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Décisions

Cass. com., 3 juin 2014, n° 13-11.491

COUR DE CASSATION

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Aviscom (SAS), Mulhaupt (ès qual.), Hartmann (ès qual.)

Défendeur :

Alsacienne de publications (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Rapporteur :

Mme Riffault-Silk

Avocat général :

M. Debacq

Avocats :

SCP Boré, Salve de Bruneton, SCP Lesourd

Paris, pôle 5 ch. 5, du 15 nov. 2012

15 novembre 2012

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 novembre 2012, n° RG 10-18375) que la Société française d'édition de journaux et d'imprimés commerciaux d'Alsace aux droits de laquelle vient la société Alsacienne de publications (la société Alsacienne de publications) édite le quotidien régional l'Alsace, principalement diffusé dans le département du Haut-Rhin ; que la société l'Alsace publicité, aux droits de laquelle vient également la société Alsacienne de publications (la société Alsacienne de publications) assurait la régie publicitaire du journal en charge de la collecte des publicités commerciales et des petites annonces, notamment celles concernant la rubrique dénommée " Carnet du jour " faisant apparaître les avis de décès des personnes originaires de la région, transmis par les familles, par les entreprises de pompes funèbres ou par des organismes ou institutions au sein desquelles le défunt exerçait une activité ; que la société Aviscom, créée en 2006, exploite un site Internet d'annonces nécrologiques et de condoléances en ligne, ayant pour nom de domaine www.avis-de-deces.net, qui a notamment pour objet la publication sur Internet d'un registre des décès qui permet notamment l'envoi de condoléances; que cette prestation est proposée aux familles, moyennant paiement, par l'intermédiaire des entreprises de pompes funèbres qui, en cas d'achat, font insérer dans les avis publiés dans la presse papier une ligne libellée " condoléances et témoignages sur www.avis-de-deces.net " ; qu'après avoir procédé à cette insertion dans divers avis de décès, la société Alsacienne de Publications a avisé les entreprises de pompes funèbres de son refus de faire figurer à l'avenir la mention " registre de condoléances et témoignages sur www.avis-de-deces.net " dans les avis de décès publiés dans son journal, et refusé l'insertion d'un bandeau publicitaire dans la revue nécrologique du journal ; que la société Aviscom l'a assignée en responsabilité pour pratiques anticoncurrentielles constitutives d'entente illicite, d'abus de position dominante et de refus de vente sur le fondement des articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce, aux fins d'injonction et en réparation de son préjudice ; que la société Aviscom ayant fait l'objet d'un plan de sauvegarde ouvert le 12 décembre 2012, M. Mulhaupt et Mme Hartmann ont été désignés respectivement administrateur et mandataire judiciaires ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société Aviscom, ainsi que M. Mulhaupt et Mme Hartmann, ès qualités, font grief à l'arrêt d'avoir dit que les pratiques reprochées à cette dernière ne constituaient pas un abus de position dominante et ne pouvaient faire l'objet d'une injonction de faire alors, selon le moyen : 1°) que l'exploitation d'une position dominante est interdite dès lors qu'elle a pour objet ou peut avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché ; qu'en déduisant que le refus du journal d'insérer la mention " condoléances sur www.avis-de-deces.net " dans ses annonces nécrologiques et de publier le bandeau publicitaire " ils nous ont quitté, le saviez-vous ? www.avis-de-deces.net " dans le carnet des annonces nécrologiques ne constituait pas un abus de position dominante du seul fait que la société Aviscom n'apportait pas la preuve d'un préjudice, ce qui démontrait que ces pratiques n'avaient pas perturbé de façon sensible cette société dans l'organisation de son marché, se bornant ainsi à examiner si les pratiques dénoncées avaient eu un effet anticoncurrentiel, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si elles n'avaient pas un objet ou pouvaient avoir un effet anticoncurrentiel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 TFUE ; 2°) que l'exploitation d'une position dominante est interdite dès lors qu'elle a pour objet ou peut avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché ; qu'en jugeant que la décision du journal de ne plus insérer la mention " condoléances sur www.avis-de-deces.net " dans ses annonces nécrologiques et de ne pas publier le bandeau publicitaire " ils nous ont quitté, le saviez-vous ? www.avis-dedeces. net " dans le carnet des annonces nécrologiques ne constituait pas un abus de position dominante quand elle constatait que cette décision avait été prise alors que les différents organes de presse écrite avaient mis en place des sites Internet, d'une part, de lecture des journaux en ligne, d'autre part, des sites spécialisés dans les annonces nécrologiques similaires à celui créé par la société Aviscom, sur lesquels étaient publiées les annonces nécrologiques paraissant dans la presse papier, le journal, du fait de sa position dominante sur le marché des annonces par voie de presse écrite, captant ainsi la quasi-totalité des annonces en ligne et s'assurant, en refusant l'insertion d'une mention dans