobre 2013, par lesquelles la société Putzmeister France demande à la cour :
Aux visas du décret 2009-1384 du 11 novembre 2009, des articles L. 442-6, L. 134-1 et L. 622-13 du Code de commerce
- de se déclarer compétente en vertu du décret 2009-1384 du 11 novembre 2009,
- de se déclarer valablement saisie au regard de la déclaration d'appel faite dans le délai légal,
- de déclarer l'appel formé par la société Putzmeister France devant la Cour d'appel de Paris recevable,
- d'infirmer le jugement rendu le 29 septembre 2011 par le Tribunal de commerce de Marseille,
- de déclarer irrecevables et non fondées les demandes de la société Hypermat à l'égard de la société Putzmeister France compte tenu de l'inapplicabilité de l'article L. 442-6 du Code de commerce aux agents commerciaux,
- de juger que la société Putzmeister France, qui n'a pas agi comme vendeur, ne peut en aucun cas être tenue pour responsable des pratiques discriminatoires reprochées par la société Hypermat,
- de juger que la société Putzmeister France, qui n'a pas agi comme vendeur, ne peut en aucun cas être tenue pour responsable du refus de vente reproché par la société Hypermat,
- de juger que la société Putzmeister France, qui n'a pas agi comme cocontractant et décisionnaire, ne peut en aucun cas être tenue pour responsable du délai de préavis accordé à la société Hypermat au titre des relations commerciales avec la société Putzmeister Mörtelmaschinen GmbH,
- de mettre hors de cause la société Putzmeister France,
- de débouter la société Hypermat de l'ensemble de ses demandes,
Sur l'appel incident de la société Hypermat:
- de juger que la société Hypermat n'apporte aucun élément de preuve relatif à l'évaluation du préjudice qu'elle prétend avoir subi et que le montant de ses demandes est fantaisiste et exorbitant,
- de juger que la société Hypermat ne saurait être indemnisée sur la base de son chiffre d'affaires, étant précisé qu'elle n'a pas déféré à la sommation de communiquer qui lui a été signifiée dans le cadre de la présente instance,
- de débouter en conséquence la société Hypermat de ses demandes,
A titre subsidiaire:
si par extraordinaire la cour devait entrer en voie de condamnation à l'encontre de la société Putzmeister France,
- de juger que le montant des demandes de la société Hypermat est manifestement excessif et en réduire le montant,
De nouveau à titre principal :
- de juger que la société Hypennat n'a été victime d'aucune pratique discriminatoire, d'aucunes conditions de règlement abusives, d'aucun refus de vente injustifié et que le préavis qui a été accordé était suffisant,
- de débouter la société Hypermat de l'ensemble de ses demandes,
- d'ordonner le remboursement à la société Putzmeister France par la société Hypermat de l'intégralité des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement dont appel, y compris les frais liés à la mise en œuvre de l'exécution provisoire,
- de condamner la société Hypermat à payer la somme de 10 000 euro à la société Putzmeister France au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- de condamner la société Hypermat aux entiers dépens d'appel et de première instance, dont le montant pourra être recouvre conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions, signifiées le 30 mars 2012, par lesquelles la société Hypermat demande à la cour :
Au visa des articles 100 du Code de procédure civile, L. 442 -6 du Code de commerce,
- de se déclarer incompétent au profit de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, première cour saisie,
subsidiairement,
- de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence
A titre subsidiaire et sur le fond,
- de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a jugé que le comportement fautif de la société Putzmeister France a causé un préjudice à la société Hypermat,
- de l'amender sur le quantum,
- de juger que jusqu'au mois d'août 2008, la société Putzmeister France a pratiqué à l'égard de la société Hypermat des délais de paiement des conditions de vente et des modalités de vente discriminatoires et non justifiées,
- de juger qu'à compter du 4 août 2008, la société Putzmeister France a soumis à la société Hypermat à des conditions de règlement manifestement abusives contraires aux bonnes pratiques et usages commerciaux
- de la condamner en conséquence, en réparation du préjudice de la société Hypermat à lui payer la somme de 360 000 euro à titre de dommages et intérêts,
- de juger que la société Putzmeister France n'a pas respecté un préavis suffisant pour dénoncer son contrat de concession et de distributeur de la société Hypermat,
- de la condamner, en conséquence, à lui payer la somme de 20 000 euro à titre de dommages et intérêts,
- de juger que la société Putzmeister France a, sans raison valable, refusé de vendre du matériel à la société Hypermat,
- de la condamner en réparation du préjudice de ces dernières à lui payer la somme de 10 000 euro à titre de dommages et intérêts,
- de condamner la société Putzmeister France à payer à la société Hypermat la somme de 10 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 29 octobre 2013 la clôture de l'instruction a été reportée au 29 octobre 2013, afin que soit versé aux débats l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 12 septembre 2013.
