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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 12 novembre 2014, n° 12-15179

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Blandin, Platimmo (SARL)

Défendeur :

Guy Hoquet l'Immobilier (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Cocchiello

Conseillers :

Mmes Luc, Nocoletis

Avocats :

Mes Vignes, Evans, Meynard, Bensoussan

T.com. Paris, du 4 juill. 2012, RG n° 20…

4 juillet 2012

Vu le jugement du 4 juillet 2012, assorti de l'exécution provisoire, par lequel le tribunal de commerce de Paris a déclaré l'action de Mme Nathalie Blandin épouse Ballouard irrecevable, débouté celle-ci de ses demandes, dit l'action de la société Platimmo recevable, débouté la société Platimmo de sa demande de résolution du contrat requalifiée en demande de résiliation aux torts de la société Guy Hoquet L'immobilier et de l'ensemble de ses demandes, dit que c'est à bon droit que les contrats de franchise ont été résiliés, l'un faute de démarrage le 24 novembre 2007, l'autre aux torts de la société Platimmo à la date du 3 mai 2011, condamné la société Platimmo à payer à la société Guy Hoquet L'immobilier la somme de 13 442,45 euros au titre des redevances impayées, celle de 15 000 euros au titre de l'indemnité contractuelle, condamné in solidum la société Platimmo et Mme Nathalie Blandin épouse Ballouard à payer à la société Guy Hoquet L'immobilier la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu l'appel interjeté par la société Platimmo et Mme Nathalie Blandin, épouse Ballouard le 8 août 2012 et leurs dernières conclusions signifiées le 9 septembre 2014, par lesquelles il est demandé à la cour de réformer le jugement entrepris, juger nul et non avenu le contrat de franchise conclu entre la société Guy Hoquet et Madame Blandin, le 23 novembre 2006, repris par la société Platimmo le 18 juin 2007, pour vice de consentement et défaut de cause, à défaut, prononcer la résolution judiciaire dudit contrat, par voie de conséquence, condamner la société Guy Hoquet à payer à la société Platimmo les sommes de 58 034,93 € au titre des redevances impayées indûment, celle de 113 960,58 € au titre des investissements réalisés à perte, celle de 120 681,89 € au titre du remboursement du compte courant d'associés débiteur, celle de 122 282,67 € au titre du montant de la perte d'exploitation cumulé au 31 décembre 2008, 76 500 € au titre de la rémunération du dirigeant telle que prévue par le budget prévisionnel sur 3 ans, 20 000 € au titre du remboursement du capital de la société Platimmo, 133 333 € au titre de la perte de la valeur du fonds de commerce au vu du budget prévisionnel, soit un total de 644 793,00 €, dans l'hypothèse où la cour jugerait que le remboursement du compte courant débiteur de Madame Blandin, et l'absence de rémunération de cette dernière constitueraient des préjudices personnels de Madame Blandin, juger que Madame Blandin, en sa qualité de dirigeant de la société Platimmo a subi un préjudice personnel donnant lieu à réparation, à ce titre, condamner la société Guy Hoquet à lui verser les sommes de 76 500 € au titre de l'absence de rémunération telle que prévue au budget prévisionnel, celle de 120 681,89 € au titre du remboursement de son compte courant débiteur, condamner en tout état de cause, la société Guy Hoquet à verser à Madame Blandin la somme de 20 000 € en réparation du son préjudice moral, dire et juger que toutes ces sommes produiront intérêts au taux légal majoré de cinq points de pourcentage à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir, ordonner la publication de l'arrêt à intervenir aux frais avancés de la société Guy Hoquet et à l'initiative de la société appelante dans deux journaux nationaux au choix de cette dernière, tels que " LES ECHOS ", " LE FIGARO " et/ou " LE MONDE ", et, enfin, condamner la société Guy Hoquet à verser à la société Platimmo, ainsi qu'à Madame Blandin, la somme de 12 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Vu les dernières conclusions de la société Guy Hoquet L'Immobilier signifiées le 24 septembre 2014, par lesquelles il est demandé à la cour de confirmer le jugement dont appel, sauf en ce qu'il a déclaré recevable la demande de la société Platimmo et limité le montant de l'indemnité contractuelle de rupture à la somme de 15.000 euros, et statuant à nouveau sur ces points, déclarer la demande de la société Platimmo irrecevable, condamner la société Platimmo à payer à la société Guy Hoquet L'Immobilier la somme de 30.500 € au titre de l'indemnité contractuelle de rupture, en toute hypothèse, condamner conjointement et solidairement les appelantes à payer à la société Guy Hoquet L'immobilier la somme de 20.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Sur ce,

Considérant qu'il résulte de l'instruction les faits suivants :

La société Guy Hoquet L'Immobilier (ci- après la société Guy Hoquet) exploite un réseau d'agences immobilières, dans le cadre d'un système de franchise. Elle a créé en 2002 un département Entreprises et Commerces pour les transactions professionnelles portant notamment sur les fonds de commerce, les droits au bail, les locaux professionnels ou commerciaux.

Le 23 novembre 2006, Madame Blandin épouse Ballouard (ci-après Mme Blandin) a signé deux contrats de franchise avec la société Guy Hoquet en son nom et au nom d'une société en formation en vue d'exploiter deux cabinets sous l'enseigne Guy Hoquet Entreprises et Commerces (GHEC enseigne rouge) dans le département du Rhône.

Le 2 juillet 2007, il a été signé un avenant pour l'un des deux contrats officialisant l'exploitation par la société Platimmo de l'un des deux cabinets dans le centre de Lyon. L'activité a effectivement commencé à cette date. Le deuxième contrat de franchise ne s'est jamais concrétisé par l'ouverture d'un cabinet.

Le 20 octobre 2008, le franchiseur proposait un appui, sous forme d'une intervention dite " Booster " pour aider l'agence, au moment de la crise de l'immobilier en France. Il réitérait cette proposition par courrier du 29 octobre 2008. Le directeur Entreprises et Commerces écrivait " au regard de vos résultats je me permets d'insister sur l'importance de ce booster destiné à vous aider dans votre activité " et proposait l'intervention de Monsieur Poirier, les 2 et 3 décembre 2008.

Le 7 novembre 2008, la société Platimmo et Madame Blandin faisaient part d'une situation critique, la société Platimmo n'ayant réalisé, de juillet 2007 à octobre 2008, qu'un chiffre d'affaires de 69 000 € hors-taxes, soit 4600 € hors-taxes par mois pour des charges s'élevant à 11 400 € par mois. Elles demandaient, dans un courrier commun avec Monsieur Smet, de la société Azergues Immo, autre franchisé du réseau, la suspension des royalties, la prise en charge de la publicité par le franchiseur et une " aide immédiate de survie de la part du franchiseur équivalente aux pertes accumulées ". Elles signalaient subir un résultat déficitaire de 271 000 € sur 15 mois, comparé au résultat bénéficiaire annoncé de 900 € par mois, figurant dans le prévisionnel Guy Hoquet Entreprises et Commerces.

Par courrier du 21 novembre 2008, le franchisé faisait part de son insatisfaction quant au réseau et en annonçait sa prochaine sortie, afin de mettre un terme à ses pertes financières. Il demandait au franchiseur s'il avait une proposition pour l'indemniser de ce préjudice.

En raison du non-paiement des redevances de franchise, et après l'envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 août 2009, la société Guy Hoquet a résilié le contrat de franchise par courrier du 3 novembre 2009.

C'est dans ces conditions que la société Platimmo et Mme Blandin ont, le 9 novembre 2009, assigné la société Guy Hoquet devant le tribunal de commerce de Paris. Le tribunal a déclaré irrecevable l'action de Madame Blandin, celle-ci n'étant pas partie au contrat de franchise résilié et ne justifiant d'aucun préjudice personnel. Il a en revanche jugé l'action de la société Platimmo recevable, nonobstant la circonstance que le contrat ait été exécuté puis rompu sans mise en demeure préalable. Il a estimé qu'aucun vice de consentement n'était démontré, et que le contrat de franchise n'était pas dépourvu de cause. Il a par ailleurs précisé que la société Platimmo n'avait apporté aucun élément probant justifiant la résiliation du contrat aux torts du franchiseur. Il a en revanche condamné la société Platimmo à payer à la société Guy Hoquet des redevances de franchise impayées, outre une indemnité de résiliation de 15 000 € HT.

