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Décisions

Cass. com., 8 avril 2014, n° 13-15.097

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Malplanche (SAS)

Défendeur :

Horel-Nivard

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Rapporteur :

Mme Darbois

Avocat général :

M. Debacq

Avocats :

Me Foussard, SCP Lyon-Caen, Thiriez

Caen, 2e ch. civ. et com., du 7 févR. 20…

7 février 2013

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 7 février 2013), que Mme Horel-Nivard, qui exploite deux fonds de commerce de bar-brasserie, a conclu avec la société Elidis deux contrats dits de mise à disposition par lesquels elle s'engageait, en contrepartie du dépôt de matériels, à débiter de manière exclusive les produits commercialisés par cette société ; que la société Malplanche, venant aux droits de la société Elidis, ayant obtenu à l'encontre de Mme Horel-Nivard deux ordonnances d'injonction de payer des soldes de factures et cette dernière ayant formé opposition devant le tribunal de commerce, la société Malplanche a en outre demandé, notamment, le remboursement de sa participation au financement des matériels mis à disposition ; que Mme Horel-Nivard s'est opposée à cette demande en soutenant que les conventions de mise à disposition étaient nulles pour absence de cause ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, qui est recevable : - Attendu que la société Malplanche fait grief à l'arrêt d'avoir annulé les conventions de mise à disposition et rejeté sa demande tendant à la condamnation de Mme Horel-Nivard à lui payer une somme correspondant au prix des matériels, alors, selon le moyen, qu'après avoir retenu que les conventions de mise à disposition ne prévoient pas de durée, les juges du fond ont considéré que les conventions conclues entre les brasseries Kronenbourg et Mme Horel-Nivard, comportant une stipulation pour autrui au profit de la société Elidis et donc de la société Malplanche, étaient conclues pour une durée de cinq ans ; que poursuivant leur analyse, les juges du fond ont estimé que cet engagement, l'approvisionnement exclusif pour cinq ans, déduit des conventions conclues entre les brasseries Kronenbourg et Mme Horel-Nivard, constituait la contrepartie de la mise à disposition du matériel dans les conventions de mise à disposition ; que ce faisant, ils ont conçu les deux séries de conventions comme un ensemble indivisible ; qu'en statuant sur la nullité des conventions de mise à disposition sans appeler à la procédure les brasseries Kronenbourg, les deux séries de conventions formant un tout indivisible, les juges du fond ont violé la règle suivant laquelle la nullité d'une convention ne peut être prononcée sans que toutes les parties aient été appelées à la procédure, ensemble l'article 14 du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que les conventions de mise à disposition de matériels conclues entre la société Elidis et Mme Horel-Nivard ne mentionnaient ni la durée de l'exclusivité ni les quantités à réaliser, puis analysé les obligations des parties à la lumière des conventions conclues entre la société Les brasseries Kronenbourg et Mme Horel-Nivard prévoyant une clause d'approvisionnement exclusif et désignant la société Elidis comme distributeur, la cour d'appel qui n'a pas porté d'appréciation sur la validité des conventions conclues entre Mme Horel-Nivard et la société Les Brasseries Kronenbourg, ni retenu que les deux séries de conventions étaient indivisibles, n'était pas tenue de faire appeler la société Les Brasseries Kronenbourg dans la procédure ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, qui est recevable : - Attendu que la société Malplanche fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, qu'à partir du moment où ils constataient eux-mêmes que l'obligation d'approvisionnement auprès des brasseries Kronenbourg, par l'intermédiaire de la société Elidis ou de la société Malplanche, avait la forme d'une stipulation pour autrui, découlant de la convention conclue entre les brasseries Kronenbourg et Mme Horel-Nivard, les juges du fond ne pouvaient se prononcer sur l'existence d'une contrepartie sans s'expliquer, au-delà des conventions de mise à disposition, sur l'économie des conventions conclues entre les brasseries Kronenbourg et Mme Horel-Nivard ; que du fait même de cette stipulation pour autrui, les conventions formaient en effet une opération globale et postulaient de la part des juges du fond une appréciation de leur économie générale ; que faute de s'expliquer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil, 1121 du même code, ensemble au regard des règles régissant l'indivisibilité ;

Mais attendu que, dès lors qu'elle n'a pas retenu que les conventions signées entre la société Elidis et Mme Horel-Nivard et les conventions signées entre celle-ci et la société Les Brasseries Kronenbourg formaient une opération globale, la cour d'appel n'avait pas à procéder à une recherche inopérante ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche : - Attendu que la société Malplanche fait encore le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, que, pour porter une appréciation correcte sur la contrepartie à l'obligation de mise à disposition, les juges du fond se devaient de s'expliquer sur les conditions auxquelles s'effectuait l'approvisionnement en boissons des établissements de Mme Horel-Nivard ; que faute de s'être expliqués sur ce point, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 et 1121 du Code civil, ensemble au regard des règles gouvernant l'indivisibilité ;

Mais attendu que le moyen, sous le couvert d'un manque de base légale, ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges du fond du caractère dérisoire de la contrepartie de l'obligation d'exclusivité imposée à Mme Horel-Nivard ; qu'il ne peut être accueilli ;

Et sur les premier, deuxième et troisième moyens, pris en leur seconde branche rédigée en termes identiques, réunis : - Attendu que la société Malplanche fait toujours le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, que les motifs du jugement ne peuvent en aucune manière conférer une base légale à l'arrêt attaqué dans la mesure où les premiers juges ne se sont pas prononcés sur la nullité des conventions de mise à disposition, sachant que l'arrêt a bien spécifié que, se prononçant sur cette nullité, il ajoutait au jugement ; que de ce point de vue également, la censure s'impose pour violation de la règle suivant laquelle toutes les parties intéressées à la nullité des conventions doivent être appelées sur la procédure, ensemble l'article 14 du Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt étant justifié par les motifs que critiquent vainement les premier, deuxième et troisième moyens, pris en leur première branche, le moyen, qui s'attaque à des motifs surabondants, ne peut être accueilli ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.