Cela étant exposé : LA COUR
Sur la compétence de la Cour d'appel de Paris:
Considérant que l'article 2 du décret n° 2009-1384 du 11 novembre 2009 (codifié à l'article D. 442-3 du Code de commerce) prévoit, pour l'application de l'article L. 442-6 du Code de commerce, la désignation des juridictions commerciales compétentes, laquelle figure à l'annexe 4-2-1 du livre IV et précise que la cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par ces juridictions est celle de Paris ; que l'article 8 de ce même décret réserve compétence à la juridiction primitivement saisie pour statuer sur les procédures introduites antérieurement à la date de son entrée en vigueur, soit le 1er décembre 2009 ;
Considérant que la procédure qui a été introduite par la société Hypermat devant le Tribunal de commerce de Marseille par une assignation délivrée le 1er juillet 2010, soit postérieurement au 1er décembre 2009, est soumise aux dispositions de l'article D. 442-3 du Code de commerce et par suite relève du pouvoir juridictionnel exclusif dévolu à la Cour d'appel de Paris ;
Sur la demande de mise hors de cause de la société Putzmeister France :
Considérant que la société Putzmeister France soutient qu'elle a agi en tant qu'agent commercial mandataire de la société Putzmeister Mörtelmaschinen GmbH, que si elle fait partie du même groupe que la société allemande, les sociétés sont juridiquement distinctes, la société Putzmeister Mörtelmaschinen n'étant pas la société-mère ; que seule cette société a vendu des machines, a émis les factures correspondantes, a déterminé les conditions et délais de règlement et les délais de livraison applicables à la société Hypermat ; que les dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce ne sont pas applicables à la société Putzmeister France qui a qualité d'agent commercial et qui n'est ni un producteur, ni un industriel, ni une personne immatriculée au répertoire des métiers ;
Considérant que le contrat d'agent commercial en date du 14 mars 2005 conclu entre les sociétés Putzmeister Mörtelmaschinen GmbH (PMM) et Putzmeister France, qui prévoit une représentation exclusive de la société Putzmeister Mörtelmaschinen GmbH en France, au Luxembourg, en Algérie, en Tunisie et en Lybie, stipule en son article 3 que "L'agent commercial a pour mission de négocier des ventes pour PMM avec des acheteurs éventuels travaillant dans son territoire. Cela signifie qu'il soutient activement les clients travaillant pour PMM dans le territoire contractuel, qu'il les forme et exerce son influence sur eux par toute méthode envisageable et soutenable par l'entreprise, afin d'atteindre les objectifs fixés par PMM dans le cadre de la stratégie française" ; que l'article 4 stipule également "Sans l'accord écrit de l'Agent commercial, PMM n'est pas habilité à dépêcher un autre agent commercial, commissionnaire ou concessionnaire dans le territoire contractuel pour les marchandises mentionnées à l'article 1. Cependant, PMM est habilité à travailler dans le territoire contractuel par l'intermédiaire de ses employés ou d'échanger avec les clients situés dans le territoire contractuel (...) PMM est tenue d'informer l'agent commercial des négociations avec les clients ou acheteurs éventuels du territoire contractuel (...)" ;
Considérant qu'il résulte du contrat précité que la société Putzmeister France avait pouvoir de représenter la société Putzmeister Mörtelmaschinen en France auprès des acheteurs, d' "exercer son influence sur eux" et de négocier les ventes ; que si l'article 3.2 précise "PMM est libre de conclure ou de refuser une vente proposée par l'agent commercial", cependant il apparaît que la société Putzmeister France avait la plus grande latitude pour choisir les revendeurs sur le territoire français, comme le démontre le courrier du 17 mai 2006 qu'elle a adressé à la société Hypermat pour lui signifier qu'après le 31 août 2006, cette dernière "n'appartiendra plus au réseau de concessionnaires Putzmeister", comme pour déterminer les conditions de vente applicables, comme le démontre le courrier adressé par la société Putzmeister France à l'administrateur judiciaire de la société Hypermat, par lequel elle répond "nous entendons parfaitement nous soumettre à la législation sur les ventes qui désormais ne pourront évidemment se faire que comptant ou avec garantie";
Considérant qu'il apparaît que c'est la société Putzmeister France qui en 2006 a décidé de réorganiser le réseau français de revendeurs en écartant la société Hypermat ; que c'est cette société qui gère le site Internet Putzmeister pour la France, sur lequel le nom de la société Hypermat a été supprimé en 2007, puis réinscrit après réclamation ; que les échanges de courriels produits montrent que la société Putzmeister France était l'interlocuteur de la société Hypermat, sauf pour les factures et les commissions qui remontaient à la société Putzmeister Mörtelmaschinen, laquelle ne s'est occupée directement de la situation de la société Hypermat qu'à compter de la fin de l'année 2007, à la suite de la mise en demeure qui lui a été adressée le 26 juillet 2007 par l'avocat de cette société ;