Sur l'irrecevabilité de la demande de Madame Blandin

Considérant que l'intimée soutient que Mme Blandin n'était pas partie au contrat de franchise, car, si elle a bien signé le contrat de franchise, ce dernier a été repris par la société Platimmo ;

Considérant qu'elle n'est recevable à demander l'annulation du contrat de franchise que si elle démontre avoir subi un préjudice personnel, distinct du préjudice de la société Platimmo ainsi qu'un lien de causalité entre les fautes alléguées et le préjudice subi, ce qu'elle échoue à démontrer ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré sa demande irrecevable ;

Sur l'irrecevabilité de la demande de la société Platimmo

Considérant que si l'intimée soutient que la demande de nullité du contrat est irrecevable faute de mise en demeure préalable, et du fait de la ratification intervenue, en application de l'article 1338 du Code civil, l'appelante expose que la recevabilité de son action en nullité ou en résolution n'est pas soumise à l'envoi préalable d'une mise en demeure ; qu'elle conteste avoir perdu son droit d'action en nullité ou en résolution du contrat, du fait de l'exécution du contrat ; qu'elle se fonde sur l'article 1338 du Code civil pour arguer que la confirmation n'entraîne pas l'irrecevabilité de l'action en nullité ;

Considérant que l'absence de mise en demeure de la société Platimmo, conforme à l'article 18.2 du contrat qui régit les cas de résiliation contractuelle, n'empêche pas la société Platimmo de solliciter en justice l'annulation ou la résiliation du contrat ;

Considérant par ailleurs, que si l'article 1338 du Code civil dispose qu' " A défaut d'acte de confirmation ou ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée ", la confirmation d'un acte nul exige à la fois la connaissance du vice l'affectant et l'intention de le réparer ; qu'en l'espèce, c'est l'exécution du contrat qui a permis à la société appelante de découvrir les causes de nullité prétendues du contrat, et notamment son absence prétendue de cause ainsi que le caractère prétendument mensonger des informations du DIP ;

Considérant que l'action de la société Platimmo est donc recevable, comme l'ont à juste titre estimé les Premiers Juges ;

Sur la demande en nullité du contrat pour vice du consentement

Considérant que l'appelante soutient que le DIP est illégal, car il ne respecte pas les dispositions des articles L. 330-3 al.2 et R. 330-1 5° du Code de commerce ni même celles de son décret d'application ou encore la norme AFNOR ; que le DIP aurait été remis à Madame Blandin le 23 novembre, soit le même jour que la date de signature du contrat de franchise, la société Guy Hoquet L'immobilier lui ayant demandé d'antidater l'attestation de remise des documents d'information ; que l'appelante expose qu'il n'existait pas d'unité pilote dans le réseau ; que les prévisionnels fournis par le franchiseur n'étaient pas sérieux ; que l'étude de marché fournie par la société Guy Hoquet l'Immobilier datait de 2002 et ne contenait que des informations très générales ; que la société Guy Hoquet l'Immobilier n'avait pas de notoriété dans le monde des professionnels des affaires ; qu'enfin, la société Guy Hoquet l'Immobilier aurait trompé Madame Blandin en lui faisant croire qu'elle bénéficierait d'une exclusivité d'implantation et d'activité, comme il était stipulé dans le DIP, alors que cinq autres agences du réseau intervenaient sur son secteur ; qu'en ne fournissant pas à son franchisé un document d'informations préalables conforme aux dispositions légales, voire trompeur, la société Guy Hoquet a vicié le consentement de son franchisé ; Considérant que l'intimée prétend que quelles que soient les circonstances de l'information précontractuelle, la nullité du contrat pour défaut d'information ne peut être prononcée que si le franchisé démontre que ce défaut a vicié son consentement ; que Madame Blandin était une personne particulièrement formée à la gestion ; qu'elle a elle-même pu prendre le temps de procéder à la vérification de la notoriété du réseau, avant de signer le contrat de franchise ; que le document signé n'a pas été antidaté et Mme Blandin a bien reçu dans les délais requis le document d'information précontractuelle ; que la société Platimmo ne bénéficiait que d'une exclusivité d'implantation de l'enseigne Guy Hoquet Entreprises et Commerces sur le territoire contractuel, selon les stipulations contractuelles ; qu'au demeurant, la société Platimmo ne prouve pas qu'elle aurait subi un préjudice du fait de la concurrence d'un de ses confrères du réseau Guy Hoquet ; que l'article R. 330-1 du Code de commerce prévoit que le DIP ne doit contenir que les comptes annuels des deux derniers exercices du franchiseur, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre les activités et qu'elle a donc parfaitement rempli ses obligations en ne désolidarisant pas les résultats de ses deux activités immobilières et entreprises-commerces ; qu'elle a en outre parfaitement respecté les obligations de l'article R. 330-1 5° du Code de commerce ; qu'elle a fourni un état du marché et non une étude de marché conformément à ses obligations légales ; qu'elle conteste avoir remis à Mme Blandin un compte d'exploitation prévisionnel, la pièce visée par l'appelante contenant des données chiffrées relatives aux postes d'investissement d'un cabinet type, comprenant les frais d'adhésion au réseau Guy Hoquet, et les résultats prévisionnels d'un cabinet type ; que c'était au franchisé de réaliser son propre prévisionnel et que c'est sur lui que repose la charge de la preuve que les chiffres étaient manifestement irréalistes ; que le seul caractère erroné des informations données ne peut, en tout état de cause, constituer une faute, compte tenu de l'existence d'un aléa dans l'établissement de toute prévision d'activité commerciale ; qu'enfin, l'avenant a été signé 9 mois après que Mme Blandin ait signé son contrat de franchise ;

