CA Rennes, 3e ch. com., 10 décembre 2013, n° 12-02529
RENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
ID Traiteur (SARL), Traiteur de Paris (SAS)
Défendeur :
Brillouet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Poumarède
Conseillers :
Mmes André, Guéroult
Avocats :
Mes Renaudin, Corgas, George
I - EXPOSE DU LITIGE
La société Traiteur de Paris Distribution est une société spécialisée dans la fabrication de produits alimentaires.
La société ID Traiteur est une société spécialisée dans la distribution de produits alimentaires frais.
Pour distribuer leurs produits, la société Traiteur de Paris a signé le 4 janvier 2010 un contrat d'agent commercial avec M. Brillouet et la société ID Traiteur en a fait de même le 18 janvier 2010 avec effet au 4 janvier 2010.
Par courrier expédié le 8 avril 2010 pour la société Traiteur de Paris et le 15 avril 2010 pour la société ID Traiteur, les deux sociétés, ont notifié à M. Brillouet la résiliation de ses contrats d'agent commercial.
Par courriers recommandés du 11 juin 2010 adressés à ses deux mandants, M. Brillouet a contesté toute faute grave et sollicité le règlement de commissions et des indemnités.
Après mises en demeure du 21 février 2011, restées infructueuses, M. Brillouet a assigné la société ID Traiteur et la société Traiteur par assignation respective des 28 et 29 avril 2011.
Par jugement contradictoire en date du 19 mars 2012, le Tribunal de commerce de Nantes a:
- prononcé la jonction des deux instances
- dit que les contrats de M. Brillouet ont été régulièrement résiliés pendant la période d'essai mais que le préavis n'a pas été respecté et que la faute grave n'est pas établie,
- condamné la société Traiteur de Paris à payer à M. Brillouet les factures impayées, soit 13 912,75 euros au titre des factures suivantes :
* n° 000008 et 000010 : acompte sur commission des mois d'avril et mai 2010 pour un montant total de 8 440 euro TTC
* n° 000007 : un solde de commissions de 3 257,25 euros TTC au 31 mars 2010 suivant CA communiqué soit 300 745 euro
* n° 000009 et 000011 : forfait mensuel d'avril et mai 2010 soit 2 215,50 euros TTC
- condamné la société Traiteur de Paris à payer à M. Brillouet la somme de 60 000 euro au titre du préjudice subi
- condamné la société ID Traiteur à payer à M. Brillouet la somme de 4 934,07 euros TTC au titre des factures impayées du 28 février, 4 mars et 15 avril 2010
- condamné la société ID Traiteur à payer la somme de 12 000 euro en réparation du préjudice subi à M. Brillouet
- débouté les sociétés ID Traiteur et Traiteur de Paris de toutes leurs demandes,
- condamné les sociétés ID Traiteur et Traiteur de Paris à payer à M. Brillouet la somme de 3000 euro au titre de l'article 700 du CPC,
- ordonné l'exécution provisoire
- fait masse des dépens et condamné les sociétés ID Traiteur et Traiteur de Paris à les régler, chacune par moitié.
Les sociétés ID Traiteur et Traiteur de Paris ont déclaré faire appel de cette décision le 13 avril 2012.
Par deux ordonnances de référé du 27 juin 2012, le premier président de la Cour d'appel de Rennes a arrêté l'exécution provisoire dont est assorti le jugement rendu le 19 mars 2012 par le Tribunal de commerce de Nantes dans ses dispositions condamnant tant la société ID Traiteur que la société Traiteur de Paris.
La société ID Traiteur demande à la cour de :
Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu
A titre principal,
- Dire et juger que la résiliation du contrat par la société ID Traiteur est bien fondée car réalisée pendant la période d'essai contractuellement convenue entre les parties,
- Dire et juger qu'en conséquence, M. Brillouet ne saurait solliciter une indemnisation pour rupture abusive du contrat,
- Rejeter toutes les demandes de ce chef de M. Brillouet.
A titre subsidiaire,
Dire et juger M. Brillouet a commis une faute grave
Rejeter la demande d'indemnisation à ce titre de M. Brillouet,
A titre infiniment subsidiaire, Dire et juger que cette indemnisation ne peut être supérieure à 2 mois et demi.
Dire et juger que M. Brillouet n'a aucun droit à commission ou forfait pour les mois d'avril et de mai 2010, dès lors que le contrat d'agent a pris fin le 8 avril 2010,
Rejeter toutes les demandes fins et conclusions de M. Brillouet.
Condamner M. Brillouet à verser à la société ID Traiteur la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux dépens.
