CA Rennes, 2e ch., 15 mars 2013, n° 11/00776
RENNES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Expertises Galtier (SA)
Défendeur :
Horvais
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Le Bail
Conseillers :
Mmes Le Brun, Le Potier
Avocats :
Selarl Luc Bourges, Selafa Villatte, SCP Gauvain Demidoff, Me Moncoq
EXPOSE DU LITIGE
La société Expertises Galtier a fait assigner Madame Marie Horvais aux fins d'obtenir le paiement d'une facture de prestation d'expertise des dommages subis par un bien immobilier appartenant à cette dernière.
Par jugement du 15 décembre 2010, le Tribunal de Grande Instance de Saint-Malo a :
- prononcé la nullité du contrat conclu le 29 décembre 2006,
- débouté la société Expertises Galtier de toutes ses prétentions,
- condamné la société Expertises Galtier à payer à Madame Horvais la somme de 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
-condamné la société Expertises Galtier aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
La société Expertises Galtier a formé appel de ce jugement et, dans ses dernières conclusions du 20 février 2012, elle demande à la cour de le réformer et de :
- condamner Madame Marie Horvais à lui payer la somme de 12 510,99 euro au titre de la prestation de service effectuée par elle,
- dire que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2008,
- condamner Madame Marie Horvais à lui payer la somme de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement,
- condamner Madame Marie Horvais à lui payer la somme de 3 000 euro au titre de l' article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions du 23 décembre 2011, Madame Marie Horvais sollicite de la cour de :
vu les articles 1134 Code civil et L. 121-23 à L. 121-26 du Code de la consommation,
- confirmer le jugement dont appel,
- prononcer la nullité du contrat du 29 décembre 2006,
- dire irrecevable et en tous cas mal fondée la société Expertises Galtier en toutes ses demandes,
- dire en toute hypothèse les pièces versées aux débats par la société Expertises Galtier postérieurement à la signification de leurs conclusions tardives et irrecevables,
- condamner la société à lui payer la somme de 6 000 euro sur le fondement de l' article 700 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est en date du 6 décembre 2012.
MOTIFS
Sur la nullité du contrat
Considérant que l' article L. 121-21 du Code de la consommation dispose qu'est soumis aux dispositions relatives au démarchage quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage, au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail, même à sa demande, afin de lui proposer l'achat, la vente, la location, la location-vente, la location avec option d'achat de biens ou la fourniture de services ;
Considérant que la copie du contrat intervenu le 29 décembre 2006 entre Madame Horvais et la société Expertises Galtier comporte la mention manuscrite "démarchage à domicile soumis aux obligations de la loi Scrivner résiliable de plein droit sous 7 jours sans pénalité" ;
Que cette clause fait la loi des parties, le moyen tiré par la société Expertises Galtier de ce que cette mention manuscrite n'est pas suivie de la signature des contractants étant inopérant ;
Qu'il est sans incidence que Madame Horvais ait elle-même pris attache avec la société, dès lors que la loi s'applique également dans le cas où le démarchage à domicile a été effectué à la demande du client ;
Considérant que le contrat est soumis aux dispositions d'ordre public régissant le démarchage à domicile ;
Considérant que le premier juge a pertinemment retenu que le contrat n'est pas conforme à ces dispositions en ce que les conditions d'exercice de la faculté de renonciation offerte au client ne sont pas précisées, que le texte intégral des articles L. 121-23 à L. 121-26 du Code de la consommation n'est pas reproduit et qu'aucun formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation n'est prévu ;
Qu'en outre, la société Expertise Galtier se prévaut de ce qu'elle a commencé sa mission dès le 2 janvier 2007 ; Qu'elle a ainsi commencé d'exécuter le contrat avant l'expiration du délai de 7 jours réservé à la rétractation du co-contractant ;
Considérant que le jugement qui a prononcé la nullité du contrat sera confirmé ;
