CA Caen, 1re ch. civ., 28 octobre 2014, n° 12-01568
CAEN
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Caen Froid (SA)
Défendeur :
Marie
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Pigeau
Conseillers :
Mme Serrin, M. Jaillet
Avocats :
Mes Le Terrier, Bougerie
FAITS ET PROCÉDURE
Le jugement en date du 5 avril 2012 du Tribunal de grande instance de Caen :
Déclare nul, en raison de l'absence de la mention relative à la faculté de renonciation prévue par l'article L. 121-23 du Code de la consommation, le contrat d'installation d'une pompe à chaleur en relève de chaudière conclu le 25 septembre 2009 entre les époux Marie et la SA Caen Froid ;
Condamne la SA Caen Froid à verser à M. Alain Marie et à Mme Catherine Lemaître épouse Marie la somme de 10 300 euros au titre de la restitution du prix perçu, à charge pour elle de reprendre possession de la pompe à chaleur installée et de ses accessoires ;
Déboute M. Alain Marie et Mme Catherine Lemaître épouse Marie de leurs demandes de dommages et intérêts ;
Condamne la SA Caen Froid à verser à M. Alain Marie et à Mme Catherine Lemaître épouse Marie une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne la SA Caen Froid à supporter les entiers dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Mes Potel-Bougerie & Leroux Quetel dans les conditions prévues à l'article 699 du Code de procédure civile.
Par déclaration reçue au greffe le 4 juin 2012, la société Caen Froid a interjeté appel de cette décision.
Au terme de ses dernières écritures déposées le 13 novembre 2012, elle demande à la cour, au visa des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation, 1604 et 1615 du Code civil de :
Réformer le jugement entrepris et en conséquence,
Débouter M. et Mme Marie de toutes leurs demandes,
Dire et juger que la société Caen Froid n'a procédé à aucun démarchage au domicile de M. et Mme Marie,
Constater que la vente conclue ne comprend aucune condition suspensive, notamment relative au bruit généré par la pompe à chaleur,
Dire et juger que la société Caen Froid a exécuté son obligation de délivrance,
Condamner M. et Mme Marie solidairement à payer à la société Caen Froid la somme de 2 500 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens avec distraction au profit de Me Le Terrier dans les conditions prévues à l'article 699 du Code de procédure civile.
Au terme de leurs dernières écritures déposées le 17 septembre 2012, M. et Mme Marie demandent à la cour, au visa des dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation, de :
Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Caen le 5 avril 2012, en déclarant nul et de nul effet le contrat proposé à M. et Mme Alain Marie au vu du devis n° D080430-b,
A titre subsidiaire,
Prononcer la résolution du contrat par application de l'article 1184 du Code civil ;
Dans les deux cas :
Condamner la SA Caen Froid à leur rembourser la somme de 10 300 euros à charge pour elle de reprendre possession de la pompe à chaleur ;
Condamner la SA Caen Froid à payer une indemnité de 1 000 euros à Mme Marie et de 2 500euro pour M. Marie au titre de leur préjudice, toutes causes confondues ;
Débouter la SA Caen Froid de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;
Condamner la SA Caen Froid à payer la somme de 4 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec droit de recouvrement direct au profit de Mes Potel-Bougerie & Leroux Quetel dans les conditions prévues à l'article 699 du Code de procédure civile.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 11 juin 2014.
Pour un plus ample exposé des faits, des moyens et des prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs dernières écritures susvisées.
MOTIFS DE LA COUR
Il n'est pas contesté que M. Astran, commercial de la société Caen Froid s'est rendu au domicile des époux Marie et qu'à la suite de ce rendez-vous, il a établi, en date du 21 octobre 2008, un devis pour l'installation d'une pompe à chaleur, devis auquel les époux Marie n'ont pas donné suite.