Considérant que la société Putzmeister France assure en France, sous son propre nom, la politique commerciale de la marque ; qu'il résulte de trois attestations de clients de la société Hypermat que la société Putzmeister France a pris la décision d'écarter la société Hypermat et de favoriser la société Ferrat ; que les dispositions de l'article L. 442-6 I 1° du Code de commerce, dans sa rédaction applicable aux contrats et aux commandes antérieurs au 1er janvier 2009, s'appliquent à la société Putzmeister France, qui était le "partenaire économique" de la société Hypermat ; que la demande de mise hors de cause de la société Putzmeister France sera rejetée ;
Considérant que la société Hypermat sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société Putzmeister France à lui verser des dommages-intérêts pour avoir notamment favorisé un autre revendeur et avoir retiré ses références du site Internet ; que ces agissements sont établis à l'encontre de la société Putzmeister France, qui après avoir assuré le mandataire judiciaire de sa volonté de continuer ses relations commerciales avec la société Hypermat a cherché à évincer la société Hypermat au profit d'un autre revendeur ;
Considérant que ce comportement d'exclusion à l'égard de la société Hypermat, qui n'est justifié par aucun manquement imputable à cette société, a entraîné un manque à gagner durant plusieurs années pour la société Hypermat, que le tribunal a exactement évalué à la somme de 50 000 euro ;
Sur les pratiques discriminatoires et les conditions de règlement abusives :
Considérant que la société Hypermat expose qu'après l'ouverture du redressement judiciaire elle n'a plus bénéficié de la remise de 5 % et de l'escompte de 2 % dont elle bénéficiait précédemment ;
que de même son délai de paiement de 90 jours a été ramené à 45 jours, puis un paiement comptant a été exigé en violation des conditions générales de vente et alors qu'elle n'a enregistré aucun impayé ;
que les délais de livraisons concernant une commande de cinq machines, de sept à huit semaines, rendent tout achat impossible, alors que des conditions différentes sont consenties au concessionnaire Ferrat, situé également à Perpignan ; qu'enfin, la production de nouvelles machines a été subordonnée à la réception d'un paiement d'avance ;
Considérant que la société Putzmeister France soutient qu'en application de l'article L. 622-13 du Code de commerce, à compter de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société Hypermat, l'administrateur judiciaire a l'obligation de procéder à un règlement au comptant ; que néanmoins, à compter de novembre 2007, il a été accordé un règlement à huit jours conformément aux conditions générales de vente de la société Putzmeister Mörtelmaschinen ; qu'il est admis par la jurisprudence que la réduction ou la suppression de facilités de paiement puisse être justifiée par un risque d'insolvabilité accru ; que les délais de livraison des machines vendues dépendent de la nature des machines et non de l'acheteur et que le retard de livraison aux acheteurs finaux s'explique par le retard de la société Hypermat dans le paiement des factures, qui en 2007 devait se faire au comptant ;
Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 622-13 du Code de commerce les relations entre les deux sociétés, qu'elles soient ou non qualifiées de contrat de concession, étaient en cours et les ventes consenties devaient faire l'objet d'un paiement comptant ; que la société Putzmeister France était en droit d'exiger après l'ouverture du redressement judiciaire un paiement comptant ; que cette exigence de paiement comptant, qui a d'ailleurs été assouplie en 2007, est à l'origine du retard de livraison à la société EDC, cliente de la société Hypermat ; que la suppression de la remise et de l'escompte qui étaient accordés à la société Hypermat avant la procédure de redressement judiciaire s'explique par la chute importante des ventes de machines et de pièces détachées ; que les conditions de règlement imposées à la société Hypermat après sa mise en redressement judiciaire, si elles ont été défavorables à son activité, n'étaient pas abusives ;
