CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 19 décembre 2012, n° 11-05092
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Ivea (SARL)
Défendeur :
Rouby Industrie (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rajbaut
Conseillers :
Mmes Chokron, Gaber
Avocats :
Mes Grappotte-Benetreau, Micallef, Bernabe, Jais
Vu l'appel interjeté le 16 mars 2011 par la société Ivea (SARL), du jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Bordeaux le 18 janvier 2011 dans le litige en contrefaçon de brevet l'opposant à la société Rouby Industrie (SAS), ci-après la société Rouby, en présence de l'Etablissement public des voies navigables de France ;
Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 19 juin 2012, constatant le désistement d'appel et le dessaisissement de la cour à l'égard de l'Etablissement public des voies navigables de France, intimé non constitué ;
Vu les dernières conclusions de la société Ivea, appelante, signifiées le 19 septembre 2012 ;
Vu les dernières conclusions de la société Rouby, intimée et incidemment appelante, signifiées le 17 octobre 2012 ;
Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 23 octobre 2012 ;
Sur ce, la Cour :
Considérant qu'il est expressément référé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures, précédemment visées, des parties ;
Qu'il suffit de rappeler que la société Rouby, spécialisée dans la construction mécanique et la chaudronnerie et déployant principalement son activité dans les domaines de l'hydraulique et de l'hydrologie, revendique un dispositif novateur de manœuvre de mécanismes associés aux écluses et autres systèmes de régulation des flux des rivières, objet d'un brevet européen EP 1.389.653, déposé le 13 août 2003, sous priorité d'un brevet français déposé le 13 août 2002, et délivré le 2 mai 2007 ;
Qu'ayant découvert que la société Ivea, sa concurrente directe sur le segment de marché concerné, fabriquait des dispositifs de manœuvre de vantaux et vantelles d'écluses comportant notamment des auto-centrales reproduisant, selon elle, l'invention protégée, et avait, en particulier, vendu de tels dispositifs à l'Etablissement public des voies navigables de France pour l'équipement du canal de la Marne au Rhin, la société Rouby, dûment autorisée par ordonnances présidentielles, a fait pratiquer des saisies-contrefaçon, le 8 septembre 2008 au siège de la société Ivea et le 10 septembre 2008 sur les sites de Velaines et Ligny en Barrois puis a fait assigner devant le Tribunal de grande instance de Bordeaux, suivant actes du 1er et du 2 octobre 2008, la société Ivea aux griefs de contrefaçon des revendications 1,2,3,4,5,8,9,10 du brevet EP 1.389.653 et de concurrence déloyale, ainsi que l'Etablissement public des voies navigables de France aux fins de jugement commun ;
Que le tribunal, par le jugement dont appel, a, pour l'essentiel, rejeté les demandes de la société Ivea tendant à l'annulation des procès-verbaux de saisie-contrefaçon, écarté comme mal fondées les contestations de la validité du brevet pour insuffisance de description, défaut de nouveauté et défaut d'activité inventive, retenu à la charge de la société Ivea des actes de contrefaçon des revendications 1,2,3,4,5 et 10 de la partie française du brevet opposé mais non pas des actes distincts de concurrence déloyale et l'a condamnée en conséquence à verser à la société Rouby les sommes de 300 000 euros en réparation du préjudice économique et de 50 000 euros au titre du préjudice moral et à supporter les frais d'une mesure de publication judiciaire, a ordonné au surplus une mesure d'interdiction sous astreinte ;
Que la société appelante Ivea persiste à poursuivre l'annulation des opérations de saisie-contrefaçon, maintient que le brevet en sa partie française est nul pour insuffisance de description et à tout le moins pour défaut d'activité inventive, conclut en toute hypothèse au rejet, comme mal fondées, des prétentions de la société Rouby à laquelle elle réclame à titre reconventionnel 150 000 euros de dommages-intérêts pour les préjudices subis à raison de saisies-contrefaçon et de procédures abusives et vexatoires ;
Que la société Rouby, intimée et incidemment appelante, prie la cour de confirmer le jugement déféré sauf à constater que les revendications dépendantes 8 et 9 sont également contrefaites, augmenter à de plus amples proportions les dommages-intérêts pour contrefaçon du brevet, retenir à la charge de la société Ivea des actes de concurrence déloyale et la condamner de ce chef à lui verser 200 000 euros de dommages-intérêts, ordonner sous astreinte le rappel, la dépose et la destruction des dispositifs illicites ;
Sur la validité des opérations de saisie-contrefaçon,
Considérant que la société Ivea conteste la validité tant des opérations de saisie-contrefaçon diligentées le 8 septembre 2008 sur les lieux de son siège social en vertu d'une ordonnance du président du Tribunal de grande instance de Bordeaux du 15 juillet 2008, que de celles réalisées le 10 septembre 2008 sur les écluses de Velaines et Ligny en Barrois suivant ordonnance du président du Tribunal de grande instance de Strasbourg du 7 août 2008 ;
