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Décisions

ADLC, 14 octobre 2013, n° 13-A-17

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Avis

Relatif à une demande d'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes portant sur l'analyse des marchés de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles en métropole et outre-mer pour la période 2014-2016

ADLC n° 13-A-17

14 octobre 2013

L'Autorité de la concurrence (commission permanente),

Vu la lettre enregistrée le 31 juillet 2013 sous le numéro 13-0057 A, par laquelle l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) a sollicité l'avis de l'Autorité de la concurrence dans le cadre de la procédure d'analyse des marchés de gros de la terminaison d'appel vocal fixe, vocal mobile et SMS des opérateurs en métropole et outre-mer pour la période 2014-2016 ;

Vu les lignes directrices de la Commission européenne du 11 juillet 2002 sur l'analyse des marchés et l'évaluation de la puissance sur le marché en application du cadre réglementaire communautaire pour les réseaux et les services de communications électroniques ;

Vu la recommandation de la Commission européenne du 17 décembre 2007 concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d'être soumis à une réglementation ex ante conformément à la directive 2002-21-CE du Parlement européen et du Conseil relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (2007-879-CE) ;

Vu la recommandation de la Commission européenne du 7 mai 2009 sur le traitement réglementaire des tarifs de terminaison d'appels fixe et mobile dans l'UE (2009-396-CE) ;

Vu le livre IV du Code de commerce ;

Vu le Code des postes et des communications électroniques ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Le rapporteur, le rapporteur général adjoint, le commissaire du Gouvernement, les représentants de l'ARCEP entendus lors de la séance du 2 octobre 2013 ;

Les représentants des sociétés Bouygues Telecom, Iliad-Free, Orange et SFR, entendus sur le fondement de l'article L. 463-7 du Code de commerce ;

Est d'avis de répondre à la demande présentée dans le sens des observations suivantes :

1. Par lettre enregistrée le 31 juillet 2013 sous le numéro 13-0057 A, l'ARCEP a sollicité l'avis de l'Autorité de la concurrence sur la définition des marchés pertinents et la désignation des opérateurs exerçant une influence significative sur les marchés de gros de la terminaison d'appel (ci-après TA) vocal fixe, vocal mobile et SMS des opérateurs en métropole et outre-mer pour la période 2014-2016.

2. Cette demande d'avis s'inscrit dans le cadre de la procédure définie à l'article L. 37-1 du Code des postes et des communications électroniques (ci-après CPCE) qui prévoit que l'ARCEP détermine, après avis de l'Autorité de la concurrence, les marchés de produits et de services du secteur des communications électroniques pour lesquels elle souhaite imposer ex ante des obligations particulières aux opérateurs exerçant une influence significative.

3. Le présent avis concerne les marchés de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles en métropole et outre-mer. Il s'inscrit dans le cadre du troisième cycle d'analyse des marchés de gros de la terminaison d'appel SMS et porte sur la période 2014-2016. Il fait notamment suite à l'avis n° 10-A-12 de l'Autorité de la concurrence du 9 juin 2010 (1) déjà rendu dans ce cadre.

4. Après avoir présenté la demande d'avis (I), l'Autorité limitera ses remarques aux évolutions constatées sur ces marchés depuis l'avis n° 10-A-12 précité qu'elle a rendu à l'ARCEP (II).

I. Constatations

5. Après quelques rappels (I.A), l'Autorité reviendra sur la régulation mise en place par l'ARCEP au cours du précédent cycle de régulation (I.B), avant d'examiner les évolutions envisagées dans le nouveau cycle de régulation (I.C).

A. DÉFINITIONS

6. Un "SMS" (Short Message Service) ou service de message court est un message écrit, composé de 160 caractères maximum, chacun codé sur 7 bits. Ce service est disponible sur la totalité du parc de terminaux en circulation sur le marché mobile.

7. Deux catégories de SMS peuvent être distinguées :

- les SMS "interpersonnels" qui sont le vecteur d'une conversation, le plus souvent entre deux personnes physiques, plus rarement entre une personne et une machine (voire entre deux machines). Ces SMS représentent plus de 90 % des terminaisons de SMS en volume ;

- les SMS "de contenu" qui mettent en relation un utilisateur final et une entreprise. Ces SMS de contenu sont le vecteur de transmission d'un service de notification ou d'accès à un contenu, gratuit ou payant (de type météo, publicité, réponse annuaire, horoscope, alerte bancaire (…)).

8. D'un point de vue technique, la terminaison d'appel SMS désigne la partie terminale du réseau de l'opérateur mobile de l'appelé permettant de joindre le client final. D'un point de vue économique, la terminaison d'appel SMS constitue le prix de gros que se facturent les opérateurs mobiles entre eux pour joindre le client final selon le modèle dit du calling party pays (2). Elle constitue, pour l'opérateur de l'appelé, un revenu qui est payé par les opérateurs mobiles tiers qui tentent de joindre une personne hébergée sur son réseau. Pour l'opérateur mobile de l'appelant, elle représente une charge qu'il paye aux opérateurs mobiles tiers lorsque son client tente de joindre une personne hébergée sur le réseau d'un autre opérateur mobile.

