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Décisions

CA Versailles, 3e ch., 23 mai 2013, n° 11-04830

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Toyota France (SAS)

Défendeur :

Belliart

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Valentin

Conseillers :

Mmes de Martel, Deletang

Avocats :

Mes Julien, Thierry, Dumeau, Bracka

TI Boulogne-Billancourt, du 13 avr. 2011

13 avril 2011

Le 20 août 2007, Monsieur Belliart et Madame Allart ont fait l'acquisition auprès de Madame Lefebvre d'un véhicule d'occasion de marque Toyota modèle RAV4.

Aucun défaut n'avait été constaté sur ce véhicule lors du contrôle technique effectué le 18 juin 2007.

Dès janvier 2008, le véhicule a fait l'objet de plusieurs pannes qui ont nécessité différentes réparations.

A la suite de la dernière réparation intervenue le 15 septembre 2008, concernant un défaut du pot catalytique et du volant moteur, Monsieur Belliart et Madame Allart ont appris que le volant moteur était défaillant sur ce type de véhicules.

Ils ont alors sollicité auprès de la SAS Toyota France le remboursement de ces réparations.

Par courrier en date du 11 févier 2009, la SAS Toyota France refusait toute indemnisation au motif que le véhicule n'était plus couvert par la garantie constructeur.

Le cabinet Lemaire a été missionné par la protection juridique de Madame Allart aux fins de procéder à une expertise amiable contradictoire et a rendu un rapport le 17 août 2009.

Postérieurement à ce rapport, la SAS Toyota France a réitéré son refus de prise en charge des frais de réparations.

Par acte en date du 7 juillet 2010, Madame Allart a assigné la SAS Toyota France aux fins de voir condamner cette dernière au paiement la somme de 3 567,74 euros représentant le coût de la réparation de son véhicule, celle de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral lié à la perte de jouissance de son véhicule, ainsi que la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'audience du 23 février 2011, Monsieur Guy Belliart a déclaré intervenir volontairement à l'instance en présentant les mêmes demandes que Madame Allart.

Par jugement en date du 13 avril 2011, le Tribunal d'instance de Boulogne-Billancourt a :

- déclaré recevable l'intervention volontaire de Monsieur Guy Belliart,

- condamné la SAS Toyota France à lui verser la somme de 2 332,58 euros,

- rejeté pour le surplus, et notamment les demandes présentées par Madame Martine Allart,

- condamné la SAS Toyota France à verser à Monsieur Guy Belliart la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

- condamné la SAS Toyota France au paiement des dépens.

La SAS Toyota France a interjeté appel de ce jugement, par déclaration remise au greffe de la cour le 25 juillet 2011.

Monsieur Guy Belliart a constitué avocat.

Dans ses dernières conclusions en date du 20 décembre 2011, la SAS Toyota France demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :

- à titre principal,

- dire et juger que le véhicule modèle RAV4, numéro de série JTE HG20V6 00038527 appartenant à Madame Allart, n'a pas été importé par la SAS Toyota France,

- en conséquence,

- prononcer la mise hors de cause de la SAS Toyota France,

- à titre subsidiaire,

- dire et juger que seule la loi applicable en l'espèce est la loi allemande,

- en conséquence,

- prononcer la mise hors de cause de la SAS Toyota France,

- à titre infiniment subsidiaire,

- dire et juger l'action de Monsieur Belliart est prescrite pour non-respect du bref délai,

- en conséquence,

- débouter Monsieur Belliart de l'ensemble de ses demandes,

- en toute hypothèse,

- dire et juger que la SAS Toyota France n'ayant été ni convoquée, ni représentée aux opérations d'expertise amiable, le "rapport" d'expertise amiable du 13 août 2009 lui est inopposable,

- en conséquence,

- débouter Monsieur Belliart de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Monsieur Belliart à payer à la SAS Toyota France la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La SAS Toyota France expose qu'elle ne saurait être tenue à la garantie des vices cachés, n'étant pas le vendeur du véhicule litigieux, ni même l'importateur ou le constructeur ; qu'elle n'a donc aucun lien dans la chaîne contractuelle de revente du véhicule pour ne l'avoir jamais acquis.

Subsidiairement, la SAS Toyota France soutient qu'en application de l'article 4 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 la loi applicable au présent litige est celle applicable au premier contrat de vente du véhicule, soit la loi allemande.

A titre infiniment subsidiaire, la SAS Toyota France soutient que la demande de Monsieur Belliart est prescrite comme tardive, ce dernier ayant eu connaissance du vice affectant le véhicule à la date de la réparation du volant moteur, soit le 25 septembre 2008.

Enfin, la SAS Toyota France conteste toute opposabilité du rapport d'expertise amiable sur lequel Monsieur Belliart fonde ses prétentions, en l'absence de tout caractère contradictoire de celui-ci.

Dans ses conclusions en date du 21 novembre 2011, Monsieur Guy Belliart demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et, subsidiairement de condamner la SAS Toyota France à lui payer la somme de 2 332,58 euros à titre de dommages-intérêts, outre celle de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Monsieur Belliart soutient que le vice affectant le véhicule n'a pu être confirmé que par l'expertise amiable, de sorte que son action ne peut être jugée tardive.

Par ailleurs, il fait valoir que la SAS Toyota France ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle n'est pas le vendeur ou l'importateur du véhicule et que celui-ci aurait été vendu par un concessionnaire allemand auprès de son propre acquéreur. Il ajoute que le véhicule RAV4 présente les liens les plus étroits avec la France, son vendeur et lui-même étant résidents français, le véhicule étant également immatriculé en France. Que selon Monsieur Belliart, la SAS Toyota France ne saurait donc valablement s'exonérer de la garantie des vices cachés.

Subsidiairement, Monsieur Belliart soutient que la SAS Toyota France a commis une faute, dès lors qu'elle s'est abstenue de rappeler les véhicules susceptibles de présenter le défaut sur le volant moteur.

En dernier lieu, Monsieur Belliart rappelle que la SAS Toyota France a été régulièrement convoquée aux opérations d'expertise auxquelles elle ne s'est pas présentée ; que cette dernière n'est donc pas fondée à exciper du caractère non contradictoire du rapport, qui lui est donc parfaitement opposable.

SUR CE,

Considérant que selon l'article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus ;

Qu'invoquant la garantie des vices cachés et subsidiairement celle de la responsabilité civile délictuelle de la SAS Toyota France, Monsieur Belliart réclame le remboursement de la somme de 2 332,58 euros correspondant au remplacement du volant moteur du véhicule Toyota RAV4 acquis auprès de Madame Lefebvre le 20 août 2007 ;

Considérant que la SAS Toyota France dénie toute garantie ou responsabilité comme n'étant pas le vendeur initial du véhicule litigieux, ni même l'importateur ou le constructeur de celui-ci ;

Qu'à l'appui de cette prétention, elle produit la copie de la facture de vente du véhicule dont s'agit entre la société Toyota Deutschland GmbH et son concessionnaire allemand ;

Considérant que l'action régie par les articles 1641 et suivants du Code civil ne peut être exercée qu'à l'encontre du vendeur ;

Considérant, en l'espèce, qu'il n'est pas contestable que la SAS Toyota France n'est pas le fabricant du véhicule litigieux ;

Considérant par ailleurs que Monsieur Belliart n'établit pas que la SAS Toyota France a été le vendeur antérieur, intermédiaire ou originaire du véhicule RAV 4 acquis par lui ;

Considérant que les mandataires automobiles ou même les représentants en France des constructeurs étrangers, lorsqu'ils n'ont pas procédé à la première commercialisation en France du véhicule pour lequel il fait état de vices cachés, ne sont pas tenus à la garantie légale prévue à l'article 1641 susvisé ;

Que c'est dès lors à tort que le premier juge a accueilli les demandes de Monsieur Belliart à l'encontre de la SAS Toyota France, cette dernière ne pouvant être considérée comme débitrice de la garantie des vices cachés ;

Que le jugement sera dès lors infirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant que la mise en œuvre de la responsabilité délictuelle de la SAS Toyota France suppose la démonstration de la faute commise par elle, qui n'est pas faite en l'espèce ;

Considérant que Monsieur Belliart, qui succombe, supportera les dépens de première instance et d'appel ;

Qu'en revanche pour des motifs d'équité, il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et publiquement, Infirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions, Statuant à nouveau, Déclare irrecevable la demande en garantie des vices cachés formée par Monsieur Guy Belliart à l'encontre de la SAS Toyota France, Déboute Monsieur Guy Belliart de sa demande en paiement de dommages et intérêts, Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne Monsieur Guy Belliart aux dépens d'instance et d'appel et autorise leur recouvrement dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.