CA Dijon, 1re ch. civ., 12 novembre 2013, n° 10-02117

La société Le Terminus a acquis le 17 mai 2008 auprès de la société Europe Ambiance Equipement un parasol professionnel de type quadrifolio pour la somme de 7 176 euro.

Ce parasol ne fonctionnant pas correctement, la société Le Terminus a fait dresser le 3 mars 2009 un constat par Maître de Philippe Matrat, huissier de justice.

Elle a, le 24 juin 2009, fait assigner la société Europe Ambiance Equipement devant le Tribunal de commerce de Mâcon pour voir prononcer la résolution du contrat de vente ainsi que la restitution du prix et obtenir la condamnation de la société Europe Ambiance Equipement à lui payer :

- la somme de 7 176 euro,

- la somme de 1 500 euro au titre des dommages et intérêts pour le trouble de jouissance,

- la somme de 2 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société Europe Ambiance Equipement a conclu, devant le premier juge, au débouté des demandes de la société Le Terminus, au motif que cette dernière ne rapportait pas la preuve d'un vice caché antérieur à la vente et que les troubles constatés avaient pour origine une mauvaise utilisation du parasol. Elle a demandé la condamnation de la société Le Terminus à lui payer la somme de 5 000 euro pour procédure abusive ainsi que 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement en date du 10 septembre 2010, le Tribunal de commerce de Mâcon a rejeté les demandes de la société Le Terminus et l'a condamnée à payer à la société Europe Ambiance Equipement une somme de 1 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile , tout en déboutant cette dernière de ses autres demandes.

La société Le Terminus a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 5 octobre 2010.

La société Europe Ambiance Equipement ayant été liquidée, la société Le Terminus a fait assigner en reprise d'instance, le 29 octobre 2012, Madame Annick Dard ès-qualités de liquidateur amiable.

L'appelante conclut à la réformation du jugement au motif que l'existence d'un vice caché à l'origine des dysfonctionnements relevés dans le constat du 3 mars 2009 est établie du fait que la société Europe Ambiance Equipement n'a pas été en mesure, malgré plusieurs interventions, de remettre en état le parasol.

Elle demande à la cour de prononcer la résolution du contrat de vente sur le fondement de l'article 1641 du Code civil et de condamner le liquidateur de la société Europe Ambiance Equipement à lui payer de ce chef la somme de 7 176 euro, ainsi qu'une somme de 3 000 euro à titre de dommages-intérêts pour trouble de jouissance, du fait qu'elle n'a pu utiliser le parasol durant deux saisons de suite.

A titre subsidiaire, elle demande à la cour de condamner Madame Annick Dard ès-qualités de liquidateur amiable de la société Europe Ambiance Equipement au paiement des mêmes sommes sur le fondement de l'article 1147 du Code civil pour le défaut de réparation du parasol.

Elle demande également la condamnation de la société Le Terminus au paiement d'une somme de 2 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour l'exposé complet des prétentions et des moyens de la société Le Terminus, la cour se réfère aux dernières conclusions qu'elle a déposées le 13 octobre 2012

Madame Annick Dard ès-qualités de liquidateur amiable de la société Europe Ambiance Equipement n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 juin 2013.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de résolution de la vente

Attendu qu'aux termes de l'article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rende impropre à l'usage auquel on la destine ;

Attendu que le parasol ayant été livré et installé le 17 Mai 2008, selon mention figurant à la facture du 16 Avril 2008, la société Le Terminus a fait dresser, le 3 Mars 2009 un constat par Maître Matrat, huissier de justice dont résulte que le parasol modèle quadrifolio, se trouvant sur la terrasse du restaurant de la société Le Terminus, est constitué d'un pied central sur lequel sont fixés, en partie haute, quatre parasols géants ; que seuls deux d'entre eux fonctionnent correctement, les deux autres ne pouvant être ouverts lors de la mise en œuvre du mécanisme prévu à cet effet ; qu'il est relevé que le câble destiné à ouvrir le deuxième parasol est " totalement cassé et distendu " et que celui du troisième parasol " casse immédiatement " en la présence de l'huissier ;

Attendu cependant, qu'ayant noté la production à la barre, d'un câble oxydé et sectionné à une extrémité, le tribunal de commerce, estimant que l'oxydation n'avait pas affaibli le câble et que la cassure en pointe était significative d'une traction ayant pu être causée par blocage de la chaîne cinématique (poulie, déraillage du câble sur la poulie, effort excessif sur la manivelle) a déduit d'une interprétation toute personnelle ne reposant sur aucun avis technique, que la société Le Terminus ne rapportait pas la preuve d'un vice caché et n'établissait pas que les dysfonctionnements évoqués ne résultaient pas d'une mauvaise utilisation du parasol ;

Or attendu que s'il appartient bien à l'acquéreur de prouver le vice et ses caractères, la preuve d'un vice compromettant l'usage de la chose se déduit de l'impossibilité pour le vendeur de la remettre en état de fonctionnement ;

Et attendu qu'en l'espèce, la venderesse a reconnu devant les premiers juges avoir procédé au remplacement des câbles et manivelles, sans que ces reprises n'aient permis de résoudre la difficulté de fonctionnement ;

que, contrairement à ce qu'a ainsi jugé le tribunal, cette intervention restée infructueuse, corrobore l'existence d'un vice caché rendant la chose impropre à l'usage auquel elle était destinée, étant observé qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir une mauvaise utilisation par l'acquéreur du bien ne présentant aucune complexité d'utilisation, et ce, alors qu'il est notable que seuls deux parasols dysfonctionnent alors que les deux autres ne présentent aucune défectuosité ;

que l'apparition de tels dysfonctionnements après moins d'un an d'utilisation, d'un quadruple parasol acquis pour un usage professionnel à un prix élevé, qu'il a été impossible de réparer, ne s'explique que par l'existence d'une fragilité anormale constitutive d'un vice préexistant ;

Attendu qu'au vu de ces éléments permettant de conclure à l'impropriété du bien qui n'aurait pas été acquis si le vice avait été connu, il convient d'infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Mâcon, de prononcer la résolution de la vente et de condamner la société Europe Ambiance Equipement à la restitution du prix, soit la somme de 7 176 euro ;

Sur la demande de dommages et intérêts

Attendu que la société Le Terminus qui n'a pu utiliser deux années de suite ce parasol justifie d'un trouble de jouissance ; que ce préjudice, à défaut de pièces justifiant le montant sollicité, sera justement indemnisé par la condamnation de la société Europe Ambiance Equipement au paiement d'une somme de 1 000 euro ;

Sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile

Attendu que la société Europe Ambiance Equipement, qui succombe doit être condamnée aux entiers dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 2 000 euro au titre des frais non compris dans les dépens exposés par l'appelante ;

Par ces motifs LA COUR Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 10 septembre 2010 par le tribunal de commerce de Mâcon ; Statuant à nouveau,

Prononce la résolution du contrat de vente du 17 juin 2008 conclu entre la société Le Terminus et la société Europe Ambiance Equipement aux torts de cette dernière ; Condamne Madame Annick Dard ès-qualités de liquidateur amiable de la société Europe Ambiance Equipement à payer à la société Le Terminus la somme de sept mille cent soixante-seize euros (7 176 euro) ; Condamne Madame Annick Dard ès-qualités de liquidateur amiable de la société Europe Ambiance Equipement à payer à la société Le Terminus la somme de mille euros (1 000 euro) en réparation de son trouble de jouissance ; Condamne Madame Annick Dard ès-qualités de liquidateur amiable de la société Europe Ambiance Equipement a payer à la société Le Terminus la somme de deux mille euros (2 000 euro) en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne Madame Annick Dard ès- qualités de liquidateur amiable de la société Europe Ambiance Equipement aux dépens de première instance et d'appel.