9. Pour acheminer un SMS à destination du client final, il existe plusieurs modalités d'interconnexion :

- les offres d'interconnexion à destination des autres opérateurs mobiles et des full MVNO (3) ;

- les offres de "SMS Push" qui s'adressent notamment aux opérateurs fixes, aux FAI et aux agrégateurs de SMS (4) ;

- l'achat de SMS de bout en bout destiné aux light MVNO dans le cadre de leur contrat MVNO existant.

B. SUR LE BILAN DU PRÉCÉDENT CYCLE DE RÉGULATION (2010-2013)

10. Après avoir analysé les principales évolutions intervenues sur les marchés de détail au cours du précédent cycle de régulation (B.1), l'Autorité présentera dans un second temps les évolutions survenues sur les marchés de gros de la terminaison d'appel SMS (B.2).

1. EVOLUTION DES MARCHÉS DE DÉTAIL

11. S'agissant des communications SMS, les marchés de détail ont été caractérisés, entre 2010 et 2013, par une confirmation des tendances apparues durant le premier cycle de régulation (2006-2009), avec un développement massif d'offres de détail attractives incluant des SMS illimités sans contrainte de réseau pour un prix forfaitaire ayant comme conséquence l'explosion des usages associés au service SMS. Il convient toutefois de distinguer la situation en métropole (a) et celle dans les DOM (b).

a) En métropole, les offres de détail SMS attractives sans contrainte de réseau se sont généralisées

12. L'Autorité constate comme l'ARCEP qu'à la suite de la baisse des charges de terminaison d'appel SMS, intervenue entre 2010 et 2013, le nombre d'offres de détail très attractives en matière de SMS n'a cessé de progresser.

13. En effet, les opérateurs ont inclus les SMS en illimité vers tous les opérateurs métropolitains dans une part croissante de leurs offres, de sorte qu'aujourd'hui une large majorité des clients ne paie plus ses SMS à l'unité, mais a accès à des SMS inclus dans son forfait ou offre prépayée. La période 2010-2012 a vu l'extinction des offres d'abondance sous la forme d'une quantité de SMS mensuelle au profit d'offres illimitées. De même, les offres illimitées restreintes à certaines tranches horaires et/ou à certains réseaux se sont raréfiées, au profit d'offres illimités SMS tous réseaux métropolitains, voire, plus récemment, tous réseaux métropolitains et ultramarins.

14. En 2012, les métropolitains ont envoyé pratiquement deux fois plus de SMS qu'en 2010 (103 milliards de SMS sur l'année 2010 pour 181 milliards sur l'année 2012). Ces données reflètent non seulement l'augmentation du nombre d'abonnés mobiles sur la période (+ 15 % en parc actif entre le troisième trimestre 2010 et le quatrième trimestre 2012), mais surtout l'explosion globale des usages, directement liée à la commercialisation d'offres de SMS illimités (5).

15. Le niveau du revenu de détail moyen par SMS a quant à lui poursuivi sa baisse jusqu'à atteindre 1 c€, soit le niveau régulé de la TA SMS. Cette forte baisse cache toutefois certaines disparités. En effet, elle bénéficie surtout aux consommateurs de SMS ayant souscrit des offres incluant des SMS illimités, mais ne profite pas aux consommateurs occasionnels de SMS, payant leurs SMS à l'unité, dont les prix n'ont globalement pas évolué depuis de nombreuses années chez les opérateurs de réseau et MVNO, essentiellement de 10 à 12 c€ TTC selon les opérateurs. Enfin, l'Autorité note, à l'instar de l'ARCEP, que le prix unitaire du SMS vers les destinations d'outre-mer reste encore à des niveaux très élevés.

b) Outre-mer, les offres d'abondance en SMS tous réseaux se sont également développées. Elles concernent surtout la zone Réunion-Mayotte, un peu moins la zone Antilles-Guyane

16. Il convient tout d'abord de rappeler que, contrairement à la métropole, les territoires ultramarins n'ont connu qu'un seul cycle de régulation (2010-2013) pour ce qui concerne l'encadrement tarifaire des TA SMS. Malgré ce décalage temporel, la croissance des usages liés aux SMS semble assez comparable à celle de la métropole, mais elle cache des disparités importantes entre les territoires.

17. Dans la zone Réunion-Mayotte, le nombre moyen de SMS envoyés par mois par les abonnés mobiles a augmenté de 50 % depuis le début de la régulation, passant de 163 messages au troisième trimestre 2010 à 242 messages au troisième trimestre 2012, soit une augmentation de 266 % en quatre ans (67 SMS par client au troisième trimestre 2008). Tout comme en métropole, le développement d'offres forfaitaires incluant des SMS illimités, associé à une forte croissance des volumes, a conduit à une baisse importante du revenu moyen de détail par SMS des opérateurs sur la zone (6).

18. Dans la zone Antilles-Guyane, la consommation en SMS des abonnés mobiles est en revanche deux fois plus faible que dans la zone Réunion-Mayotte. Si, mi-2008, la consommation mensuelle y était supérieure, la zone Antilles-Guyane n'a pas connu le mouvement haussier observé en métropole et dans la zone Réunion-Mayotte. La consommation n'a augmenté que de 170 % sur quatre ans, passant de 43 messages par client au troisième trimestre 2008 à 119 messages au troisième trimestre 2012. Ce développement plus lent des usages liés aux SMS dans la zone Antilles-Guyane peut s'expliquer à la fois par la prépondérance du segment prépayé sur le segment post-payé et par un lancement plus tardif des offres de SMS illimités.

2. EVOLUTION DES MARCHÉS DE GROS

19. Sur les marchés de gros, il convient tout d'abord de souligner que les asymétries de trafic qui ont pu être constatées par le passé ont totalement disparu depuis la généralisation des offres de SMS illimités tous réseaux (un SMS envoyé impliquant quasi systématiquement une réponse de la part de celui qui le reçoit). Ainsi, contrairement aux marchés de gros de terminaison d'appel vocal où des déséquilibres de trafic peuvent se faire jour, les marchés de terminaisons d'appel SMS se caractérisent aujourd'hui par une symétrie des trafics et donc par un équilibre global des soldes d'interconnexion.

20. Selon les derniers chiffres publiés par l'ARCEP (7), 190 milliards de SMS interpersonnels ont été envoyés sur les réseaux mobiles entre le deuxième trimestre 2012 et le deuxième trimestre 2013. Le volume de trafic annuel directement concerné par les terminaisons d'appel SMS (trafic off net) s'élève à 118 milliards de SMS. Ainsi, un centime de terminaison d'appel SMS représente aujourd'hui pour le secteur des communications électroniques un coût global de 1,4 milliards d'euros par an sur les marchés de l'interconnexion.

21. S'agissant du contexte réglementaire, les terminaisons d'appels des opérateurs de réseau font l'objet d'un encadrement tarifaire pluriannuel, conformément aux décisions de l'ARCEP n° 2010-0892 (8), 2010-1149 (9), 2011-0926 (10), 2012-097 (11) et 2012-1502 (12). L'encadrement pluriannuel des terminaisons d'appel SMS s'inscrit, de manière générale, dans une baisse tendancielle des charges d'interconnexion, illustrée dans le graphique suivant. Depuis le 21 juillet 2013 (date d'expiration de la décision n° 2010-0892 précitée), les TA SMS ne sont formellement plus soumises à un encadrement tarifaire, bien que l'ARCEP ait déjà annoncé son intention de maintenir, pour l'ensemble des opérateurs mobiles, le niveau du dernier plafond.

Terminaison d'appel SMS (2011-2013) en c€/ SMS efficace

<EMPLACEMENT GRAPHIQUE>

22. Aujourd'hui, la TA SMS de l'ensemble des opérateurs anciennement régulés (13) est symétrique et s'élève à 1 centime d'euro pour la métropole et pour l'outre-mer, ce qui place la France parmi les pays de l'Union Européenne où les TA SMS sont les plus basses (14).

23. S'agissant des SMS Push, qui n'étaient pas soumis à une régulation ex ante lors du premier cycle d'analyse des marchés, le deuxième cycle d'analyse des marchés a permis l'élaboration d'une véritable offre d'interconnexion à destination des agrégateurs de SMS. En plus d'une baisse des tarifs (la TA SMS Push s'élève aujourd'hui à 3 centimes d'euros pour les opérateurs régulés) et d'une uniformisation de la structure tarifaire (frais fixe par numéro court et TA par SMS sans variation selon le volume), les agrégateurs de SMS ont obtenu de la part des opérateurs mobiles des engagements de qualité de service, ainsi que la possibilité de modification du champ émetteur pour l'envoi de SMS de contenu (changement d'OAdC (15)). Il convient toutefois de souligner que la diminution du niveau des tarifs de TA SMS Push s'est accompagnée de la création, voire, dans certains cas, d'une hausse, des tarifs connexes liés à cette prestation.

C. SUR LE NOUVEAU CYCLE DE RÉGULATION (2014-2016)

1. RÉGULATION ENVISAGÉE POUR LES TERMINAISONS D'APPEL SMS

24. Au cours du précédent cycle de régulation, de nouveaux acteurs sont apparus. Il s'agit en particulier de Free Mobile et des opérateurs full MVNO (EI Telecom, LycaMobile, Mundio Mobile et Oméa Télécom). Bien qu'ayant déjà fait l'objet d'une analyse de marché relative à la TA vocal mobile, ces acteurs ne sont aujourd'hui soumis à aucune forme de régulation ex ante sur les marchés de la TA SMS. Si les niveaux de terminaisons d'appel SMS entre ces acteurs sont aujourd'hui symétriques, il semble qu'ils ne soient pas tous cohérents avec le niveau des tarifs actuellement régulés.

25. Ainsi, s'agissant des opérateurs soumis à une régulation ex ante, l'ARCEP envisage d'inclure Free Mobile et l'ensemble des opérateurs full MVNO précités dans le cadre du prochain cycle d'analyse des marchés.

