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Décisions

CA Versailles, 12e ch., 11 mars 2014, n° 13-07463

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Kar'express (SARL)

Défendeur :

DHL International Express (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Rosenthal

Conseillers :

Mmes Calot, Orsini

Avocats :

Mes Farge, Guerin, Coffy, Michel

T. com. Pontoise, du 12 sept. 2013

12 septembre 2013

Vu le jugement rendu le 12 septembre 2013 par le Tribunal de commerce de Pontoise qui a déclaré la société DHL international express recevable et bien fondée en son exception d'incompétence, s'est déclaré incompétent pour connaître du litige, a désigné, par application de l'article 96, alinéa 2, du Code de procédure civile, le Tribunal de commerce de Paris pour en connaître et a condamné la société Kar' express à payer à la société DHL international express la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu le contredit formé le 30 septembre 2013 par la société Kar' express, oralement soutenu à l'audience, aux termes duquel cette société demande à la cour de :

- dire et juger que le Tribunal de commerce de Pontoise est seul compétent pour connaître de ses demandes,

- rejeter l'exception d'incompétence soulevée à des fins dilatoires par la société DHL international express,

- condamner la société DHL international express à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu les conclusions du 19 décembre 2013 oralement soutenues à l'audience du 30 janvier 2014, par lesquelles la société DHL international express demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner la société Kar' express à lui payer, en cause d'appel, la somme complémentaire de 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et de la condamner aux dépens ;

Sur ce, LA COUR,

Considérant que, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé à la décision déférée ainsi qu'aux écritures des parties oralement soutenues ; qu'il sera seulement rappelé que :

- la société DHL international express (société DHL) propose des services de messagerie intégrés et sur mesure pour la gestion et le transport des lettres, marchandises et de l'information ;

- elle a développé un partenariat commercial avec la société Kar' express, société de messagerie express ;

- le 2 juin 2009, les deux sociétés ont signé un contrat de sous-traitance de transport, modifié par avenant du 4 janvier 2010 ;

- au mois de février 2012, la société DHL a rompu le contrat la liant à la société Kar'express ;

- par acte du 7 novembre 2012, la société Kar'express a assigné la société DHL devant le Tribunal de commerce de Pontoise en dommages-intérêts, d'une part, pour rupture abusive du contrat sur le fondement des articles 1134 et 1147 du Code civil et, d'autre part, "pour rupture brutale en raison de l'absence de préavis raisonnable", au visa de l'article L. 442-6-I 5° du Code de commerce, sollicitant, à ces titres, les sommes respectives de 270 000 euros et de 90 000 euros ;

- la société DHL a soulevé l'exception d'incompétence du Tribunal de commerce de Pontoise au profit du Tribunal de commerce de Paris au visa de l'article D. 442-3 du Code de commerce qui détermine les juridictions commerciales compétentes pour connaître du contentieux de l'article L. 442-6 du Code de commerce ;

- c'est dans ces circonstances qu'a été rendu le jugement entrepris qui a déclaré le Tribunal de commerce de Pontoise incompétent au profit du Tribunal de commerce de Paris ;

Sur l'exception d'incompétence

Considérant qu'à l'appui du contredit, la société Kar' express soutient que l'article 42 du Code de procédure civile qui dispose que la juridiction compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure la défendeur, pose un principe général de compétence et que les exceptions à ce principe doivent être interprétées de manière stricte ;

Qu'elle expose que sa principale demande est celle fondée sur le droit commun des contrats, pour laquelle elle réclame la somme de 270 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors qu'elle ne réclame que la somme de 90 000 euros sur le fondement de l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce ;

Qu'elle soutient que l'article D. 442-3 du Code de commerce qui donne compétence au Tribunal de commerce de Paris pour juger des actions en responsabilité délictuelle fondées sur l'article L. 442-6 du Code de commerce ne saurait faire obstacle à la compétence générale du Tribunal de commerce de Pontoise, telle qu'elle résulte de l'article 42 du Code de procédure civile, pour connaître de sa demande principale fondée sur le droit commun des contrats et de sa demande accessoire fondée sur l'article L. 442-6 du Code de commerce ; qu'elle affirme que l'interprétation faite par le tribunal de ces articles conduit à exclure la compétence de droit commun de tous les tribunaux de commerce pour tout litige relatif à la rupture de relations commerciales entre sociétés et que cette interprétation ne correspond ni à l'esprit du législateur ni au texte lui même qui ne vise que la brutalité de la rupture ;

Considérant que la société DHL oppose que l'article D. 442-3 du Code de commerce qui donne compétence à certains tribunaux de commerce pour juger des actions fondées sur l'article L. 442-6 du même Code est un texte spécial qui prévaut sur les règles de compétence de droit commun et que seul le Tribunal de commerce de Paris est au cas présent compétent pour statuer sur l'ensemble des demandes de la société Kar 'express ;

Considérant que les demandes de la société Kar' express reposent sur deux fondements juridiques distincts ; qu'une première demande est fondée sur le droit commun des contrats et recherche la responsabilité contractuelle de la société DHL pour rupture abusive du contrat tandis qu'une seconde demande est fondée sur l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce et met en cause la responsabilité délictuelle de la société DHL pour rupture brutale des relations établies ;

Que l'article D. 442-3 du Code de commerce dispose que, pour l'application de l'article L. 442-6 du même Code, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 du livre IV ; que selon ce tableau, le Tribunal de commerce de Paris est compétent pour le ressort de la Cour d'appel de Versailles ;

Que contrairement à ce que soutient la société Kar' express les juridictions commerciales citées à l'annexe ont une compétence exclusive pour connaître des litiges relatifs à la rupture brutale de relations commerciales établies ;

Que dès lors que la société Kar' express forme une demande sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce, seul le Tribunal de commerce de Paris est compétent pour connaître du litige, peu important le fait qu'une autre demande de la société Kar express ait un fondement contractuel, lequel aurait pu justifier la compétence du Tribunal de commerce de Pontoise ;

Qu'il en résulte que le tribunal a, à bon droit, accueilli l'exception d'incompétence soulevée par la société DHL, étant observé qu'aucune demande de disjonction n'a été formulée ;

Que le contredit n'est pas fondé et sera rejeté ;

Sur les autres demandes :

Considérant que le jugement doit être confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens ;

Qu'il y a lieu de faire partiellement droit aux prétentions de la société DHL au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, la demande de la société Kar'express sur ce même fondement étant rejetée ;

Par ces motifs : LA COUR, Statuant par arrêt contradictoire, Dit le contredit mal fondé et confirme le jugement du 12 septembre 2013 en toutes ses dispositions. Ajoutant au jugement, Condamne la société Kar' express à payer à la société DHL international express la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et rejette sa demande à ce titre ; Condamne la société Kar 'express aux frais du contredit.