Considérant que la société Platimmo fait grief à la société Guy Hoquet d'avoir méconnu son obligation précontractuelle d'information, en s'abstenant de lui remettre, dans le délai prévu à l'article L. 330-3 du Code de commerce, le document d'information précontractuelle, et en lui fournissant des informations lacunaires ou erronées, méconnaissances qui seraient, selon elle, constitutives de dol et de réticence dolosive ayant vicié son consentement ;

Sur le délai de remise du DIP

Considérant qu'un délai minimum de 20 jours doit séparer la remise des documents d'information pré contractuelle et la conclusion du contrat de franchise ;

Considérant qu'il résulte d'un accusé de réception des informations pré contractuelles signé par Madame Blandin que le DIP lui a été présenté le 2 novembre 2006 ; qu'il n'y a a priori aucune raison de penser que ce document aurait été antidaté, l'appelante ne versant aux débats aucun indice en ce sens ; qu'ainsi, ce document a été remis plus de 20 jours avant la signature du contrat de franchise ; que, lors de la signature, le 18 juin 2007, de l'avenant au contrat de franchise au nom de la société Platimmo, le franchisé " déclare connaître (le secteur) pour avoir effectué lui-même les recherches nécessaires à sa parfaite information " ; qu'il avait donc pu mettre le temps écoulé à profit pour effectuer ses propres recherches ; que Madame Blandin était une commerçante et une dirigeante avertie, ayant été directrice de deux Intermarchés de 1995 à 2006 et major de promotion 1988 en gestion financière et en droit bancaire ; qu'en toute hypothèse le délai de remise était suffisant pour qu'elle soit parfaitement éclairée ;

Sur le DIP

Considérant que l'article L. 330-3 du Code commerce dispose que " toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause " ; que le dol suppose, pour être caractérisé, de rapporter la preuve de l'intention dolosive ayant animé son auteur ; que, selon les dispositions de l'article L. 330-3 du Code de commerce, le document d'information pré contractuelle (ci-après DIP), " dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités " ; qu'en vertu du 5° de l'article R. 330-1 du Code commerce, le DIP doit contenir " une présentation du réseau d'exploitants qui comporte : a) la liste des entreprises qui en font partie (...) ; b) l'adresse des entreprises établies en France (...) c) le nombre d'entreprises qui (...) ont cessé de faire partie du réseau au cours de l'année précédent celle de la délivrance du document, (...) ; (...) " ;

Sur le champ des exclusivités

Considérant que si le document d'information pré contractuelle prévoit une exclusivité d'implantation et une exclusivité d'activité professionnelle, l'article 2 du contrat de franchise permet à d'autres agences Guy Hoquet, exerçant sous la franchise Guy Hoquet l'Immobilier d'exercer, dans la même zone que la société Platimmo, à titre accessoire, l'activité de transaction sur les fonds de commerce ; que cet article ne contredit par les prévisions du DIP ; que, au demeurant, la société Platimmo ne démontre pas qu'elle aurait été affectée par la concurrence de confrères du réseau Guy Hoquet ni que son consentement aurait été vicié sur ce point ;

