Livv
Décisions

CA Montpellier, 2e ch., 25 mars 2014, n° 12-09635

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Kracher

Défendeur :

Mondo Deco (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bachasson

Conseillers :

MM. Chassery, Prouzat

Avocats :

Mes Sollier, Pepratx Negre, d'Alimonte-Bonnet, Steva-Touzery

T. com. Montpellier, du 26 nov. 2012

26 novembre 2012

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :

Par acte sous seing privé du 15 avril 2008, la société Mondo Déco a conclu avec Johnny Kracher un contrat d'agent commercial à durée indéterminée pour la commercialisation de ses produits (des décorations de pâtisseries et décors de table) auprès de divers clients (bars, glaciers, restaurants, salons de thé, boulangeries, pâtisseries, GMS hors groupe Casino, grossistes pour les décors pâtisserie à l'exclusion de tout autre commerce), dans un secteur géographique correspondant aux départements 67, 68, 90, 54, 57 et 88, à titre exclusif.

La rémunération de l'agent commercial a été fixée contractuellement à 20 % sur les articles classés au tarif de la catégorie n° 1 et à 10 % sur les articles classés au tarif de la catégorie n° 2.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 13 octobre 2009, reçue le 16 octobre suivant, la société Mondo Déco a notifié à M. Kracher la résiliation à effet immédiat du contrat d'agence aux motifs que du 2 mai 2008 au 31 décembre 2008, le chiffre d'affaires de son secteur avait enregistré une baisse de 7 700 euro HT par rapport à la même période en 2007, que le montant des ventes sur les neuf premiers mois de l'année 2009 était en très faible hausse de 1 490 euro HT et que le nombre de commandes de décors de noël était nulle de la part de la clientèle des hypermarchés, tandis que les commandes des autres clients étaient comprises entre 10 et 40.

Par acte du 11 mars 2011, M. Kracher a fait assigner la société Mondo Déco devant le Tribunal de commerce de Montpellier en paiement de la somme de 10 394,81 euro au titre de l'indemnité de rupture prévue à l'article L. 134-12 du Code de commerce et à l'article 7 du contrat.

Le tribunal, par jugement du 26 novembre 2012, a constaté la déchéance du droit à réparation de M. Kracher et condamné celui-ci au paiement de la somme de 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

M. Kracher a régulièrement relevé appel de ce jugement en vue de sa réformation.

Il demande à la cour (conclusions reçues par le RPVA le 30 janvier 2013) de condamner la société Mondo Déco à lui payer la somme de 10 394,81 euro en principal, avec intérêts de droit à compter du 29 juillet 2010, outre les sommes de 1 500 euro à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de son appel, il fait essentiellement valoir que :

- il n'encourt aucune déchéance de son droit à réparation, dès lors que par courrier du 29 juillet 2010, son conseil a réclamé à la société Mondo Déco le paiement de l'indemnité de rupture et qu'un courrier de relance, visant le courrier du 29 juillet 2010, effectivement reçu par la société, a été adressé à celle-ci le 10 septembre 2010, soit dans l'année suivant la cessation du contrat,

- la lettre de rupture, qui ne précise pas quels manquements à ses obligations contractuelles il aurait commis, se borne à faire référence au seul chiffre d'affaires, alors qu'il n'est pas démontré une insuffisance d'activité de sa part, ni une absence de démarchage de la clientèle,

- il ne peut ainsi lui être imputé de faute grave, privative de l'indemnité de rupture.

La société Mondo Déco conclut, pour sa part, à la confirmation du jugement ; subsidiairement, elle demande que M. Kracher soit débouté de l'intégralité de ses prétentions, la résiliation de son mandat d'agent étant justifié par une faute grave privative de l'indemnité ; elle sollicite enfin l'allocation de la somme de 2 500 euro en remboursement de ses frais irrépétibles (conclusions reçues par le RPVA le 25 mars 2013).