Sur la demande en paiement de la société Expertises Galtier
Considérant que la nullité du contrat entraîne la remise des parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'exécution du contrat ;
Que dans les contrats de prestation de services la restitution en nature de la prestation est impossible ;
Que le prestataire peut prétendre à une indemnité correspondant à la valeur du travail fourni et à l'avantage retiré par le contractant ;
Considérant que le contrat étant annulé, ni la grille de calcul des honoraires ni la mention concernant une rémunération à 600 euro la demi-journée figurant au contrat, ne sont applicables ;
Considérant que devant le premier juge, la société Expertises Galtier avait produit au soutien de sa demande en paiement, la facture d'honoraires de 12 510,99 euro, en donnant pour seule explication qu'il s'agit de 4 % du montant de l'évaluation des dommages soit 13 374 euro moins l'avoir de 863 euro soit 12 510,99 euro, et le procès-verbal d'expertise du 6 juin 2007 ;
Que devant la cour la société Expertises Galtier a communiqué de nouvelles pièces 10 à 22 ;
Considérant que Madame Horvais, dans ses conclusions au fond du 23 décembre 2011, demande à la cour de dire que les pièces versées aux débats par la société Expertises Galtier postérieurement à la signification de ses conclusions, sont tardives et irrecevables sans préciser sur quelles dispositions elle se fonde ;
Qu'il ne sera pas donné suite à cette demande, étant de plus observé que Madame Horvais n'a pas déposé de conclusions d'incident à ce sujet ;
Considérant que le procès-verbal d'expertise du 10 mai 2007 mentionne qu'il est intervenu entre Monsieur Roux de Seri Bretagne, expert choisi par GMF, et Monsieur Lenfant du cabinet Galtier, expert choisi par Madame Horvais, à l'effet de procéder à l'estimation contradictoire des dommages causés par un incendie aux biens que la GMF avait assuré à Madame Horvais ;
Que ce procès-verbal, clos le 6 juin 2007, présente un tableau des dommages et conclut que l'indemnité totale pouvant incomber à la GMF sous réserve de son agrément est de 276 109 euro ;
Que la société Expertises Galtier fournit de nombreux devis ou documents, sans en-tête, chiffrant les dommages subis par l'immeuble de Madame Horvais, mais qu'elle ne démontre pas que ces devis, plans, photographies et estimations aient été établis par elle ou à la suite de ses démarches ;
Qu'au contraire, il résulte de ces pièces et de celles déposées au dossier par Madame Horvais que c'est elle-même ou Monsieur Bertin, économiste de la construction par elle mandaté, qui ont collecté une grande partie de ces documents ;
Que cependant, il y a lieu de tenir compte du temps passé par la société Expertises Galtier en réunions et rendez-vous préparatoires au procès-verbal d'expertise clos le 6 juin 2007, et des quelques courriers émanant de la société Expertises Galtier ;
Que la cour dispose des éléments lui permettant de fixer à 3 000 euro l'indemnisation de la société Expertises Galtier pour les dépenses par elle exposées dans l'intérêt de Madame Horvais ;
Que s'agissant d'une indemnité, les intérêts courront à compter du présent arrêt, conformément aux dispositions de l'article 1153-1 du Code civil ;
Considérant que la société Expertises Galtier ne caractérisant pas de résistance abusive de la part de Madame Horvais, elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;
Considérant que la condamnation prononcée par le premier juge au titre de l'article 700 du Code de procédure civile était justifiée et sera maintenue ;
Que pour la procédure d'appel, il sera dit n'y avoir lieu à application de ce texte ;
Que la société Expertises Galtier qui succombe sur une grande part de ses prétentions, sera condamnée aux dépens ;
Par Ces Motifs LA COUR Infirme le jugement déféré mais seulement en ce qu'il a débouté la société Expertises Galtier de sa demande en paiement ; Statuant à nouveau sur le chef infirmé ; Condamne Madame Marie Horvais à payer à la société Expertises Galtier la somme de 3 000 euro ; Y additant ; Déboute les parties de leurs autres demandes ; Condamne la société Expertises Galtier aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;