Considérant que l'appelante soutient, par ailleurs, avoir été trompée par la société Guy Hoquet, le franchiseur ne lui ayant pas communiqué une présentation sincère et complète du marché et de la rentabilité du concept Entreprises et Commerces ;

Sur la présentation du marché

Considérant que, s'il appartient au franchisé, sur la base des éléments communiqués par le franchiseur, de réaliser lui-même une analyse d'implantation précise, encore faut-il que les éléments essentiels fournis par celui-ci pour éclairer son cocontractant soient exacts et complets et lui permettent de se déterminer en toute connaissance de cause ; que la présentation sincère du marché local constitue une obligation déterminante et essentielle du franchiseur ;

Considérant que la société Platimmo prétend que le franchiseur lui-même lui a caché l'existence d'un cabinet concurrent dans sa zone de chalandise ;

Mais considérant qu'elle n'en tire aucun argument, ne fournissant aucun élément démontrant que ce cabinet lui aurait fait effectivement concurrence ;

Considérant que le document précontractuel comportait une annexe intitulée " informations sur l'état du marché global " comportant un état de la population au recensement 1999, un aperçu général de la création d'entreprises par grands secteurs d'activité datant de 2002, dans le commerce, l'immobilier, les services aux entreprises, le transport et la construction, ainsi qu'un recensement des entreprises ; que la liste des entreprises constituant le réseau était mentionnée, qu'il s'agisse d'agences Guy Hoquet Entreprises et Commerce ou d'agences Guy Hoquet exerçant l'activité de vente de fonds de commerce à titre accessoire, avec leur activité immobilière ; qu'ainsi, la société Platimmo ne pouvait ignorer le petit nombre de franchisés existants au moment de la conclusion de son contrat ; que le DIP présenté respectait bien les dispositions des articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce ; que le franchisé n'a pas été trompé sur l'existence d'un site pilote qui n'a jamais été alléguée ;

Sur les documents prévisionnels

Considérant que si le franchiseur n'est pas tenu de remettre un compte d'exploitation prévisionnel au candidat à la franchise, aux termes du 6° de l'article R. 330-1 du Code de commerce, le document d'information précontractuelle doit contenir " la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l'exploitation " ; qu'il appartient ensuite à chaque franchisé d'établir son compte prévisionnel à partir de ces données ; que si le franchiseur remet un compte d'exploitation, il doit donner des informations sincères et vérifiables ;

Considérant que selon l'appelante, le franchiseur aurait communiqué des " résultats prévisionnels HT cabinet type ", prévoyant un chiffre d'affaires au titre de l'exercice n de 250 000 €, au titre de l'année n +1 de 350 000 € et au titre de l'année n +2 de 400 000 €, avec des bénéfices respectifs de 10 730 €, 74 405 € et 88 425 € ; que la société appelante verse aux débats le même document remis en février 2006 à un autre franchisé, faisant état de chiffres forts différents : respectivement 171 000 €, 246 000 €, et 348 000 € au titre des années n, n +1 et n+2 et des résultats avant impôts de 11 009 €, 48 098 € et 100 362 € ; que les différences considérables entre ces deux budgets prévisionnels démontreraient, selon la société appelante, le caractère fantaisiste des documents en cause ; que le document d'information préalable remis à Madame Blandin reproduisait le compte de résultat de la société Guy Hoquet sans préciser la part de chiffre d'affaires imputable à la seule franchise Entreprises et Commerces ; que par ailleurs il n'est pas contesté que sur les 13 cabinets mentionnés comme étant liés par un contrat de franchise Guy Hoquet Entreprises et Commerces, six d'entre eux exerçaient également dans le cadre de la franchise Guy Hoquet Immobilier ;

Considérant que la société Platimmo n'a réalisé, de juillet 2007 à octobre 2008, qu'un chiffre d'affaires de 69 000 € hors-taxes, soit 4600 € hors-taxes par mois pour des charges s'élevant à 11 400 € par mois ; qu'elle signalait subir un résultat déficitaire de 271 000 € sur 15 mois, comparé au résultat bénéficiaire annoncé de 900 € par mois, figurant dans le prévisionnel Guy Hoquet Entreprises et Commerces ;