Il n'est pas davantage contesté que ce même devis a été accepté par M. Marie le 25 septembre 2009. Il a apposé ses initiales sur ce devis établi sur 4 pages, sur l'annexe intitulée "garantie" (page 6) et il a apposé sa signature sur la page 5 intitulée "résumé des conditions générales de vente" sur laquelle il a été porté la date (25/09/2009) précédée de la mention "bon pour accord".
Il est précisé sur ce document qu'un acompte de 30 % du montant de la commande (matériel et installation) est versé par le client lors de la commande.
M. Marie a également signé la déclaration fiscale lui permettant de bénéficier du taux réduit de TVA. Cette attestation est datée du 25 septembre 2009 et il est précisé qu'elle est faite à Saonnet, soit dans la commune où il est domicilié.
La société Caen Froid fait valoir que c'est à tort que M. et Mme Marie prétendent que le contrat a été signé à leur domicile, en présence de M. Astran, commercial de la société, le 25 septembre 2009 et indique que M. Astran ne s'est déplacé à leur domicile qu'une seule fois, en 2008.
Aucun des éléments versés au dossier ne corrobore l'assertion de la société Caen Froid selon laquelle "les particuliers indiquent en général la commune de leur domicile, même lorsque le devis est signé ailleurs, notamment au sein des établissements du professionnel".
Il ne peut être déduit de cet "ailleurs, notamment" l'affirmation que la signature du contrat et de l'attestation fiscale concomitante qui seule porte une indication de lieu, a été donnée au lieu de commercialisation du bien proposé au sens des dispositions de l'article L. 121-21 du Code de la consommation dans sa version applicable aux faits de la cause.
La société Caen Froid n'explique pas davantage dans quelles circonstances, s'il n'était pas présent lorsque M. Marie a signé le devis, M. Astran a apposé, sur un double du résumé des conditions générales de vente et en face de la clause de versement d'un acompte de 30 % le jour de la commande, la mention "reçu ce jour 2 300 euros d'acompte" suivie de sa signature.
C'est en conséquence à juste titre que le premier juge a retenu que le commercial de la société Caen Froid s'était rendu au domicile des époux Marie et que c'est en sa présence que le contrat a été signé.
C'est par des motifs pertinents et que la cour adopte qu'il a dit que cette opération, constituant un démarchage, entre dans le champ d'application des articles L. 121-1 et suivants du Code de la consommation et qu'elle devait être annulée pour inobservation des dispositions de l'article L. 121-23 du même Code.
Les dispositions de l'article L. 121-21 du Code de la consommation sont en effet applicables à quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage au domicile d'une personne pour proposer la vente, la location ou la location-vente de marchandises ou objets quelconques ou pour offrir des prestations de services, alors même que le démarchage a été effectué à la demande d'un éventuel client, a été accepté au préalable par ce dernier, ou a été précédé de pourparlers au cours lesquels aucun engagement n'a été contracté par l'intéressé comme l'a jugé la Cour de cassation (1ère chambre civile, 30 Mars 1994, pourvoi 92-15.801).
Les époux Marie qui poursuivent la nullité du contrat ne sont pas bien fondés à demander des dommages et intérêts pour la mauvaise exécution de celui-ci, et notamment en raison de la défectuosité alléguée du matériel vendu qui aurait été source de bruits troublant leur tranquillité.
A supposer qu'il soit établi que "l'absence de nuisances sonores est bien entrée dans le champ contractuel" ou qu'ils ont été privés de chauffage, aucune responsabilité ne peut être retenue sur ce fondement contre la société Caen Froid.
Il serait inéquitable en revanche de laisser à la charge des époux Marie les frais irrépétibles exposés devant la cour. La société Caen Froid sera en conséquence condamnée à leur verser une indemnité de 3 000,00 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Confirme le jugement du Tribunal de grande instance de Caen en date du 05 avril 2012 ; Y ajoutant : Condamne la société Caen Froid à verser à M. et Mme Marie la somme de 3 000,00 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne la société Caen Froid aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.