26. S'agissant des remèdes, le régulateur sectoriel souhaite maintenir et prolonger la régulation actuelle pour trois ans en imposant à l'ensemble des opérateurs de réseaux mobiles des obligations non-tarifaires (accès, non-discrimination, transparence), ainsi qu'un contrôle tarifaire sous la forme d'une orientation vers les coûts complets d'un opérateur générique efficace, mais n'envisage pas de nouvelle baisse des tarifs de TA SMS dont le plafond resterait fixé à 1 centime d'euro jusqu'au 31 décembre 2016 pour l'ensemble des opérateurs de métropole et en outre-mer. Les obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts qui s'appliquent aujourd'hui à Bouygues Telecom, Orange France, Orange Caraïbes, SFR et SRR seraient maintenues pour ces sociétés et s'étendraient, pour les SMS, à Free Mobile, Orange Réunion et Digicel, mais elles ne concerneraient pas les full MVNO.

27. Enfin, s'agissant du contrôle tarifaire de la TA SMS Push, l'ARCEP souhaite passer d'une obligation d'orientation vers les coûts à une obligation de tarifs non excessifs.

2. LA QUESTION D'UNE RÉGULATION DES TERMINAISONS D'APPEL MMS

28. S'agissant des MMS (Multimedia Message Service), l'ARCEP s'interroge sur l'opportunité de conduire une analyse des marchés de la terminaison d'appel MMS sur les réseaux mobiles aux fins d'une régulation ex ante et a explicitement sollicité "l'avis de l'Autorité de la concurrence quant à la puissance des opérateurs mobiles sur ce marché et sa pertinence pour une régulation ex ante".

II. Analyse

29. L'Autorité de la concurrence souscrit aux développements de l'ARCEP conduisant à conclure qu'à court et moyen terme, aucun autre service n'est substituable aux prestations de terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles et considère également que chaque opérateur dispose d'un monopole sur son propre réseau, aucun contre-pouvoir d'acheteur ne venant contrebalancer ce pouvoir de marché. Elle souhaite néanmoins apporter quelques compléments à ses précédentes analyses (16) concernant la substituabilité du SMS par les autres services de messagerie.

30. Sur cette question, l'Autorité souligne que le SMS doit continuer à être distingué car il est le seul service disponible sur l'ensemble du parc de terminaux mobiles, les MMS, e-mails et messageries instantanées n'étant des substituts que pour un sous-ensemble du parc et plus particulièrement celui des smartphones. Or, si la vente de smartphones dépassera vraisemblablement 50 % de part de marché en flux pour la première fois en 2013, ces terminaux évolués restent encore assez largement minoritaires sur le parc total. A titre d'exemple, le parc actif multimédia mobile mesuré par l'ARCEP (qui correspond au nombre de clients ayant utilisé au moins une fois sur le dernier mois un service multimédia) représente encore au deuxième trimestre 2013 moins de 50 % des terminaux utilisés. Ceci conduit notamment l'Autorité à penser qu'à l'horizon de la présente analyse des marchés, aucun autre service de messagerie n'est véritablement substituable au SMS.

31. L'Autorité considère donc que les trois critères cumulatifs définis par la Commission européenne pour recenser les marchés susceptibles d'être soumis à une réglementation ex ante, conformément à sa recommandation du 17 décembre 2007 susvisée (17), restent aujourd'hui remplis, mais que la dynamique de substitution précédemment décrite sera susceptible de remettre en cause, dans le futur, le critère d'absence d'évolution possible vers une situation de concurrence effective.

32. L'Autorité limitera par conséquent ses remarques aux trois questions suivantes :

- l'exercice, par les opérateurs full MVNO, d'une puissance significative sur ces marchés (II.A) ;

- les remèdes envisagés et la pertinence du maintien d'une régulation ex ante de ces marchés à l'horizon de la présente analyse (II.B) ;

- la définition des marchés de la terminaison d'appel MMS sur les réseaux mobiles aux fins d'une régulation ex ante (II.C).

A. SUR L'EXERCICE, PAR LES OPÉRATEURS FULL MVNO, D'UNE PUISSANCE SIGNIFICATIVE SUR LES MARCHÉS PERTINENTS

33. S'agissant des SMS, l'Autorité estime que les full MVNO sont dans une situation similaire à celle des opérateurs de réseaux mobiles et renvoie par conséquent à ses précédentes analyses, notamment à son avis n° 11-A-09 (18) du 9 décembre 2011, concernant l'analyse de la puissance de marché de ces opérateurs. Elle est donc d'avis que les opérateurs full MVNO disposent d'une puissance significative sur leurs marchés de gros de terminaison d'appel SMS, au même titre que les opérateurs de réseau.

34. L'Autorité s'interroge toutefois sur les niveaux actuels des prestations connexes, en particulier des prestations d'acheminement des appels et des SMS entrants et sortants facturées par les opérateurs hôtes à leur full MVNO, qui, en l'absence de régulation, permettent aujourd'hui aux opérateurs hôtes de récupérer tout ou partie de la terminaison d'appel du full MVNO lorsque celle-ci est régulée. De la même manière, l'Autorité s'interroge sur les niveaux des prestations connexes que les opérateurs mobiles facturent aux agrégateurs de SMS dans le cadre de leurs offres de SMS Push qui peuvent avoir pour effet de renchérir significativement les coûts liés à ce type de prestation. L'Autorité invite donc le régulateur sectoriel à se montrer vigilant sur ce point et à agir, le cas échéant, pour que les niveaux des prestations connexes facturées aux full MVNO et aux agrégateurs de SMS ne soient pas disproportionnés.

B. SUR LES REMÈDES ENVISAGÉS ET LA PERTINENCE DU MAINTIEN D'UNE RÉGULATION EX ANTE DE CES MARCHÉS À L'HORIZON DE LA PRÉSENTE ANALYSE

35. S'agissant de la question de la symétrie, comme indiqué précédemment, les trafics SMS sont aujourd'hui globalement équilibrés entre opérateurs mobiles du fait de la généralisation des offres de SMS illimités tous réseaux (un SMS envoyé impliquant quasi systématiquement une réponse en retour). Dans ce cadre, la question d'une possible asymétrie tarifaire accordée, à titre transitoire, au profit d'opérateurs nouveaux entrants pour compenser un potentiel déséquilibre financier sur le marché de l'interconnexion SMS lorsque les prix de gros sont éloignés des coûts ne se pose pas.

36. Dans les conditions actuelles (trafics globalement équilibrés, pas de déséquilibres significatifs des soldes d'interconnexion, tarifs proches des coûts de référence), la symétrie des tarifs de terminaison d'appel SMS est un principe à la fois vertueux et efficace qui, sous certaines conditions, pourrait se suffire à lui-même, compte tenu de la généralisation des offres d'abondance tous réseaux. La question de la pertinence du maintien d'une régulation tarifaire ex ante sur les marchés de gros de la terminaison d'appel SMS se pose donc.

37. Avant d'envisager la levée des obligations ex ante pour ces marchés, il convient toutefois de rappeler, en premier lieu, que :

- en métropole, ces marchés ont connu un bouleversement important du fait de l'arrivée, en 2012, de nouveaux acteurs, notamment le quatrième opérateur mobile, qui n'ont jamais été soumis aux mêmes obligations en matière d'accès, de non-discrimination, de transparence et de contrôle tarifaire (19) ;

- outre-mer, notamment dans la zone Antilles-Guyane, les offres de SMS illimités, ainsi que les usages liés au SMS, semblent moins développés qu'en métropole et qu'à La Réunion-Mayotte et, par ailleurs, des problèmes d'interconnexion SMS peuvent subsister (en particulier sur les îles de Saint Martin et de Saint Barthélémy) (20).

38. En second lieu, le risque de voir les tarifs de gros remonter à la suite d'une levée de l'obligation tarifaire ne peut être à ce jour totalement écarté. Certes, les trafics demeurent aujourd'hui globalement équilibrés et les transferts financiers qui en découlent restent limités, mais, compte tenu des volumes de SMS échangés, un léger déséquilibre de trafic sur le marché de gros peut entraîner un déséquilibre significatif des soldes d'interconnexion. Ainsi, en cas de levée d'obligations ex ante adaptées, les opérateurs anciennement régulés pourraient chercher à réaligner leur terminaison d'appel SMS sur le niveau pratiqué par les opérateurs arrivés plus récemment. Ceux-ci pourraient également faire évoluer leur prix à la hausse pour compenser ces évolutions, les volumes échangés rendant significatifs des écarts unitairement faibles.

39. Aujourd'hui, ce risque théorique d'effet domino et de déstabilisation semble militer pour un nouvel encadrement tarifaire qui permettrait notamment au régulateur sectoriel d'aligner progressivement les conditions tarifaires de l'ensemble des opérateurs mobiles, à un rythme soutenable par le marché, avant que puisse être, dans un second temps, effectivement envisagée une levée de la régulation. Dans ce cadre, il semble aujourd'hui prématuré d'envisager la fin de la régulation ex ante et son maintien dans un horizon de un à trois ans semble non seulement pertinent, mais justifié et proportionné.

40. Néanmoins, l'Autorité invite le régulateur sectoriel à s'interroger sur la pertinence du maintien à terme d'une régulation des marchés de gros de la terminaison d'appel SMS, voire, le cas échéant, à envisager une levée progressive des obligations pesant sur les opérateurs mobiles avant la fin du présent cycle d'analyse, si les circonstances de droit ou de fait le justifient.

C. SUR LA DÉFINITION DES MARCHÉS DE GROS DE LA TERMINAISON D'APPEL MMS SUR LES RÉSEAUX MOBILES AUX FINS D'UNE RÉGULATION EX ANTE

41. Après avoir brièvement présenté les services MMS sur les marchés de détail et de gros de la téléphonie mobile (C.1), l'Autorité développera son point de vue quant à l'opportunité de mener une analyse des marchés de gros de la terminaison d'appel MMS aux fins d'une régulation ex ante (C.2).

1. CONSTATATIONS

a) Définitions

42. Un MMS (Multimedia Message Service) est un système d'émission et de réception de messages multimédias pour la téléphonie mobile. Il permet notamment de transmettre des photos, des enregistrements audio, ainsi que de la vidéo, sous réserve de disposer d'un téléphone adapté (terminaux multimédia, smartphones).

43. De la même manière que pour le SMS, deux catégories de MMS peuvent être distinguées : les MMS interpersonnels et les MMS de contenus qui correspondent à des architectures d'interconnexion et à des usages différents selon le type de client ciblé.

b) Présentation des marchés de détail

44. Selon l'ARCEP (21), les échanges de MMS se sont élevés à deux milliards entre le deuxième trimestre 2012 et le deuxième trimestre 2013 (soit près de 100 fois moins que pour les SMS) et ont progressé de 46,2 % sur un an (contre 4,9 % pour les SMS). Par ailleurs, le parc actif multimédia mobile (22) s'élève, au 30 juin 2013, à 35,3 millions, soit 47,3% du parc mobile (contre 32,8 millions en juin 2012), soit une hausse de 7,6 % sur un an.