La société Traiteur de Paris demande à la cour de:
Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu
Dire et juger M. Brillouet a commis une faute grave,
Rejeter la demande d'indemnisation à ce titre
A titre subsidiaire dire et juger que cette indemnisation ne peut être supérieure à 2 mois et demi
Dire et juger que M. Brillouet n'a aucun droit à commission ou forfait pour les mois d'avril et de mai 2010, dès lors que le contrat d'agent a pris fin le 8 avril 2010
Condamner M. Brillouet à verser à la société Traiteur de Paris la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre aux dépens.
M. Brillouet, intimé demande à la cour de :
Déclarer la société ID Traiteur non fondée en son appel, l'en débouter ainsi que de toutes ses contestations et demandes;
Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Nantes le 19 mars 2012, en ce qu'il a:
- jugé que la faute grave n'était pas établie.
- condamné la société ID Traiteur à indemniser Monsieur Brillouet du préjudice subi.
- condamné la société ID Traiteur à verser à Monsieur Brillouet la somme de 4 934,07 euro au titre des factures des 28 février, 4 mars et 15 avril 2010 impayées.
- condamné la société ID Traiteur à verser à Monsieur Brillouet la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Réformer le jugement
- Dire et juger que la période d'essai insérée dans le contrat n'est pas valable
- Condamner la société ID Traiteur à verser à Monsieur Brillouet une somme qui ne saurait être inférieure à 24 000 euro en réparation du préjudice subi du fait de la rupture abusive du contrat.
Subsidiairement
- Même à considérer la période d'essai insérée dans le contrat valable, confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Nantes du19 mars 2012 en ce qu'il a reconnu un droit à commissions à Monsieur Brillouet en application du contrat d'agent commercial.
En toute hypothèse
- Condamner la société ID Traiteur à verser à Monsieur Brillouet la somme complémentaire de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamner la société ID Traiteur aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Benoit George du Cabinet Lexavoué conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
M. Brillouet demande également à la cour de :
Déclarer la société Traiteur de Paris non fondée en son appel, l'en débouter ainsi que de toutes ses contestations et demandes,
Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Nantes le 19 mars 2012, en ce qu'il a:
- Jugé que la faute grave n'était pas établie.
- Condamné la société Traiteur de Paris à indemniser Monsieur Brillouet du préjudice subi.
- Condamné la société Traiteur de Paris à verser à Monsieur Brillouet la somme de 13 692,75 euro TTC au titre des factures n° 000007, 000008, 000009 et 000010, 000011 impayées.
- Condamné la société Traiteur de Paris à verser à Monsieur Brillouet la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Réformer le jugement sur le montant de l'indemnisation
Condamner la société Traiteur de Paris à verser à Monsieur Brillouet une somme qui ne saurait être inférieure à 121 200 euro en réparation du préjudice subi du fait de la rupture abusive du contrat.
En toute hypothèse:
- Condamner la société Traiteur de Paris à verser à Monsieur Brillouet la somme complémentaire de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Condamner la société Traiteur de Paris aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Benoit George du Cabinet Lexavoué conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
II MOYENS DES PARTIES
À l'appui de leurs prétentions, la société ID Traiteur indique que le contrat signé par Monsieur Brillouet prévoyait une période d'essai de 6 mois, qu'au jour de la réception de la lettre de résiliation, la période d'essai n'était pas écoulée, la rupture valable et en conséquence aucune indemnité de rupture n'est due.
La période d'essai et valable et le statut des agents commerciaux n'a vocation à s'appliquer que postérieurement à la période d'essai et de la même façon l'indemnité de préavis n'est pas due.
Les deux mandants exposent par ailleurs que en ne respectant pas les termes des contrats d'agent commercial, notamment en ce qui concerne ses devoirs fixés aux articles 5 des contrats, Monsieur Brillouet n'a pas respecté ses obligations et toute confiance était ainsi rompue entre les parties;
Les conditions commerciales proposées par l'agent devaient être validées par le directeur commercial de la société ID Traiteur, or M. Brillouet a engagé avec Système U Ouest une promotion avec une marge négative sans l'accord d'ID Traiteur et a fait de même en consentant à la société Leclerc des conditions tarifaires non acceptées par la société Traiteur de Paris qui s'est inquiétée dès janvier 2010 de la situation; la preuve d'une éventuelle tolérance de l'un ou l'autre des mandants n'est nullement rapportée;
Les contrats de M. Brillouet n'ayant duré que quelques mois, le droit à réparation s'il est retenu doit être évalué à deux mois et demi de commissions. M. Brillouet ne justifie pas de ses demandes de calcul. Il est contraire aux règles élémentaires du droit de prendre en compte la période antérieure pendant laquelle il a travaillé au sein de la société ID Traiteur sous d'autres statuts pour évaluer la durée de la relation d'agent commercial.
