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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 21 mars 2014, n° 12-05236

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Atlantic Climatisation et Ventilation (SAS)

Défendeur :

Airmat (EURL), Guérin (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Aimar

Conseillers :

Mmes Nerot, Renard

Avocats :

Mes Pelit-Jumel, De Marcellus, Borrel-Prat, Zafrani, Abello

TGI Paris, 3e ch. sect. 3, du 2 mars 201…

2 mars 2012

La société Airmat est spécialisée notamment dans la distribution et la fabrication de matériel de climatisation domestique. Elle fabrique entre autres des chaudières qui, associées à un matériel complémentaire, constituent des pompes à chaleur par aérothermie.

Elle a mis au point un dispositif comprenant deux circuits de circulation de fluide caloporteur et un système au sein d'un échangeur favorisant les échanges thermiques entre les deux fluides afin d'améliorer le rendement de la pompe à chaleur et est titulaire d'un brevet européen EP 1.403.608, déposé le 29 septembre 2003, sous priorité du brevet français FR 0211986 en date du 27 septembre 2002.

Ce brevet européen a été délivré le 2 avril 2008 et porte sur "un dispositif de climatisation".

La société Atlantic Climatisation et Ventilation (ci-après la société Atlantic) a pour activité la recherche, étude, fabrication et commerce de tout matériels et appareils à usage domestique ou industriel, notamment ceux destinés à la ventilation, climatisation et chauffage.

A compter de 2006, la société Atlantic a commercialisé sous la marque Atlantic des pompes à chaleur air/eau comprenant une unité intérieure ou pompe faisant office d'échangeurs fabriquée par la société Airmat et une unité extérieure ou groupe d'alimentation fournie par la société Fujitsu.

Aucun accord écrit formalisant les relations commerciales entre la société Atlantic et la société Airmat n'est intervenu.

La dernière commande de la société Atlantic à la société Airmat a été effectuée le 4 février 2008.

Le 19 juin 2008, la société Airmat a adressé une mise en demeure à la société Atlantic prenant acte de la cessation brutale des relations commerciales et sollicitant la cessation de la fabrication du système d'échangeur des unités intérieures reproduit dans le catalogue 2008 pour les produits Alfea qui constituerait la contrefaçon du brevet EP 1403608.

Par courrier du 21 juillet 2008, la société Atlantic indiquait avoir informé la société Airmat de ses intentions dès le mois de juillet 2007 de développer en interne des produits complémentaires aux produits Airmat qui lui garantiraient une baisse des prix et une gamme de produits plus large pour rester compétitive et soutenait que l'échangeur qu'elle commercialisait ne reproduisait pas les caractéristiques du brevet de la société Airmat, à savoir l'effet tourbillon induit par le tuyau coudé injectant le 2ème fluide caloporteur dans l'échangeur.

Par ordonnance en date du 10 septembre 2009, la société Airmat a été autorisée à procéder à une saisie-contrefaçon dans les locaux d'un établissement à l'enseigne "Cobatri", dépendant de la société Accueil Negoce Chauffage Sanitaire, offrant à la vente du matériel Atlantic "Alfea Inverter" ou "Alfea Duo Inverter" sous marque "Atlantic" incorporant le dispositif litigieux. La saisie-contrefaçon effectuée le 26 octobre 2009 a révélé que ce matériel était fabriqué par la société dénommée Societe Industrielle de Chauffage (SIC), spécialisée dans la fabrication de chaudières pour le chauffage central et filiale du groupe Atlantic.

C'est dans ces conditions que par actes d'huissier du 18 novembre 2009 la société Airmat a assigné devant le Tribunal de grande instance de Paris la Société Industrielle de Chauffage et la société Atlantic Climatisation et Ventilation en contrefaçon de son brevet, pour rupture fautive des relations commerciales et déloyauté commerciale.

Par jugement en date 2 mars 2012, le Tribunal de Grande Instance de Paris (3ème chambre 3ème section) a :

- prononcé la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 de la partie française du brevet EP 1.403.608 dont la société Airmat est titulaire pour insuffisance de description,

- ordonné la transcription du présent jugement, une fois devenu définitif, auprès du RNB tenu à l'INPI, à la requête de la partie la plus diligente,

- déclaré irrecevables les demandes en contrefaçon de brevet,

- dit que la société Atlantic a rompu brutalement, sans préavis, les relations commerciales qu'elle entretenait avec la société Airmat,

en conséquence,

- condamné la société Atlantic à payer à la société Airmat la somme de 4 235 414 euros en réparation du préjudice subi du fait de la rupture des relations commerciales,

- dit que la société Atlantic s'est rendue coupable de pratiques commerciales trompeuses,

En conséquence,

- condamné la société Atlantic à payer à la société Airmat la somme de 20 000 euros en réparation de son préjudice,

- déboute la société Airmat de sa demande à l'encontre de la société Industrielle De Chauffage,

- rejeté les demandes d'expertise,

- rejeté la demande de publication judiciaire,

- condamné la société Atlantic aux dépens de la présente instance, avec recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

- condamné la société Atlantic à payer à la société Airmat la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- rejeté la demande de la société Industrielle de Chauffage au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire partielle de la présente décision à hauteur de la somme de 1 500 000 euros.

La société Atlantic a formé appel de ce jugement le 20 mars 2012.

Par ordonnance en date du 5 septembre 2013 le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable l'appel provoqué par la société Airmat, Maître Sébastien Vigreux ès qualités d'administrateur judiciaire de ladite société et Maître Dominique Guérin ès qualités de mandataire judiciaire de ladite société formé à l'encontre de la société Industrielle de Chauffage (SIC) selon acte d'huissier en date du 9 janvier 2013 et condamné ces derniers à payer à la société Industrielle de Chauffage (SIC) la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'incident.

