CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 27 février 2014, n° 12-04758
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Ancel (ès qual.), Routex (SAS)
Défendeur :
La Poste (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Perrin
Conseillers :
Mme Michel-Amsellem, M. Douvreleur
Avocats :
Mes de La Taille, Klein, Teytaud, Ferla
FAITS ET PROCÉDURE
La société Routex, qui exerce l'activité de routage, effectuait pour le compte de ses clients, une prestation de conditionnement et d'affranchissement des envois qui lui étaient confiés. Elle effectuait aussi, pour le compte de la société La Poste, une prestation de tri préalable et confection de lots de sacs en fonction des destinations des envois. Par jugement des 2 juin et 6 octobre 2008, cette société a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires. La SCP Yves Coudray-Christophe Ancel, a été désignée en qualité de mandataire liquidateur en la personne de Maître Ancel.
Soutenant que la société La Poste avait eu des comportements relevant de la concurrence déloyale et avait mis en œuvre des pratiques discriminatoires au préjudice de la société Routex, la SCP Yves Coudray-Christophe Ancel, ès qualités, a, par acte du 30 juin 2009, fait assigner la société La Poste devant le Tribunal de commerce d'Evry, lequel par jugement du 7 octobre 2010, s'est dit incompétent et a renvoyé l'affaire devant le Tribunal de commerce de Paris.
Par jugement du 13 décembre 2011, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a :
- débouté de toutes ses demandes la SCP Yves Coudray - Christophe Ancel, en la personne de Maître Christophe Ancel, mandataire judiciaire, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Routex,
- dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu l'appel interjeté par la société SCP Yves Coudray - Christophe Ancel, ès qualités, le 13 mars 2012 ;
Vu les dernières conclusions de la société SCP Yves Coudray - Christophe Ancel, ès qualités, signifiées le 29 octobre 2013, par lesquelles il est demandé à la cour de :
- réformer en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 14 février 2012.
- recevoir Me Ancel, ès-qualités, de la SCP Yves Coudray-Christophe Ancel, mandataire judiciaire, pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Routex, en son appel et l'y déclare bien fondé,
En tant que de besoin, sous réserve de l'appréciation de son opportunité par la cour,
- renvoyer devant la Cour de Justice de l'Union Européenne aux fins de question préjudicielle portant sur l'interprétation des directives 2002/39/CE du 10 juin 2002 (points 27 et 28) et 97/67/ CE du 15 décembre 1997 (article 12 cinquième tiret).
- dire et juger que La Poste, abusant de sa position dominante, s'est rendue coupable de pratiques discriminatoires et de concurrence déloyale au préjudice de l'entreprise Routex et donc des créanciers de cette dernière.
- dire et juger Me Ancel, ès-qualités, recevable et bien fondé en sa demande de condamnation de La Poste à indemniser les conséquences préjudiciables subies par l'entreprise Routex par suite des pratiques discriminatoires et actes de concurrence déloyale de La Poste.
- condamner La Poste à payer à Me Ancel, ès-qualités, la somme de 10 105 834 euros au titre de l'indemnisation du préjudice résultant de la surfacturation discriminatoire subie par Routex au regard des conditions tarifaires avec ristourne de 5 % consentie par La Poste aux autres clients ;
- condamner La Poste à indemniser la procédure collective du préjudice résultant du handicap et des surcharges financières supportées par Routex dans son activité par l'obligation discriminatoire qui lui a été faite de fournir une caution bancaire, dans l'hypothèse où il ne serait pas justifié par La Poste que les mêmes contraintes étaient imposées aux autres clients ;
- condamner La Poste à payer à Me Ancel, ès-qualités, la somme de 5 972 000 euros ou subsidiairement la somme de 2 226 000 euros au titre de l'indemnisation du préjudice résultant de la perte de la valeur patrimoniale de l'entreprise par suite de la concurrence déloyale de La Poste à son profit au moyen de pratiques discriminatoires par abus de position dominante ;
- condamner La Poste à payer à Me Ancel, ès-qualités, une indemnité de 15 000 euros sur le fondement des dispositions de l'art. 700 CPC en l'état des frais irrépétibles exposés.