Qu'elle soutient, en ce qui concerne la saisie-contrefaçon du 8 septembre 2008, qu'elle a été pratiquée en présence d'une tierce personne, en l'occurrence Julie Cenatiempo, dont rien ne justifiait qu'elle était soumise au secret professionnel et à l'obligation de confidentialité, qu'au surplus, le procès-verbal qui en a été dressé ne permet pas de distinguer entre les constatations de l'huissier instrumentaire et les explications du conseil en propriété industrielle lui prêtant assistance outre qu'il porte les signatures des huissiers de justice Selosse et Etienne de la SCP Selosse-Etienne titulaire d'un office d'huissier de justice à La Roche sur Yon, ce dont il résulte que les opérations ont été conduites par deux huissiers de justice et non par un seul huissier de justice conformément à l'autorisation présidentielle ;
Considérant, sur le premier grief, qu'il est disposé à l'article L. 615-5 du Code de la propriété intellectuelle que toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon est en droit de faire procéder en tout lieu et par tous huissiers, assistés d'experts désignés par le demandeur, en vertu d'une ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, avec ou sans prélèvements d'échantillons, soit à la saisie réelle des produits ou procédés prétendus contrefaisants ainsi que de tout document s'y rapportant ;
Qu'en la cause, l'ordonnance présidentielle du 15 juillet 2008 autorisait l'huissier à se faire assister d'experts choisis (...) éventuellement parmi les conseils en propriété industrielle de la société requérante ;
Que, selon les énonciations du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 8 septembre 2008, l'huissier instrumentaire était assisté dans la conduite de ses opérations de Bernard Pouchucq, conseil en propriété industrielle, et de Julie Cenatiempo, ingénieur brevet ;
Que force est de constater que le responsable de la société Ivea n'a émis lors des opérations de saisie-contrefaçon aucune objection à la présence, aujourd'hui critiquée, de Julie Cenatiempo ;
Qu'il s'infère en toute hypothèse des pièces de la procédure que celle-ci occupait au jour de la saisie-contrefaçon un emploi salarié au sein de la société Aquinov, inscrite sur la liste des conseils en propriété industrielle, dont Bernard Pouchucq, également inscrit sur cette liste, était le gérant ;
Qu'elle était en conséquence, en vertu du contrat de travail la liant à la société de conseil de propriété industrielle Aquinov, astreinte aux obligations attachées à l'exercice de l'activité de conseil en propriété industrielle et en particulier au secret professionnel et à la confidentialité de sorte que le grief invoqué manque en fait ;
Considérant que l'ordonnance présidentielle autorisait, au demeurant, l'assistance de plusieurs experts, non exclusivement choisis parmi les conseils en propriété industrielle ;
Qu'il s'ensuit que la présence aux opérations de saisie-contrefaçon de l'ingénieur brevet au côté du conseil en propriété industrielle, n'est aucunement critiquable ;
Considérant, sur le deuxième grief, qu'il ressort de l'examen du procès-verbal de saisie-contrefaçon que l'huissier instrumentaire a lui-même interrogé le responsable de la société Ivea, consigné les réponses qui lui ont été apportées, procédé à la description des plans qui lui ont été présentés, opéré ses propres constatations sur les dispositifs entreposés dans les ateliers dont il a pris lui-même des photographies ;
Qu'il n'est justifié par ailleurs d'aucun élément susceptible de montrer que le conseil en propriété industrielle ou l'ingénieur brevet auraient à un quelconque moment franchi les limites d'une mission d'assistance technique ;
Que l'huissier ayant conservé la parfaite maîtrise de l'ensemble des opérations, la saisie-contrefaçon n'encourt aucune critique de ce chef ;
Considérant, sur le troisième grief, qu'il manque en fait, le premier original du procès-verbal de saisie-contrefaçon révélant que l'acte a été rédigé de la main du seul huissier instrumentaire Selosse et sous sa seule signature et n'indiquant en rien que les deux huissiers de justice de la SCP Selosse-Etienne auraient été présents sur le lieu des opérations ;
Considérant que pour contester la validité de la saisie-contrefaçon du 10 septembre 2008, la société Ivea fait valoir que c'est en contravention avec l'ordonnance du président du Tribunal de grande instance de Strasbourg du 7 août 2008 que des opérations ont été menées sur le site de Velaines, de surcroît en la présence, non autorisée, d'un clerc de l'étude de l'huissier de justice instrumentaire ainsi que d'un préposé de la société Rouby ;
Mais considérant qu'aux termes de l'ordonnance présidentielle du 7 août 2008 la société requérante était autorisée à faire procéder par tout huissier de son choix, sur l'écluse de Ligny en Barrois, exploitée par l'Etablissement public des voies navigables de France (VNF) (...) ainsi qu'en tous autres lieux se trouvant dans le ressort du tribunal, exploités par les VNF et dans lesquels les constatations se révéleraient utiles ;