Par arrêt en date du 6 décembre 2013, la cour autrement composée a confirmé l'ordonnance du 5 septembre 2013 et, y ajoutant, a condamné la société Airmat, en la personne de ses représentants légaux ès qualités, à payer à la société Industrielle de Chauffage la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par dernières écritures signifiées par voie électronique le 14 janvier 2014, auxquelles il est expressément renvoyé, la société Atlantic demande à la cour, au visa des articles 132 et suivants du Code de procédure civile, 138 (1) a), b) et c) de la CBE, du Livre VI du Code de la propriété intellectuelle, des L. 442-6 5° du Code de commerce, L. 112-6 et L. 121 du Code de la consommation, 143 et suivants, 232 et suivants du Code de procédure civile, et de l'arrêt du 6 décembre 2013 de la Cour d'appel de Paris, de :

à titre principal,

- déclarer irrecevables les demandes à l'encontre de la société SIC,

- prononcer la nullité du procès-verbal de constat dressé par Maître Philippe Adrillon le 26 décembre 2012 ainsi que la vidéo qui en constitue l'annexe et, en conséquence, l'écarter des débats,

- confirmer le jugement du Tribunal de grande instance de Paris rendu le 2 mars 2012 en ce qu'il a :

- prononcé la nullité de la revendication 1 et des revendications dépendantes 2, 3, 4, 5, 6 et 7 de la partie française du brevet EP 1 403 608 dont la société Airmat est titulaire,

- ordonné la transcription du jugement, une fois devenu définitif, auprès du RNB tenu à l'INPI à la requête de la partie la plus diligente,

- déclaré irrecevables les demandes en contrefaçon de brevet,

- débouté la société Airmat de sa demande contre la Société Industrielle de Chauffage,

- débouté la société Airmat de ses demandes d'expertise et de publication judiciaire de la décision, y ajoutant en tant que de besoin,

- dire et juger que la partie française du brevet EP 1 403 608 est nulle en application de l'article 138 (1) b) et c) CBE pour insuffisance de description et extension de son objet au-delà du contenu de la demande,

- dire et juger que les revendications 1 à 7 de la partie française du brevet européen, EP1 403 608 sont nulles pour défaut d'activité inventive,

- ordonner la transcription de l'arrêt auprès du RNB tenu à l'INPI à la requête de la partie la plus diligente,

- débouter la société Airmat de toutes ses demandes en contrefaçon à son encontre comme étant, si ce n'est irrecevables, à tout le moins mal fondées,

- infirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'elle a rompu brutalement, sans préavis, les relations commerciales qu'elle entretenait avec la société Airmat, dit qu'elle s'est rendue coupable de pratiques commerciales trompeuses, et l'a condamnée à payer à la société Airmat la somme de 4 235 414 euros en réparation du préjudice subi du fait de la rupture des relations commerciales et la somme de 20 000 euros en réparation de son préjudice pour pratiques commerciales trompeuses,

en conséquence,

- dire et juger que la société Airmat ne justifie d'aucune rupture brutale de ses relations commerciales avec la société Atlantic Climatisation et Ventilation,

- dire et juger qu'elle n'a pas commis d'actes de publicité mensongère et de concurrence déloyale,

- dire et juger que la société Airmat ne démontre pas le préjudice qu'elle prétend avoir subi,

- débouter la société Airmat de toutes ses demandes à son encontre,

à titre subsidiaire,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser à la société Airmat la somme de 4 235 414 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales,

- en conséquence, dire et juger que le montant de la condamnation prononcée à son encontre pour rupture brutale des relations commerciales ne saurait être supérieur à un montant de 188 000 euros,

- infirmer le jugement en ce qu'il a l'a condamnée à verser à la société Airmat la somme de 20 000 euros pour pratiques commerciales trompeuses,

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande de voir désigner un expert afin de fournir les éléments nécessaires à l'évaluation du préjudice de la société Airmat au titre de la rupture brutale des relations commerciales,

- ordonner avant dire droit la désignation d'un expert afin de fournir les éléments nécessaires à l'évaluation du préjudice de la société Airmat tant au titre de la rupture brutale des relations commerciales qu'au titre des actes argués de contrefaçon,

en tout état de cause,

- condamner la société Airmat à lui verser la somme de 150 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Airmat aux entiers dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Par dernières écritures signifiées par voie électronique le 10 janvier 2014, auxquelles il est également expressément renvoyé, la société Airmat et Maître Dominique Guérin, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de redressement de ladite société, nommé à cette fonction par jugement rendu le 4 décembre 2013 par le Tribunal de commerce de Bayonne, et intervenant volontaire à la procédure, demandent à la cour de :

- réformer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 de la partie française du brevet EP 1.403.608 dont elle est titulaire, pour insuffisance de description et déclaré irrecevables les demandes en contrefaçon de brevet,

- réformer en toutes ses dispositions le jugement sur ce point,

- écarter des débats tous les documents en langues étrangères n'ayant pas fait l'objet d'une traduction intégrale, notamment les pièces adverses 6 à 8

et en conséquence,

- dire et juger que la partie française du brevet EP 1 403 608 est valable,

- la dire et juger, en conséquence, recevable et bien fondée en son action en contrefaçon,

à titre subsidiaire,

- prononcer la nullité partielle de la revendication 1 et la limiter à "un dispositif de climatisation dans lequel les dimensions du réservoir et notamment son diamètre sont adaptées pour obtenir un phénomène d'agitation satisfaisant" et la renvoyer devant l'INPI pour limiter le brevet en conséquence,

- dire et juger que la société Atlantic se rend coupable d'actes de contrefaçon en reproduisant les revendications 1 à 7 du brevet EP 1 403 608,

- ordonner, en conséquence, la cessation de tous les actes de contrefaçon sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, l'astreinte commençant à courir cinq jours après la signification du jugement à intervenir,