Considérant que les sociétés appelantes versent aux débats un tableau récapitulant le chiffre d'affaires des cabinets GHEC ouverts avant 2007, faisant état, pour l'année 2006, d'un chiffre d'affaires moyen de 99 920 € et de 122 530 € en 2007 ;

Mais considérant que le document intitulé " résultats prévisionnels HT cabinet type " n'était pas daté et se présentait de manière isolée sans être relié au reste du DIP ; qu'il n'est pas démontré qu'il ait été communiqué au franchisé au moment de la communication du DIP et donc qu'il ait pu influer sur la décision du franchisé de conclure le contrat de franchise ; que l'article 7 du contrat de franchise prévoit d'ailleurs que le franchisé devra réaliser un chiffre d'affaire minimum annuel de 150 000 € hors-taxes, chiffre qui est beaucoup plus proche du chiffre d'affaires effectivement réalisé les 15 premiers mois par le franchisé ; que la crise immobilière explique probablement une part des mauvais résultats du franchisé ;

Considérant que, muni des informations sur les investissements à réaliser, dont la société appelante ne conteste pas la communication exhaustive, il appartenait au franchisé d'élaborer ses propres comptes, en y intégrant ses propres informations et ses connaissances du milieu local ; qu'il résulte des pièces versées aux débats qu'il pouvait réunir les éléments relatifs à la rentabilité des autres franchisés en les contactant lui-même ; que le délai écoulé entre la signature du DIP et la conclusion de l'avenant au contrat de franchise au profit de la société Platimmo laissait un temps important à Madame Blandin pour étudier la zone de chalandise concernée ;

Considérant qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté l'appelante de son action en nullité du contrat de franchise pour vice du consentement ;

Sur la demande en nullité du contrat pour défaut de cause

Considérant que l'appelante prétend que la société Guy Hoquet, à la date de signature du contrat de franchise, ne disposait pas d'un savoir-faire conforme aux exigences légales en matière de cessions de fonds de commerces et d'entreprises, ni d'un véritable réseau, et ne jouissait d'aucune notoriété dans le monde des professionnels de ce secteur ; qu'elle conteste l'existence d'un savoir-faire secret, substantiel et identifié ; que la société Guy Hoquet n'aurait pas mis à sa disposition les outils adaptés pour développer sa franchise Entreprises et Commerces, ne respectant pas ses obligations légales et contractuelles ; que c'est sur le franchiseur que pèse la charge de la preuve de l'existence d'un savoir-faire propre à la cession de fonds de commerces et d'entreprises ; que le réseau décrit par la société Guy Hoquet n'a jamais existé et la société Guy Hoquet n'a jamais fait la promotion de son réseau Entreprises et Commerces, empêchant ainsi son développement ;

Considérant que l'intimée prétend qu'un savoir-faire a bien été transmis aux franchisés et qu'il concerne la communication, la rigueur notamment dans le respect des lois et du client, la convivialité, l'échange, la signalétique, et l'aptitude à exploiter de manière optimisée l'activité de transactions, telle qu'elle est prévue par la loi Hoguet, celle-ci s'appliquant indifféremment aux particuliers et aux transactions entre professionnels ; que le savoir-faire transmis est le savoir-faire Guy Hoquet qui irrigue toutes les activités des agences, qu'il s'agisse des activités Guy Hoquet Immobilier ou Guy Hoquet Entreprises et Commerces ; que seule une faible partie des modalités d'exploitation diffère selon les activités ; que les franchisés adhèrent au réseau de franchise Guy Hoquet et non à Guy Hoquet Immobilier ou Guy Hoquet Entreprises et Commerces ; que pendant les deux années d'exploitation du concept, ni Mme Blandin ni la société Platimmo n'ont contesté le savoir-faire Guy Hoquet ; que l'intimée conteste la prétendue absence de notoriété de l'enseigne Guy Hoquet, Mme Blandin reconnaissant elle-même avoir été attirée par cette notoriété pour rejoindre le réseau de franchise ; que l'intimée souligne enfin qu'elle n'a pas reçu de mise en demeure mettant en cause la qualité des obligations mises à sa charge, contrairement aux dispositions du contrat de franchise ;