Et considérant qu'il est constant que les écluses de Velaines et Ligny en Barrois sont exploitées par les VNF et sont situées, dans le ressort du Tribunal de grande instance de Strasbourg, sur le canal de la Marne au Rhin dont, précisément, l'équipement fourni par la société Ivea est l'objet du litige ;
Que c'est dès lors en conformité avec les dispositions de l'ordonnance présidentielle que les opérations de saisie-contrefaçon se sont déroulées sur le site de Ligny en Barrois ainsi que sur le site de Velaines ;
Considérant que s'il ressort en effet du procès-verbal de saisie-contrefaçon que l'huissier instrumentaire était assisté de Magali Sabre, clerc assermenté en son Etude, force est de constater que la société Ivea se garde d'invoquer un quelconque grief étant au demeurant relevé que le clerc a toujours agi sous la direction et sous le contrôle de l'huissier instrumentaire qui lui demandait en l'espèce de procéder à des clichés photographiques ;
Considérant enfin, quant à la présence sur les lieux de Gérald Duhoux, préposé de la société Rouby, que si l'ordonnance présidentielle interdisait à la société Rouby de choisir ses experts au nombre de ses subordonnés, elle l'autorisait à procéder au démontage et remontage du dispositif argué de contrefaçon afin d'en permettre ou d'en faciliter la description, par tout mécanicien de son choix, sous sa responsabilité ;
Considérant qu'il s'en infère que la société Rouby pouvait choisir parmi ses préposés le mécanicien appelé à effectuer les opérations de démontage et de remontage, ce d'autant que l'ordonnance précisait que ces opérations seraient réalisées sous sa responsabilité ;
Qu'en outre, le procès-verbal de saisie-contrefaçon montre que l'employé de la société Rouby s'est strictement limité à sa tâche de mécanicien en procédant au démontage et au remontage du dispositif argué de contrefaçon installé sous une plaque galvanisée qu'il a soulevée après avoir en avoir desserré les boulons et refermée ;
Considérant qu'il suit de l'ensemble des développements qui précèdent que les opérations de saisie-contrefaçon des 8 et 10 septembre 2008 ne sont affectées d'aucun vice et que les demandes en annulation dont elles sont l'objet sont mal fondées ;
Sur la portée du brevet,
Considérant que le brevet intitulé 'Dispositif de manœuvre de mécanismes associés aux écluses et de régulation de flux de rivières', porte sur un dispositif de manœuvre de mécanismes associés aux écluses tels que vantaux et vantelles d'écluses et /ou vannes et clapets des seuils de niveaux, grâce à des vérins et couvre également l'installation hydraulique et électrique équipée de ces dispositifs ;
Que le breveté rappelle que les rivières et canaux, pour être rendus navigables, sont régulièrement coupés par des écluses qui permettent de franchir des dénivelés, à la descente comme à la montée, en gardant un débit de la rivière compatible avec les embarcations qui y naviguent ;
Qu'à cet effet, les écluses utilisent la gravité et le principe des vases communicants pour former entre le bief amont et le bief aval un bassin (ou sas), isolé par des portes (ou vantaux), situées aux deux extrémités, s'ouvrant et se fermant par pivotement de manière à permettre le passage des bateaux, des moyens étant prévus pour mettre en communication l'eau du bief amont vers le bassin pour le remplir et l'eau du bassin vers le bief aval pour le vider, moyens constitués de vantelles, c'est-à-dire des petites portes coulissantes s'ouvrant et se fermant, telle une guillotine, par un mouvement de translation verticale, disposées au bas des vantaux ;
Que le breveté rappelle encore, que d'autres mécanismes de régulation du flux des voies navigables font appel à des seuils de niveaux, sous forme de vannes ou de clapets, qui provoquent des retenues d'eau en amont par la manœuvre de portes également, mais verticalement, en rotation ou en inclinaison ;
Qu'il précise toutefois s'attacher, pour la description du brevet, à une écluse de type sas, comprenant deux vantaux avec chacun une vantelle ;
Qu'il expose que les vantaux et les vantelles, autrefois manœuvrés manuellement, sont désormais actionnés par des vérins hydrauliques ;
Qu'une première génération de vérins était alimentée en fluide hydraulique à partir d'une borne extérieure par l'intermédiaire de conduits (ou câbles) rigides et/ou flexibles de grande longueur, une deuxième génération de vérins étant constituée d'un système dit d'auto-vérins, dans lequel une centrale hydraulique est directement associée à chaque vérin, soit intégrée dans le corps du vérin, soit fixée sur le corps du vérin ;
Que les systèmes d'alimentation par câbles présentent des inconvénients liés notamment à la présence, à proximité de l'écluse, d'une borne encombrante et inesthétique abritant la pompe, le réservoir et les conduits, et au risque de blocage du dispositif en cas de panne de la pompe assurant la mise en pression du fluide ou d'inondation de la borne, quant à la solution des auto-vérins, elle n'a pas eu le succès escompté car elle est inadaptée à la restauration des écluses déjà équipées de vérins simples et coûteuse dès lors qu'elle implique la dépose et le remplacement des vérins existants ;