- interdire sous la même astreinte à la société Atlantic de fabriquer ou faire fabriquer, importer, commercialiser les pompes à chaleur, objet du litige et, plus généralement, tout dispositif contrefaisant le brevet EP 1.403.608,

- condamner la société Atlantic à lui verser la somme de 200 000 euros au titre du préjudice moral résultant de l'atteinte à ses droits privatifs,

- condamner la société Atlantic à lui verser, à titre provisionnel, la somme de 20 millions d'euros au titre du fait du préjudice commercial subi du fait des actes de contrefaçon ou, à tout le moins, la somme de 396.680 euros sur la base des seules ventes consenties à la société Accueil Negoce/Cobatri,

- ordonner à la société Atlantic et à toute personne qui a été trouvée en possession de produits contrefaisants, notamment la société Industrielle de Chauffage (SIC), de lui communiquer, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard passé un délai de 30 jours à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir :

a) Les nom et adresse des producteurs, fabricants, distributeurs, fournisseurs et autres détenteurs antérieurs des produits contrefaits, ainsi que des grossistes destinataires et des détaillants,

b) Les quantités produites, commercialisées, livrées, reçues ou commandées, ainsi que sur le prix obtenu pour les produits contrefaits, dont les bénéfices indus réalisés par la société Atlantic en raison de l'exploitation des dispositifs argués de contrefaçon, et notamment les documents comptables indiquant l'étendue des actes de contrefaçon précités commis depuis temps non prescrit, en indiquant précisément :

- les livraisons individuelles (avec présentation des factures et des bons de livraison) indiquant :

- les quantités livrées, les dates de livraison et les prix,

- les marques des produits pertinents et tous les éléments d'identification des produits, tels que la désignation, le nom de l'article et le numéro de série du produit,

- les nom et adresse des clients des sociétés Atlantic et Societe Industrielle De Chauffage (SIC),

- les offres individuelles (avec présentation des offres écrites) indiquant :

- les quantités offertes, les dates et les prix,

- les marques des produits pertinents et tous les éléments d'identification des produits, tels que la désignation, le nom de l'article et le numéro de série du produit,

- les nom et adresse des clients des défenderesses (sic),

- les coûts par produit conformément aux différents facteurs et les bénéfices réalisés,

- les noms et adresses des fabricants, fournisseurs et autres détenteurs antérieurs, accompagnés à chaque fois de la mention des quantités de produits fabriquées, reçues et commandées,

- ordonner la destruction de l'intégralité des stocks détenus, ainsi que le retrait des produits déjà vendus des réseaux de distribution, sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard passé un délai de quinze jours à compter de la date de la signification de l'arrêt à intervenir,

- subsidiairement, dire et juger, en cas de confirmation de la nullité du brevet, qu'en reproduisant les caractéristiques originales du dispositif mis au point par la société Airmat après avoir mis fin aux relations commerciales, la société Atlantic s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale,

- condamner en conséquence la société Atlantic à indemniser le préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale de ce chef en lui allouant à la somme de 705 000 euros à titre de provision, le solde de la réparation devant être déterminé à dire d'expert,

- réformer le jugement sur le montant du préjudice alloué en réparation des actes de concurrence déloyale et de publicité trompeuse perpétrés à son préjudice et condamner la société Atlantic à lui verser la somme de 200 000 euros,

- ordonner à titre de réparation complémentaire la publication aux frais de la société Atlantic, de l'arrêt à intervenir dans deux journaux de son choix et ce dans une limite de 5 000 euros hors taxes maximum par insertion,

- débouter la société Atlantic de toutes ses demandes et fins de non-recevoir,

- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que la société Atlantic a rompu brutalement sans préavis les relations commerciales qu'elle entretenait avec elle,

- confirmer en conséquence le jugement en ce qu'il a condamné la société Atlantic à réparer le préjudice subi de ce chef du fait de la rupture des relations commerciales,

- porter à la somme de 5 542 992 euros les sommes allouées en réparation du préjudice subi,

- et subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Atlantic à lui payer la somme de 4 235 414 euros au titre du préjudice subi du fait de la rupture des relations commerciales ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a constaté que la société Atlantic s'est rendue coupable de pratiques commerciales trompeuses et d'actes de concurrence déloyale et l'a condamnée à indemniser le préjudice subi,

en toute hypothèse,

- condamner la société Atlantic à lui verser la somme de 200 000 euros en raison de la tardiveté et de la déloyauté de la fin de non-recevoir soulevée pour la première fois le 18 décembre 2013, veille de la clôture, après 4 ans de procédure,

- condamner la société Atlantic à verser la somme de 130 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Atlantic aux dépens, dont distraction au profit de son conseil. L'ordonnance de clôture a été prononcée le 16 janvier 2014.

SUR CE,

Sur les demandes formées à l'encontre de la société Industrielle de Chauffage (SIC)

Considérant que les demandes formées à l'encontre de la société Industrielle de Chauffage (SIC), notamment la demande de communication de pièces, doivent être déclarées irrecevables, cette dernière n'étant pas partie à la procédure ;

Sur le rejet des pièces

Considérant que la société Airmat sollicite le rejet des débats tous les documents en langues étrangères n'ayant pas fait l'objet d'une traduction intégrale, notamment les pièces adverses 6 à 8 ;

Que toutefois le défaut de traduction intégrale n'est pas une cause de rejet desdites pièces qui restent opposables à la société appelante en ce qui concerne leurs parties traduites et en tout état de cause soumises à l'appréciation de la cour en tant que telles ;

Sur la portée du brevet EP 1403608

Considérant que l'invention concerne un dispositif de climatisation, de préférence réversible et destiné aux maisons d'habitation ;

Que la partie descriptive rappelle que selon l'art antérieur, il existe deux familles de dispositifs de climatisation ;

