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Décisions

Cass. crim., 20 septembre 2011, n° 11-81.870

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Louvel

Avocats :

SCP Masse-Dessen, Thouvenin

Versailles, 9e ch., du 13 janv. 2011

13 janvier 2011

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par M. Jean-Marc X, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en date du 13 janvier 2011, qui, pour opposition à l'exercice des fonctions des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, l'a condamné à 7 000 euros d'amende, dont 2 000 avec sursis ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article L. 450-8 du Code de commerce, de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, du principe de loyauté dans l'administration de la charge de la preuve, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré un dirigeant social, M. X, le demandeur, coupable du délit d'opposition aux fonctions des agents chargés du contrôle des prix et de la concurrence et l'a condamné à une peine de 7 000 euros dont 3 000 euros avec sursis ;

"aux motifs que le contrôle en cause sur la régularité de la vente privée justifiait la demande de la remise des tickets de caisse pour vérifier qu'ainsi que l'annonçait le document publicitaire envoyé aux clients, 50 % ou 30 % étaient appliqués immédiatement sur les produits à la caisse "sur présentation discrète" par les invités du "carton d'invitation à la caisse" ; qu'ainsi, par ces tickets, il pouvait être contrôlé que le rabais annoncé était effectif et qu'il s'agissait d'une opération destinée à une clientèle spécifique comme l'indiquait la publicité pour une vente privée et non pas de promotions en réalité destinées à toute la clientèle ; qu'à supposer que M. X n'eût pas compris les raisons de la communication des tickets réclamés, il avait pu croire répondre à la demande qui lui était faite par lettre du 16 juin 2006 de produire les tickets de caisse du magasin matérialisant les ventes effectuées du 12 au 15 juin 2006 inclus, sans plus de précision, en expédiant comme il l'avait fait le 23 juin, les bordereaux récapitulatifs de caisse des journées des 12, 13, 14 et 15 juin 2006 de son magasin Concept mode ; qu'en revanche, il ne planait plus d'ambiguïté sur la nature des pièces demandées après la mise en demeure de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes par lettre du 29 juin 2006, qui accusait réception de l'envoi le 23 juin des bordereaux récapitulatifs et précisait qu'il était demandé en réalité les doubles des tickets de caisse délivrés aux clients, qui faisaient apparaître les références, description et prix de chaque produit ; que cette nouvelle mise en demeure par l'administration fixait un nouveau délai de cinq jours pour la transmission par le commerçant ; qu'il avait fallu la notification le 5 août 2006 d'un procès-verbal d'infraction du 25 juillet 2006 pour obtenir par envoi du 8 août les documents voulus ; que le seul motif de l'abstention de M. X était son opposition à l'injonction qui lui était faite ; qu'il s'ensuivait que l'infraction était bien constituée, s'agissant d'un refus délibéré de permettre aux agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes d'exercer leurs fonctions, comportement qui n'avait pu être vaincu qu'à la suite de l'établissement d'un procès-verbal d'infraction ; que, de surcroît, la communication des tickets de caisse permettait aussi de contrôler la régularité des soldes fixés à Chartres pour l'été 2006 entre le 28 juin et le 5 août ; qu'en effet, il convenait de vérifier le respect des articles 2 et 3 de l'arrêté du 2 septembre 1977 relatifs à la publicité à l'égard des consommateurs, selon lesquels lorsque cette publicité comportait une annonce de réduction de prix, comme tel était le cas en matière de soldes, et qu'elle était faite sur les lieux, l'étiquetage, le marquage ou l'affichage des prix réalisés devaient faire apparaître, outre le prix réduit annoncé, le prix de référence qui ne pouvait excéder le prix le plus bas effectivement pratiqué par l'annonceur pour un article ou une prestation similaire, dans le même établissement de vente au détail, au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité ; que cette vérification de la correspondance du prix de référence affiché effectivement au cours des soldes avec les prix pratiqués au cours la vente privée ne pouvait se faire que par la comparaison des rabais octroyés pendant celle-ci avec les publicités dans le magasin au cours des soldes et non a posteriori comme le suggérait le prévenu par la seule comparaison des prix pratiqués au cours de la vente privée et au cours des soldes ;

"1) alors que le principe de loyauté dans l'administration de la preuve impose aux agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes qu'ils informent, dès le début de leur enquête, la société contrôlée de l'objet précis de leurs investigations, délimité par la nature des faits recherchés ; qu'ils ne peuvent modifier celui-ci in extremis, au moment de l'établissement du procès-verbal d'infraction ; que la cour d'appel ne pouvait donc écarter la méconnaissance du principe de loyauté par l'administration dès lors que celle-ci avait demandé au demandeur la communication de documents en vue de vérifier la régularité de l'opération de vente privée, pour ensuite modifier l'objet de son enquête in extremis dans le procès-verbal d'infraction en affirmant avoir voulu contrôler la régularité de l'opération de soldes ;

"2) alors que, subsidiairement, le délit prévu à l'article L. 450-8 du Code de commerce ne peut être caractérisé que si la volonté de l'auteur de s'opposer à l'enquête menée par les agents de contrôle, définie par son objet, est établie ; que la cour d'appel ne pouvait caractériser l'infraction sans justifier que le demandeur avait voulu faire obstacle au déroulement de l'enquête menée sur la régularité des soldes ;

"3) alors qu'en tout état de cause, le simple retard dans la transmission de documents sollicités par les agents chargés du contrôle des prix et de la concurrence ne caractérise pas le délit d'opposition à leurs fonctions ; que la cour d'appel ne pouvait légalement retenir l'opposition du prévenu sur la base de son seul retard à adresser les documents qui lui étaient demandés";

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la société dont M. X est le dirigeant a organisé en juin 2006 une vente privée de vêtements destinée à certains de ses clients ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'opposition aux fonctions des agents de la DGCCRF ayant tenté de procéder au contrôle de cette opération, l'arrêt confirmatif attaqué retient, par motifs propres et adoptés, qu'il a été réclamé à M. X copie des tickets de caisse pour la période considérée ; que celui-ci ne les a produits qu'après deux injonctions écrites, à une date à laquelle le contrôle des prix de référence, tant pour la vente privée que pour les soldes ultérieures, n'était plus possible ; que le seul motif de l'abstention de M. X est son opposition à l'injonction qui lui était faite ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.