Considérant que le breveté se propose de remédier aux inconvénients de l'art antérieur avec un dispositif de troisième génération, constitué d'une auto-centrale c'est-à-dire d'un système complet et autonome de manœuvre par vantail, desservant les vérins de vantail et de vantelles, une seule auto-centrale permettant ainsi d'actionner l'intégralité des dispositifs équipant chaque vantail : le vantail lui-même plus, une ou plusieurs vantelles ;
Qu'il explique que ce dispositif a pour avantage d'être entièrement étanche et de pallier les risques d'inondations, d'être compact et de répondre aux contraintes esthétiques imposées aux sites classés, d'être complètement indépendant du vérin ce qui permet d'une part de le positionner en tout lieu à proximité du vérin et assure d'autre part une réduction des coûts d'équipement et de maintenance ;
Considérant que le brevet comporte 10 revendications au nombre desquelles sont opposées les revendications 1, 2, 3, 4, 5, 8, 9 et 10 ainsi libellées :
1- Dispositif de manœuvre de mécanismes associés à des écluses tels que des vantaux et vantelles d'écluses et/ou des seuils de niveaux, grâce à des vérins hydrauliques (22,24), double effet, alimentés par des conduits (26), souples ou rigides, caractérisé en ce qu'il comprend un caisson (20) indépendant mécaniquement du vérin ou des vérins, contenant au moins une pompe hydraulique (40) à motorisation électrique, un bloc foré hydraulique (42) et une centrale de pilotage et d'alimentation (44), du fluide hydraulique étant contenu dans ledit caisson, la pompe avec sa motorisation électrique, le distributeur et la centrale étant immergés dans ce fluide hydraulique,
2- Dispositif de manœuvre de mécanismes selon la revendication 1, caractérisé en ce que le caisson (20) comprend des moyens (38) d'étanchéité,
3- Dispositif de manœuvre de mécanismes selon la revendication 2, caractérisé en ce que le caisson (20) comprend une enceinte (32) avec une base (34) et un couvercle monté de façon amovible et étanche sur cette base au moyen d'un joint d'étanchéité (38),
4- Dispositif de manœuvre de mécanismes selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce que le bloc foré hydraulique (42) comprend des connexions rapides hydrauliques (50), accessibles de l'extérieur du caisson,
5- Dispositif de manœuvre de mécanismes selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce que la centrale de pilotage et d'alimentation (44) comprend au moins une prise étanche (52) accessible de l'extérieur du caisson et susceptible de recevoir au moins une prise (54) étanche de profil conjugué,
8- Dispositif de manœuvre de mécanismes selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce qu'il comprend une pompe rotative (56) à entraînement manuel par une manivelle (58) indépendante,
9- Dispositif de manœuvre de mécanismes selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce qu'il comprend plusieurs pompes hydrauliques (40), disposées dans un même caisson,
10- Installation hydraulique équipée d'au moins un dispositif selon l'une quelconque des revendications précédentes alimentant au moins un vérin hydraulique de manœuvre d'un mécanisme ;
Considérant qu'il importe à titre liminaire, selon la société Ivea, de déterminer la juste portée du brevet, au regard des revendications, de la description, de la figure 2, mais aussi des explications avancées par le breveté devant l'examinateur de l'OEB pour se démarquer de l'art antérieur et justifier d'une activité inventive ;
Qu'il s'en infère, toujours selon la société Ivea qui souligne à cet égard la déclaration de la société Rouby insistant, dans le cadre de la procédure de délivrance, sur l'importance de la caractéristique selon laquelle tous les éléments actifs et/ou passifs baignent dans le fluide hydraulique, que l'apport de l'invention protégée réside dans le fait que tous les éléments du dispositif à savoir la pompe avec sa motorisation électrique, le bloc foré hydraulique et la centrale de pilotage et d'alimentation sont obligatoirement placés dans la base du caisson pour y être totalement plongés dans le fluide hydraulique ;
Or considérant qu'aux termes de l'article 69 de la convention de Munich, l'étendue la protection conférée par le brevet européen ou par la demande de brevet est déterminée par la teneur des revendications, toutefois, la description et les dessins servent à interpréter les revendications ;
Qu'en la cause, la revendication 1 du brevet énonce que le dispositif de l'invention est caractérisé en ce qu'il comprend un caisson (20) indépendant mécaniquement du vérin ou des vérins, contenant une pompe hydraulique (40) à motorisation électrique, un bloc foré hydraulique (42) et une centrale de pilotage et d'alimentation (44), du fluide hydraulique étant contenu dans ledit caisson, la pompe avec sa motorisation électrique, le distributeur et la centrale étant immergés dans ce fluide hydraulique ;