Qu'il est précisé que les dispositifs de la première famille comprennent des moyens susceptibles de refroidir un fluide caloporteur circulant dans un circuit alimentant un ou plusieurs échangeurs disposés à l'intérieur de l'habitation, mais que cette solution a pour inconvénient l'absence de possibilité de réglage indépendant des échangeurs, que les dispositifs de le seconde famille plus souple d'utilisation, permettent de pallier cet inconvénient, et comprennent à cet effet un premier circuit dans lequel circule un fluide caloporteur refroidi par un groupe à froid disposé à l'extérieur qui alimente un premier échangeur, un deuxième circuit dans lequel circule grâce à une pompe un deuxième fluide caloporteur, en général de l'eau, susceptible d'être refroidi en traversant le premier échangeur et de refroidir l'eau présente dans le réservoir, et un troisième circuit relié au réservoir dans lequel circule l'eau susceptible de traverser des échangeurs disposés dans les différentes pièces de l'habitation. Dans ce cas, le troisième circuit permet de régler les échangeurs de manière différente tout en ayant un régime constant au niveau du premier circuit, mais cette solution nécessite une installation complexe et coûteuse, mal adaptée au marché de l'habitat ;

Considérant que le but de l'invention est de proposer un dispositif de climatisation de conception simple, adapté au marché de l'habitat et procurant un fonctionnement souple ;

Que pour ce faire, l'invention a pour objet un dispositif de climatisation comprenant un premier circuit dans lequel circule un premier fluide caloporteur, des moyens pour refroidir ou/et chauffer le premier fluide, ainsi qu'un second circuit dans lequel circule un second fluide caloporteur, traversant au moins un échangeur et comportant un réservoir dans lequel une portion du premier circuit est disposée, caractérisé en ce qu'il comprend des moyens de mesure de la température du second fluide caloporteur, de manière à réguler le fonctionnement des moyens de refroidissement ou de chauffage du premier fluide, ainsi que des moyens d'agitation du second fluide caloporteur dans le réservoir permettant un meilleur échange entre lesdits premier et second fluides ;

Qu'il est ajouté que de préférence la portion de premier circuit disposée dans le réservoir se présente sous la forme d'un serpentin, et avantageusement le premier fluide caloporteur est du fréon et le second de l'eau ;

Considérant que la partie descriptive développe, par ailleurs, un exemple de réalisation de l'invention ;

Considérant que le brevet se compose à cette fin de 7 revendications, qui sont toutes invoquées, et dont la teneur suit :

1. Dispositif de climatisation comprenant un premier circuit dans lequel circule un premier fluide caloporteur, comportant des moyens pour refroidir ou/et chauffer le premier fluide, ainsi qu'un second circuit dans lequel circule un second fluide caloporteur, traversant au moins un échangeur et comportant un réservoir dans lequel une portion dudit premier circuit disposée, caractérisé en ce qu'il comprend des moyens de mesure de la température du second fluide caloporteur, de manière à réguler le fonctionnement des moyens de refroidissement et/ou de chauffage du premier fluide, ainsi que des moyens d'agitation du second fluide caloporteur dans le réservoir permettant un meilleur échange entre lesdits premier et second fluides.

2. Dispositif selon la revendication 1, caractérisé en ce que la portion du premier circuit disposée dans le réservoir se présente sous la forme d'un serpentin.

3. Dispositif selon l'une des revendications 1 ou 2, caractérisé en ce que les moyens d'agitation sont réalisés par des moyens d'infection du second fluide caloporteur dans le réservoir, le second circuit débouchant dans ledit réservoir sous forme d'un coude.

4. Dispositif selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que le premier fluide caloporteur est du fréon.

5. Dispositif selon l'une quelconque des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que le second fluide caloporteur est de l'eau.

6. Dispositif selon l'une quelconque des revendications 1 à 5, caractérisé en ce qu'il comprend des moyens de chauffage du second fluide caloporteur disposés dans le réservoir.

7. Dispositif selon l'une quelconque des revendications 1 à 6, caractérisé en ce qu'une partie d'un troisième circuit dans lequel circule un troisième fluide caloporteur, notamment de l'eau destiné à alimenter un chauffe-eau, est disposé à l'intérieur du réservoir ou au niveau de sa ou ses parois de manière à permettre un échange thermique entre les second et troisième fluides caloporteurs.

Sur la validité du brevet européen n° 1403608

Considérant que la société Airmat fait grief au jugement d'avoir prononcé la nullité des revendications 1 à 7 du brevet dont elle est titulaire, lui reprochant en premier lieu d'avoir dit que la notion de "flux tourbillonnant et perturbé" n'est pas pertinente et compréhensible par l'homme du métier et d'avoir considéré que le brevet ne comportait pas d'indication portant sur la façon de mettre en œuvre l'invention ;

Que se prévalant tant de l'encyclopédie Wikipedia et du dictionnaire Petit Robert 2002 que de la figure 3 du brevet et des conclusions d'un rapport d'expertise amiable réalisé à sa demande par Monsieur Woog, elle fait valoir que la notion de flux tourbillonnant est parfaitement établie pour l'homme du métier et fait partie de ses connaissances générales ;

Que se référant au même rapport de Monsieur Woog selon lequel "si le flux n'est pas laminaire, l'homme du métier en déduit que le flux perturbé fait référence à un flux turbulent", elle ajoute que la référence à un flux "perturbé" est également compréhensible de l'homme du métier, le brevet spécifiant que l'objectif de l'agencement mis en œuvre est de ne pas avoir un flux laminaire à l'intérieur du réservoir ;

