CA Montpellier, 1re ch. A, 13 mars 2014, n° 11-08487
MONTPELLIER
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Groupama d'Oc
Défendeur :
Loubière Charpentes (EURL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Besson
Conseillers :
Mme Chiclet, M. Bertrand
Avocats :
Mes Argellies, Apollis, Senmartin, Rainero
PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Vu le jugement rendu le 30 septembre 2011 par le Tribunal de grande instance de Rodez qui a déclaré prescrite l'action en garantie légale des vices cachés de la compagnie Groupama d'Oc à l'encontre de l'EURL Loubière Charpentes, l'a déboutée de toutes ses demandes et condamnée au paiement de la somme de 1 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Vu l'appel régulièrement interjeté par la compagnie Groupama d'Oc ;
Vu ses conclusions du 9 mars 2012, prises au visa des articles 1251-3, 1147, 1792 et 1792-4 et 1641 du Code civil tendant à :
- à titre principal, confirmer le jugement en ce qu'il considère que les poutres fabriquées par la société Loubière ne sont pas des EPERS ; constater qu'elle a d'ores et déjà financé une indemnité de 37 364,11euro pour des désordres ; dire et juger que la compagnie Groupama est subrogée dans les droits du maître d'ouvrage et dans ceux de la société Vayssettes, que les poutres vendues par la Sarl Loubière Charpentes sont affectées d'une non-conformité contractuelle, et ne sont pas exemptes de vice, infirmer en conséquence le jugement en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité contractuelle de la société Loubière et la condamner à lui payer la somme de 37 364,11euro, à titre de dommages et intérêts ;
- à titre subsidiaire, constater que les poutres en lamellé collé vendues par la Sarl Loubière Charpentes à la Sarl Bruno Vayssettes sont affectées d'un vice caché lors de la vente et de nature à les rendre impropres à leur destination et qu'elle est responsable, sur le fondement de l'article 1641 du Code civil, des désordres litigieux, et que le point de départ du délai de prescription se situe à la notification du rapport d'expertise amiable, soit le 15 avril 2009 ; en conséquence, infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré son action prescrite et condamner la société Loubière à lui verser la somme de 37 364,11 euro ;
- en tout état de cause, la condamner à lui payer la somme de 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens ;
Vu les conclusions reçues de l'EURL Loubière Charpentes le 9 mai 2012, tendant à confirmer le jugement en déclarant forclose l'action en garantie des vices cachés ; subsidiairement, en cas de recevabilité, dire et juger que les poutres litigieuses constituent des EPERS et que la compagnie Groupama d'Oc doit garantir la SARL Loubière au titre de la garantie décennale, en cas de responsabilité de sa part ; sur la prétendue non conformité, confirmer le jugement ; subsidiairement, débouter la compagnie Groupama de toutes ses demandes ; la condamner à lui payer la somme de 2 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens ;
Vu l'ordonnance de clôture du 20 janvier 2014 ;
M O T I V A T I O N
Sur le FONDEMENT JURIDIQUE de l'ACTION
En droit :
Aux termes de l'article 1641 du Code civil, "le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus".
Lorsque la chose vendue est affectée d'un vice au sens de cet article, la garantie des vices cachés constitue l'unique fondement possible de l'action exercée par l'acheteur et ce, même si le vice constitue une non-conformité aux engagements contractuels.
Ce n'est que lorsqu'il est de moindre importance et ne répond pas aux critères légaux que l'acquéreur peut agir sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun de l'article 1147 du Code civil, soumise à la prescription quinquennale de l'article 2224.
En l'espèce :
Le rapport de la société Saretec établit que la cause des décollements et des fissurations des poutres en lamellé collé qui ont compromis la solidité de la piscine médicalisée et l'ont rendue inutilisable, réside dans un vice caché des poutres fabriquées par l'entreprise Loubière Charpentes. Il est donc certain que si l'entreprise Vayssettes en avait eu connaissance, elle ne les aurait pas achetées.
En conséquence, la garantie des vices cachés des articles 1641 et suivants du Code civil est l'unique fondement possible de l'action.
Sur l'ACTION en GARANTIE des VICES CACHES
Ainsi que le fait justement observer l'entreprise Loubière Charpentes, le délai de deux ans substitué au bref délai de l'article 1648 du Code civil par l'ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005 n'est pas applicable aux contrats conclus avant son entrée en vigueur. Le marché ayant été conclu au mois de novembre 2004, l'action résultant des vices rédhibitoires devait donc être engagée par la compagnie Groupama subrogée dans les droits de son assuré dans un bref délai à compter de la découverte du vice.
Compte tenu de ses termes parfaitement explicites, le rapport Saretec suffit à se convaincre du vice intrinsèque dont les poutres sont affectées.
Ce rapport a été clôturé le 21 mars 2008. Cependant, cette expertise ayant été commandée par l'assureur dommages ouvrage la MAIF, c'est celle-ci qui en a été destinataire. Par courrier du 1er avril 2008, elle a présenté ensuite à la compagnie Groupama sa demande en paiement.
Celle-ci en a alors tiré les conséquences en transmettant ce rapport le 4 avril 2008 à la société Loubière Charpentes et en lui écrivant que les dommages constatés sur les poutres en lamellé collé étaient consécutifs à un vice caché des produits vendus par elle à l'entreprise Vayssettes.
Dès lors, la connaissance certaine du vice par la société Groupama est nécessairement intervenue entre le 1er et le 4 avril 2008.
Elle ne rapporte aucune preuve de l'existence de pourparlers transactionnels de nature à entraîner une prorogation du bref délai.
Le rapport complémentaire qu'elle a cru devoir commander à la société Saretec et qui a été déposé le 15 avril 2009 ne présentait pas un intérêt particulier et n'a fait au demeurant que confirmer le précédent.
Dans ces circonstances, il ne peut être considéré que l'action en garantie des vices cachés engagée par assignation du 31 mars 2010 l'a été dans un bref délai.
Dès lors c'est à bon droit que le premier juge l'a déclarée prescrite.
Par ces motifs : LA COUR, Confirme le jugement déféré. Y ajoutant : Condamne la société Groupama d'Oc aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile, et à payer à l'EURL Loubière Charpentes la somme de 2 000 euro sur le fondement de l'article 700 du même Code.