45. S'agissant des offres, les premiers forfaits MMS illimités tous réseaux ont fait leur apparition en métropole au cours de l'année 2012. A la connaissance de l'Autorité, ces offres ne sont aujourd'hui proposées sur la totalité des forfaits que par les trois plus anciens opérateurs mobiles. En particulier, Free Mobile et les full MVNO n'intègrent pas de MMS illimités dans leurs offres de bas de marché. Enfin, il peut être noté que le prix unitaire des MMS reste significativement plus élevé que celui des SMS.

c) Présentation des marchés de gros

46. S'agissant des modalités d'interconnexion, les opérateurs mobiles se facturent entre eux une terminaison d'appel MMS qui varie selon la taille du message envoyé. Il existe plusieurs paliers tarifaires dont le niveau varie, selon l'opérateur et le palier considéré, entre 4 c€ et 60 c€ par MMS. Les charges de TA MMS sont aujourd'hui symétriques entre les opérateurs et semblent complètement décorrélées des coûts. S'agissant des trafics d'interconnexion, rien n'indique que ces derniers soient équilibrés, un MMS reçu n'impliquant pas nécessairement de MMS retour.

2. ANALYSE

47. Imposer des obligations ex ante par le biais d'une procédure d'analyse des marchés nécessiterait que l'ARCEP établisse, au travers d'une démonstration rigoureuse, l'existence des trois critères cumulatifs définis par la Commission européenne, conformément à sa recommandation du 17 décembre 2007 susvisée (23), à savoir :

(i) l'existence de barrières à l'entrée ou d'entraves au développement de la concurrence ;

(ii) l'absence d'évolution possible vers une situation de concurrence effective ;

(iii) l'incapacité du droit de la concurrence à remédier, à lui seul, aux défaillances du marché.

a) Sur la substituabilité des MMS avec les autres services d'échange de données

48. Comme indiqué précédemment, les MMS semblent aujourd'hui imparfaitement substituables aux SMS. Il n'en va pas de même de la substituabilité du MMS avec les autres services de messagerie (e-mails mobiles, services de messageries instantanées), ces applications étant le plus souvent accessibles depuis les terminaux multimédia qui proposent les MMS.

49. Parmi les services intégrés aux terminaux multimédia, et notamment aux smartphones, figure la possibilité d'utiliser sa messagerie électronique ou de recevoir des messages instantanés via des applications permettant de joindre, souvent à coût marginal nul, un correspondant doté de ces applications et d'un terminal connecté à Internet (iMessage sur les iPhones d'Apple, Whatsapp sur les terminaux compatibles, etc.).

50. Cette substituabilité des produits du côté de la demande sur les marchés de détail invalide donc le deuxième critère précédemment cité d'absence d'évolution possible vers une situation de concurrence effective, dans la mesure notamment où l'utilisation des services de messagerie décrits plus haut pourraient se substituer à l'envoi de MMS.

b) Sur les problèmes concurrentiels potentiels posés par l'absence de régulation des niveaux de TA MMS

51. L'Autorité tient toutefois à souligner qu'un certain nombre de problèmes concurrentiels semblent potentiellement pouvoir être identifiés pour ce qui concerne l'envoi et la réception de MMS :

- en premier lieu, et comme le soulignent les opérateurs mobiles entrés récemment sur le marché, les niveaux élevés de tarifs de terminaison d'appel MMS semblent très supérieurs aux coûts encourus (24) ;

- en second lieu, les usages liés aux MMS restent relativement peu développés, notamment en outre-mer, et leur prix à l'unité demeure élevé ;

- enfin, il semble que le MMS fasse l'objet de problèmes d'interopérabilité et d'accès, notamment dans les départements d'outre-mer (25).

52. Cependant, s'il est confirmé que des problèmes sont susceptibles d'affecter le fonctionnement du service MMS, l'Autorité n'est pas en mesure de confirmer que l'imposition d'obligations ex ante se justifie à ce stade. D'une part, les MMS semblent substituables à d'autres services et, d'autre part, il n'est pas démontré que les outils de régulation symétrique dont dispose l'ARCEP (26) ne suffiraient pas à résoudre les problèmes identifiés. L'ARCEP est ainsi d'ores et déjà parfaitement en mesure d'intervenir pour résoudre les problèmes d'interopérabilité du service en outre-mer. Par ailleurs, des opérateurs qui jugeraient inéquitables les conditions tarifaires des services de MMS ont la possibilité de saisir le régulateur dans le cadre de l'article L. 36-8 du CPCE. L'absence de tout litige dans ce domaine ne permet pas de démontrer l'incapacité de cet outil à traiter les difficultés soulevées par certaines réponses à la consultation publique, ni de conclure à un besoin de régulation ex ante.