Qu'elle ajoute que le brevet divulgue suffisamment d'indications quant à un diamètre adapté du réservoir pour permettre à un homme du métier de réaliser l'invention, qu'un "diamètre adapté pour obtenir une agitation satisfaisante" signifie implicitement que le réservoir présente une section circulaire, et que la caractéristique "h" signifie également que le diamètre du réservoir doit être adapté aux dimensions de la portion d'hélice, le mot "adapté" signifiant que le diamètre doit être choisi de façon à ce que le flux sortant de la portion d'hélice soit tangent à la paroi du réservoir pour permettre de générer un flux tourbillonnant, pour en déduire que l'homme du métier comprend, à la lecture du brevet et notamment de sa figure 2, que s'il choisit une portion d'hélice avec un faible diamètre d'enroulement, alors ladite portion d'hélice doit être placée dans un réservoir de petit diamètre et non dans un grand réservoir, à défaut de quoi, l'effet escompté, c'est-à-dire l'obtention d'un flux tourbillonnant significatif par rapport au volume du réservoir, n'est pas obtenue ;

Qu'elle poursuit en indiquant que le brevet permet de calculer un exemple de diamètre adapté, notamment au vu des figures 1 à 3 et des données numériques exposées dans le paragraphe 26 qui donne un exemple de diamètre de réservoir permettant d'obtenir un flux tourbillonnant ; que proposant à la cour des formules mathématiques, elle fait valoir enfin que, sur la base des enseignements de la description et des figures, l'homme du métier est en mesure de déduire des valeurs de diamètre d'un réservoir et que c'est à tort que le tribunal a considéré que le brevet ne présentait pas d'indication portant sur la façon de mettre en œuvre l'invention et en particulier ne présentait pas d'indication quant au diamètre du réservoir ;

Qu'elle sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté la société Atlantic de sa demande de nullité de la revendication 1 pour extension de l'objet au-delà de la demande en relevant, sur le premier moyen de nullité, que la demande ne mentionnait, dès l'origine, aucun autre type de dimension à adapter, en dehors du diamètre, pour parvenir au phénomène recherché de sorte que l'objet du brevet n'a pas été étendu au-delà de la demande, et sur le second, d'une part, que la caractéristique que la société Atlantic associe à l'existence d'un orifice unique ne contribue pas à l'effet recherché et n'est donc pas lié de manière fonctionnelle à celle-ci, et, d'autre part, que ces deux caractéristiques ne sont pas présentées en combinaison, mais séparées, dans la demande de brevet ;

Qu'enfin elle fait valoir qu'aucun des documents de l'art antérieur ne divulgue la création d'un flux tourbillonnant à l'intérieur d'un réservoir afin d'améliorer les échanges thermiques entre un premier circuit de fluide caloporteur, en partie disposé à l'intérieur dudit réservoir et un second circuit débouchant dans ledit réservoir et qu'en outre, ce flux tourbillonnant découle de l'éjection du fluide dans le réservoir via un orifice situé à l'extrémité d'une partie du second circuit décrivant une portion d'hélice, et qu'un tel agencement n'est pas non plus divulgué dans un des documents de l'art antérieur.

Qu'elle conclut ainsi à la validité de la revendication 1 du brevet et des revendications 2 à 7 placées dans sa dépendance ;

Considérant que la société Atlantic, après avoir réfuté les arguments de la société Airmat sollicite quant à elle la confirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du brevet Airmat n° 1403608 pour insuffisance de description des revendications 1 à 7 sur le fondement de l'article 138 (1) b) de la CBE ; qu'elle invoque en outre comme motif de nullité du brevet l'extension de son objet au-delà de la demande sur le fondement de l'article 138 (1) c) de la CBE, en analysant à ce titre uniquement la revendication 1, et l'absence d'activité inventive des revendications 1 à 7 sur le fondement des articles 138 (1) a) et 56 de la CBE ;

a) Sur la validité de la revendication 1

Sur l'insuffisance de description

Considérant qu'aux termes de l'article 138-1-b) de la CBE, le brevet européen peut être déclaré nul par les tribunaux d'un État contractant s'il n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter ;

Qu'ainsi, l'invention doit être mise en œuvre au prix d'un effort raisonnable par l'homme du métier, et compte tenu également de ses connaissances générales ;

Qu'en l'espèce les parties s'accordent à considérer que l'homme du métier est un spécialiste de la conception des dispositifs de climatisation et de chauffage ;

Qu'il est constant que l'objet du brevet porte sur les moyens d'obtenir au sein du réservoir un "flux tourbillonnant et perturbé" afin de favoriser les échanges thermiques entre les premier et second fluides, et que la revendication 1 indique dans sa partie caractérisante que "le réservoir (a) un diamètre adapté pour obtenir un phénomène d'agitation satisfaisant" ;

Or la description ne donne aucune information ni aucun indice qui permettrait à l'homme du métier de savoir ce qu'est un diamètre "adapté" pour obtenir un phénomène d'agitation "satisfaisant" tel que revendiqué ;

Que le brevet ne mentionne aucune dimension du réservoir, ce qui obligera l'homme du métier, ainsi que l'ont relevé les premiers juges à observer l'effet du diamètre du réservoir sur le flux à partir d'expériences avec des réservoirs ayant des diamètres différents, le terme "adapté" étant particulièrement vague et imprécis pour permettre à l'homme du métier de savoir quelle réalité technique il recouvre ;

Que la description ne mentionne pas plus le débit ni la forme de l'orifice d'éjection ni l'agencement de l'orifice d'éjection par rapport au réservoir alors que si les termes "flux tourbillonnant" et "perturbé" peuvent avoir une signification en langue française, ces notions, appliquées au domaine considéré, ne font pas partie des références techniques de l'homme du métier, étant précisé que le brevet ne renseigne pas plus sur les notions de flux - laminaires, transitoires et/ou turbulents - qui sont pourtant connues et quantifiables ;