Considérant que le savoir-faire est défini comme un ensemble finalisé de connaissances pratiques, transmissibles, non immédiatement accessibles, non brevetées, résultant de l'expérience du franchiseur, testées par lui et conférant à celui qui le maîtrise un avantage concurrentiel ; que le défaut de savoir-faire prive le contrat de franchise de cause ;

Considérant, en l'espèce, que la définition contractuelle du savoir-faire protégé figure à l'article 4 du contrat de franchise et se réfère à la compétence acquise par le franchiseur dans le domaine des transactions immobilières, à savoir la présentation des agences, la formation interactive assurée par les franchisés expérimentés, la mise à disposition d'un logiciel transaction, des relations privilégiées avec les membres du réseau, la valorisation d'un véritable partenariat mis en exergue par l'association des membres du réseau, une communication interne constante, et une approche spécifique du client ; qu'il s'agit donc de la déclinaison, au secteur des fonds de commerce, de l'expérience acquise en matière de transactions immobilières ; que ce savoir-faire est en partie similaire et le franchisé ne rapporte pas la preuve contraire ; qu'il est transmis par la formation initiale, par la formation continue et par la remise au franchisé de la bible ; que cette bible, si elle contient une part commune avec la bible remise aux franchisés immobiliers, comporte des annexes spécifiques aux secteurs des fonds de commerce ; que cette documentation est adaptée aux besoins du franchisé ; que la société appelante ne démontre pas que le franchiseur ait failli à ses obligations de formation ; qu'elle n'a d'ailleurs jamais mis en cause le savoir-faire Guy Hoquet pendant plus de deux années ; que l'absence de sites pilotes ne démontre pas en soi l'absence de réussite éprouvée du savoir-faire ; qu'en effet, ce savoir-faire avait été expérimenté et était transmis par les premiers franchisés du réseau, déjà en place, qui assuraient des formations et animations ; qu'un réel savoir-faire a été transmis ; que la mutualisation des moyens de formation au sein du réseau Guy Hoquet ne démontre pas l'absence d'existence d'un savoir-faire spécifique pour la franchise Entreprises et Commerces ; que l'enseigne Guy Hoquet, existant depuis vingt ans, est notoire et bénéficie aussi à l'enseigne Entreprises et Commerces ; que les lacunes du logiciel de gestion ne suffisent pas, ainsi que l'ont justement souligné les Premiers Juges, à démontrer la vacuité du savoir-faire proposé ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a écarté la demande en nullité du contrat pour absence de cause ;

Sur la demande de résiliation du contrat

Considérant que les appelantes se fondent sur les articles 1183 et 1184 du Code civil pour demander la résolution judiciaire du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Guy Hoquet L'Immobilier, reprenant les mêmes arguments que pour leur demande en annulation ; que leurs demandes seront, de la même façon, et pour les mêmes motifs, rejetées et le jugement entrepris confirmé sur ce point ;

Sur l'appel incident de la société Guy Hoquet L'immobilier

Considérant qu'après l'envoi d'une mise en demeure de s'acquitter des redevances de franchise impayées, par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 août 2009, restée infructueuse, la société Guy Hoquet a résilié le contrat de franchise par courrier du 3 novembre 2009 ; que cette résiliation étant régulière, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Platimmo à payer à la société Guy Hoquet la somme de 13 442,45 € TTC au titre des redevances de franchise impayées ;

Considérant que l'article 17 du contrat prévoit le versement, par la partie fautive à l'autre partie, d'une indemnité de rupture au moins égale à 30 500 € ; qu'il y a donc lieu d'allouer cette somme à la société Guy Hoquet et d'infirmer le jugement entrepris sur ce point ;

Par ces motifs, Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a réduit à la somme de 15 000 € l'indemnité contractuelle de rupture, L'infirme sur ce point, et statuant à nouveau, Condamne la société Platimmo à payer à la société Guy Hoquet l'Immobilier la somme de 30 500 € au titre de l'indemnité contractuelle de rupture, Condamne la société Platimmo et Madame Blandin in solidum aux dépens de l'instance d'appel, qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, Condamne la société Platimmo et Madame Blandin in solidum à payer à la société Guy Hoquet la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.