- débouter en tout état de cause La Poste de l'ensemble de ses demandes, tendant à voir condamner Me Ancel, ès-qualités, à une amende civile au visa de l'article 32-1 du Code de procédure civile et à des dommages et intérêts au visa de l'article 1382 du Code civil.
- rejeter toutes les demandes, fins et conclusions de La Poste.
Me Ancel, ès-qualités, soutient que La Poste en effectuant une prospection systématique des clients de la société Routex a mis en œuvre des actes de concurrence déloyale.
Il ajoute que cette société a exercé des pratiques discriminatoires au détriment de la société Routex et que ces dernières ont eu pour résultat un détournement de clientèle, ainsi que la perte de la valeur de la société Routex, par démonétisation de sa clientèle.
Au soutien de cette affirmation, l'appelant fait valoir que La Poste a proposé aux clients les plus importants de la société Routex, de traiter directement avec elle le règlement des frais d'affranchissement, tout en leur réservant des avantages financiers qu'elle n'offrait pas à l'entreprise de routage, et sans leur imposer les contraintes financières qu'elle faisait peser sur les sociétés de routage.
Il invoque à ce sujet la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne selon laquelle " les écarts de prix sont admissibles entre diverses catégories de clients lorsqu'ils traduisent des différences raisonnables de coûts dans les éléments commerciaux de l'opération, mais l'entreprise dominante ne peut pas être autorisée à opérer une discrimination dans le traitement qu'elle réserve à ses propres clients réguliers ou aux clients anciens ou présents de la victime dont elle espère conserver ou reprendre la clientèle " (Comm. CE, Déc. Aff. N° IV/30698, 14 décembre 1985, ES c./ Akzo Chemie).
Me Ancel, ès-qualités, invoque aussi de nombreuses conventions conclues entre La Poste et sa filiale Dynapost, société de routage, et détaillées par le Conseil de la concurrence dans une décision du 17 novembre 2005, conventions par lesquelles La Poste a fait bénéficier cette filiale d'avantages, notamment ceux consistant, d'une part, à informer sa clientèle de la gamme des services proposés par la société Dynapost, d'autre part, à communiquer à cette dernière les coordonnées de ses clients intéressés par les services offerts par cette filiale
Vu les dernières conclusions signifiées par La Poste le 31 octobre 2013, par lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 14 février 2012
A titre principal :
- constater que Me Ancel, ès-qualités, de la SCP Yves Coudray-Christophe Ancel, mandataire judiciaire, pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Routex, n'apporte pas la preuve d'une quelconque pratique discriminatoire ou d'un quelconque abus de position dominante dans le chef de La Poste ;
En conséquence,
- débouter Me Ancel, ès-qualités, de ses demandes sur le fondement de l'article L. 420-2 du Code de commerce ;
- rejeter la demande de renvoi préjudiciel en interprétation des directives 2002/39/CE du 10 juin 2002 (points 27 et 28) et 97/67/CE du 15 décembre 1997 (article 12 cinquième tiret) telle que formulée par l'appelant
- constater que Me Ancel, ès-qualités, n'apporte pas la preuve d'une quelconque pratique de concurrence déloyale ;
- constater que Me Ancel, ès-qualités, n'apporte pas la preuve d'une quelconque perte de valeur d'actif ;
- débouter Me Ancel, ès-qualités, de ses demandes fondées sur l'article 1382 du Code civil
En tout état de cause,
- condamner Me Ancel, ès-qualités, à une amende civile sur le fondement de l'article 32-1 du Code de procédure civile ;
- condamner Me Ancel, ès-qualités, à verser à la concluante la somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ;
- condamner Me Ancel, ès-qualités, à verser à la concluante la somme de 30 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner Me Ancel, ès-qualités, aux entiers dépens.
La Poste expose que les demandes de la société Routex se résument à des allégations non prouvées et infondées en droit.
Elle soutient que la fragilisation financière de l'appelante ne peut lui être imputée. Elle fait valoir que sa présence sur le marché du routage n'est pas en elle-même anticoncurrentielle, et que la politique de modernisation du système d'information qu'elle a mis en place s'imposait à toutes les entreprises de routage, y compris ses propres filiales.
Elle oppose que la société Routex ne fait qu'alléguer des pratiques discriminatoires abusives sans en rapporter la preuve, qu'elle est en droit de réserver les remises commerciales aux seuls clients émetteurs et que les conditions d'une pratique discriminatoire ne sont pas réunies en l'espèce.