Le tribunal ne motive pas sa décision et a quantifié de façon arbitraire l'indemnité sans adéquation avec le préjudice réel de M. Brillouet et n'a pas davantage individualisé les situations des deux mandants.
Les factures postérieures à la rupture ne peuvent, alors que l'agent ne pouvait prétendre à un préavis, être payées.
À l'appui de ses prétentions, l'intimé soutient que la clause du contrat d'agent commercial insérée dans le contrat avec la société ID Traiteur prévoyant une période d'essai est réputée non écrite par application de l'article L. 134-16 du Code de commerce dès lors que les relations entre les parties ont débuté préalablement. En 2009 il était gérant de la société ID Traiteur et conseiller commercial de la société Traiteur de Paris pour la représentation de leurs produits dans les enseignes de la grande et moyenne distribution ; il menait les mêmes actions commerciales pour la société ID Traiteur.
L'article 8 du contrat prévoit une indemnité en cas de rupture et ni dans la lettre de rupture ni après la société ID traiteur ne s'est prévalu de la période d'essai et voulant résilier pour faute grave, elle a renoncé à se prévaloir de la période d'essai.
Les mandants ne rapportent pas d'éléments de preuve suffisants pour justifier une faute grave qu'il n'a pas commise.
Il indique que la société ID Traiteur avait connaissance des remises faite au réseau Système U, qui avait commencé alors qu'il était gérant de la société ID Traiteur et la société ID Traiteur a poursuivi les mêmes opérations commerciales après la rupture. La société Traiteur de Paris ne lui a jamais donné d'instructions fermes sur les conditions commerciales à accorder aux clients et lui laissait une certaine marge de négociation et les remises négociées l'ont été dans les mêmes proportions que celles qui avaient été consenties par le mandant en 2009. Les contrats ont été négociés et validés en parfaite concertation avec la société Traiteur de Paris, ce dès 2009 et se sont poursuivies dans des conditions similaires en 2010 et postérieurement à son départ. Il n'est pas établi que la société Traiteur de Paris ait subi la moindre perte.
Il justifie par ailleurs de ses factures.
Son préjudice est considérable puisqu'il est le résultat de plusieurs années de travail pour ses mandants, les faire connaître dans la grande et moyenne distribution et les implanter dans ce secteur qu'ils ne connaissaient pas.
L'ordonnance de clôture est du 11 septembre 2011.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties la cour se réfère aux énonciations de la décision déférée et aux dernières conclusions signifiées des parties :
- du 8 juin 2012 pour chacun des appelants.
- du 30 juillet 2012 pour l'intimé
III- MOTIFS
Le contrat d'agent commercial en date du 18 janvier 2010 signé entre la société ID Traiteur et M. Brillouet, conclu pour une durée indéterminée et à effet du 4 janvier 2010 a prévu en son article 2, une période d'essai de six mois.
Les parties sont libres de fixer la date à laquelle le contrat d'agent commercial débute, elles peuvent ainsi notamment reporter la date d'effet du contrat à la date d'immatriculation de l'agent sur le registre spécial. Le fait que le contrat du 18 janvier 2010 ait fait rétroagir la date d'effet du contrat au 4 janvier 2010, date à laquelle M. Brillouet a cédé ses parts de la société, n'a pas d'incidence sur la validité de la clause prévoyant une période d'essai.
Cette clause insérée dans le contrat est valable et lie les parties par application de l'article 1134 du Code civil, le contrat d'agent commercial n'excluant pas que les parties puissent prévoir celle-ci. Le mandant comme le mandataire aurait pu également le faire, pouvait en application de cette clause résilier le contrat de son agent commercial pendant la durée de la période d'essai. La résiliation, pour faute grave au visa de la lettre, est intervenue par courrier recommandé en date du 15 avril 2010 soit pendant la période d'essai de six mois que l'on se place à la date de signature du contrat ou à sa date d'effet antérieure de 15 jours. Il importe peu que le mandant n'ait pas invoqué la rupture pendant la durée de la période d'essai aux termes de sa lettre de résiliation. L'indemnité compensatrice de la rupture et l'indemnité de préavis ne sont pas dues, ce nonobstant l'article 8 du contrat qui prévoit un préavis et une indemnité de rupture. Cet article n'a en effet vocation à s'appliquer que passée la période d'essai ; en effet cette période d'essai avec maintien d'une indemnité de rupture ou encore d'une indemnité de préavis n'aurait aucun sens.
