CA Douai, 1re ch. sect. 1, 25 novembre 2013, n° 12-06553
DOUAI
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
General Motors France (SAS)
Défendeur :
Boury Simon, Chene, Espace Motors (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Merfeld
Conseillers :
Mmes Metteau, Doat
Avocats :
Mes Levasseur, Bourriau, Robiquet, Pas, Dragon, Hermary.
Par jugement rendu le 14 septembre 2012, le Tribunal d'instance d'Arras a :
condamné la société General Motors France à payer à Mme Céline Boury Simon la somme de 7 331,11 euros au titre du préjudice subi en raison de l'existence d'un vice caché rendant le véhicule Opel Corsa CDTI 1,7 immatriculé 6538VF62 impropre à sa destination,
débouté Mme Céline Boury Simon de ses demandes dirigées à l'encontre de la société Espace Motors et de M. Pascal Chene,
constaté que l'appel en garantie de M. Pascal Chene est sans objet, compte tenu de l'issue du litige,
condamné la société General Motors France à payer à Mme Céline Boury Simon la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles,
condamné la société General Motors France à payer à M. Pascal Chene la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles,
dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de la société Espace Motors,
condamné la société General Motors aux dépens qui comprendront le coût de la mesure d'expertise ainsi que les frais de l'instance de référé.
La SAS General Motors France a interjeté appel de cette décision le 15 octobre 2012.
RAPPEL DES DONNEES UTILES DU LITIGE :
Mme Céline Boury a acheté le 31 octobre 2002 un véhicule neuf de marque Opel modèle Corsa Elégance immatriculé 6538VF62 moyennant un prix de 14.280,01 euros au concessionnaire Opel de Saint Laurent Blangy, aux droits duquel vient la société Espace Motors.
Le 4 avril 2008, le véhicule a été confié à la société Espace Motors pour procéder à son entretien.
Le 12 avril 2008, Mme Boury a été victime d'une avarie sur la route des vacances et a confié son véhicule à M. Chene, réparateur Citroën agréé, sur la commune de Poligny.
Le 13 avril 2008, le garagiste a préconisé le changement du kit de distribution et de la pompe à huile. Les travaux ont été facturés 1 219,32 euros ; la pompe à huile endommagée a été remontée sur la voiture, la pièce de remplacement commandée et facturée n'ayant pas été livrée.
Le 20 avril 2008, Mme Boury a entendu un bruit important et a fait transporter la voiture auprès des établissements Espace Motors et a immédiatement fait procéder à une expertise amiable du véhicule.
Alléguant une faute du constructeur et du réparateur, elle a fait assigner la société Espace Motors et M. Chene devant le président du Tribunal de grande instance d'Arras, en référé, pour voir organiser une mesure d'expertise judiciaire. Par ordonnance du 18 juin 2009, M. Kempen a été désigné à cette fin. Il a, par la suite, été remplacé par M. Scherpereel. Par ordonnance du 15 juillet 2010, M. Pascal Chene a mis en cause la SAS General Motors France.
Le rapport d'expertise est daté du 27 janvier 2011.
Par actes d'huissier des 6 et 13 mai 2011, Mme Céline Boury Simon a fait assigner la société Espace Motors et M. Pascal Chene exerçant sous l'enseigne Garage Pascal Chene devant le Tribunal d'instance d'Arras aux fins de les voir condamner solidairement à lui payer la somme de 8.331,11 euros en réparation du préjudice subi et celle de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile. Par acte d'huissier du 30 novembre 2011, M. Pascal Chene a fait assigner la SAS General Motors France devant cette juridiction aux fins de voir dire que cette dernière est la seule responsable des préjudices subis par Mme Boury Simon et, en conséquence, de débouter Mme Boury Simon des demandes présentées à son encontre. A titre subsidiaire, il est sollicité la garantie de la SAS General Motors et sa condamnation à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Lors de l'audience, Mme Boury Simon a sollicité la condamnation solidaire de la société Espace Motors, de la SAS General Motors et de M. Chene.
La décision déférée a été rendue dans ces conditions.