Que les revendications suivantes 4 et 5 précisent que le bloc foré hydraulique (42) comprend des connexions rapides hydrauliques (50), accessibles de l'extérieur du caisson et que la centrale de pilotage et d'alimentation (44) comprend au moins une prise étanche (52) accessible de l'extérieur du caisson ;
Considérant que la figure 2 du brevet représente en détail le caisson (20) et montre, ainsi qu'il est dit en page 4 colonne 6 de la description du brevet :
- que le caisson est constitué d'une base (34), c'est-à-dire la partie inférieure du caisson, d'une enceinte (32), c'est-à-dire l'ouverture en partie supérieure du caisson, d'un couvercle (36) monté de façon amovible et étanche sur cette base au moyen d'un joint d'étanchéité (38),
- que la base du caisson est équipée de la pompe hydraulique 40, du bloc foré hydraulique (42) et de la centrale de pilotage et d'alimentation (44),
- que le bloc foré hydraulique (42) est accessible de l'extérieur et dispose sur sa face extérieure des connexions hydrauliques rapides (50) prêtes à recevoir les flexibles (26) des vérins,
- que, de même, la centrale de pilotage (44) est accessible de l'extérieur au moyen d'au moins une prise (52) à connexion étanche, prête à recevoir au moins une prise (54) conjuguée à verrouillage étanche ;
Que force est de relever que c'est en parfaite cohérence tant avec les revendications 4 et 5 du brevet, qu'avec la description du brevet, que, selon la figure 2, le bloc foré hydraulique (42) et la centrale de pilotage (44), tout en plongeant dans la base du caisson contenant le fluide hydraulique, forment une saillie au-dessus du couvercle du caisson de manière à être accessibles de l'extérieur et à pouvoir recevoir, ainsi qu'il est nécessaire à leur fonctionnement, pour le bloc foré, par l'intermédiaire des connexions hydrauliques rapides (50), les flexibles des vérins et pour la centrale de pilotage et d'alimentation, par l'intermédiaire de la prise (52) à connexion étanche, la prise conjuguée (54) à verrouillage étanche ;
Et que c'est encore en conformité avec la description du brevet (paragraphe 62), que la pompe hydraulique à motorisation électrique (40) de la figure 2 est quant à elle totalement immergée dans l'huile hydraulique ;
Considérant qu'il suit de ces éléments que la société Ivea dénature le libellé de la revendication 1 et lui confère une portée restrictive qui n'est soutenue ni par les revendications suivantes 4 et 5, ni par la description du brevet, ni par les dessins, en lui faisant dire que la pompe avec sa motorisation électrique, le bloc foré hydraulique et la centrale de pilotage et d'alimentation sont intégralement immergés dans le fluide hydraulique du caisson ;
Considérant que la société Ivea ne saurait à cet égard se prévaloir de la déclaration de la société Rouby à l'OEB selon laquelle tous les éléments actifs et/ou passifs baignent dans le fluide hydraulique, dont force est de relever qu'elle reprend en des termes identiques le paragraphe 64 de la description du brevet qui explique que L'ensemble de ces éléments, pompe hydraulique 40, bloc foré hydraulique 42, centrale de pilotage et d'alimentation 44 (...) sont à baigner dans l'huile ;
Or considérant que le verbe baigner décrit l'action de plonger et tenir un corps, en tout ou partie, dans un liquide, en sorte que l'utilisation de ce verbe, tant dans le préambule du brevet, que dans les explications fournies pour la délivrance du brevet, vient confirmer que, selon l'invention, la pompe hydraulique, le bloc foré hydraulique et la centrale de pilotage et d'alimentation constituant le dispositif de manœuvre, ne sont pas intégralement immergés dans le fluide hydraulique ;
Sur la validité du brevet,
Considérant que pour demander la nullité du brevet, la société Ivea oppose l'insuffisance de description et le défaut d'activité inventive ;
Considérant, sur le premier moyen, que selon les dispositions de l'article L. 613-25 du Code de la propriété intellectuelle, un brevet est nul notamment s'il n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter ;
Considérant qu'il n'est pas contesté en la cause que l'homme du métier est le technicien spécialiste des systèmes hydrauliques ;
Considérant que selon la société Ivea, l'homme du métier ainsi défini se trouve dans l'incapacité d'exécuter l'invention dès lors que le brevet ne renseigne aucunement sur la nature exacte, la structure, le rôle et le mode de fonctionnement de la centrale de pilotage et d'alimentation ;
Or considérant que pour être sanctionnée par la nullité du brevet, l'insuffisance de description doit porter sur l'objet même de l'invention et constituer un empêchement à l'exécution de l'invention ;
Qu'en l'espèce, l'invention ne concerne pas une centrale de pilotage et d'alimentation mais un dispositif de manœuvre de mécanismes associés à des écluses tel que caractérisé par les revendications du brevet, c'est-à-dire, ainsi qu'il est expliqué en préambule du brevet, un dispositif associant, dans un agencement nouveau, des éléments connus de l'art antérieur à savoir une centrale de pilotage et d'alimentation, un bloc foré hydraulique et une pompe hydraulique motorisée ;
Que force est de relever, au demeurant, que si la centrale de pilotage et d'alimentation n'est pas décrite dans sa structure et dans sa fonction, le bloc foré hydraulique et la pompe hydraulique motorisée du dispositif selon l'invention ne sont pas davantage spécifiés ni dans les revendications du brevet ni dans la partie descriptive du brevet ;
Que par ailleurs, les échanges avec l'examinateur de l'OEB ne portent nulle trace d'une demande d'explication concernant ces éléments ;
Qu'il s'en infère que la centrale de pilotage et d'alimentation constitue à l'instar du bloc foré hydraulique et de la pompe hydraulique avec sa motorisation électrique un élément dont la nature, la structure et la fonction sont connus de l'homme du métier, spécialiste des systèmes hydrauliques ;
Qu'il est en toute hypothèse à la portée de l'homme du métier de comprendre à la lecture de la revendication 5 du brevet où il est dit que la centrale de pilotage et d'alimentation (44) comprend au moins une prise étanche (52) accessible de l'extérieur du caisson et susceptible de recevoir au moins une prise (54) étanche de profil conjugué, que l'élément concerné, raccordé au réseau électrique, assure l'alimentation du dispositif en énergie électrique et commande ainsi, ou pilote, le fonctionnement de la pompe hydraulique à moteur électrique qui actionne le bloc foré hydraulique et les vérins de vantail et de vantelles ;
Que, par voie de conséquence, la demande en nullité du brevet pour insuffisance de description est dénuée de fondement ;
Considérant que la société Ivea soulève, en second lieu, le défaut d'activité inventive en présence des enseignements divulgués dans le catalogue HYTOS de décembre 1998 ou encore dans les enseignements identiques issus du catalogue HAWE de février 2000, dont force est de relever qu'ils n'étaient pas invoqués en première instance et qui, selon elle, conduisaient naturellement l'homme du métier sur la voie de l'invention ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 611-14 du Code de la propriété intellectuelle, une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour l'homme du métier, elle ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique ;
Considérant qu'il a été dit précédemment que l'homme du métier est le technicien spécialiste des systèmes hydrauliques ;
Considérant que le document extrait du document commercial Hawe présente une centrale oléohydraulique dont la principale caractéristique est la disposition immergée de la pompe et du moteur et avance les avantages suivants : meilleure exploitation de la puissance du moteur grâce au refroidissement par l'huile en circulation, niveau sonore réduit grâce à l'amortissement de l'huile du réservoir, faible encombrement grâce à la compacité de la construction et au fait que la pompe est flasquée sur le moteur ;
Que force est de relever que le document HAWE ne prétend pas répondre aux inconvénients de l'art antérieur tels que décrits en préambule du brevet en offrant, à l'instar de l'invention protégée, un dispositif tout à la fois compact pour répondre aux contraintes esthétiques de sites classés, étanche pour pallier le risque d'inondation inhérent à la proximité des écluses et indépendant du vérin en sorte que les coûts d'équipement et de maintenance sont diminués, de sorte que l'homme du métier confronté aux inconvénients de l'art antérieur ne sera pas spontanément enclin à s'y référer dans sa recherche de solutions ;
Qu'au surplus, si le document invoqué mentionne que la pompe et son moteur sont immergés, il n'indique en rien que le dispositif de manœuvre serait constitué, outre de la pompe, d'un bloc foré hydraulique et d'une centrale de pilotage et d'alimentation et ne révèle pas davantage, au vu de l'illustration qui y est exposée, la présence, au côté de la pompe et du moteur en disposition immergée, d'un bloc foré hydraulique et d'une centrale de pilotage et d'alimentation ;
Considérant qu'il découle de ces observations que l'homme du métier muni des informations du document Hawe ou de celles, identiques, de la brochure commerciale Hytos n'était pas conduit, dans le cadre d'une simple exécution, sur la voie de l'invention et ne pouvait parvenir, sans faire preuve d'activité inventive, à la solution de l'invention et à concevoir un dispositif comprenant un caisson indépendant mécaniquement du vérin et, contenus dans le caisson, immergés dans le fluide hydraulique lui-même contenu dans le caisson, une pompe hydraulique à motorisation électrique, un bloc foré hydraulique et une centrale de pilotage et d'alimentation ;
Qu'il s'ensuit, par confirmation du jugement déféré, que la revendication 1 du brevet est valable et que les revendications 2 à 5 et 8 à 10, placées sous la dépendance de la revendication principale à laquelle elles ajoutent, sont également valables ;
Sur la contrefaçon,
Considérant que pour contester la contrefaçon la société Ivea fait valoir que dans son dispositif, le bloc foré hydraulique n'est pas logé dans le caisson, immergé dans le fluide hydraulique, mais flasqué, c'est-à-dire fixé, contre la face extérieure du caisson ;