l'annonce papier ou la publication d'un bandeau publicitaire, que l'entourage du défunt consulte ses sites Internet plutôt que celui de la société Aviscom, ce dont il résultait que les pratiques dénoncées par l'exposante avaient pour objet ou à tout le moins pouvaient avoir pour effet d'évincer la société Aviscom du marché des annonces nécrologiques, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 TFUE ; 3°) qu'est anticoncurrentielle la pratique qui porte atteinte à l'intérêt du consommateur ; qu'en jugeant que la décision " injustifiée " du journal de ne plus insérer la mention " condoléances sur www.avis-de-deces.net " dans ses annonces nécrologiques ne constituait pas un abus de position dominante quand elle constatait que cette décision avait porté atteinte à la manifestation de volonté des familles et proches du défunt dans l'organisation des funérailles et portait, ainsi, directement atteinte à leur intérêt, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 TFUE ; 4°) que l'existence d'un abus de position dominante doit être apprécié par rapport au marché pertinent identifié à partir de l'offre et de la demande d'un produit ou service et de la zone géographique dans laquelle se rencontrent cette offre et cette demande ; qu'en jugeant que la société Aviscom ne pouvait imputer la régression du nombre de ses annonces en ligne au comportement du journal dès lors qu'elle " ne saurait prétendre que la venue de concurrents directs sur le marché Internet n'a pas eu d'incidence ", sans établir que sur le marché pertinent en cause, celui des annonces nécrologiques dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et du Doubs, le site de l'exposante subissait une autre concurrence que celle du journal, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 TFUE ; 5°) qu'abuse de sa position dominante l'entreprise qui l'exploite de telle façon que le développement commercial d'un concurrent s'en trouve limité ; qu'en jugeant que la régression du nombre d'annonces nécrologiques sur le site Internet de la société Aviscom était liée à la politique de commercialisation des entreprises de pompes funèbres, quand elle constatait que ces dernières avaient " fait savoir (à la société Aviscom) que ce refus de la possibilité d'insérer la référence au site réduisait l'intérêt de recourir aux services de la société Aviscom et qu'elles hésiteraient à proposer ce service aux familles tant que le journal maintiendrait sa position ", de sorte que c'était bien le refus du journal qui limitait le développement commercial du site " www.avis-de-deces.net ", la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 TFUE ; 6°) que l'existence d'un abus de position dominante doit être apprécié par rapport au marché pertinent identifié à partir de l'offre et de la demande d'un produit ou service et de la zone géographique dans laquelle se rencontrent cette offre et cette demande ; qu'en jugeant que la société Aviscom ne justifiait pas que son essor aurait été bloqué du fait du refus du journal d'insérer la mention " condoléances sur www.avis-de-deces.net " dans ses annonces nécrologiques et de publier le bandeau publicitaire " ils nous ont quitté, le saviez-vous ? www.avis-de-deces.net " dans le carnet des annonces nécrologiques, au motif que la tenue du répertoire des décès n'avait pas été affectée, quand elle constatait que le marché en cause était celui des annonces nécrologiques vendues par le journal et la société Aviscom, prestation différente du répertoire des décès alimenté automatiquement par les entreprises de pompes funèbres, la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation des articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 TFUE ; 7°) que le juge ne peut refuser d'indemniser un dommage établi dans son principe au seul motif qu'il est difficile à chiffrer ; qu'en retenant, pour dire que la société Aviscom ne rapportait pas la preuve d'un préjudice matériel, qu'elle ne chiffrait pas ce préjudice alors que, dans ses conclusions d'appel, elle en démontrait l'existence en son principe et soulignait la difficulté de son évaluation, sollicitant le recours aux services d'un expert, la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation des articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 TFUE, ensemble l'article 1382 du Code civil ; 8°) que l'atteinte portée à la réputation d'une entreprise constitue pour elle un préjudice moral ; qu'en jugeant que la société Aviscom ne justifiait pas d'un préjudice moral quand il résultait de ses constatations que le refus du journal de faire mention du site de la société Aviscom dans ses annonces nécrologiques avait nuit à sa réputation tant vis-à-vis des familles et proches, qui voyaient supprimer dans l'annonce qu'ils avaient faite parvenir au journal la référence au site et fortement diminuer l'intérêt de ce site, que vis-à-vis des pompes funèbres qui ne voulaient plus proposer le " pack " de la société Aviscom à la vente, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L. 420-2 du Code de commerce et 102 TFUE, ensemble l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que la société Aviscom n'a fondé ses prétentions sur les dispositions de l'article 102 TFUE ni dans son assignation introductive d'instance, ni dans ses conclusions d'appel ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit ;