Dans ses conclusions, la SAS General Motors France demande à la cour de :
infirmer le jugement,
dire et juger que la preuve de l'existence d'un vice caché au sens de l'article 1641 du Code civil n'est pas rapportée, seul M. Chene ayant engagé sa responsabilité en qualité de garagiste réparateur,
débouter, par conséquent, Mme Boury Simon de l'intégralité de ses demandes et M. Chene de son appel en garantie à son encontre,
débouter plus généralement les parties de l'intégralité de leurs demandes à son encontre,
subsidiairement, dire et juger que les demandes d'indemnisation ne sont justifiées ni dans leur principe ni dans leur montant ; débouter les parties de l'intégralité de leur demande d'indemnisation,
condamner tout succombant à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
condamner tout succombant aux entiers dépens.
Elle rappelle qu'en sa qualité de constructeur, elle a l'obligation de mettre à disposition et de communiquer aux membres de son réseau mais également aux garagistes réparateurs indépendants les informations nécessaires pour leur permettre de procéder aux réparations et à l'entretien des véhicules Opel. Elle affirme avoir respecté cette obligation et avoir permis à tout garagiste d'accéder à une plate-forme d'information technique sur son site Internet concernant le véhicule litigieux et que, dans une note SAV 1558, elle a expliqué que l'entraînement de pompe à huile de ce type de véhicule se desserrait en fonctionnant de sorte qu'elle préconisait un nouveau couple de serrage. Elle affirme que le garagiste réparateur se devait de rechercher cette information pour procéder aux interventions, de suivre ses préconisations et de les diffuser auprès de ses clients en attirant leur attention sur les réparations s'imposant, au regard de l'obligation de conseil pesant sur eux.
Elle relève qu'il n'est pas contesté que le mauvais serrage de l'écrou de la pompe à huile est à l'origine des désordres, que M. Chene est intervenu sur le véhicule litigieux deux jours avant l'avarie en installant un nouveau type de distribution avec pompe à huile préalablement commandé auprès du réseau et que, au regard de la note technique n°1558 qu'elle avait diffusée et qui est également systématiquement livrée avec les kits de distribution, ce dernier aurait dû contrôler le couple de serrage de l'écrou de pompe à huile. Elle en déduit que le garagiste n'est pas intervenu dans les règles de l'art et qu'il a ainsi manqué à son obligation de résultat de sorte que sa responsabilité est engagée, qu'il doit être débouté de son appel en garantie à son encontre et qu'elle doit être mise hors de cause.
Subsidiairement, elle relève que les demandes d'indemnisation présentées ne sont justifiées ni dans leur principe ni dans leur quantum, qu'elles concernent pour 1 219, 32 euros les réparations du véhicule, réparations défectueuses dont seul M. Chene est responsable, pour 473,14 euros des frais non justifiés de recherche de panne, pour 500 euros des frais non justifiés au titre de l'immobilisation d'un capital et pour 3 000 euros la valeur vénale du véhicule alors que Mme Boury Simon n'entend mettre en cause ni l'action rédhibitoire ni l'action estimatoire de sorte qu'aucune condamnation au titre de la restitution d'une partie ou la totalité du prix ne peut être prononcée.
Elle souligne que le préjudice de jouissance n'est pas plus justifié puisque Mme Boury Simon est responsable de la durée de la procédure. Elle constate que celle-ci a sollicité une mesure d'expertise judiciaire par voie d'assignation du 2 juin 2009, soit plus d'un an après l'avarie, que M. Chene a également attendu une année avant de saisir le tribunal pour que cette mesure soit rendue opposable au constructeur et que Mme Boury Simon n'a saisi le tribunal d'instance au fond que trois mois après le dépôt du rapport d'expertise, M. Chene l'ayant appelée en garantie six mois après avoir été lui-même assigné. Elle en déduit que le véhicule a été immobilisé quasiment deux années du fait de Mme Boury Simon ou de M. Chene et qu'elle ne peut être tenue responsable de cette situation.
Dans ses conclusions, Mme Céline Boury Simon sollicite, au visa des articles 1134, 1147, 1641 et suivants du Code civil, de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société General Motors France et, dans ces conditions, de débouter celle-ci de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions. Elle forme appel incident et sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes dirigées à l'encontre de la société Espace Motors et de M. Chene et de :
dire et juger que le véhicule vendu par les établissements Espace Motors était affecté au jour de la vente d'un vice caché,
dire et juger que le garage Chene a engagé sa responsabilité contractuelle pour avoir failli à son obligation de résultat,
condamner solidairement les établissements Espace Motors, la société General Motors et M. Chene à lui payer la somme de 8 331,11 euros en réparation du préjudice subi,
débouter les établissements Espace Motors, la société General Motors et M. Pascal Chene de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions formulées à son encontre,
les condamner solidairement à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais de première instance,
les condamner solidairement à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour la procédure d'appel,
les condamner solidairement aux entiers frais et dépens incluant les frais d'expertise et de référé.