Que la société Atlantic indique à juste titre que les termes employés ne permettent donc pas à l'homme du métier de reproduire l'invention et que la société Airmat ne peut affirmer que par des essais de routine, ce dernier déterminerait rapidement et simplement le rapport optimum à observer entre le diamètre du réservoir et la taille de l'hélice pour aboutir au meilleur rendement dès lors qu'il n'est pas démontré qu'il aurait eu cette connaissance ;

Que, par ailleurs, le terme satisfaisant ne donne aucune indication technique pour réaliser l'invention alors que cette caractéristique, présentée comme essentielle par le brevet, a pour but de faciliter les échanges thermiques par un phénomène d'agitation ; que la description ne fournit pas plus de fourchette de valeur ou d'exemples permettant de déterminer à partir de quelle valeur, le phénomène d'agitation serait satisfaisant de sorte que l'homme du métier ne peut donc pas plus déterminer la portée du brevet ;

Considérant, en définitive, que le fait que l'homme du métier comprenne, avec ses connaissances, que le réservoir est circulaire, le brevet ne le renseigne en rien sur la taille du diamètre pour qu'il soit adapté afin obtenir un phénomène d'agitation satisfaisant, et rien n'indique a priori la direction du flux dans le réservoir ;

Qu'enfin la société Airmat ne peut déduire des figures 1 à 3 du brevet un rapport entre la hauteur et le diamètre du réservoir et donc la taille de celui-ci dès lors que les schémas ne sont pas cotés et qu'aucun exemple de réalisation ne suggère un quelconque ordre de grandeur ;

Considérant que le brevet EP n° 1403608 est donc insuffisamment décrit au sens de l'article 138 (1) b) de la CBE et c'est donc à juste titre que le tribunal a annulé la revendication 1 pour ce motif ;

Que le jugement sera donc confirmé de ce chef sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de nullité de la revendication 1 qui sont surabondants ;

Que la nullité affectant la revendication 1 dans son ensemble, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande subsidiaire contenue dans les dernières écritures de la société Airmat et tendant à voir limiter cette revendication ;

b) sur la validité des revendications dépendantes

Considérant que les revendications 2 à 7 sont toutes dépendantes de la revendication 1 ;

Que la société Airmat reproche au tribunal d'avoir prononcé la nullité de ces revendications pour insuffisance de description alors que les motifs de la décision en analyse la brevetabilité ;

Que la société Atlantic, sans énoncer ici de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement sur ce point ; qu'elle est donc réputée s'approprier les motifs du tribunal ;

Que toutefois, il a été dit que le tribunal n'a pas analysé la validité des revendications dépendantes par rapport à l'insuffisance de description ;

Que faute d'argument en ce sens de la part de la société Atlantic, le moyen de nullité pour ce motif ne peut prospérer et sera donc rejeté ;

Considérant qu'il y a lieu en conséquence d'analyser la validité des revendications dépendantes au regard de l'activité inventive dont l'absence est ensuite invoquée par la société Atlantic ;

Considérant que selon l'article 138 (1) a) CBE "Sous réserve des dispositions de l'article 139, le brevet européen ne peut être déclaré nul, avec effet pour un état contractant, que si l'objet du brevet européen n'est pas brevetable aux termes des articles 52 à 57" ;

Que l'article 56 de la CBE dispose qu'"une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique" ;

Or, en l'espèce, la revendication 2 porte sur un "dispositif selon la revendication 1, caractérisé en ce que la portion du premier circuit disposée dans le réservoir se présente sous la forme d'un serpentin" alors que la société Atlantic justifie que les échangeurs constitués d'un premier circuit sous la forme d'un serpentin sont commercialisés depuis 1985 ;

Que la revendication 3 porte sur un "dispositif selon l'une des revendications 1 ou 2, caractérisé en ce que le premier fluide caloporteur et le second fluide caloporteur ont des flux à contre-courant" alors que l'échange à contre-courant est utilisé dans la plupart des échangeurs de chaleur performants quelle que soit leur technologie ;

Que les revendications 4 et 5 portent sur un "dispositif selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que le premier fluide caloporteur est du fréon" et un "dispositif selon l'une quelconque des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que le second fluide caloporteur est de l'eau" alors que la description du brevet mentionne dans l'art antérieur l'utilisation de ces deux fluides ;

Que la revendication 6 porte sur un "dispositif selon l'une quelconque des revendications 1 à 5, caractérisé en ce qu'il comprend des moyens de chauffage du second fluide caloporteur disposés dans le réservoir" et reprend le principe du chauffage électrique dans un ballon, connu de l'art antérieur et utilisé par la société Atlantic depuis au moins 1980 ;

Que la revendication 7 du brevet porte sur un "dispositif selon l'une quelconque des revendications 1 à 6, caractérisé en ce qu'une partie d'un troisième circuit dans lequel circule un troisième fluide caloporteur, notamment de l'eau destiné à alimenter un chauffe-eau, est disposé à l'intérieur du réservoir ou au niveau de sa ou ses parois de manière à permettre un échange thermique entre les second et troisième fluides caloporteurs" alors qu'il est justifié par la production d'une documentation commerciale de 1979 des chaudières Guillot, que des dispositifs composés de trois fluides, le deuxième chauffant le troisième fluide circulant dans le serpentin réchauffeur disposé à l'intérieur du réservoir de la chaudière ;

Considérant dès lors que l'homme du métier, tel que ci-dessus défini, sera amené au vu de ces éléments antérieurs à réaliser de manière évidente un dispositif de climatisation comportant les caractéristiques revendiquées ;

Que les revendications 2 à 7 doivent donc être annulées pour défaut d'activité inventive ;

Que le brevet étant annulé l'action en contrefaçon ne peut prospérer et la société Airmat sera déboutée de l'ensemble de ses demandes formées de ce chef ainsi que de toutes ses demandes afférentes, y compris celle en paiement de la somme de 200 000 euros formée à l'encontre de la société Atlantic "en raison de la tardiveté et de la déloyauté de la fin de non-recevoir soulevée pour la première fois le 18 décembre 2013, veille de la clôture, après 4 ans de procédure" dès lors que cette demande se rapporte à l'imputabilité des actes de contrefaçon ;

Que, par ailleurs, il n'y a pas lieu de se prononcer sur la validité du procès-verbal de constat d'huissier réalisé le 26 décembre 2012 à la demande de la société Airmat ni "de la vidéo qui en constitue l'annexe", ce procès-verbal et ses annexes étant opposés comme moyens de preuve de la contrefaçon alléguée ;

Sur la concurrence déloyale et/ou le parasitisme

Considérant que la société Airmat, visant l'article 1382 du Code civil, forme à titre subsidiaire devant la cour, et en douze lignes dont quatre évoquent une décision de la Cour de cassation de 2007, une demande en concurrence déloyale et/ou en parasitisme ;

Que toutefois, cette demande qui tend à voir dire que la société Atlantic a commis une faute en reproduisant le principe de fonctionnement spécifique et original (sic) de son ancien fournisseur est, ainsi que le relève la société Atlantic dans ses écritures, formée pour la première fois en cause d'appel ;

Qu'elle doit donc, en application de l'article 564 du Code de procédure civile, être déclarée irrecevable ;

Sur la rupture des relations commerciales

Considérant que la société Atlantic fait grief aux premiers juges de l'avoir condamnée à payer à la société Airmat la somme de 4 235 414 euros en réparation du préjudice subi du fait de la rupture, en l'absence de préavis, des relations commerciales qu'elle entretenait avec la société Airmat, alors que, selon elle :

- d'une part, les relations entre les parties, qui ont consisté sur une période de 21 mois en plusieurs commandes faisant chacune l'objet de contrats indépendants, représentant sur toute la période 3 800 produits achetés, n'ont jamais fait l'objet d'un contrat-cadre garantissant une quelconque exclusivité ou un quelconque engagement de chiffre d'affaires à la société Airmat, et que la précarité de cette organisation contractuelle ne garantissait nullement aux parties la certitude d'une relation commerciale continue et perpétuelle, chaque partenaire restant libre de déterminer sa politique commerciale de sorte que ces commandes ne peuvent donc revêtir le caractère de relations habituelles et stables au sens des dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce,

- d'autre part, au cours des 21 mois, les parties n'ont jamais manifesté leur volonté réciproque de voir perdurer leurs relations et sont restées libres l'une et l'autre de leurs choix d'investissements, disposant chacune de solutions techniquement et économiquement équivalentes leur permettant d'anticiper de façon prévisible et sereine la fin de la relation, de sorte que la fin de cette relation ne peut donc constituer une rupture brutale au sens des dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

Qu'elle ajoute que la société Airmat a délibérément choisi de privilégier des investissements injustifiés décidés de son seul chef, ajoutés à l'effondrement du marché de la pompe à chaleur, qui, eux seuls, ont pu causer le préjudice qu'elle allègue, et qu'ainsi la fin des relations commerciales avec elle est sans aucun lien avec ce prétendu préjudice ;

Que sur le préavis, elle fait valoir que le tribunal "s'est trompé" sur la durée de celui-ci en le fixant à trois mois et en le doublant aux motifs que les produits en cause sont des produits vendus sous "marque de distributeur" ; qu'elle ajoute que la très courte durée des relations entre les parties, l'existence de solutions alternatives pour redéployer son activité, les volumes d'achat des produits concernés justifient que le délai de préavis soit fixé à deux mois ;

Que sur le montant des dommages et intérêts alloués, elle indique que celui-ci est disproportionné et quasi punitif représentant près de 21 % de son chiffre d'affaires des ventes de pompes à chaleur aérothermiques réalisé pendant les 21 mois de relations avec Airmat ;

Que se fondant sur les dispositions de l'article L. 442-6-I-5° du Code du commerce la société Airmat sollicite la confirmation du jugement qui a retenu que la société Atlantic, qui n'a pas respecté l'exigence de préavis imposé par la loi, a rompu brutalement ses relations commerciales avec elle lui causant de ce fait un préjudice correspondant au bénéfice qu'elle aurait réalisé pendant la durée du préavis, soit de mars à août 2008 ;

Qu'elle entend cependant voir porter l'indemnité à ce titre à la somme de 5 542 992 euros calculée sur la base de 1 755 unités majorées d'un coefficient d'évolution du marché de 3,36 % et d'une marge brute de 940 euros par chaudière ;

Considérant ceci exposé, que selon l'article L. 442-6-I-5° du Code du commerce précité, "engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers du fait de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'Economie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure" ;

Qu'en l'espèce, les relations commerciales entre la société Airmat et la société Atlantic ont commencé en mai 2006 et ont cessé en mars 2008, date des dernières livraisons ;

Qu'en 2006, les commandes passées par la société Atlantic au titre des sept derniers mois de l'année ont représenté un total de 900 machines, soit une moyenne de 128 par mois, représentant 16 % des machines vendues par la société Airmat, et en 2007, les commandes ont atteint un total de 2 685 appareils soit une moyenne de 224 par mois représentant 44 % des machines vendues en 2007 par la société Airmat, soit 32 % de son chiffre d'affaires ;

Qu'au mois de juillet 2007, un prévisionnel établi par la société Atlantic envisageait une commande de 1 960 appareils sur les 6 derniers mois de l'année ;

Qu'enfin, dans le cadre de ce partenariat commercial, la société Airmat a mis en œuvre une procédure de demande de certification NF PAC pour le produit conçu pour le compte d'Atlantic, a déposé le 16 janvier 2008 auprès de l'association Certita une demande de droit d'usage de la marque NF Pac pour la gamme Atlantic et a réglé le 29 février suivant la redevance correspondant au titre de l'usage de la marque pour l'année à venir 2008 ;