Elle soutient que :

- M. Kracher ne lui a adressé aucune demande de versement de l'indemnité de rupture dans le délai d'un an suivant la résiliation de son contrat d'agent commercial, la lettre du 29 juillet 2010 n'ayant pas été réceptionnée par elle et celle du 10 septembre 2010 ne faisant pas mention d'une demande en paiement de l'indemnité compensatrice de clientèle,

- en toute hypothèse, ses agissements sont constitutifs d'une faute grave privative de l'indemnité de l'indemnité compensatrice au sens de l'article L. 134-13, dès lors qu'il est établi, par les pièces produites, une absence de prospection, de sa part, de la clientèle de son secteur, à l'origine d'une baisse du chiffre d'affaires observée au cours des années 2008 et 2009.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 28 janvier 2014.

MOTIFS de la DECISION :

Il résulte des dispositions combinées des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce, que sauf faute grave, l'agent commercial a droit, en cas de cessation de ses relations avec le mandant, à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi, mais qu'il perd le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits.

La notification, que doit faire l'agent commercial, à peine de déchéance de son droit, dans l'année suivant la cessation de la relation contractuelle, n'est soumise à aucun formalisme particulier, mais doit manifester, de façon expresse, la volonté de celui-ci de réclamer une indemnité de fin de contrat ou de contester le montant proposé par le mandant.

En l'occurrence, M. Kracher a, par l'intermédiaire de son conseil, adressé, le 9 juin 2010, un courrier recommandé à la société Mondo Déco, reçu le 14 juin, la mettant en demeure de lui régler la somme de 2 157,57 euro au titre d'un arriéré de commissions, objet d'une facture en date du 21 avril 2010 ; ce courrier, dans lequel il est simplement indiqué que M. Kracher se réserve également de mettre en compte l'indemnité compensatrice prévue à l'article 7 du contrat ne peut être regardé comme manifestant sans équivoque la volonté de l'intéressé de réclamer le paiement d'une indemnité de fin de contrat.

M. Kracher se prévaut ensuite de deux courriers simples, l'un du 29 juillet 2010, réclamant clairement le paiement d'une indemnité de 10 394,81 euro compensatrice du préjudice consécutif à la résiliation du contrat, outre le montant de sa facture de commissions, l'autre du 10 septembre 2010, se plaignant d'un défaut de réponse à la lettre du 29 juillet et menaçant la société Mondo Déco d'une assignation en justice en l'absence de règlement dans le délai de huit jours des montants dus, sans autre précision ; s'il est établi, par les télécopies envoyées le 14 septembre 2010 à 14 h 29 et 15 h 33 au cabinet Wurth et associés, conseil de M. Kracher, que la société Mondo Déco a effectivement reçu le courrier du 10 septembre 2010, dont la copie est ainsi retournée à ce cabinet d'avocats, accompagné de la copie du chèque de 2 118,12 euro adressé, le 7 septembre 2010, à M. Kracher en règlement de sa dernière facture de commissions, tel n'est pas le cas du courrier du 29 juillet 2010 réclamant, de façon expresse, le paiement d'une indemnité de fin de contrat de 10 394,81 euro ; rien ne permet dès lors d'affirmer que la société Mondo Déco a bien reçu, contrairement à ce qu'elle prétend, le courrier simple du 29 juillet 2010, manifestant l'intention de M. Kracher de réclamer une indemnité de fin de contrat, et que la réclamation de celui-ci a donc été faite dans le délai d'un an suivant la cessation de la relation contractuelle, expirant le 16 octobre 2010.

C'est ainsi à juste titre que le premier juge a considéré que M. Kracher, dont l'assignation n'avait été délivrée que par acte du 11 mars 2011, se trouvait déchu de son droit à réparation ; le jugement entrepris doit, dans ces conditions, être confirmé dans toutes ses dispositions.

Succombant sur son appel, M. Kracher doit être condamné aux dépens, ainsi qu'à payer à la société Mondo Déco la somme de 1 000 euro au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, Confirme dans toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de commerce de Montpellier en date du 26 novembre 2012, Condamne M. Kracher aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la société Mondo Déco la somme de 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Dit que les dépens d'appel seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même Code.