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Décisions

CA Montpellier, 5e ch. A, 10 octobre 2013, n° 12-02561

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Monedero

Défendeur :

Feuillette

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vernudachi

Conseillers :

Mmes Bebon, Gregori

TGI Perpignan, du 21 mars 2012

21 mars 2012

EXPOSE DU LITIGE

La cour est saisie d'un appel interjeté le 3 avril 2012 par Monsieur Patrick M. et Monsieur Jean C. à l'encontre d'une ordonnance de référé en date du 21 mars 2012 rendue par le juge des référés du tribunal de grande instance de Perpignan qui a :

dit n'y avoir lieu à référé au regard du trouble anormal de voisinage,

constaté l'existence d'un trouble manifestement illicite lié à l'irrégularité de la situation en contravention avec la réglementation des ventes au déballage au visa de l'article L. 310-2 du Code de commerce, en particulier sur l'absence de déclaration préalable et la durée d'exploitation,

fait interdiction à Monsieur Patrick M. à continuer d'exercer son activité [...] et ce dans un délai de huit jours suivant la signification de la présente décision, sous astreinte de 100 euros par jour de retard pendant trois mois sauf prorogation après liquidation par le juge de l'exécution,

déclaré la présente opposable à Monsieur C.,

débouté Monsieur F. de sa demande de dommages-intérêts

condamné Monsieur Patrick M. au paiement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Suivant ordonnance de référé en date du 16 mai 2012 du premier président de la cour d'appel, le sursis à exécution provisoire sollicité par Monsieur Patrick M. et Monsieur Jean C. a été rejeté.

Par actes de reprise d'instance signifiés les six et sept août 2012, Madame Marie-Madeleine F. née G. ainsi que Mesdames Virginie F. et Nathalie F. sont intervenues pour poursuivre la procédure es qualité d'héritières de Monsieur F. décédé le 12 mai 2012.

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique et reçues au greffe le 11 juillet 2013, Monsieur M. demande la cour de :

- réformer partiellement l'ordonnance de référé

- dire et juger que l'activité exercice par Monsieur M. n'est pas génératrice d'un trouble manifestement illicite, notamment au regard de l'article L. 310 - 2 du Code de commerce.

- dire et juger que Monsieur M. est autorisé à poursuivre son activité de sandwicherie,

- débouter les consorts F. de toutes leurs demandes,

- condamner les consorts F. au paiement de la somme de 5 000 euros en indemnisation du préjudice subi par Monsieur M.,

- condamner les consorts F. au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique et reçues au greffe le 16 août 2013, Monsieur C., qui fait cause commune avec son locataire, demande à la cour de :

- réformer l'ordonnance

- débouter les consorts F. de toutes leurs demandes notamment tendant à interdire toute vente ou exposition de marchandises sur un terrain privé,

- condamner in solidum les consorts F. au paiement d'une indemnité provisionnelle de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts à valoir sur le préjudice moral du concluant

- condamner in solidum les consorts F. au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions communiquées par voie électronique et reçues au greffe le 29 août 2013, les consorts F. demandent à la cour de :

- débouter Messieurs M. et C. de l'ensemble de leurs demandes

- confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a estimé qu'il existait un trouble manifestement illicite

- constater que la procédure de Messieurs M. et C. est totalement dilatoire est abusive

En conséquence,

- condamner Messieurs M. et C. à verser la somme de 5 000 euros d'indemnité provisionnelle à Mesdames F. à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- condamner solidairement Messieurs M. et C. à verser la somme de 5 000 euros à Mesdames F. au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 août 2013.

MOTIFS DE LA DECISION

A l'audience, les consorts F. ont déclaré retirer les pièces nouvelles 26 à 32 de leurs dernières conclusions afin de respecter l'article 16 du Code de procédure civile ; il leur en sera donné acte.

Par acte sous seing privé en date du 15 décembre 2010 Monsieur C. a donné un bail à Monsieur M. un garage sis [...] "pour y garer sa voiture" sur une parcelle située en vis à vis de la parcelle F..

Il est acquis aux débats que M M. a installé dans l'avancée du garage dont il est locataire un fourgon dans lequel il exploite en permanence une vente rapide de pizzeria- restauration rapide- boissons- sandwicherie.

L'article L. 310-2 du Code de commerce stipule "sont considérés comme ventes au déballage, les ventes de marchandises effectuées dans des locaux ou sur des emplacements non destinés à la vente au public de ces marchandises ainsi qu'à partir de véhicules spécialement aménagés à cet effet". Les ventes au déballage ne peuvent excéder deux mois par année civile dans un même local ou sur un même emplacement". Elles font l'objet d'une déclaration préalable auprès du maire de la commune dont dépend le lieu de vente"

Or les témoignages que M M. produit aux débats à d'autres fins et qui sont datés pour la plupart du 16 mai 2011 ainsi que sa déclaration de main courante du 14 avril 2011 où il reconnaît "être implanté avec son camion depuis le 10 janvier 2011 et évoque le fait que son voisin ne supporte par son activité" suffisent à établir que son activité de vente à emporter a débuté bien avant à la déclaration en mairie du 22 septembre 2011, pour autant qu'elle concerne ce lieu d'établissement, et qu'elle ne saurait répondre à l'exigence de déclaration "préalable" prévue par la loi .

Les autorisations antérieures liées aux permis d'exploitation et de débit de boissons ne concernent que l'établissement principal pourvu de la licence restaurant qu'il exploite dans le quartier immédiatement voisin et situé au [...] ; elles restent étrangères à l'implantation litigieuse.

Le caractère permanent de l'exploitation de ce commerce " ambulant " qu'il a sédentarisé dans un quartier pavillonnaire contrevient également aux dispositions de l'Article L. 310-2 du Code de commerce qui limite les possibilités de vente au déballage à deux mois par an.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que l'implantation sauvage d'une activité artisanale dans un quartier pavillonnaire qui a débuté sans avertir les services de la mairie et qui s'est prolongée au-delà des conditions réglementairement autorisées constitue, en dehors du caractère excessif ou anormal de voisinage que le juge du fond doit apprécier, un trouble manifestement illicite qu'il appartenait bien au juge des réfères de faire cesser.

L'ordonnance sera ainsi confirmée en toutes ses dispositions et les demandes des appelants rejetées.

L'exercice d'une voie de recours ne peut à lui seul caractériser un abus de droit. La demande de dommages-intérêts pour procédure abusive des consorts F. sera par conséquent rejetée.

En revanche M M. et M C., parties perdantes, supporteront les dépens d'appel.

Ils seront en outre condamnés solidairement à payer aux consorts F. une somme supplémentaire de 1 200 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, Donne acte aux consorts F. ce qu'ils retirent des débats les pièces 26 à 32 de leurs dernières conclusions, Confirme l'ordonnance en toutes ses dispositions, Rejette les autres demandes. Y ajoutant, Condamne in solidum Messieurs M M. et M C. à payer aux consorts F. la somme de 1 200 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, Condamne in solidum Messieurs M M. et M C. aux dépens d'appel, dont distraction au profit de la SCP A. H. A. conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, étant précisé que M M. est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle.