CA Nîmes, 1re ch. civ., 27 juin 2013, n° 12-00638
NÎMES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Universat - L'Ecran du Monde (SAS)
Défendeur :
Remont, Crédit Agricole Consumer Finance (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bruzy
Conseillers :
Mme Thery, M. Berthet
Avocats :
SCP Curat Jarricot, SCP Brun Chabadel Expert, Mes Degeneve, Laporte
La société par actions simplifiée Universat - L'Ecran du Monde est appelante du jugement du 10 janvier 2012 par lequel le Tribunal d'instance de Nîmes :
- constate que le matériel livré par la SAS Universat n'est entaché d'aucun vice caché
- constate que la SAS Universat n'a pas manqué à son obligation de délivrance
- constate que le consentement au contrat de vente du 19.04.2010 de Mme Remont résulte d'une erreur déterminante
- constate que la SAS Universat a manqué à son obligation légale d'information envers Mme Remont Patricia
- constate que la SAS Universat a provoqué l'erreur de Mme Remont sur le consentement qui a déterminé celle-ci à conclure les contrats de vente du 19.04.2010 auprès de la société Universat et le contrat de prêt du 19.04.2010 accessoire à la vente du matériel auprès de la SA Sofinco dont la société Consumer Finance vient aux droits
- requalifie l'action de Mme Patricia Remont envers les requis d'action en nullité pour erreur sur le consentement en application de l'article 1110 du Code civil
- prononce la nullité du contrat de vente conclu le 19.04.2010 entre Mme Patricia Remont et la société Universat
- prononce la nullité du contrat de prêt accessoire au contrat de vente susvisé conclu le 19.04.2010 entre Mme Patricia Remont et la SA Sofinco dont la SA Consumer Finance vient aux droits,
- ordonne à Mme Patricia Remont de restituer à la société Universat l'intégralité du matériel livré par cette dernière détaillé sur le contrat de vente du 19.04.2010
- ordonne à la SA Consumer Finance venant aux droits de la SA Sofinco de rembourser à Mme Patricia Remont la totalité des mensualités réglées par cette dernière depuis le 10.08.2010 jusqu'au prononcé du présent jugement
- dit que la SAS Universat devra garantir la SA Consumer Finance venant aux droits de la SA Sofinco des condamnations prononcées à l'encontre de celle-ci au bénéfice de Mme Remont
- ordonne l'exécution provisoire du jugement,
- condamne les défenderesses au paiement des entiers dépens
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par conclusions du 12 juillet 2012 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et de ses moyens, la société Universat demande à la cour de :
Vu l'article 1110 du Code civil,
Vu l'article 1641 du Code civil
Vu l'article L. 111-1 du Code de la consommation,
Vu les articles L. 211-4 et suivants du Code de la consommation,
Vu la jurisprudence citée,
Vu les pièces produites,
1.
Constater que la société Universat a satisfait à son obligation d'information,
Constater la validité du contrat de vente du 19 avril 2010,
Constater la validité du contrat de crédit affecté,
En conséquence
Réformer le jugement du 10 janvier 2012 en ce qu'il a requalifié le manquement à l'obligation d'information en erreur sur la substance,
Réformer le jugement du 10 janvier 2012 en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente,
Réformer le jugement du 10 janvier 2012 en ce qu'il a condamné la société Universat à relever en garantie la société CA Consumer des condamnations prononcées contre elle,
Débouter Madame Remont de l'intégralité de ses demandes,
2.
Constater que la société Universat a satisfait à son obligation de délivrance conforme,
Constater l'absence de vice caché affectant le matériel vendu,
En conséquence,
Confirmer le jugement du 10 janvier 2012 en ce qu'il a considéré que la société Universat avait rempli son obligation de délivrance conforme et que le matériel n'était affecté d'aucun vice caché,
Rejeter toutes demandes adverses contraires,
Condamner Madame Remont au règlement de la somme de 3 000 euro en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, et aux entiers dépens, dont distraction au profit de l'avocat soussigné.
Par conclusions du 11 juin 2012, Madame Patricia Remont demande à la cour de :
Vu les art. L. 211-1 et svts du c.cons,
Vu les art. 1110 svts c.civ.,
Vu les art. 1604 et svts, 1641 et svts du c.civ.,
Vu les art. L. 311-1 et svts du c.cons.,
A titre principal,
Dire que la société Universat a provoqué une erreur sur le consentement de Mme Remont portant sur un ensemble home cinéma, lecteur DVD Blu-ray, récepteur numérique destiné à recevoir toutes les chaines en haute définition,
Déclarer la société Universat responsable de l'erreur déterminante sur le consentement de Mme Remont relatif à l'acquisition d'un home cinéma, lecteur DVD Blu-ray, récepteur numérique destiné à recevoir toutes les chaînes en haute définition,
Par conséquent,
Confirmer en tout point le jugement rendu par la juridiction d'instance le 10 janvier 2012,
A titre subsidiaire,
Réformer le jugement du tribunal d'instance du 10 janvier 2012 en ce qu'il a constaté que la SAS Universat n'a pas manqué à son obligation de délivrance,
Dire que le bien livré à Mme Remont par la société Universat portant sur un ensemble home cinéma, lecteur DVD Blu-ray, récepteur numérique destiné à recevoir toutes les chaines TNT et CanalSat en haute définition, n'est pas conforme,
Déclarer la société Universat responsable de la délivrance non conforme de l'ensemble home cinéma, lecteur DVD Blu-ray, récepteur numérique destiné à recevoir toutes les chaînes TNT et CanalSat en haute définition acquis par Mme Remont,
Par conséquent,
Confirmer le jugement rendu le 10 janvier 2012 par la juridiction d'instance en ce qu'il prononce la nullité du contrat de vente conclu le 19 avril 2010 entre Mme Remont Patricia et la société Universat,
A titre très subsidiaire,
Réformer le jugement du tribunal d'instance du 10 janvier 2012 en ce que le matériel livré par la SAS Universat n'est entaché d'aucun vice caché,
Dire que le bien livré à Mme Remont par la société Universat, portant sur un ensemble home cinéma, lecteur DVD Blu-ray, récepteur numérique pour recevoir toutes les chaînes TNT et CanalSat en haute définition, est affecté d'un vice caché,
Déclarer que la société Universat est responsable du vice caché affectant l'ensemble home cinéma, lecteur DVD Blu-ray, récepteur numérique pour recevoir toutes les chaînes TNT et CanalSat en haute définition acquis par Mme Remont,
Par conséquent,
Prononcer la nullité du contrat de vente conclu le 19 avril 2010 entre Mme Remont Patricia et la société Universat,
En toute hypothèse,
Prononcer la nullité du contrat de prêt souscrit par Mme Remont auprès de la société CA Consumer Finance venant aux droits de la société Sofinco le 19 avril 2010 ;
Condamner la société Universat à venir relever et garantir Mme Patricia Remont du paiement du solde restant dû au titre du prêt souscrit auprès de la société CA Consumer Finance venant au droit que Sofinco ;
Condamner la société Universat à rembourser à Mme Patricia Remont l'ensemble des mensualités versées au titre du prêt à la consommation souscrit auprès de la société CA Consumer Finance venant au droit de la société Sofinco à compter du mois d'août 2010 et jusqu'au prononcé de la décision à venir ;
Condamner la société Universat à porter et payer à Mme Patricia Remont la somme de 2 000 euro titre de l'art. 700 du CPC ;
Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,
La condamner aux entiers dépens.
Par conclusions du 17 septembre 2012, la SA Crédit Agricole Consumer Finance, anciennement Sofinco, demande à la cour de :
Déclarer recevable l'appel de madame Remont,
Le dire non fondé,
A titre principal,
Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le matériel livré par la SAS Universat n'était entaché d'aucun vice caché et que la société Universat n'avait pas manqué à son obligation de délivrance,
Accueillant l'appel incident de la concluante,
Y faisant droit,
Le dire bien fondé,
Réformant,
Dire et juger que le consentement de madame Remont n'a pas été vicié par suite d'une erreur,
Condamner en conséquence madame Remont à payer à la concluante la somme de 7 758,90 euro avec intérêts au taux contractuel à compter du 10 octobre 2010 date de la mise en demeure,
A titre subsidiaire et si par impossible la cour décidait de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat de vente et du contrat de crédit,
Condamner la société Universat L'Ecran du Monde à relever et garantir la société Crédit Agricole Consumer Finance des condamnations prononcées à l'encontre de la société Universat au bénéfice de madame Remont,
Condamner en tout état de cause la SA Universat L'Ecran du Monde à restituer à Crédit Agricole Consumer Finance l'intégralité des sommes mobilisées pour cette opération soit la somme de 7 900 euro,
Condamner madame Remont ou toute partie succombante à verser à la concluante la somme de 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du CPC,
Condamner madame Remont ou toute partie succombante à rembourser les frais de timbres d'un montant de 150 euro ainsi que les dépens distraits au profit de Me Laporte, avocat, sur ses offres de droit.
La mise en état a été clôturée par ordonnance du 30 octobre 2012 avec effet au 10 janvier 2013.
SUR QUOI, LA COUR :
Attendu que le 19 avril 2010, Madame Remont, démarchée par la société Universat, a fait l'acquisition d'un ensemble "Home Cinéma" comportant un pack de cinq enceintes acoustiques, un caisson de grave actif, un lecteur DVD/Blu-Ray et un récepteur numérique lui permettant de recevoir toutes les chaînes de la TNT et de CanalSat en haute définition, un groupe aérien composite avec terminal numérique et un lecteur universel avec disque dur de 250 Go, moyennant un prix de 7 960 euros TTC financé grâce à un prêt de la SA Sofinco d'un montant de 7 900 euros remboursable en 84 mensualités de 132,87 euros, à compter du 10 août 2010.
Attendu qu'il n'est constaté aucune défaillance technique de l'un quelconque des appareils livrés et installés chez Madame Remont, aucun défaut de leur interconnexion entraînant un dysfonctionnement de l'installation ; que c'est à bon droit que le premier juge a écarté le moyen tiré du vice caché.
Attendu qu'il n'est constaté aucune différence de présentation, de fonctionnalité ou de performances entre les documents contractuels et notices et les appareils livrés et installés chez Madame Remont ; que c'est à bon droit que le premier juge a écarté le moyen tiré du manquement à l'obligation de délivrance.
Attendu que s'agissant de matériel de haute technicité, dont la description des caractéristiques techniques n'est pas d'une lecture abordable au consommateur non initié, il appartient au professionnel de s'assurer de l'objectif poursuivi par le consommateur afin de lui recommander les équipements propres à y répondre et de satisfaire à son devoir d'information au regard de l'article L. 111-1 du Code de la consommation, en l'informant exactement des limites voire des impossibilités ou incompatibilités à raison desquelles l'usager ne pourra pas atteindre le résultat recherché.
Attendu, ainsi que l'a relevé le tribunal, que la plaquette publicitaire présentée à l'intimée comporte notamment ces indications :
IDHD Power - Ce terminal multi-satellites est destiné à la réception des programmes libres ou cryptés (...)
La Haute définition s'invite chez vous.
Il intègre 2 tuners HD pour la réception de vos chaînes en haute définition en SAT HD et TNT HD. (...) Ce récepteur multi-satellites répond aux meilleures normes de qualité de fabrication actuelle.
(...)
Cet équipement ouvre l'accès à la TNT, aux chaînes et radios diffusés par les satellites (...) L'accès facilité à un bouquet numérique payant tel que Canal + / CanalSat est facilité par le lecteur universel d'accès aux opérateurs européens. Il n'entraîne pas de modification de votre installation. Nous sommes agréés par ces opérateurs pour vous proposer ce service.
Attendu que si Universat ne s'est pas engagée à assurer la réception de CanalSat en haute définition, il demeure que ni cette plaquette ni le contrat dont elle ne peut être dissociée, jouant un rôle déterminant dans le consentement du client, ne révèlent l'impossibilité de recevoir CanalSat en haut définition avec l'équipement vendu ; que peu importe que le matériel fourni soit apte à procurer à Madame Remont la meilleure qualité de réception des programmes qui ne l'intéressent pas ou auxquels elle n'attache pas un intérêt suffisant pour rechercher la réception en haute définition ; que les annotations susvisées ne faisant pas ressortir clairement au moment de la vente que cet équipement ne permettrait pas l'activation de la haute définition sur le bouquet numérique Canal Sat auquel Madame Remont était abonnée, ce qui constituait sa motivation d'achat, c'est par une exacte analyse des éléments de fait de la cause que le premier juge a constaté que son consentement était vicié par une erreur déterminante au sens de l'article 1110 du Code civil ; qu'il en a tiré les exactes conséquences légales en prononçant la nullité du contrat de vente et accessoirement celle du contrat de crédit dont il est le support, et en ordonnant les restitutions réciproques ; que le jugement entrepris doit être confirmé.
Attendu que la société Universat qui succombe doit supporter les dépens et rembourser les frais de timbre exposés par CA Consumer Finance ; que pour défendre sur son appel, les intimés ont dû exposer des frais non compris dans les dépens, au titre desquels il doit être alloué à Madame Remont la somme de 1 200 euro et à la CA Consumer Finance la somme de 1 000 euro.
Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile, en dernier ressort, En la forme, reçoit la SAS Universat - L'Ecran du Monde en son appel et le dit mal fondé. Confirme le jugement déféré. Condamne la SAS Universat - L'Ecran du Monde à rembourser à la SA Crédit Agricole Consumer Finance la somme de 150 euro au titre de ses frais de timbre. Condamne la SAS Universat - L'Ecran du Monde à payer, au titre des frais exposés en appel, en application de l'article 700 du Code de procédure civile, à Madame Patricia Remont la somme de 1 200 euro et à la SA Crédit Agricole Consumer Finance la somme de 1 000 euro. Condamne la SAS Universat - L'Ecran du Monde aux dépens et alloue à Maître Laporte le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.