Elle soutient que l'expertise judiciaire a permis de mettre en évidence le fait qu'au jour de la vente, son véhicule était atteint d'un vice caché puisque le fait générateur initial de la panne est la détérioration de la liaison d'entraînement de la pompe à huile, laquelle a été progressive, à l'origine directe d'une baisse de la pression d'huile destinée à assurer le fonctionnement du moteur. Elle souligne que l'expert a pu constater que ce fait générateur résultait d'une anomalie du produit implanté d'origine par General Motors France, ce qui constitue un défaut de fabrication.
Elle ajoute que la société Espace Motors avait d'ailleurs constaté l'existence d'un bruit lors de la révision du 4 avril 2008, soit antérieurement à la panne.
Elle indique que le garagiste est tenu d'une obligation de résultat, que M. Chene a failli à sa mission et que sa prestation a été facturée 1 219,32 euros.
Elle fait valoir que General Motors ne peut prétendre que l'avarie n'est intervenue que deux jours après l'intervention du garagiste puisque l'avarie motrice est due à la panne d'origine, antérieure à cette intervention, et qui a pour cause un défaut de serrage de la vis de maintien de poulies. Elle constate que les nouvelles pièces versées aux débats par le constructeur, et en particulier celles relatives au site Internet, datent de janvier 2013 alors que le dommage est survenu en 2008.
Elle en déduit que tous les intervenants ont engagé leur responsabilité et qu'ils doivent être condamnés solidairement.
Elle explique qu'elle a subi un préjudice de jouissance important puisque son véhicule est immobilisé depuis le 20 avril 2008, qu'il ne lui a été prêté un véhicule de remplacement que durant six jours, qu'elle a accompli de manière rapide les diligences nécessaires mais que la procédure a été longue, chacun des intervenants contestant sa responsabilité. Elle ajoute qu'elle a dû faire face aux frais de la réparation initiale non déficiente, aux frais de recherche et de diagnostic de la panne.
Elle remarque que la réparation à intervenir pour la remise en état du véhicule représente le prix du changement du moteur à hauteur de 6 531,35 euros. Elle fait valoir que le véhicule s'est déprécié, qu'elle a subi un préjudice annexe du fait de l'immobilisation d'un capital et que des frais de remise en état de la voiture seront également nécessaires pour 750 euros. Compte tenu des montants nécessaires aux réparations, elle précise ne solliciter que la valeur vénale de la voiture soit 3 000 euros augmentée de son préjudice de jouissance, du montant des réparations, des frais d'immobilisation du capital (elle a été dans l'obligation d'acheter un nouveau véhicule compte tenu de la durée de la procédure) et des frais d'assurance à savoir un montant total de 8 331,11 euros.
Elle souligne l'importance des frais irrépétibles qu'elle a exposés, ayant dû assister à deux réunions d'expertise amiable, effectuer de multiples déplacements et démarches infructueuses, procéder à la consignation dans le cadre de l'expertise ordonnée en référé, participer à trois réunions d'expertise judiciaire et l'affaire ayant été reportée à de nombreuses reprises avant de pouvoir être plaidée devant le tribunal d'instance.
Dans ses écritures, la SAS Espace Motors demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, en ce qu'elle l'a mise hors de cause, de constater l'absence de vice caché, de débouter Mme Boury Simon de l'ensemble de ses prétentions et, à titre infiniment subsidiaire, de réduire à de plus justes proportions le montant de l'indemnisation sollicitée par celle-ci et notamment d'exclure des condamnations les réparations inutiles auxquelles il a été procédé par le garage Chene et les frais de diagnostic, de condamner Mme Boury Simon à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers frais et dépens de première instance et d'appel.
Elle affirme qu'il n'existe aucune certitude quant à l'origine de la panne subie, que le garage Chene n'a émis qu'une hypothèse sur l'origine du dysfonctionnement qui touchait la distribution du moteur avant de conclure à un desserrement de la vis de maintien de la pompe à huile, que le rapport d'expertise judiciaire ne permet ni d'exclure ni de corroborer cette hypothèse puisque les opérations se sont tenues après divers démontages amiables et contradictoires. Elle en déduit que l'existence d'un vice caché antérieur à la vente laquelle remonte à plus de six ans avant la panne, n'est pas établie. Elle ajoute que l'expertise amiable a permis de démontrer qu'il n'existait aucune anomalie résultant d'un défaut de conception sur la pompe à huile mais que les réparations réalisées par le garage Chene ne répondaient pas aux règles de l'art de sorte qu'il était déjà impossible, à cette époque, d'établir l'origine de la première panne. Elle en conclut que le seul fait générateur clairement avéré résulte de l'intervention de ce garagiste. A titre infiniment subsidiaire, elle demande d'exclure des condamnations prononcées à son encontre les réparations inopérantes et les frais de diagnostic.
Dans ses conclusions, M. Pascal Chene demande à la cour de dire l'appel principal de la SAS General Motors France non fondé, de dire l'appel incident de Mme Céline Boury Simon non fondé en ce qu'il est dirigé à son encontre, de les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre, de confirmer le jugement et y ajoutant de condamner la SAS General Motors France à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ainsi qu'au paiement des entiers frais et dépens de l'instance. A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour devait entrer en voie de condamnation à son encontre, il sollicite de condamner la SAS General Motors France et la SAS Espace Motors, in solidum, à le garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, de les condamner, in solidum, à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel et de les condamner, in solidum, au paiement des entiers frais et dépens de l'instance.
Il fait valoir qu'il a accepté d'effectuer les réparations sur le véhicule dépanné sur l'autoroute sous réserve et sans garantie, qu'il a averti sa cliente des risques de casse moteur après réparations puisque le moteur avait dû fonctionner sans pression d'huile de sorte que le risque que la réparation soit inefficace a été accepté en connaissance de cause. Il précise que sur la facture du 18 avril 2008, il a été précisé que le carter avait été recollé et que la pièce neuve commandée mais non parvenue serait adressée par la poste.
Il affirme que les conclusions des experts sur l'origine de la panne sont incontestables, que celle-ci ne découle pas d'une usure normale du véhicule mais a pour origine un défaut de fabrication. Il ajoute qu'aucune faute ne lui est imputable dès lors que l'avarie du moteur existait déjà lors de son intervention même si les réparations qu'il a pu faire se sont avérées inutiles et inadaptées à un traitement durable de l'avarie. Il ajoute qu'il a pris le soin d'avertir son client de sorte que sa responsabilité ne peut être engagée dans ce contexte.
A titre subsidiaire, il sollicite la garantie du constructeur qui avait connaissance du vice caché affectant le véhicule et précise qu'il n'a jamais eu connaissance de la note n°1558 et ce d'autant que les copies d'écran produites aux débats sont datées de janvier 2013. Il ajoute que si une intervention de reserrage de la vis devait être réalisée sur le véhicule, elle devait l'être avant l'avarie ayant causé la destruction de cet organe et que cette opération relevait de la SAS Espaces Motors qui entretenait régulièrement le véhicule et avait procédé à la révision quelques jours avant l'avarie.
MOTIFS DE LA DECISION
L'article 1641 du Code civil prévoit que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus.
Selon l'article 1645, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.
Mme Boury Simon qui invoque, pour fonder sa demande de dommages et intérêts, un vice caché de son véhicule OPEL, doit justifier de l'existence d'un défaut caché de cette voiture, lors de sa vente, qui la rendait impropre à son usage ou qui en diminuait tellement l'usage qu'elle ne l'aurait pas acquise si elle en avait eu connaissance.
Il ressort tant que l'expertise amiable réalisée par M. Cieslewicz que de l'expertise judiciaire de M. Scherpereel que :
le carter de pompe à huile présente un surplus de patte à joint et qu'un orifice de lubrification est obstrué ; cependant, cet orifice n'est pas sur le chemin de lubrification du moteur.
La pompe à huile a été endommagée ; elle a été changée par M. Chene le 18 avril 2008 ; elle présente une usure anormale du met plat de fixation de sa poulie par l'axe de pompe à huile. La poulie s'est desserrée et n'a plus permis le fonctionnement de la pompe, ce qui a entraîné un manque de lubrification du moteur qui est à changer.
Le défaut de la pompe est un vice de fabrication qui a fait l'objet d'une note technique de General Motors.
Même si le moteur avait été démonté lors de l'expertise amiable, l'expert judiciaire n'a pas fait état de difficultés pour déterminer, nettement, l'origine de la panne.
L'avarie est due, selon lui, à une anomalie d'assemblage de laquelle il a résulté un desserrage d'écrou solidarisant la roue dentée d'entraînement de la pompe à huile et l'arbre de commande de cette pompe suivi d'une usure progressive puis un fonctionnement incohérent de l'arbre de pompe générant une anomalie de la pression de l'huile délivrée par la pompe. Par ailleurs, le fait qu'un orifice ait été partiellement obstrué par M. Chene n'a pas de lien avec les désordres du moteur, lequel a été détruit par un grippage du piston du cylindre n°1. Les réparations nécessaires consistent à rembourser le bloc moteur.
Le problème à l'origine de la panne subie existait dès la construction du véhicule étant précisé que l'assemblage défaillant ne requiert ni entretien ni vérification lors de l'entretien courant du véhicule. Si M. Chene n'a pas effectué de réparation efficace de l'avarie, il n'est pas pour autant à l'origine de l'avarie du moteur (le grippage étant amorcé lors de son intervention de sorte que le bloc moteur devait, en tout état de cause être changé).
Il résulte de ces éléments que le véhicule acheté par Mme Boury Simon le 31 octobre 2002 à la société Garage MERAL et FILS, aux droits de laquelle vient la société Espace Motors était affecté, dès sa construction, d'un vice, non apparent, diminuant l'usage du véhicule (puisqu'entraînant à terme la destruction du moteur, alors que la pièce litigieuse ne nécessite, en temps normal, pas d'entretien particulier). Si Mme Boury Simon avait connu ce désordre et le risque de destruction du moteur, il est évident qu'elle n'aurait pas acquis ce véhicule, qu'elle achetait neuf et qui était donc censé être sans défaut, ou qu'elle n'en aurait donné qu'un moindre prix.
Elle est donc fondée à solliciter la réparation du préjudice qu'elle a subi, étant précisé qu'en sa qualité d'acquéreur, elle n'a aucune obligation d'engager une action rédhibitoire ou estimatoire mais qu'elle peut, exclusivement, demander des dommages et intérêts.
Son action est fondée à l'égard de son vendeur, la SAS Espace Motors, professionnelle en matière automobile et donc présumée connaître les vices affectant la chose vendue, mais également à l'égard de la SAS General Motors France, fournisseur du véhicule. Le seul fait que la SAS Espace Motors ait prétendu ne pas avoir eu connaissance de la note n°1588 de General Motors ne peut suffire à écarter sa responsabilité, telle que prévue par l'article 1645 du Code civil.
Au titre des préjudices qu'elle a subis, Mme Boury Simon invoque les postes suivants :
- frais de réparations inutiles. Si les réparations effectuées par M. Chene sur le véhicule se sont avérées inefficaces à long terme (elles ont cependant permis à Mme Boury Simon de revenir de vacances avec son véhicule), il n'en demeure pas moins que Mme Boury Simon a subi un préjudice en étant dans l'obligation d'exposer de tels frais suite à la défaillance de la pompe à huile de sa voiture, défaillance directement causée par le vice caché. Elle a donc subi un préjudice de ce fait à hauteur de 1 219,32 euros.
- frais de recherche (473,14 euros). Ces frais correspondent à une facture de la société Espace Motors datée de 2009, directement consécutive à la panne subie. Ils représentent donc un préjudice en lien avec le vice caché.
- valeur vénale du véhicule. Mme Boury Simon explique que le montant des réparations pour la remise en état de sa voiture sont nettement supérieurs à la valeur de ce bien. (3 000 euros selon l'expert mais entre 5 000 et 6 000 euros selon les annonces de ventes de l'époque pour ce type de véhicule). Elle prétend donc obtenir des dommages et intérêts pour 3 000 euros. Cette demande est en fait fondée sur la perte de valeur de sa voiture consécutivement au vice et aux avaries entraînées par celui-ci. Il sera fait droit à cette demande, le véhicule conservé par Mme Boury Simon étant inutilisable suite à la destruction du moteur, après seulement six années d'usage.
- immobilisation d'un capital (500 euros). Du fait de l'impossibilité d'utiliser son véhicule, Mme Boury Simon a vu la valeur de ce bien indisponible. Elle a subi de ce fait un préjudice qui a été exactement évalué par le premier juge à 500 euros.
- préjudice de jouissance : de même, l'immobilisation de la voiture a causé à Mme Boury Simon un préjudice de jouissance. Cette dernière a même été dans l'obligation de racheter une autre voiture. Ce préjudice a exactement été fixé à 1 500 euros, au regard de la durée de la procédure, par le premier juge. L'appel a conduit à une aggravation de cette situation et le montant des dommages et intérêts alloués à ce titre sera fixé à 2 000 euros au total. Il ne saurait être prétendu que Mme Boury Simon ou M. Chene sont à l'origine de ce préjudice, par leur attitude procédurale alors que, depuis la panne et surtout depuis le rapport d'expertise amiable daté du 20 octobre 2008, l'origine de l'avarie est parfaitement connue et que le constructeur et le vendeur n'ont pas cessé de tenter de rejeter toute responsabilité sur le garagiste réparateur.
- frais d'assurance : Mme Boury Simon a fait le choix de conserver le véhicule litigieux. Elle ne peut donc prétendre que les frais d'assurance qui sont à la charge du propriétaire correspondent à un préjudice indemnisable. Elle sera déboutée de sa demande de ce chef.
La SAS General Motors France et la SAS Espace Motors seront donc condamnées, in solidum, à lui payer la somme de 7 192,46 euros.
En revanche, les demandes à l'encontre de M. Chene doivent être rejetées ; en effet, ce dernier, s'il n'a pas effectué une réparation efficace, n'est pas à l'origine de la panne, qui, dès son constat, nécessitait le remplacement du moteur, selon l'expert judiciaire qui précise que le grippage du moteur, caractérisé par une perte de puissance, a été ressenti avant l'intervention du réparateur et qu'il nécessite, quelque soit le stade du grippage (en amorce, réalisé ou générateur d'un usage impossible du moteur) un remplacement de l'organe. Par ailleurs, il doit être observé qu'il avait averti sa cliente de ce que sa réparation était faite sans aucune garantie dans la mesure où le moteur avait pu tourner sans pression d'huile et que Mme Boury Simon avait donc, correctement avertie avant les travaux de réfection, accepté les risques d'une intervention inefficace.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de M. Chene et, en conséquence, dit que l'appel en garantie de ce dernier était sans objet.
La SAS General Motors France et la SAS Espace Motors succombant en leurs principales prétentions, elles seront condamnées, in solidum, aux dépens d'appel. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la SAS General MOTORS aux dépens de première instance, aux frais d'expertise et de la procédure de référé.
Il serait inéquitable de laisser à Mme Boury Simon la charge des frais exposés et non compris dans les dépens. La SAS General Motors France et la SAS Espace Motors seront condamnées à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la SAS General Motors France au paiement de la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance.
Par ailleurs, le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué à M. Chene la somme de 3 000 euros en première instance sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et il lui sera accordé une indemnité de 2 000 euros en cause d'appel sur le même fondement, à la charge, in solidum, de la SAS General Motors et de la SAS Espace Motors.
Par ces motifs : LA COUR, statuant par arrêt contradictoire : CONFIRME le jugement en ce qu'il a : - condamné la société General Motors France à payer à Mme Céline Boury Simon des dommages et intérêts au titre du préjudice subi en raison de l'existence d'un vice caché rendant le véhicule Opel Corsa CDTI 1,7 immatriculé 6538VF62 impropre à sa destination, débouté Mme Céline Boury Simon de ses demandes dirigées à l'encontre de M. Pascal Chene, constaté que l'appel en garantie de M. Pascal Chene est sans objet, compte tenu de l'issue du litige, condamné la société General Motors France à payer à Mme Céline Boury Simon la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles, condamné la société General Motors France à payer à M. Pascal Chene la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles, - condamné la société General Motors aux dépens qui comprendront le coût de la mesure d'expertise ainsi que les frais de l'instance de référé. L'INFIRME en ce qu'il a débouté Mme Céline Simon Boury de ses demandes à l'encontre de la SAS Espace Motors et sur le quantum des dommages et intérêts alloués; Statuant à nouveau des chefs infirmés : CONDAMNE, in solidum, la SAS General Motors France et la SAS Espace Motors à payer à Mme Céline Boury Simon la somme de 7.192,46 euros à titre de dommages et intérêts ; CONDAMNE, in solidum, la SAS General Motors France et la SAS Espace Motors aux dépens d'appel ; CONDAMNE, in solidum, la SAS General Motors France et la SAS Espace Motors à payer à Mme Céline Boury Simon la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel et à M. Pascal Chene la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel