Cass. crim., 5 mai 1981, n° 80-92.703
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Mongin
Rapporteur :
M. Monzein
Avocat général :
M. Dullin
Avocat :
M. Ryziger
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi de X René, contre un arrêt de la Cour d'appel d'Angers, 2e chambre, du 5 juin 1980, qui, pour publicité de nature à induire en erreur, l'a condamné à 1 000 F d'amende et a des dommages-intérêts ; - Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 44 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973, des articles 485 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que la décision attaquée a déclaré le sieur X coupable de publicité mensongère ;
"aux motifs que, sur un document appelé tarif 06-1977 relatif à un vitrage isolant qualitherme, le prévenu aurait porté les mentions procès-verbal d'essai n° 5176-015 / 77-1, nature des essais : Conformité aux spécifications techniques du label Aviq CEBTP, qu'en réalité les essais commencés le 28 juillet 1977 se sont terminés le 18 novembre 1977 et ont fait l'objet d'un procès-verbal en date du 14 décembre 1977 qui, d'après les constatations de l'arrêt a établi la conformité aux spécifications techniques du label contesté, qu'au surplus dans une lettre circulaire adressée à ses clients au début de 1978 X écrivait : j'ai le plaisir, à présent, de porter à votre connaissance que notre vitrage isolant a subi avec succès les essais du CEBTP et bénéficiera, ainsi, à l'avenir, de la garantie décennale de Geco, qu'en l'espèce si les échantillons fournis par X ont satisfait aux normes techniques, CEBTP n'a jamais attribué à X le label Aviq CEBTP et a mis X en demeure de cesser séance tenante ses allégations aussi intempestives qu'injustifiées, qu'il est établi que X n'a jamais bénéficié de la garantie d'assurance le Geco ;
"alors, d'une part, que ne saurait constituer une publicité au sens de l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 le tarif d'une maison, non plus qu'une lettre adressée à des clients ;
"alors, d'autre part, que le délit de publicité mensongère prévu et réprimé par l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 suppose des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, lorsque celles-ci portent sur un certain nombre de qualités prévues par l'article 44, et notamment les qualités substantielles, qu'en l'espèce actuelle, le demandeur avait fait valoir dans un chef péremptoire des conclusions prises par lui devant la cour que le tarif juin 1977 portant référence au procès-verbal d'essai du CEBTP n'avait été diffusé qu'en janvier 1978 après qu'un procès-verbal d'essai eût fait apparaitre la conformité de la production Sotraver avec les spécifications techniques du label Aviq CEBTP ;
"alors, enfin, que la cour n'a pu considérer que les écrits litigieux comportaient des allégations inexactes quant aux qualités substantielles du vitrage isolant produit par Sotraver, dès lors qu'il résulte de ses propres constatations, d'une part que les échantillons fournis par X ont satisfait aux normes requises par CEBTP, d'autre part que X n'affirmait pas que le vitrage fabriqué par Sotraver possédait certaines qualités substantielles, en l'espèce le label de CEBTP avec la garantie décennale et la couverture d'une assurance, mais seulement que ce produit pourrait bénéficier de ces avantages, ce qui avait précisément motivé sa relaxe du chef du délit de tromperie qui lui était reproché ;
Attendu que, pour déclarer X, président du conseil d'administration de la société Sotraver, coupable du délit de publicité de nature à induire en erreur, l'arrêt attaqué et le jugement qu'il confirme après en avoir adopté les motifs non contraires relèvent que ladite société a envoyé à sa clientèle et à des personnes susceptibles d'être intéressées des documents commerciaux leur proposant un vitrage qualitherm, qui, ayant satisfait aux épreuves du centre d'essai du bâtiment et des travaux publics (CEBTP), bénéficierait du label délivré par cet organisme, serait garanti pendant 10 années et couvert par une assurance, que cette annonce a été confirmée par la diffusion d'un tarif mentionnant procès-verbal d'essai n° 517 6 015 / 771- nature des essais, conformité aux spécifications techniques du label Aviq CEBTP ;
Attendu que les juges du fond ont retenu à la charge du prévenu le caractère mensonger de ladite publicité, réalisée notamment au cours de l'année 1979, en observant que, si les échantillons fournis au CEBTP avaient effectivement satisfait aux normes requises par cet organisme, le vitrage qualitherm n'avait cependant jamais bénéficié ni du label, ni de la garantie décennale, ni de l'assurance annoncée, que X, lui-même, avait reconnu avoir utilisé dans sa fabrication des matériaux différents de ceux soumis aux essais ;
Attendu que, par ces énonciations, qui répondent implicitement aux conclusions du prévenu, selon lesquelles le tarif, bien que daté de juin 1977, n'aurait été diffusé qu'en janvier 1978, la cour d'appel a retenu à la charge de X, non seulement la publicité réalisée par l'envoi du tarif en question, mais l'ensemble de la publicité, réalisée tant en 1977 qu'en 1978 par les annonces faites dans l'ensemble des documents envoyés à son initiative, qu'elle a ainsi donné une base légale à sa décision ;
Attendu qu'en cet état, il n'importe que le prévenu ait bénéficié d'une relaxe du chef de fraude sur les qualités substantielles de la marchandise vendue, dès lors qu'il ressort des constatations des juges du fond que celui-ci a réalisé une publicité de nature à induire en erreur par l'un des moyens prévus par l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 en donnant aux éventuels clients des indications erronées sur l'existence d'un label de garantie et d'une assurance dont la marchandise ne bénéficiait pas ;
Attendu, en effet, qu'il n'existe aucune contradiction de principe entre une relaxe pour tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise mise en vente ou vendue et une condamnation pour une infraction à l'article 44 précité, dès lors que seule la première de ces infractions comprend parmi ses éléments constitutifs la mauvaise foi et que, d'autre part, la possibilité d'induire en erreur peut avoir un autre support qu'une qualité substantielle au sens qui lui est donné pour l'application de l'article 1er de la loi du 1er juillet 1905 ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Rejette le pourvoi.