Le jugement sera en conséquence infirmé dès lors qu'il a condamné la société ID Traiteur au versement d'une indemnité de rupture de 12 000 euro, sans qu'il soit besoin de s'attacher en ce qui concerne ce contrat à l'existence ou pas d'une faute grave.
M. Brillouet ne réclame aucune commission sur vente pour les mois postérieurs à la rupture.
Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société ID Traiteur à lui payer les factures de commissions impayées sur les ventes de janvier, février et mars 2010, antérieures à la rupture, selon factures du 28 février 2010 pour un montant de 274,37 euro, du 4 mars 2010 pour un montant de 593,48 euro et du 15 avril 2010 pour un montant de 4 066,22 euro, soit un total de 4 934,07 euro.
Le contrat d'agent commercial en date du 4 janvier 2010 signé entre la société Traiteur de Paris et M. Brillouet, aux fins de commercialiser ses produits de la marque Chef de Paris auprès des grandes et moyennes surfaces a été conclu pour une durée indéterminée et ne prévoit quant à lui aucune période d'essai.
Seule la faute grave, c'est-à-dire celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel, est privatrice de l'indemnité compensatrice du préjudice subi en cas de cessation du contrat d'agence commerciale et il appartient au mandant de rapporter la preuve d'une telle faute par application des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce.
(Article 134-12 du Code du commerce :
En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.
( ... )
Article L. 134-13
La réparation prévue à l'article L. 134-12 n'est pas due dans les cas suivants: 1° La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial;
( ... )
Il est notamment stipulé à l'article 5 du contrat au titre des devoirs de l'agent que :
En début de chaque année, avant le 31 janvier, M. Franck Brillouet doit remettre à la société, un budget des ventes qui doit être validé avec le Directeur Commercial. Ce budget devra reprendre:
- la liste des clients tels que définis à l'Annexe 1,
- la liste des produits et tarifs tels que définis à l'Annexe 2,
- les volumes, par mois, des ventes par produits et par clients,
- l'ensemble des conditions commerciales demandées par l'Agent Commercial et validées par le Directeur Commercial de la société (Mise en avant des produits, budgets accordés au client; etc.). Si à la fin de l'année, la somme des budgets accordés par l'Agent Commercial aux clients est supérieur à ce qui était accordé par la société, le surplus est facturé par la société à l'Agent Commercial, hors enveloppes consommateurs variables accordés aux enseignes pour les opérations de mises en avant (tickets Leclerc, BRI...)
Il apparaît à ce stade utile d'indiquer que M. Brillouet a été embauché le 2 avril 2007 comme directeur commercial salarié avec un statut de cadre de la société Denis Pinault Restauration (ancienne dénomination de la société Traiteur de Paris), aux fins de lancer la distribution de ses produits, avant d'être licencié, puis d'avoir créé avec M. Pinault la société ID Traiteur pour lancer une nouvelle gamme de produits; en parallèle la société ID Traiteur, gérée par ses soins et la société Traiteur de Paris, ont conclu le 2 janvier 2009 un contrat de conseiller commercial, mandat d'intérêt commun aux termes duquel la société Traiteur de Paris a confié en exclusivité à M. Brillouet et à un dénommé M. Dauphas (responsable commercial de la société ID Traiteur), la représentation de ses produits sur l'ensemble du territoire national, lesquels ont alors entrepris des négociations commerciales avec les enseignes de la grande distribution ; puis le 4 janvier 2010, une filiale de la société Traiteur de Paris a racheté à M. Brillouet ses parts dans le capital de la société ID Traiteur, pour l'euro symbolique, le jour de la conclusion de son agent commercial; ces éléments attestent que M. Brillouet intervenait de longue date dans la stratégie commerciale des sociétés du groupe.