III. Conclusion

53. L'Autorité considère que la mise en œuvre par l'ARCEP d'un nouveau cycle d'analyse des marchés de la terminaison d'appel SMS pour la période 2014-2016 reste pertinente. En particulier, il apparaît qu'à l'horizon 2016, aucun autre service de messagerie ne semble encore pouvoir se substituer au SMS, notamment du fait du caractère universel de ce service qui touche 100 % des terminaux actuellement en circulation.

54. Par ailleurs, compte tenu de l'apparition de nouveaux opérateurs sur ce marché, il semble utile de permettre à l'ARCEP d'aligner les conditions de concurrence entre opérateurs, afin que le marché se stabilise avant d'envisager la levée progressive des obligations imposées.

55. Ainsi, l'Autorité invite le régulateur sectoriel à envisager et à préparer à court ou moyen terme une éventuelle levée des obligations ex ante sur le marché de gros de la terminaison d'appel SMS, le cas échéant avant la fin du présent cycle d'analyse si les circonstances de droit ou de fait le justifiaient.

56. Enfin, s'agissant de la définition des marchés de la terminaison d'appel MMS aux fins d'une régulation ex ante, l'Autorité considère que la mise en place de remèdes ex ante à l'issue d'une procédure d'analyse des marchés ne se justifie pas au regard des conditions posées par la Commission dans sa recommandation sur les marchés pertinents et ne constitue pas nécessairement la réponse la plus efficace et la mieux adaptée pour résoudre les problèmes identifiés.

Délibéré sur le rapport oral de M. Henry-Pierre Mélone, rapporteur, et l'intervention de M. Nicolas Deffieux, rapporteur général adjoint, par Madame Élisabeth Flüry-Hérard, vice-présidente, présidente de séance, Mme Claire Favre, vice-présidente, et M. Patrick Spilliaert, vice-président.

Notes :

1 Avis n° 10-A-12 du 9 juin 2010 relatif à une demande d'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en application de l'article L. 37-1 du Code des postes et communications électroniques, portant sur l'analyse des marchés de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles.

2 Sur les marchés de détail, le coût de l'appel est intégralement supporté par l'émetteur, tandis que la réception de l'appel est gratuite pour le destinataire final. Il n'en va pas de même sur les marchés de gros sur lesquels la terminaison d'appel - vocal fixe, vocal mobile ou SMS - est fixée par l'opérateur de l'appelé et payée par l'opérateur de l'appelant.

3 Ce mode d'acheminement impliquant une interrogation directe du HLR (Home Location Register) de l'opérateur de l'appelé par l'opérateur de l'appelant, il nécessite la mise en place de moyens techniques spécifiques, ainsi qu'une sécurisation particulière. Le HLR est en effet un élément sensible sur un plan technique et commercial, dans la mesure notamment où il regroupe toutes les informations sur les abonnés autorisés à utiliser un réseau GSM.

4 Aussi appelés "facilitateurs", les agrégateurs de SMS sont un intermédiaire entre les éditeurs de services et les opérateurs mobiles pour ce qui concerne l'envoi de SMS de contenu. Sur les marchés de gros, les SMS Push constituent des offres plus complètes que la seule prestation de terminaison d'appel SMS utilisée par les opérateurs mobiles, dans la mesure où c'est l'opérateur mobile de l'appelé qui gère lui-même l'interrogation du HLR et les problèmes de sécurisation.

5 En effet, un client mobile métropolitain envoyait en moyenne, à fin 2012, 231 messages par mois contre 140 messages au troisième trimestre 2010, soit une augmentation de 65 % sur la période.

6 Cette baisse varie entre les différents opérateurs en fonction de leur avancée commerciale en la matière. L'ARCEP estime que le revenu moyen de détail par SMS dans la zone Réunion-Mayotte est désormais très proche, voire inférieur, à 1 c€.

7 Observatoire trimestriel des marchés des communications électroniques en France, ARCEP, 3 octobre 2013.

8 Décision n° 2010-0892 de l'ARCEP en date du 22 juillet 2010 portant sur la définition des marchés pertinents de gros de la terminaison d'appel SMS sur les réseaux mobiles en métropole et en outre-mer, la désignation d'opérateur disposant d'influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre.

9 Décision n° 2010-1149 de l'ARCEP en date du 2 novembre 2010 portant sur la détermination des marchés pertinents relatifs à la terminaison d'appel vocal sur les réseaux mobiles français en métropole et outre-mer, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre pour la période 2011-2013.

10 Décision n° 2011-0926 de l'ARCEP en date du 26 juillet 2011 portant sur la définition des marchés pertinents de la téléphonie fixe, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre.

11 Décision n° 2012-0997 de l'ARCEP en date du 24 juillet 2012 portant sur la détermination des marchés pertinents relatifs à la terminaison d'appel vocal de Free Mobile, Lycamobile et Oméa Télécom, la désignation d'opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre pour la période 2012-2013.

12 Décision n° 2012-1502 de l'ARCEP en date du 27 novembre 2012 portant définition de l'encadrement tarifaire des prestations de terminaison d'appel vocal mobile des opérateurs outre-mer pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2013.

13 Pour la métropole : Bouygues Telecom, Orange France et SFR. Pour l'outre-mer : Dauphin Télécom, Digicel, Orange Caraïbe, Orange Réunion, Outremer Telecom, SPM Telecom, SRR et UTS Caraïbe.