Que, cependant, les commandes ont cessé au mois de mai 2008 et postérieurement à cette date, soit le 21 juillet 2008, la société Atlantic adressait un courrier à la société Airmat dans lequel elle explique la rupture des relations entre les parties ;

Qu'il résulte de ces éléments que la société Atlantic entretenait avec la société Airmat une relation commerciale établie depuis mai 2006 et jusqu'au mois de mars 2008, date de la dernière livraison, laquelle relation n'est conditionnée ni par un écrit ni par l'existence d'un échange permanent et continu entre les parties, et que, par ailleurs, les parties avaient la volonté de voir perdurer cette relation, ce à quoi la société Airmat pouvait en tout cas légitiment croire ;

Que cette croyance légitime pour la société Airmat quant à la poursuite des relations résulte au surplus des termes d'un courriel que lui a adressé le 22 juin 2006 la société Atlantic, qui a pour objet "le point sur (nos) prévisions de commande et dernières discussions", qui indique au paragraphe "notre collaboration" qu'"une réunion sera organisée pour faire un premier bilan de (nos) premiers mois de collaboration et réfléchir ensemble à l'avenir à court et à moyen terme" et envisage des "développements communs ultérieurs" quant à des essais, prévoyant enfin une formation de cinq salariés d'Atlantic par Airmat ;

Qu'ainsi, en rompant de manière brutale, sans préavis écrit, auquel ne saurait être assimilé le prévisionnel de juillet 2007, les relations commerciales établies avec la société Airmat, la société Atlantic a engagé sa responsabilité et doit réparer le préjudice subi par la société Airmat ;

Considérant que compte tenu de la durée des relations commerciales, soit 22 mois, et de la nature des produits en cause, la durée du préavis qu'aurait dû raisonnablement respecter la société Atlantic sera fixée à deux mois, et il n'y a pas lieu de doubler cette durée car les produits en cause n'ont pas été fournis sous marque de distributeur puisqu'ils ne constituent qu'un composant du produit fini ;

Que le préjudice subi par la société Airmat résulte du caractère brutal de la rupture, et non pas de la rupture elle-même de sorte que cette dernière n'est pas fondée à réclamer une indemnisation résultant du coût des investissements réalisés ;

Qu'il correspond à la marge brute à laquelle la société Airmat aurait pu prétendre sur une durée de deux mois à compter du mois de mars 2008, et ce sans qu'il y ait lieu d'appliquer à ce montant un coefficient tenant compte de l'évaluation du chiffre d'affaires d'Airmat entre 2007 et 2008 réalisé avec ses autres clients ;

Qu'ainsi, en considération du nombre de pompes à chaleur vendues sur la période antérieure de mars et avril 2007, à laquelle il convient de se référer, et d'une marge brute de 940 euros HT par unité vendue, qui n'est contredite par aucun élément contraire, le préjudice effectivement subi par la société Airmat correspond à 200 produits x 940 euros = 188 000 euros, somme au paiement de laquelle sera condamnée la société Atlantic ;

Qu'il convient en conséquence de réformer le jugement dont appel quant au montant de l'indemnité allouée ;

Sur les pratiques commerciales trompeuses

Considérant qu'à ce titre la société Airmat reproche à la société Atlantic, sur le fondement de l'article L. 121-1 du Code de la consommation, d'avoir affiché dans sa documentation commerciale, de fausses performances quant aux produits Alfea S16 et Alfea S10 ;

Que, cependant, la société Atlantic fait justement valoir que ces actes, à les supposer établis, ne peuvent lui être imputés, seule la Société Industrielle de Chauffage (SIC), qui n'est pas dans la cause, commercialisant les produits de marque Atlantic, et étant de ce fait susceptible d'être responsable des informations qu'elle fait figurer dans les catalogues qu'elle édite et diffuse ;

Que dès lors le grief ne peut prospérer à l'encontre de la société Atlantic, seule partie à la procédure ;

Sur les autres demandes

Considérant que la société Atlantic, partie perdante, supportera la charge des dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Qu'en outre, il serait inéquitable de laisser à la société Airmat la charge de la totalité des frais irrépétibles et il convient de lui allouer la somme de 40 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, Dit n'y a voir lieu à rejeter des débats les pièces n° 6 à 8 de la société Atlantic Climatisation et Ventilation. Déclare irrecevables les demandes dirigées à l'encontre de la Société Industrielle De Chauffage (SIC). Confirme le jugement rendu entre les parties le 2 mars 2012 en ce qu'il a prononcé la nullité de la revendication 1 de la partie française du brevet EP 1 403608 pour insuffisance de description et dit que la société Atlantic Climatisation et Ventilation a rompu brutalement, sans préavis, les relations commerciales qu'elle entretenait avec la société Airmat. L'infirme pour le surplus, et statuant à nouveau, Prononce la nullité des revendications 2 à 7 de la partie française du brevet EP 1 403608 pour défaut d'activité inventive. Dit que le présent arrêt sera transcrit à l'Institut National de la Propriété Industrielle par le Greffier préalablement requis par la partie la plus diligente aux fins d'inscription au Registre National des Brevets. Déboute la société Airmat de l'ensemble de ses demandes relatives à la contrefaçon. Déclare irrecevables les demandes subsidiaires de la société Airmat en concurrence déloyale et parasitaire. Condamne la société Atlantic Climatisation et Ventilation à payer à la société Airmat la somme de 188 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la rupture brutale des relations commerciales. Déboute la société Airmat de sa demande relative aux pratiques commerciales trompeuses. Déclare sans objet ou mal fondé le surplus des demandes. Condamne la société Atlantic Climatisation et Ventilation à payer à la société Airmat la somme de 40 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile. Condamne la société Atlantic Climatisation et Ventilation aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.