La société Traiteur de Paris reproche à son agent d'avoir concédé aux centrales d'achat de Leclerc, des conditions commerciales et tarifaires non validées par le directeur commercial, générant d'importante pertes. Les mails adressés à M. Brillouet par son mandant les 18 et 20 janvier 2010 évoquent des pénalités de retard Leclerc qui sont consécutives à des défaillances ou retard de livraison qui ne sont pas imputables à l'agent, comme l'a d'ailleurs relevé le tribunal de commerce et le mandant n'expose guère en quoi ces pénalités pourraient être liées au comportement de M. Brillouet. Celui du 29 janvier 2010 fait état d'une interrogation sur une promotion de 8 % accordée à Système U et ce n'est que le 26 mars 2010 que la société Traiteur de Paris en référence au dossier Leclerc mentionnait clairement à celui-ci la nécessité de bien vouloir mettre à la signature tous les contrats signés avec la grande et moyenne surface pour 2010; la société précisait " comme tu le sais tu as l'expérience des relations avec la GMS que nous n'avons pas... Pour autant, il faut, dans l'accord qui nous lie, que tout le monde gagne de l'argent, et les premiers éléments qui me sont communiqués me laissent à penser que TdP a un bilan négatif sur ce dossier. (...)", puis évoquait à son agent dans un autre mail : "Franck, Nous devons nous rencontrer d'urgence. A ce jour nous sommes certes avec un dossier en forte développement de Chiffre d'Affaires mais qui est loin d'être rentable pour Traiteur de Paris. Pour info, à ce jour nous avons reçu plus de factures de la part de Leclerc que ce que la marge brute nous a rapporté. Sans compter qu'il faut payer ta commission et le transport. Résultat: des pertes sur le dossier. Merci de revenir vers moi d'urgence".
Force est cependant de constater que le mandant ne justifie d'aucune perte suite aux négociations ou remises consentis par son agent et qui se trouvaient dans la continuation des actions commerciales et remises accordées et validées par la société en 2009 alors que M. Brillouet exerçait ses fonctions, certes sous une autre casquette. Il a transmis en temps utile le budget client prévisionnel de l'année 2010 et il est justifié par des mails de l'existence de réunions de travail avec son mandant.
La société Traiteur de Paris n'établit en aucune façon une faute de son agent ayant porté atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rendant impossible le maintien du lien contractuel la faute grave de l'agent.
L'indemnité de rupture est en conséquence due, précision cependant apportée que l'indemnité de préavis n'a pas été et n'est pas réclamée par M. Brillouet
Compte tenu de la durée du contrat, il est établi au vu des commissions impayées qui seront vu infra, une moyenne mensuelle de commissions de 5 050 euro;
Il convient compte tenu de ces éléments, de la durée, courte du contrat d'agent commercial, de fixer l'indemnité de rupture à la somme de 30 000 euro.
S'agissant des factures de commissions restées impayées le tribunal de commerce a justement énoncées celles-ci. La société Traiteur de Paris reste devoir à son agent :
- au titre des acomptes de commissions des mois d'avril et mai 2010, alors que le contrat prévoit un versement mensuel et par avance sur la base de 4 000 euro, une somme de 8 440 euro selon factures n° 000008 et 000010,
- les forfaits mensuels fixes pour les mêmes mois, selon factures 000009 et 000011, alors que le contrat prévoit l'attribution de cette commission mensuelle fixe de 1 050 euro, soit la somme de 2 215,50 euro (1 107,75 euro X 2),
- un solde de commission de mars 2010, selon facture n° 000007, évalué à la somme de 3 037,25 euros compte tenu des éléments communiqués par la société Traiteur de Paris faisant ressortir à cette date un chiffre d'affaires de 300 745 euro HT.
C'est donc la somme totale de 13 692,75 euro qui reste due.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société ID Traiteur formée au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. Il n'y a pas lieu non plus de faire droit aux demandes de M. Brillouet formées à l'encontre de la société ID Traiteur à ce titre.
Il convient de condamner la société Traiteur de Paris à verser à M. Brillouet la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700.
Il y a lieu de faire masse des dépens et de condamner d'une part M. Brillouet et d'autre part la société Traiteur de Paris à en supporter chacun la moitié.
Par ces motifs, LA COUR : Confirme le jugement en ce qu'il a : - prononcé la jonction des procédures, - condamné la société ID Traiteur à verser à M. Brillouet, la somme de 4 934,07 euro TTC au titre des factures impayées du 28 février, 4 mars et 15 avril 2010, - Condamné la société Traiteur de Paris à payer à Monsieur Brillouet la somme de 13 912, 75 euro TTC au titre des factures impayées. Infirme le jugement pour le surplus, et statuant de nouveau et y ajoutant : Déboute M. Brillouet de sa demande d'indemnité de rupture formée à l'encontre de la société ID Traiteur, Condamne la société Traiteur de Paris à verser à M. Brillouet une indemnité de 30 000 euro, Condamne la société Traiteur de Paris à verser à M. Brillouet la somme de 3000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Fait masse des dépens et Condamne M. Brillouet et la société Traiteur de Paris à les régler chacun par moitié.