Attendu, en second lieu, qu'après avoir constaté, par des motifs non critiqués, que les deux publications, l'une par voie de presse locale pour un nombre restreint d'avis de décès et d'obsèques de personnes originaires de la région, diffusés à la demande de familles et de personnes elles-mêmes nommées dans ces publications, l'autre sur Internet ayant pour objet la constitution d'une base de données globale indépendante de la volonté des familles et sans limites géographiques, le public n'ayant accès qu'à la liste restreinte des défunts pour lesquels la prestation de condoléances à distance proposée par la société Aviscom avait été vendue aux familles par les entreprises de pompes funèbres, ne répondaient pas à la même finalité et se distinguaient aussi par leurs caractéristiques respectives, et relevé que les prestations proposées avaient cependant l'une et l'autre comme support un avis nécrologique de sorte que les marchés développés par chacune des parties étaient des marchés connexes et qu'il y avait lieu de rechercher si le refus d'insertion opposé à la société Aviscom, qui n'était pas justifié par une prétendue politique rédactionnelle qui n'avait pas été celle du quotidien précédemment, avait constitué un abus de la position dominante que celui-ci détenait sur le marché des avis nécrologiques dans la presse locale, l'arrêt retient que la société Aviscom, qui prétend que ce refus et la diminution de ses annonces en ligne qui en serait résultée lui ont causé un double préjudice matériel et moral et qu'ainsi se trouve caractérisé un abus de position dominante de la part du quotidien, ne chiffre pas son préjudice matériel, se bornant à faire état d'un plan prévisionnel aléatoire, sans produire aucune analyse comparative de ses chiffres d'affaires et de ses bénéfices, et ce alors même qu'elle a été créée en 2006, que les pratiques dénoncées ont porté sur la période du 23 octobre 2008, date du refus d'insertion, jusqu'à la date du jugement soit le 6 juillet 2010, et que la société Alsacienne de publications condamnée par ce jugement assorti de l'exécution provisoire à procéder aux insertions litigieuses, s'est exécutée; qu'il relève, de même, que la société Aviscom ne justifie pas davantage en quoi le refus d'insertion aurait nui à sa réputation et lui aurait causé un préjudice moral ; qu'il retient, enfin, que cette absence de preuve d'un préjudice à l'occasion de pratiques alléguées sur une période de près de deux ans, d'une part, sur le plan local, d'autre part, à l'occasion d'une entente invoquée entre des quotidiens diffusant à travers tout le territoire national, démontre qu'il n'y a pas eu d'entrave au développement des annonces nécrologiques sur Internet, où d'autres sites ont d'ailleurs pu se développer, ensuite, que la pratique alléguée n'a pas perturbé de façon sensible la société Aviscom elle-même dans l'organisation de son activité et qu'il s'en déduit que cette pratique n'est pas constitutive d'un abus de position dominante; qu'ayant par ces constatations et appréciations souveraines, fait ressortir que la société Aviscom ne rapportait la preuve, qui lui incombait, ni de ce que les agissements qu'elle dénonçait auraient eu un effet sensible sur le marché en cause, ni de ce qu'il en serait résulté pour elle un préjudice, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués aux quatrième, cinquième et sixième branches, et qui a effectué les recherches prétendument omises, a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en ce qu'il invoque l'article 102 TFUE, n'est pas fondé pour le surplus ;

Et sur le second moyen : - Attendu que la société Aviscom, ainsi que M. Mulhaupt et Mme Hartmann, ès qualités, font grief à l'arrêt d'avoir dit que les pratiques reprochées à la société Alsacienne de publications ne constituaient pas une entente illicite et ne pouvaient faire l'objet d'une injonction de faire alors, selon le moyen : 1°) que l'existence d'une entente s'infère de la constatation d'un parallélisme de comportements qui ne peut s'expliquer ni par les caractéristiques du marché ni par la poursuite de l'intérêt individuel de chaque entreprise et traduit ainsi le choix de celles-ci de coopérer en fait ; qu'en jugeant qu'il n'était pas établi que le refus simultané et brutal des différents organes de presse régionaux de toute référence au site Internet de la société Aviscom qu'ils accueillaient jusqu'alors résultait d'une action concertée, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ce parallélisme de comportements ne s'expliquait ni par les caractéristiques du marché ni par la poursuite de l'intérêt individuel de chaque journal, de sorte qu'il était suffisant pour établir l'existence d'une action concertée entre les journaux en cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE ; 2°) que les juges du fond doivent répondre à l'ensemble des moyens soulevés par les parties et se prononcer sur tous les documents régulièrement versés aux débats et soumis à leur examen ; qu'en jugeant qu'il n'était pas établi que le refus simultané et brutal des différents organes de presse régionaux de toute référence au site Internet de la société Aviscom qu'ils accueillaient jusqu'alors résultait d'une action concertée, sans examiner les arguments et éléments de preuve de la société Aviscom démontrant que, appliqué au moment même où les journaux avaient lancé leur propre site Internet similaire et concurrent de celui exploité par la société Aviscom, ce refus ne pouvait procéder que d'une décision commune des différents journaux, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; 3°) qu'en jugeant qu'il n'était pas établi que le refus de la société Alsacienne de publications de faire référence au site Internet de la société Aviscom ne procédait pas d'une pratique concertée avec les autres organes de presse membres du site " www.libramemoria.com " ayant adopté un comportement similaire, simultané et concomitant au lancement de ce site, au motif qu'il n'était pas démontré que ces sociétés avaient participé à la création de ce site quand elle constatait qu'elles en étaient membres, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, en violation des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE ; 4°) qu'une entreprise dominante dans une zone géographique, exploitant de façon abusive cette position dans cette zone, peut également se rendre coupable d'entente en s'accordant avec d'autres entreprises pour généraliser cette pratique sur une zone plus large ; qu'en jugeant que le refus simultané et brutal des différents organes de presse régionaux de toute référence au site Internet de la société Aviscom qu'ils accueillaient jusqu'alors ne pouvait caractériser une entente au motif que ces journaux diffusaient dans des départements différents, quand cette circonstance démontrait, au contraire, l'existence d'une entente pour généraliser cette pratique, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE ; 5°) que constitue une entente illicite la pratique concertée qui a pour objet ou peut avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché ; qu'en déduisant que l'existence d'une entente entre les différents organes de presse n'était pas démontrée au motif inopérant que ces derniers pouvaient légitimement créer et développer un site Internet d'annonces nécrologiques, quand ce n'était pas, en elles-mêmes, la création et l'exploitation d'un site Internet concurrent de celui exploité par la société Aviscom par plusieurs organes de presse qui constituaient une pratique anticoncurrentielle, mais le refus simultané et concomitant au lancement du site Internet de tous les organes de presse membres de ce site de faire référence au site Internet de la société Aviscom, alors qu'ils jouissaient d'une position dominante sur le marché des annonces papier, leur octroyant un avantage concurrentiel sur le marché des annonces en ligne, qui ne pouvait que conduire à évincer le site de la société Aviscom du marché, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE ; 6°) que constitue une entente