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Décisions

CA Bourges, ch. civ., 12 décembre 2013, n° 13-00048

BOURGES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Etablissements Tisserand (Sté)

Défendeur :

Simonin

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Decomble

Conseillers :

Mme Le Meunier, M. Gautier

Avocats :

SCP Gerigny & Associés, SCP Avocats Business Conseils, Mes Bouillaguet, Salsac

TI Bourges, du 12 déc. 2012

12 décembre 2012

Vu le jugement rendu le 12 décembre 2012 par le Tribunal d'instance de Bourges ;

Vu l'appel interjeté contre cette décision par l'entreprise Tisserand ;

Vu les dernières conclusions qui ont été prises, le 17 juillet 2013 par l'entreprise Tisserand et le 6 septembre 2013 par Madame Bernadette Simonin ;

Vu les demandes et moyens contenus dans ses écritures ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 1er octobre 2013 ;

SUR CE, LA COUR

Pour un plus ample exposé de la situation litigieuse et de la procédure antérieure, ainsi que pour l'énoncé des prétentions et moyens des parties en première instance, la cour s'en remet à la décision rendue qu'elle estime complète et claire ;

Il sera simplement rappelé :

Que l'entreprise Tisserand a exécuté au cours de l'automne 2005 des travaux de fourniture et de mise en place d'une clôture, d'un portail et d'un portillon au domicile de Madame Bernadette Simonin pour un prix de 7 893,55 euros selon facture du 28 octobre 2005 qui a été acquittée ;

Que déplorant au cours de l'été 2010 un décollement localisé de peinture sur le portail, Madame Bernadette Simonin a effectué une déclaration de sinistre à son assureur protection juridique la MAIF qui a organisé une expertise amiable au contradictoire de l'entreprise Tisserand, demeurée sans suite ;

Que par acte d'huissier en date du 6 juillet 2012, Madame Bernadette Simonin a, au visa de l'article 1641 du Code civil et subsidiairement de l'article 1147 du même Code, fait assigner l'entreprise Tisserand aux fins, à titre essentiel, de la voir condamner à lui payer la somme de 5 296,50 euros avec indexation correspondant au coût de remplacement du portail et du portillon ;

Et que par jugement réputé contradictoire en date du 12 décembre 2012, le Tribunal d'instance de Bourges a fait droit à sa demande ;

Aux termes de ses dernières conclusions, l'entreprise Tisserand demande à la cour, sur le fondement de l'article 1648 du Code civil, de déclarer irrecevable pour cause de prescription l'action en garantie des vices cachés intentée par Madame Bernadette Simonin et subsidiairement au fond, de rejeter la demande en l'absence de preuve de l'existence d'un vice caché présentant les caractéristiques exigées par l'article 1641 du Code civil ;

Aux termes de ses dernières conclusions, Madame Bernadette Simonin demande principalement à la cour de confirmer la décision déférée, sauf à porter le montant de son indemnisation à la somme de 5 473,05 euros ;

Sur la recevabilité de l'action en garantie des vices cachés

L'article 1648 du Code civil dispose que l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée dans le délai de deux ans à compter de la découverte du vice ;

L'entreprise Tisserand soutient que Madame Bernadette Simonin, qui reconnaît dans un courrier du 9 juillet 2010 lui avoir téléphoné "à deux reprises ces dernières semaines" pour faire part d'un décollement de peinture, n'a pas respecté la condition de délai biennal puisqu'elle n'a assigné que par acte en date du 6 juillet 2012 ;

Cependant, il est constant que le point de départ du délai doit être fixé, non pas au jour de l'apparition des désordres mais au jour de la découverte du vice, c'est-à-dire au jour où l'acheteur a eu connaissance de l'ampleur et des conséquences des défauts affectant la chose ;

En l'espèce, avant les opérations d'expertise de Monsieur Delaunay désigné par son assureur, Madame Bernadette Simonin n'avait découvert que certaines manifestations du dommage et ce n'est qu'au vu du rapport d'expertise qui explique le décollement de la peinture par une altération du support en aluminium qu'elle a pu se convaincre de l'ampleur et des conséquences des défauts affectant son portail ;

Le point de départ du délai biennal doit donc être fixé au 15 décembre 2010, date du rapport d'expertise ;

L'action engagée par Madame Bernadette Simonin ayant été formulée dans le délai de deux ans à compter de cette date, elle n'est pas atteinte par la forclusion ;

Le jugement qui a retenu la recevabilité de l'action sera confirmé de ce chef ;

Sur le bien-fondé de l'action en garantie des vices cachés :

Par application de l'article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui en diminue tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix ;

L'expert, dont les conclusions ne sont pas remises en cause, a relevé la manifestation de désordres sous forme de décollements de peinture et de cloques, le tout localisé sur deux traverses en aluminium laquées situées en partie médiane du portail. Il a constaté que le reste des éléments constituant le portail n'était "absolument pas endommagé". Il a estimé que les désordres étaient dus à l'altération de l'aluminium situé sous le film de peinture et a imputé ce défaut à un vice du matériau ;

Madame Bernadette Simonin estime être en présence d'un vice caché ;

Cependant, il convient de rappeler que la garantie des vices cachés s'attache à la révélation d'un vice d'une gravité suffisante, de nature à rendre l'objet de la vente impropre à sa destination ou, tout au moins, à en diminuer tellement l'usage que, s'il l'avait connu, l'acheteur ne l'aurait pas acquis ;

Dans cette optique, sans contester le désagrément éprouvé par Madame Bernadette Simonin, force est de constater que les désordres de peinture, aussi contrariants soient-il, ne mettent nullement en cause la destination première du portail et du portillon, à savoir la clôture hermétique de sa propriété ;

Au demeurant, il y a lieu d'observer, au vu du rapport d'expertise, que le dommage apparaît très limité dans son étendue, comme ne touchant que la bande d'anneaux décoratifs du portail et probablement à terme celle du portillon ;

Au bénéfice de cette motivation, la cour estime, contrairement à ce qu'a pu considérer le tribunal, que le portail et le portillon ne sont pas atteint d'un vice caché, au sens des articles 1641 et suivants du Code civil ;

En conséquence, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris et, statuant de nouveau, de déclarer la demande de Madame Bernadette Simonin recevable mais non fondée sur ce fondement et de l'en débouter ;

Sur le bien-fondé de l'action en responsabilité fondée sur l'article 1147 du Code civil :

À titre subsidiaire, Madame Bernadette Simonin affirme qu'à défaut de prononcer la résolution de la vente pour vice caché, il conviendrait de réparer son préjudice sur le fondement de l'article 1147 du Code civil ;

Cependant, elle n'accompagne cette affirmation d'aucune argumentation en fait et en droit, ni d'aucune pièce ;

La cour ne pourra donc que la débouter de sa demande subsidiaire ;

Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens :

Madame Bernadette Simonin succombant, il convient d'infirmer la décision dont appel, en ce qu'elle a condamné l'entreprise Tisserand aux dépens et il y a lieu de condamner Madame Bernadette Simonin aux dépens de première instance comme d'appel ;

Enfin, qu'il apparaît équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile tant en première instance qu'en appel ;

Par ces motifs : LA COUR, Infirme la décision déférée en toutes ses dispositions ; Statuant à nouveau, Déboute Madame Bernadette Simonin de toutes ses demandes ; Condamne la Madame Bernadette Simonin aux dépens de première instance et d'appel.