Que, de surcroît, son dispositif ne comporte pas davantage une centrale de pilotage immergée dans le fluide contenu dans le caisson, mais un simple bornier électrique fixé contre la face extérieure du dessus du caisson ;
Mais considérant qu'il a été précédemment souligné que le bloc foré hydraulique, selon l'invention, n'est pas totalement immergé dans le caisson et dispose d'une face en saillie, accessible de l'extérieur, sur laquelle des connexions hydrauliques rapides sont prêtes à recevoir les flexibles des vérins ;
Considérant que le dispositif incriminé, tel qu'il résulte du propre plan communiqué par la société Ivea en n° 17, comprend un bloc foré certes fixé contre la face extérieure du caisson mais dont la face intérieure et, à tout le moins, les connexions de la face intérieure, sont immergées dans le fluide hydraulique contenu dans le caisson, de telle manière que le bloc foré soit relié aux autres éléments du dispositif et en particulier à la pompe motorisée qui assure son fonctionnement ;
Considérant que dans les deux dispositifs, le bloc foré présente une face extérieure, qui permet le raccordement aux vérins, et une face intérieure, plongeant dans le fluide contenu dans le caisson et assurant, peu important le degré d'enfoncement dans le fluide, la connexion avec la pompe hydraulique à moteur ;
Que, par voie de conséquence, le bloc foré hydraulique de la société Ivea est identique à celui de l'invention ou à tout le moins équivalent en ce qu'il assure la même fonction pour parvenir au même résultat à savoir une compacité du système au moyen d'une simplification des raccords réalisés, dans les deux mécanismes opposés, entièrement dans le caisson où la pompe est intégrée ;
Considérant que pour contester la reproduction de la centrale de pilotage et d'alimentation la société Ivea soutient que son dispositif présente, ce qui n'est pas contesté, un bornier électrique fixé contre la face extérieure du dessus du caisson ;
Or considérant qu'il n'est pas démenti que le bornier, dont il est au demeurant indiqué qu'il est électrique, se définit comme un dispositif permettant d'assurer la continuité électrique entre différentes parties d'une installation ;
Et qu'il n'est pas davantage contesté que le bornier assure, dans le dispositif argué de contrefaçon, le raccordement au réseau électrique extérieur à l'installation afin de permettre l'alimentation et la commande de l'ensemble des éléments du dispositif et en particulier de la pompe et de son moteur immergés dans le fluide contenu dans le caisson, la société Ivea reconnaissant explicitement à cet égard que, dans son dispositif, le moteur de la pompe immergée est relié au bornier de raccordement électrique fixé contre la face extérieure du caisson ;
Considérant qu'il s'ensuit que le bornier, peu important également le degré d'enfoncement dans le couvercle du caisson, reproduit la centrale de pilotage et d'alimentation du dispositif breveté qui comprend ainsi qu'il est dit à la revendication 5 au moins une prise étanche accessible de l'extérieur du caisson et qu'à tout le moins, la reproduction par équivalence par moyens est réalisée à raison d'une fonction identique et d'un résultat similaire à savoir la compacité du système ;
Considérant qu'il n'est pas discuté par ailleurs et qu'il résulte en toute hypothèse de la pièce n°17 et des plans saisis au cours des opérations de saisie-contrefaçon, que le dispositif de la société Ivea comprend un caisson indépendant mécaniquement du vérin et une pompe hydraulique à motorisation électrique immergée dans le fluide hydraulique contenu dans le caisson ;
Considérant qu'il suit de ces éléments que la revendication 1 du brevet, reproduite en sa partie caractérisante, est réalisée ;
Considérant qu'il ressort au surplus des éléments recueillis lors des opérations de saisie-contrefaçon et notamment des photographies annexées au procès-verbal de saisie-contrefaçon du 10 septembre 2008, que le caisson du dispositif de la société Ivea est constitué d'une enceinte et d'un couvercle et dispose de moyens d'étanchéité, que le bloc foré hydraulique est muni de connexions hydrauliques accessibles de l'extérieur recevant les flexibles des vérins, que le bornier dispose de prises d'alimentation électriques étanches, qu'une pompe à secours manuelle est indiquée sur les photos 10 et 13 sous les mentions 'secours vantail', 'secours vantelles', que deux pompes hydrauliques sont disposées dans un même caisson ;
Qu'il s'infère de ces observations que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a retenu que les revendications 2 à 5 et 10 du brevet sont aussi contrefaites et qu'il y sera ajouté que les revendications 8 et 9 sont également contrefaites ;
Sur la concurrence déloyale,
Considérant que la société Rouby fait à juste titre grief à la société Ivea d'avoir commis à son préjudice des actes distincts de concurrence déloyale en reproduisant la configuration, en forme de boîtier parallélépipède rectangle, de son dispositif d'auto-centrale, de surcroît, selon des proportions et des dimensions (de hauteur, longueur et largeur) quasi-identiques à 2 ou 3 centimètres près ;