Considérant que le refus, en septembre 2009, d'une commande de quatre machines en leasing pour un montant de 77 000 euro a été motivé par l'absence de couverture sur le compte de la société Hypermat et par la demande d'une échéance de paiement de 15-20 jours après encaissement du leasing, présentée comme une pratique non habituelle pour la société Putzmeister Mörtelmaschinen; qu'il résulte des courriels échangés entre les parties, d'une part, que la décision de refus a été prise par la société Putzmeister Mörtelmaschinen et, d'autre part, que la décision n'avait pas de caractère discriminatoire mais était dictée par la prudence, dès lors que la société Hypermat, bien que n'ayant pas d'impayés, était dans une situation financière difficile, avait un chiffre d'affaires en diminution constante et n'avait vendu aucune machine Putzmeister depuis deux années ;
Considérant que s'il est établi que la société Putzmeister France a adopté une attitude de défiance et a préféré privilégier un autre revendeur situé dans le même secteur géographique et offrant plus de sécurité financière que la société Hypermat, il apparaît que cette attitude était dictée par la prudence, pour éviter des pertes économiques et non par une volonté de discrimination ;
Considérant que la discrimination consiste pour une entreprise à traiter des co-contractants qui sont dans la même situation de façon différente, une telle différence n'étant pas justifiée par des contreparties réelles, en créant de ce fait pour certains d'entre eux un désavantage dans la concurrence ;
que, au vu des documents produits aux débats, la société Hypermat ne rapporte pas la preuve qu'elle ait été traitée par la société Putzmeister France différemment qu'un autre revendeur se trouvant dans la même situation qu'elle ;
Sur la rupture des relations commerciales :
Considérant que la société Hypermat soutient que la société Putzmeister France a mis un terme à une relation commerciale qui a duré plus de neuf années en ne lui accordant qu'un préavis de trois mois et neuf jours, ce qui est insuffisant pour lui permettre de trouver un autre fournisseur et contraire aux dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ;
Considérant que par courrier du 26 juillet 2007, la société Hypermat a saisi directement la société Putzmeister Mörtelmaschinen de ses difficultés et a pu négocier avec cette société les conditions de continuation des relations commerciales ; que le courrier du 21 septembre 2009 mettant fin à ces relations à compter du 30 décembre 2009 émane de cette société ; que si la société Hypermat considère que le préavis prévu par ce courrier est trop court eu égard à la durée de la relation d'affaires, cependant la rupture de la relation commerciale établie depuis 2000 n'est pas imputable à la société Putzmeister France mais à la société Putzmeister Mörtelmaschinen, qui n'est pas dans la cause ; que la demande de la société Hypermat dirigée contre la société Putzmeister France sera rejetée ;
Sur le refus de vente :
Considérant que la société Hypermat reproche à la société Putzmeister France d'avoir refusé de lui vendre une marchandise en janvier 2010 au motif que son compte était fermé ;
Considérant que la décision de fermer le compte de la société Hypermat le 1er janvier 2010 a été prise par la société Putzmeister Mörtelmaschinen, qui l'avait annoncée à la société Hypermat dans le courrier de rupture du 21 septembre 2009 ; que la commande urgente refusée a été adressée directement à la société Putzmeister Mörtelmaschinen, qui a répondu le 11 janvier 2010 sur le bon de commande "Selon décision de la direction votre compte client a été fermé depuis le 1er janvier conformément au courrier que vous a adressé M. Grunder le 22 octobre 2009" ;
Considérant qu'aucun refus de vente ne peut être reproché à la société Putzmeister France, dont rien n'établi qu'elle ait été même consultée sur cette décision ;
Par ces motifs : Déclare la Cour d'appel de Paris compétente en application des dispositions de l'article D. 442-3 du Code de commerce ; Déclare l'appel de la société Putzmeister France recevable ; Confirme le jugement, sauf en ses dispositions ayant condamné la société Putzmeister France à payer à la société Hypermat la somme de 50 000 euro à titre de dommages et intérêts tous préjudices confondus ; Et y ajoutant : Rejette la demande de mise hors de cause de la société Putzmeister France ; Condamne la société Putzmeister France à verser à la société Hypermat la somme de 50 000 euro à titre de dommages-intérêts ; Déboute la société Hypermat de ses demandes dirigées contre la société Putzmeister France au titre des pratiques discriminatoires, des conditions de règlement abusives, de la rupture des relations commerciales et du refus de vente ; Condamne la société Putzmeister France à verser à la société Hypermat la somme de 7 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Déboute les parties de leurs autres demandes ; Condamne la société Putzmeister France aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.