La Poste expose aussi que l'absence de discrimination au cas d'espèce a été reconnue par un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 26 mars 2008, confirmé par la Cour de cassation dans un arrêt du 5 mai 2009, qui a autorité de la chose jugée à l'égard de la société Routex. Elle souligne qu'une procédure parallèle sur le même fondement, intentée par un certain nombre de routeurs, a été rejetée tant en première instance qu'en appel.
L'intimée fait ensuite valoir que le système de sécurisation financière qu'elle a mis en place n'était pas discriminatoire, et que l'affirmation de son adversaire selon laquelle elle se serait rendue coupable de détournements de clientèle n'est pas démontré. Elle ajoute qu'il n'est pas établi que le détournement de clientèle allégué par la société Routex aurait généré une perte de valeur d'actif de celle-ci. La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée, ainsi qu'aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.
MOTIFS
Me Ancel, ès-qualités, reproche à la société La Poste divers comportements discriminatoires mis en œuvre par elle contre les routeurs et en particulier la société Routex, qui, selon lui, ont eu pour objectif, de substituer à son monopole de droit sur le marché du timbre ouvert à la concurrence en 2011, un contrôle et un monopole de fait sur le même marché. Les pratiques dénoncées ont consisté en l'implantation de filiales sur le marché du routage, la mise en œuvre de pratiques discriminatoires en matière tarifaire, mais aussi par imposition d'importants investissements ainsi que de lourdes garanties financières et, enfin, en des démarchages de la clientèle de la société Routex. Ces pratiques auraient eu pour effet de démonétiser la valeur de la clientèle de la société Routex qui aurait été captée par les sociétés de routage filiales de la société La Poste.
La société La Poste ne conteste pas disposer d'une position dominante portant sur les services postaux qui concernent plusieurs marchés parmi lesquels celui de la distribution des correspondances, sur lequel interviennent les routeurs. Son monopole historique sur ces marchés a été progressivement réduit pour être désormais quasi-pleinement ouvert à la concurrence.
Il convient de rappeler que le fait pour un opérateur en position dominante sur un marché de développer, directement ou par l'intermédiaire de filiales, une activité concurrentielle ne constitue pas, par elle-même, une pratique anticoncurrentielle, mais qu'elle le devient si sont mises en œuvre des pratiques déloyales, notamment, lorsqu'elle est détentrice d'un réseau dont l'usage permet l'accès à une clientèle, des pratiques discriminatoires concernant l'usage de ce réseau.
Le caractère déloyal des pratiques reprochées par Me Ancel, ès-qualités, doit donc être examiné pour chacune de ces pratiques.
Sur les discrimination tarifaires
Les pratiques dénoncées sur ce point consistent, selon Me Ancel, ès-qualités, dans la réservation aux expéditeurs, en particuliers ceux désignés sous l'appellation " grands comptes ", une remise quantitative d'affranchissement de 5 % sans donner accès aux routeurs à la même remise lorsqu'ils interviennent dans le cadre d'une prestation globale de tri et d'affranchissement pour ces expéditeurs.
Il a déjà été jugé de façon définitive par cette cour (Arrêt de la 5ème chambre, du 28 mars 2008 n° de RG 05/24993-) dont l'analyse a été validée par la Cour de cassation, dans un arrêt de la Chambre commerciale, financière et économique, du 5 mai 2009 (pourvoi n° 08-15.290) que cette façon de procéder ne constituait pas une pratique discriminatoire anticoncurrentielle, dans la mesure où les expéditeurs lorsqu'il s'adressent directement pour leur affranchissement à la société La Poste ne se trouvent pas dans une situation identique à celle des routeurs. Selon ces arrêts, cette différence de situation justifiant une différenciation tarifaire résulte de ce que les expéditeurs sont les uniques décideurs de l'envoi par la Poste et que leur demande leur est spécifique, les routeurs ne faisant qu'être des intermédiaires s'agissant de l'affranchissement et ne décidant pas du mode de distribution des courriers confiés par les distributeurs.
Me Ancel, ès-qualités, soutient que ces arrêts n'ont pas autorité de la chose jugée à son égard. Il convient cependant de relever que les demandes qu'il forme en l'espèce en sa qualité de liquidateur de la société Routex, ont la même cause résultant du caractère discriminatoire du refus de la société La Poste de faire bénéficier les routeurs de la remise quantitative accordée aux clients "Grands comptes". Par ailleurs, la société Routex qui ne conteste pas avoir absorbé, en 2007, la société Defitech Routage Express Service, partie à la précédente instance, a bénéficié du transfert universel de son patrimoine devenant ainsi titulaire des droits et actions de la société absorbée, elle est donc devenue, à ce titre, partie à la procédure précédente ayant abouti à l'arrêt de cette cour du 28 mars 2008 (Dans le même sens voir Cass. com. 18 février 2004, pourvoi n° 02-11.453). Enfin, Me Ancel, qui intervient en sa qualité de liquidateur de la société Routex, dont la personnalité subsiste pour les besoins de sa liquidation, en application de l'article 1844-8, alinéa 3, du Code civil, exerce en l'espèce les droits dont elle était titulaire avant sa liquidation et n'agit pas, ou pas seulement, contrairement à ce qu'il indique, en qualité de représentant de ses créanciers. Il s'en déduit que l'arrêt de cette cour du 28 mars 2008, ainsi que l'arrêt de la Cour de cassation du 5 mai 2009 qui l'a rendu définitif, ont autorité de la chose jugée à l'égard de la société Routex et que Me Ancel, ès-qualités, ne saurait invoquer à nouveau le caractère discriminatoire de la pratique tarifaire de remise quantitative de la société La Poste.
Dès lors, si par un arrêt du 6 mars 2008 (CJCE, aff. N° C-287/06 à C-292/06, Deutsche Post AG et a. C/ Bundesrepublik Deutschland ), la Cour de Justice de l'Union européenne a dit pour droit que " (...) l'article 12, cinquième tiret, de la directive 97/67 doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce que soit refusé aux entreprises regroupant, à titre professionnel et en leur propre nom, les envois postaux de plusieurs expéditeurs le bénéfice des tarifs spéciaux que le prestataire national du service postal universel, accorde dans le domaine de sa licence exclusive, à des clients professionnels pour le dépôt dans ses centres postaux de quantités minimales d'envois prétriés ", quelle que soit l'interprétation de cette réponse contestée entre les parties quant à son étendue, cette décision ne peut remettre en cause l'autorité de la chose jugée qui s'applique en l'espèce. Il n'y a donc pas lieu de poser une question préjudicielle à la Cour de Justice de l'Union européenne.
Il est enfin sans portée que la société La Poste ait antérieurement été sanctionnée par le Conseil de la Concurrence (Décision n° 05-D-63) pour une pratique tarifaire discriminatoire concernant la rémunération de services, au bénéfice de sa filiale la société Datapost et au détriment des routeurs, dès lors que cette décision concernait un service de tri, différent de celui d'affranchissement.
Sur la discrimination résultant du système de sécurisation bancaire
Me Ancel, ès-qualités, reproche à la société La Poste d'avoir imposé des contraintes financières suivant des critères de pure circonstance. Il s'agit en réalité d'une seule contrainte consistant à imposer la fourniture d'une caution bancaire garantissant le paiement des frais d'affranchissement, lorsque le montant de ceux-ci est supérieur à 80 % du chiffre d'affaires du client déposant. La société La Poste oppose que cette pratique imposée de façon générale à tous les clients qu'ils soient routeurs ou clients directs existe depuis 1990 et qu'elle n'est pas discriminatoire. Il résulte de l'" avenant de sécurisation financière relatif aux affranchissements des contractants ", produit par la société La Poste, que celui-ci "a pour objet de déterminer les conditions de paiement et de garanties des affranchissements pour les déposants ayant accès aux contrats (...) dont le montant des affranchissements annuels est supérieur à 100 000 euros, ainsi que pour toutes sociétés ayant pour activité principale ou secondaire l'affranchissement pour compte de tiers, indépendamment du chiffre d'affaires réalisé". Cet avenant précise les critères d'analyse du risque que représente le contractant pour la société La Poste, à partir de laquelle celle-ci applique au contractant les modalités du dispositif de sécurisation financière. Ces critères, qui reposent sur des données propres aux entreprises clientes, sont objectifs et il ne résulte pas des éléments du dossier que la société La Poste en ait fait une application discriminatoire s'agissant de la société Routex, dont le liquidateur ne démontre d'ailleurs pas de quelle façon et dans quelle mesure elle aurait été pénalisée par l'obligation de fournir une telle caution. La cour relève de surcroît qu'il résulte des conclusions de Me Ancel, ès-qualités, (paragraphe 42) que la demande de garantie financière est ancienne et qu'elle préexistait à l'ouverture des services postaux à la concurrence.
Sur la pratique de démarchage et de détournement de clientèle
Me Ancel, ès-qualités, soutient, sans en rapporter aucune preuve, que la société La Poste présenterait une offre à la clientèle relevant des "Grands comptes" liant l'affranchissement et les prestations de routage, ce qui aurait pour effet de détourner ces clients des entreprises de routage. Il ne démontre pas non plus que la société La Poste aurait de façon systématique, démarché les clients de la société Routex afin de leur proposer les services de ses propres filiales exerçant une activité de routage. À ce sujet, la cour relève que la lettre de la société Capitole Finance adressée le 27 juillet 2009 à la société Datalis, filiale de la société Routex, l'informant de ce qu'elle mettait fin à leur collaboration et lui expliquant que dans un contexte de réduction significative du volume d'envois de ses "mailings", elle avait conclu une "(...) convention globale avec différents services de la Poste (...)" concernant "(...) la personnalisation, la mise sous pli et le routage de nos courriers (...)", ne démontre pas qu'elle ait bénéficié d'un tarif liant l'affranchissement et les prestations de routage, ni qu'elle ait été démarchée par La Poste. Par ailleurs, le courrier électronique adressé par le responsable de la société Nouvel R qui communique une liste des clients perdus par cette société "au bénéfice de La Poste", ne démontre lui non plus aucunement les pratiques de tarifs liés ou de démarchage alléguées.
Sur les autres pratiques
Me Ancel, ès-qualités, ne rapporte pas davantage la preuve de ce que la diminution des rémunérations versées par la société La Poste à la société Routex ait eu d'autre cause que la diminution des prestations réalisées par cette société au bénéfice de La Poste, ni même que celle-ci aurait conditionné l'accès à son réseau, qualifié d'installation essentielle, à des conditions discriminatoires qui l'auraient empêché de maintenir une offre attractive de service à la clientèle. Il n'apporte non plus aucun élément qui permettrait de justifier l'affirmation selon laquelle les "comportements anormaux et fautifs" de la société La Poste seraient à l'origine de la dépréciation des éléments incorporels de ses "entreprises", cédées dans le cadre des cessions d'actifs.
Il se déduit de l'ensemble de ce qui précède que Me Ancel, ès-qualités, ne rapporte pas la preuve des griefs qu'il allègue contre la société La Poste et que le jugement qui a, par une motivation que la cour adopte pour le surplus, justement rejeté les demandes de dommages-intérêts présentées par celui-ci, doit être confirmé.
Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusiveLes demandes formées par Me Ancel, ès-qualités, ont été maintenues, alors que la question du caractère discriminatoire des remises quantitatives de la société La Poste avait été tranchée par un arrêt définitif de cette cour revêtu de l'autorité de la chose jugée à l'égard de la société Routex. Ce maintien relève de la légèreté blâmable et constitue une faute à l'égard de la société La Poste. Il résulte des éléments du litige que le préjudice de celle-ci s'élève à la somme de 5 000 euros au paiement de laquelle sera condamné Me Ancel, ès-qualités.
Sur la demande de prononcé d'amende civile
Compte tenu de la situation juridique et financière de la société Routex, il ne sera pas prononcé d'amende civile.
Sur les frais irrépétibles
L'ensemble des éléments de la cause conduisent la cour à considérer qu'il est justifié de ne pas laisser à la charge de la société La Poste l'ensemble des fais irrépétibles exposés par elle pour faire valoir ses droits.
Me Ancel, ès-qualités, sera condamné à verser à la société La Poste la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs, LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort : Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; Y ajoutant, Condamne Me Ancel, ès-qualités, à verser à la société La Poste la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ; Condamne Me Ancel, ès-qualités, à verser à la société La Poste la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; Rejette toute demande autre, plus ample, ou contraire des parties ; Condamne Me Ancel, ès-qualités, aux dépens qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.