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Décisions

Cass. 2e civ., 15 mai 2014, n° 13-11.136

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Herport (SAS)

Défendeur :

Cargo logistic (SARL), International Cargo services (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Flise

Rapporteur :

Mme Robineau

Avocats :

SCP Waquet, Farge, Hazan, SCP Coutard, Munier-Apaire

Versailles, 14e ch. civ., du 31 oct. 201…

31 octobre 2012

LA COUR : Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 septembre 2012), qu'invoquant des actes de concurrence déloyale par détournement de clientèle et débauchage massif de salariés qu'elles imputaient à la société Herport, les sociétés Cargo logistic et International Cargo services (les sociétés Cargo) ont obtenu, sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile, du président d'un tribunal de commerce, statuant sur requête, la désignation d'un huissier de justice aux fins de constatations et investigations dans les locaux de cette société ; que cette dernière a demandé, en référé, la rétractation de l'ordonnance sur requête ;

Attendu que la société Herport fait grief à l'arrêt de la débouter de l'ensemble de ses demandes et de confirmer la mesure d'instruction, alors, selon le moyen : 1°) que le juge est tenu de respecter et de faire respecter la loyauté des débats ; que dans une procédure sur requête, l'absence de contradiction impose au requérant d'exposer les faits avec loyauté sans avoir recours ni au mensonge ni à la dissimulation, la violation de cette obligation devant entraîner la rétractation de l'ordonnance ayant fait droit à la requête et ce même si d'autres faits, cités dans la requête, pouvaient suffire à justifier la décision ; qu'en l'espèce, elle faisait valoir, dans ses conclusions, que les sociétés Cargo avaient manqué à leur devoir de loyauté en tronquant et dissimulant certains faits (le transfert par la société International Cargo services à la société Herport du bureau de Trégeux avec son mobilier, son système informatique et ses lignes téléphoniques, la mission confiée par M. Leclair à M. Froideval, pendant plusieurs mois après la démission de ce dernier, de recouvrer les créances dues aux sociétés Cargo logistic et International Cargo services par les clients du secteur avicole et de solder les comptes de ces clients, l'existence d'une procédure opposant M. Froideval à la société Cargo logistic devant le conseil des prud'hommes) ou même en mentant (en feignant d'avoir appris fortuitement, par la consultation d'un site Internet, l'identité de l'employeur de ses anciens salariés, pourtant déjà connue par des échanges de mails, ou la domiciliation d'un bureau de la société Herport à la même adresse que l'établissement secondaire de la société International Cargo services alors qu'il s'agissait du même bureau transféré d'une société à l'autre ou encore en feignant d'avoir découvert tardivement l'utilisation par M. Morin d'adresses personnelles de mail bien que cette utilisation ait été connue et justifiée par des contraintes techniques) ; que, pour exclure toute fraude imputable aux sociétés Cargo pour avoir celé au juge des requêtes les échanges et accords intervenus entre les parties, la cour d'appel a retenu que la portée de ces accords était sujette à discussion et devrait être débattue devant le juge du fond ; qu'en statuant ainsi, bien que le seul fait pour les sociétés Cargo d'avoir caché des éléments importants était de nature à caractériser leur défaut de loyauté, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 3, 145, 493, 494 du Code de procédure civile et 10, alinéa 1, du Code civil ; 2°) que le juge est tenu de respecter et de faire respecter la loyauté des débats ; que dans une procédure sur requête, l'absence de contradiction impose au requérant d'exposer les faits avec loyauté sans avoir recours ni au mensonge ni à la dissimulation, la violation de cette obligation devant entraîner la rétractation de l'ordonnance ayant fait droit à la requête et ce même si d'autres faits, cités dans la requête, pouvaient suffire à justifier la décision ; qu'en l'espèce, la société Herport faisait valoir, dans ses conclusions, que les sociétés Cargo avaient manqué à leur devoir de loyauté en tronquant et dissimulant certains faits (le transfert par la société International Cargo services à la société Herport du bureau de Trégeux avec son mobilier, son système informatique et ses lignes téléphoniques, la mission confiée par M. Leclair à M. Froideval, pendant plusieurs mois après la démission de ce dernier, de recouvrer les créances dues aux sociétés Cargo par les clients du secteur avicole et de solder les comptes de ces clients, l'existence d'une procédure opposant M. Froideval à la société Cargo logistic devant le conseil des prud'hommes) ou même en mentant (en feignant d'avoir appris fortuitement, par la consultation d'un site Internet, l'identité de l'employeur de ses anciens salariés, pourtant déjà connue par des échanges de mails, ou la domiciliation d'un bureau de la société Herport à la même adresse que l'établissement secondaire de la société International Cargo services alors qu'il s'agissait du même bureau transféré d'une société à l'autre ou encore en feignant d'avoir découvert tardivement l'utilisation par M. Morin d'adresses personnelles de mail bien que cette utilisation ait été connue et justifiée par des contraintes techniques) ; qu'en se fondant, pour exclure toute fraude imputable aux sociétés Cargo, sur l'interprétation différente par les parties de la portée des accords intervenus entre elles, sans rechercher si les sociétés Cargo n'avaient pas d'une part menti, notamment en feignant d'avoir appris fortuitement l'identité du nouvel employeur de leurs salariés ou la domiciliation d'un bureau de la société Herport à la même adresse que l'établissement secondaire de la société International Cargo services, d'autre part caché l'existence d'une instance prud'homale opposant M. Froideval à la société Cargo logistic et si ces mensonges et omissions n'étaient pas constitutifs de comportements déloyaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 3, 145, 493, 494 du Code de procédure civile et 10, alinéa 1, du Code civil ;

Mais attendu que le juge, saisi d'une demande de rétractation de l'ordonnance sur requête ayant ordonné une mesure sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile et tenu d'apprécier au jour où il statue les mérites de la requête, doit s'assurer seulement de l'existence d'un motif légitime à ordonner la mesure probatoire et des circonstances justifiant de ne pas y procéder contradictoirement ;

Et attendu qu'ayant relevé que les sociétés Cargo justifiaient que six de leurs salariés affectés au transport aviaire avaient démissionné, que deux d'entre eux apparaissaient peu de temps après dans les effectifs de la société Herport exerçant également une activité de transport et qu'ensuite leur propre activité avait fortement décru, caractérisant ainsi le motif légitime, puis retenu souverainement que les lectures opposées de la correspondance échangée entre les protagonistes ne permettaient pas de caractériser de façon manifeste une fraude imputable aux sociétés Cargo dans la présentation de leur requête et que ces courriers ou accords intervenus étaient sujets à discussion et devraient être débattus devant les juges du fond, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à d'autres recherches, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

Et attendu que la troisième branche n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.