CA Limoges, ch. civ., 19 septembre 2013, n° 12-01177
LIMOGES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Feyssat
Défendeur :
Coze
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Baluze
Conseillers :
MM. Pugnet, Soury
Avocats :
Mes Catherinot, Verger-Morlhigem, Pagnou
Mme Rachel Coze a acheté à M. Christophe Feyssat, plombier chauffagiste, un poêle à granulé de la SARL Staub Fonderie, modèle Galgary, le 29 novembre 2010 pour 3 057,15 euro.
Elle s'est plainte fin 2011 de dysfonctionnements et après des démarches amiables, elle a engagé une action judiciaire.
Par jugement du 27 août 2012, le juge de proximité de Limoges a prononcé la résolution de la vente du poêle, condamné M. Feyssat à payer à Mme Coze la somme de 3 057,15 euro en restitution du prix du poêle et 200 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dit que M. Feyssat devra récupérer ledit poêle à ses frais dans tel délai et débouté M. Feyssat de ses demandes.
M. Feyssat a interjeté appel.
Par ordonnance du 20 février 2013, le conseiller de la mise en état a rejeté l'incident d'irrecevabilité de l'appel soulevé par Mme Coze.
M. Feyssat, selon ses conclusions au fond du 10 janvier 2013 auxquelles il est renvoyé, demande d'infirmer le jugement, de débouter Mme Coze de ses demandes et de la condamner à lui payer 1 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Mme Coze, selon conclusions du 8 mars 2013 auxquelles il est également renvoyé, conclut à la confirmation du jugement, au rejet des prétentions de M. Feyssat et à l'allocation de 1 500 euro au titre de l'art. 700 du Code de procédure civile.
Un avis de fixation a été établi le 18 mars 2013 prévoyant l'ordonnance de clôture le 2 mai 2013.
Mme Coze a conclu à nouveau le 29 avril 2013.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 mai 2013. Le même jour, M. Feyssat a transmis des conclusions pour demander d'écarter les conclusions et pièces signifiées le 30 avril 2013.
A l'audience, Mme Coze a demandé oralement d'admettre la recevabilité de ses dernières conclusions et pièces, précisant notamment que les conclusions étaient les mêmes et avaient été établies pour transmettre quelques nouvelles pièces.
L'incident a été joint au fond.
Sur ce,
Les dernières conclusions et pièces de Mme Coze ont été transmises le 29 avril 2013 alors que la date de la clôture au 2 mai était prévue depuis environ un mois et demi.
La veille de la clôture était un jour férié.
Il n'apparaît pas que les nouvelles pièces soient bien récentes (plusieurs en tout cas ne sont pas datées) ou ne pouvaient être communiquées que deux jours ouvrables avant la clôture.
Ces conclusions et pièces ont été transmises tardivement à M. Feyssat qui peut se prévaloir d'un délai insuffisant pour les analyser et répliquer éventuellement de telle sorte qu'il sera fait droit à sa demande afin de les écarter.
Si la première année de chauffe s'est déroulée convenablement, Mme Coze s'est plainte de dysfonctionnements fin 2011 et a fait des réclamations par une association de consommateur.
Il peut être relevé les observations suivantes selon les quelques éléments du dossier recevables (essentiellement échange de mails entre divers intervenants pour ce produit qu'il n'est pas toujours aisé d'identifier précisément mais qui apparaissent être des grossistes, fournisseurs (...)) :
- la carte commande et l'allumeur électrique ont été changés, selon message du 2.01.2012 qui précise que l'entretien complet a été fait (démontage complet, nettoyage des sondes (...)) mais qu'apparemment le problème reste entier, que fait-on
- message du 4.01.2012 : apparemment personne de chez Staub de compétent entend se déplacer (...) faire procéder à l'échange complet de l'appareil, on ne va pas s'amuser à changer les pièces un par un, depuis le problème on a eu à chaque fois au téléphone un technicien de chez Staub et avons agi sur le remplacement des pièces qu'il nous avait dit, la panne était clairement expliquée depuis le départ,
- un changement a été réclamé et proposé dans le cadre de la garantie contractuelle, vu lettre de M. Feyssat du 12.01.2012 qui indique cependant que le modèle Galgary n'est plus fabriqué, il est proposé un autre type de poêle mais refusé par la cliente car non équivalent,
- il a donc été admis en tout cas qu'il y avait lieu de changer l'appareil malgré des réparations et interventions précédentes avec entretien complet, à cause d'une panne identifiée par les intervenants professionnels dès le début du non-fonctionnement, ce qui est significatif d'une inaptitude du poêle à son usage pour une caractéristique l'affectant,
- un message du 6.02.2012 fait état de vices de fonctionnement de l'appareil,
- si M. Feyssat fait état dans la procédure d'un problème de stockage des granulés dans un lieu humide et non clos contrairement à la fiche technique, il renvoie à ce sujet à la pièce 7 de son dossier "normes de granulés", il n'apparaît pas cependant que cette pièce (en fait n° 1 et non n° 7) contienne d'indication explicite à ce sujet, M. Feyssat ne précise d'ailleurs pas où dans ce document il y aurait une telle indication ; ensuite il n'est pas établi qu'elle ait été fournie au moment de l'achat à la cliente et que celle-ci ait été avisée de cette précaution à prendre ; par ailleurs cette cause n'est nullement évoquée dans la lettre de M. Feyssat ou les messages produits.
L'ensemble de ces éléments permet donc de considérer que l'appareil était affecté d'un vice caché d'origine rendant le poêle impropre à son usage.
L'action en garantie des vices cachés doit être engagée dans les deux ans de la découverte du vice selon l'article 1648 du Code civil.
En l'espèce, la vente elle-même a eu lieu le 29 novembre 2010 et l'action a été engagée le 2 avril 2012.
Cette action n'est pas obligatoirement subordonnée à un référé-expertise ou une expertise judiciaire.
L'existence d'une garantie contractuelle n'exclut pas l'action légale en garantie des vices cachés, cela est d'ailleurs rappelé dans le certificat de garantie.
L'éventuelle incidence d'une modification du système de chauffage ou de la résolution de la vente par rapport au bail concerne les rapports entre Mme Coze, locataire, et son bailleur, et non les rapports contractuels distincts entre Mme Coze et M. Feyssat qui ne peut s'en prévaloir pour s'opposer à l'action de celle-ci.
Mme Coze a nécessairement subi un préjudice du fait des dysfonctionnements de son système de chauffage et son montant a été apprécié convenablement par le Tribunal. La condamnation de ce chef à 300 euro n'a pas été reprise dans le dispositif du jugement, cette omission matérielle sera réparée par le présent arrêt.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il convient donc de confirmer le jugement.
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme Coze l'intégralité de ses frais irrépétibles d'appel. Il lui sera alloué une indemnité supplémentaire au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel selon montant précisé au dispositif.
Par ces motifs : LA COUR, Statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Déclare irrecevables les conclusions de Mme Coze du 29 avril 2013 et les nouvelles pièces communiquées avec, soit les pièces n° 11 à n° 14, Rejette l'appel et les autres demandes de M. Feyssat, Confirme le jugement, Y ajoutant au dispositif par rectification d'omission matérielle : Condamne M. Christophe Feyssat à payer à Mme Rachel Coze 300 euro de dommages intérêts, Précise que le délai d'un mois imparti à M. Feyssat pour récupérer le poêle court à compter de la signification du présent arrêt, Condamne M. Christophe Feyssat à payer à Mme Rachel Coze une indemnité supplémentaire de 1 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel, Condamne M. Christophe Feyssat aux dépens et accorde à Maître Pagnou le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.