Considérant que ces actes qui ne sauraient être fortuits et que n'imposaient pas la reprise des caractéristiques techniques de l'invention protégée qui ne revendique ni forme ni dimensions particulières, procèdent d'une volonté délibérée de générer un risque de confusion sur l'origine du produit outre de s'épargner, au détriment de son concurrent, les efforts nécessaires à la conception du produit et caractérisent une faute au sens des dispositions de l'article 1382 du Code civil, contraire à un exercice paisible et loyal de la liberté du commerce et de l'industrie ;
Que le jugement sera en conséquence réformé en ce qu'il a débouté la société Rouby de sa demande en concurrence déloyale ;
Sur les mesures réparatrices,
Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 615-7 du Code de la propriété intellectuelle, la juridiction prend en considération, pour fixer le préjudice de contrefaçon, les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par le contrefacteur et le préjudice moral causé au titulaire des droits du fait de l'atteinte ;
Considérant qu'il est établi en la cause que la société Ivea, qui soumissionnait, en concurrence avec la société Rouby, au marché d'équipement du canal de la Marne au Rhin, comportant 34 écluses soit un total de 136 dispositifs d'auto-centrales, a emporté le marché et évincé sa concurrente en proposant à moindre coût (40 % moins cher) le dispositif contrefaisant ;
Considérant qu'il n'est pas démenti que les sociétés Rouby et Ivea étaient les seules à proposer, pour le marché concerné, un dispositif d'auto-centrale, de sorte que la société Ivea a bénéficié d'un avantage certain en soumissionnant avec un dispositif identique à celui de la société Rouby mais à moindre coût ;
Considérant que le préjudice de la société Rouby est lié en premier lieu à la perte de la marge brute qu'elle pouvait espérer réaliser si elle avait obtenu le marché, marge brute totale qui représente pour un dispositif proposé au prix unitaire de 4 785 euros HT et une marge brute unitaire de 1 456 euros HT, la somme de 198 016 euros HT ;
Considérant que la société Rouby, qui bénéficiait d'une avance technologique sur le marché de l'équipement des écluses, s'est trouvée, des suites de la contrefaçon, atteinte dans son image d'entreprise innovatrice, et fragilisée dans sa position de leader sur le marché des auto-centrales et subi de ce chef un préjudice moral ;
Considérant que le contrefacteur a réalisé pour sa part, au moyen du seul dispositif contrefaisant et sur le seul marché du canal de la Marne au Rhin, un bénéfice brut de l'ordre de 2 800 euros HT (prix unitaire) x 136 ;
Considérant que la société Rouby fait par ailleurs état d'une perte, à concurrence d'une marge brute de 370 000 euros, de marchés connexes liés à des prestations indissociables de la fourniture du produit breveté mais ne produit pas d'éléments tangibles susceptibles de permettre de retenir l'ensemble des postes de préjudice invoqués qui apparaissent pour certains, au vu des pièces soumises à l'appréciation de la cour, indirects voire hypothétiques ;
Considérant qu'au regard de l'ensemble des observations qui précèdent, le tribunal a procédé à une juste appréciation du préjudice de contrefaçon en allouant à la société Rouby une somme totale de 350 000 euros ;
Considérant que les actes distincts de concurrence déloyale commis au préjudice de la société Rouby seront suffisamment réparés par l'allocation d'une somme de 50 000 euros ;
Considérant que les mesures accessoires prononcées par le tribunal sont pertinentes au regard des circonstances de la cause et qu'en particulier, les mesures de publication judiciaire et d'interdiction sous astreinte suffisent à faire cesser les actes illicites et à prévenir leur renouvellement sans qu'il y ait lieu d'ordonner de surcroît le rappel et la dépose en vue de leur destruction des dispositifs vendus par la société Ivea, les conséquences d'une telle mesure étant disproportionnées compte tenu notamment des réparations allouées à la société Rouby à raison des ventes dommageables ;
Sur les autres demandes,
Considérant qu'il s'infère du sens de l'arrêt que la demande de dommages-intérêts formée par la société Ivea pour saisies-contrefaçon et procédures abusives est dénuée de fondement ;
Par ces motifs : Confirme le jugement entrepris sauf à le réformer en ce qu'il a débouté la société Rouby de sa demande en concurrence déloyale, Statuant à nouveau du chef réformé, Condamne la société Ivea à payer à la société Rouby la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts pour concurrence déloyale, Y ajoutant, Dit que la société Ivea a également contrefait les revendications 8 et 9 de la partie française du brevet européen EP 1 389 653 de la société Rouby, Dit que la publication judiciaire fera mention du présent arrêt, Condamne la société Ivea aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile et à verser à la société Rouby une indemnité complémentaire de 25 000 euros au titre des frais irrépétibles.