14 Selon la dernière étude publiée par le BEREC (Body of European Regulators for Electronic Communications) en juin 2013, la moyenne pondérée des TA SMS au sein de l'Union Européenne s'élève à 2,73 c€. A ce jour, seuls le Danemark, la Pologne et la France ont fait le choix de mettre en place une régulation ex ante sur ces marchés.

15 Le changement d'OAdC (Originating Address Code) est la possibilité, pour un agrégateur, de modifier le champ de l'identifiant émetteur du SMS (numéro court à 5 chiffres) par des caractères alphanumériques, ce qui permet notamment à un éditeur de service (client de l'agrégateur) d'avoir une meilleure visibilité lorsqu'il souhaite envoyer un SMS de contenu à destination d'un client final dans le cadre par exemple d'une campagne de marketing direct.

16 cf. Avis n° 06-A-05 du 10 mars 2006 et n° 10-A-12 du 9 juin 2010.

17 Le premier critère est la présence de barrières élevées à l'entrée. Le deuxième critère consiste à admettre uniquement les marchés dont la structure ne présage pas d'évolution vers une situation de concurrence effective. Le troisième critère réside dans l'incapacité du droit de la concurrence à remédier à lui seul à la ou aux défaillance(s) concernée(s) du marché.

18 Avis n° 11-A-19 du 9 décembre 2011 relatif à une demande d'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en application de l'article L. 37-1 du Code des postes et communications électroniques, portant sur l'analyse des marchés de gros de la terminaison d'appel vocal mobile de Free Mobile, Lycamobile et Oméa Télécom (cf. notamment les paragraphes 23 à 27).

19 L'Autorité note en particulier que, si elles restent symétriques deux à deux, les TA SMS de ces acteurs ne sont pas toujours alignées avec le niveau des TA SMS régulées. Par ailleurs, dans sa réponse à consultation publique, un acteur s'est plaint du fait qu'à ce jour, les sociétés LycaMobile, Dauphin Télécom et Outremer Telecom ne disposaient pas d'offre d'interconnexion SMS à destination des agrégateurs de SMS.

20 Ainsi, l'opérateur Dauphin Télécom indique dans sa réponse à la consultation publique : "Du fait de notre petite taille, de nos faibles volumes et de notre insularité nous n'avons pas d'interconnexion directe avec les autres opérateurs. (…) Nous avons essayé de demander une interconnexion directe à l'un des acteurs (…) et nous avons renoncé car cet opérateur voulait bien recevoir notre trafic mais refusait de nous envoyer directement notre trafic."

21 Observatoire trimestriel des marchés des communications électroniques en France, ARCEP, 3 octobre 2013.

22 Le parc actif multimédia est défini par l'ensemble des clients (abonnés ou prépayés) qui ont utilisé au moins une fois sur le dernier mois un service multimédia de type internet, MMS, e-mail, et ce, quelle que soit la technologie support (CSD, GPRS, UMTS, LTE...). En première analyse, il constitue donc un indicateur pertinent permettant de mesurer la proportion de clients des opérateurs mobiles ayant la capacité d'envoyer et de recevoir des MMS.

23 cf. 2007-879-CE : recommandation de la Commission européenne du 17 décembre 2007 concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d'être soumis à une réglementation ex ante conformément à la directive 2002-21-CE du Parlement européen et du Conseil relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques.

24 Pour les opérateurs de petite taille, ces tarifs rendent risquée l'inclusion des MMS en abondance dans leurs offres de bas de marché, dans la mesure où toute asymétrie éventuelle fait alors peser sur les petits opérateurs un risque financier significatif à l'échelle de l'économie de ces offres (sur ce point, l'Autorité renvoie notamment à la lecture des paragraphes 29 et 30 de son avis n° 11-A-19 du 9 décembre 2011). Or, comme indiqué précédemment, rien n'indique que les volumes de MMS échangés entre opérateurs mobiles soient équilibrés. En particulier, un opérateur ultramarin a fait état d'un trafic sortant plus de deux fois supérieur au trafic entrant, ce qui implique, pour cet opérateur, un solde d'interconnexion structurellement négatif.

25 A titre d'exemple, l'opérateur Dauphin Télécom, qui est actif dans la zone Antilles-Guyane, a en effet indiqué dans sa réponse à consultation publique "n'[avoir] jamais réussi à obtenir un accord d'interconnexion MMS", qu'"à ce jour il s'agit pour [lui] d'un service limité à [son] propre réseau". Enfin, l'opérateur précise qu'il envisage d'arrêter le service MMS car il "n'[arrive] pas à communiquer avec les autres opérateurs".

26 L'ARCEP peut, si elle le juge nécessaire, ouvrir une procédure de sanction à l'encontre d'un opérateur qui ne respecterait pas ses engagements. Cette procédure, prévue par le CPCE, peut se faire soit à son initiative, soit à la demande d'un tiers intéressé conformément à l'article L. 36-11 du CPCE. Par ailleurs, en cas de refus d'accès ou d'interconnexion, d'échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'interconnexion ou d'accès à un réseau de communications électroniques, l'ARCEP peut être saisie du différend par l'une ou l'autre des parties et régler le litige en équité, conformément à l'article L. 36-8 du CPCE.