illicite la pratique concertée qui a pour objet ou peut avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché ; qu'en déduisant que les pratiques dénoncées ne constituaient pas une entente du fait qu'elles n'avaient pas entravé le développement du site de la société Aviscom et que d'autres sites sans lien avec la presse écrite avaient pu se développer, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si elle n'avait pas un objet ou pouvaient avoir un effet anticoncurrentiel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE ; 7°) que l'entente est interdite dès lors qu'elle a pour objet ou peut avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché ; qu'en jugeant que la politique commune des organes de presse de refuser l'insertion de la mention " condoléances sur www.avis-de-deces.net " dans leurs annonces nécrologiques et la publication du bandeau publicitaire " ils nous ont quitté, le saviez-vous ? www.avis-dedeces. net " dans le carnet des annonces nécrologiques ne constituait pas une entente quand elle constatait que cette décision avait été prise alors que les différents organes de presse écrite avaient mis en place des sites Internet, d'une part, de lecture des journaux en ligne, d'autre part, des sites spécialisés dans les annonces nécrologiques similaires à celui créé par la société Aviscom, sur lesquels étaient publiées les annonces nécrologiques paraissant dans la presse papier, les journaux, du fait de leur position dominante sur le marché des annonces par voie de presse écrite, captant ainsi la quasi-totalité des annonces en ligne et s'assurant, en refusant toute publicité au site Internet de la société Aviscom, par l'insertion d'une mention dans l'annonce papier ou la publication d'un bandeau publicitaire, que l'entourage du défunt consulte leurs sites Internet plutôt que celui de la société Aviscom, ce dont il résultait que la pratique dénoncée par l'exposante avait pour objet ou à tout le moins pouvait avoir pour effet d'évincer la société Aviscom du marché des annonces nécrologiques, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE ; 8°) qu'est anticoncurrentielle la pratique qui porte atteinte à l'intérêt du consommateur ; qu'en jugeant que la politique commune des organes de presse de refuser l'insertion de la mention " condoléances sur www.avis-de-deces.net " dans leurs annonces nécrologiques ne constituait pas une entente quand elle constatait que cette pratique avait porté atteinte à la manifestation de volonté des familles et proches du défunt dans l'organisation des funérailles et portait, ainsi, directement atteinte à leur intérêt, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE ; 9°) que l'existence d'une entente illicite doit être appréciée par rapport au marché pertinent identifié à partir de l'offre et de la demande d'un produit ou service et de la zone géographique dans laquelle se rencontrent cette offre et cette demande ; qu'en jugeant que la société Aviscom ne pouvait imputer la régression du nombre de ses annonces en ligne au comportement parallèle des organes de presse dès lors qu'elle " ne saurait prétendre que la venue de concurrents directs sur le marché Internet n'a pas eu d'incidence au motif qu'elle aurait débuté son activité dans les départements de l'est de la France où ces nouveaux intervenants seraient absents alors que le propre des sites Internet est de ne pas avoir de frontières géographiques ", sans établir que sur le marché pertinent en cause, celui des annonces nécrologiques dans les départements de diffusion de ces différents journaux, le site de l'exposante subissait une autre concurrence que celle du journal, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE ; 10°) que constitue une entente illicite le comportement commun qui limite le développement commercial d'un concurrent ; qu'en jugeant que la régression du nombre d'annonces nécrologiques sur le site Internet de la société Aviscom était liée à la politique de commercialisation des entreprises de pompes funèbres, quand elle constatait que ces dernières avaient " fait savoir (à la société Aviscom) que le refus de la possibilité d'insérer la référence au site réduisait l'intérêt de recourir aux services de la société Aviscom et qu'elles hésiteraient à proposer ce service aux familles tant que le journal maintiendrait sa position ", de sorte que c'était bien le refus simultané des organes de presse qui limitait le développement commercial du site " www.avis-de-deces.net ", la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE ; 11°) que l'existence d'une entente illicite doit être appréciée par rapport au marché pertinent identifié à partir de l'offre et de la demande d'un produit ou service et de la zone géographique dans laquelle se rencontrent cette offre et cette demande ; qu'en jugeant que la société Aviscom ne justifiait pas que son essor aurait été bloqué du fait de la politique commune des organes de presse de refuser l'insertion de la mention " condoléances sur www.avis-de-deces.net " dans leurs annonces nécrologiques et la publication du bandeau publicitaire " ils nous ont quitté, le saviez-vous ? www.avis-de-deces.net " dans le carnet des annonces nécrologiques, au motif que la tenue du répertoire des décès n'avait pas été affectée, quand elle constatait que le marché en cause était celui des annonces nécrologiques vendues par les journaux en cause et la société Aviscom, prestation différente du répertoire des décès alimenté automatiquement par les entreprises de pompes funèbres, la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE ; 12°) que le juge ne peut refuser d'indemniser un dommage établi dans son principe au seul motif qu'il est difficile à chiffrer ; qu'en retenant, pour dire que la société Aviscom ne rapportait pas la preuve d'un préjudice matériel, qu'elle ne chiffrait pas ce préjudice alors que, dans ses conclusions d'appel, elle en démontrait l'existence en son principe et soulignait la difficulté de son évaluation, sollicitant le recours aux services d'un expert, la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE, ensemble l'article 1382 du Code civil ; 13°) que l'atteinte portée à la réputation d'une entreprise constitue pour elle un préjudice moral ; qu'en jugeant que la société Aviscom ne justifiait pas d'un préjudice moral quand il résultait de ses constatations que le refus des journaux de faire mention du site de la société Aviscom dans leurs annonces nécrologiques avait nuit à sa réputation tant vis-à-vis des familles et proches, qui voyaient supprimer dans l'annonce qu'ils avaient faite parvenir au journal la référence au site et fortement diminuer l'intérêt de ce site, que vis-à-vis des pompes funèbres qui ne voulaient plus proposer le " pack " de la société Aviscom à la vente, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L. 420-1 du Code de commerce et 101 TFUE, ensemble l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que dans ses conclusions d'appel, la société Aviscom ne fondait pas ses prétentions sur les dispositions de l'article 101 TFUE ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'après avoir relevé qu'il incombe à la société Aviscom, qui allègue d'une politique concertée de plusieurs journaux diffusés sur tout le territoire national, dont elle affirme que dix appartiennent au même groupe de presse, ayant eu pour objet de freiner l'émergence d'autres modes de publication d'annonces nécrologiques, de faire la preuve de ses affirmations et donc de l'existence d'une entente au sein de ce groupe pour adopter une politique rédactionnelle unique qui aurait eu pour conséquence d'entraver le jeu de la concurrence, l'arrêt retient que la circonstance que le journal l'Alsace et plusieurs journaux régionaux aient adopté une politique similaire en matière d'annonces nécrologiques et refusé de publier dans les avis de décès la ligne de son site, ne saurait à lui seul caractériser une action concertée ; qu'ayant par ces constatations et appréciations souveraines fait ressortir que la société Aviscom n'apportait pas la preuve que le parallélisme de comportement qu'elle dénonçait procédait d'une volonté commune des organes de presse en cause et spécialement de la société Alsacienne de publications, la cour d'appel, qui a effectué la recherche prétendument omise et qui n'était pas tenue d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties, a, abstraction faite des motifs surabondants critiqués à la troisième branche et légalement justifié sa décision ;

Et attendu, en dernier lieu, qu'il s'infère du rejet de la première branche que le moyen pris en ses autres branches est inopérant ; d'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en ses première, troisième, quatrième, cinquième, sixième, septième, huitième, neuvième, dixième, onzième, douzième et treizième branches en ce qu'il invoque l'article 101 TFUE, n'est pas fondé pour le surplus ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.