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Décisions

CA Nîmes, 1re ch. civ., 24 octobre 2013, n° 12-00170

NÎMES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Energie Solaire Voltaico (SARL), Roussel (ès qual.)

Défendeur :

Cornilleau, Groupe Sofemo (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bruzy

Conseillers :

Mme Hebrard, M. Berthet

Avocats :

SCP Gras-Diard, SCP Marion Guizard Patricia Servais, SCP La Sade Clusan, SCP Curat Jarricot, Me Hilaire-Lafon

TGI Avignon, du 13 déc. 2011

13 décembre 2011

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 13 janvier 2012, la SARL Énergie Solaire Voltaico a régulièrement relevé appel d'un jugement rendu le 13 décembre 2011 par le Tribunal de grande instance d'Avignon ayant :

- au visa des articles L. 121-21, L. 121-23, L. 121-24 du Code de la consommation, vu les irrégularités du contrat intervenu par démarchage le 10/12/2008 entre la SARL Energie Solaire Voltaico et les époux Cornilleau, prononcé la nullité du dit contrat,

- vu la nullité du contrat principal, l'article L. 121-26 du Code la consommation et les manquements de la société Sofemo dans l'établissement du contrat de crédit du 10/12/2008, prononcé la nullité du dit contrat de crédit ;

- condamné en conséquence la société Energie Solaire Voltaico à payer aux époux Cornilleau la somme de 27 000 euro, au titre de l'indu résultant de la nullité du contrat ainsi que celle de 2 000 euro à titre des dommages et intérêts ;

- ordonné le démontage de l'installation photovoltaïque par la société Energie Solaire Voltaico, qui démontera le matériel mis en place et remettra les lieux en état initial, sous astreinte de 50 euro par jour de retard à l'expiration d'un délai de 3 mois à compter de la signification du présent jugement,

- condamné la SA Sofemo à paver aux époux Cornilleau la somme de 795.35 euro indûment versée, après nullité du contrat de prêt et celle de 1 000 euro à titre de dommages et intérêts ;

- dit que les condamnations ci-avant prononcées en principal en dommages et intérêts porteront intérêts au taux légal à compter du jour de l'assignation ;

- condamné in solidum la SA Sofemo et la SARL Energie Solaire Voltaico à payer aux époux Cornilleau la somme de 2 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- débouté la SARL Energie Solaire Voltaico de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- débouté la SA Sofemo de sa demande subsidiaire aux fins que le vendeur relève et garantisse l'emprunteur du remboursement du prêt et des dommages et intérêts ainsi que de sa demande formée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamné la SARL Energie Solaire Voltaico et la SA Sofemo in solidum aux entiers dépens avec distraction au profit de l'avocat des époux Cornilleau.

Par acte huissier du 19 octobre 2012 Monsieur Daniel Cornilleau et Madame Claudine Masselin, son épouse ont assigné devant la cour avec signification de leurs conclusions, Maître Bernard Roussel, désigné en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Énergie Solaire Voltaico par le Tribunal de commerce d'Avignon dans son jugement du 11 avril 2012 ayant prononcé la liquidation de cette dernière société.

Dans ses dernières conclusions du 11 mars 2013 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de ses moyens et arguments, maître Bernard Roussel, ès qualités sollicite la cour au visa des dispositions des articles 1116, 1184 et 1338 alinéa 2 du Code civil , de le dire recevable et bien fondé en son appel, en conséquence d'infirmer le jugement déféré, et statuant à nouveau de débouter les époux Cornilleau de toutes leurs demandes et de les condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de son conseil ainsi qu'à lui payer la somme de 3 000 euro en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans leurs écritures en réplique auxquelles il est également explicitement renvoyé,

"les époux Cornilleau concluent le 26 février 2013" avec justification de la production de leur créance à la liquidation judiciaire de la SARL Energie Solaire Voltaico faite par RPVA le 8 mars 2013 - à la recevabilité de la SARL Energie Solaire Voltaico de son appel mais à son mal fondé, au prononcé, après constat des manquements de cette société au droit de la consommation et du dol commis à leur préjudice, de la nullité du contrat du 10 décembre 2008, en conséquence à l'inscription au passif de la liquidation de la SARL Energie Voltaico par Maître Roussel. es qualités de la somme de 27 000 euro au titre de la répétition de l'indu liée à la nullité du contrat ou à sa résolution, ainsi que de celle de 6 000 euro au titre des désagréments causés par la déficience du matériel et la perturbation au quotidien qu'ils ont subie, enfin, au visa des articles L. 312 1 et suivants du Code de la consommation ainsi que 1315 et suivants du Code civil, après constat que la société Sofemo ne justifie pas leur avoir fait une offre préalable régulière, que l'offre produite démontre au contraire tant la violation des dispositions afférentes aux mentions obligatoires qu'au délai de réflexion, à la nullité du contrat de crédit et en conséquence à la condamnation de Sofemo à leur rembourser la somme de 795,35 euro versée soit 540 euro de frais de dossier et 255,35 euro indûment prélevés, ainsi qu'à leur payer la somme de 4 000 euro à titre de dommages et intérêts, lesdites sommes portant intérêts au taux légal à compter de l'assignation valant mise en demeure, tenant son comportement déloyal et le manquement à son obligation de conseil, enfin à la condamnation de Sofemo aux entiers dépens et à leur payer la somme de 3 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

"la SA Sofemo conclut le 22 juin 2012 et le12 mars 2013 pour notification à Maître Bernard Roussel. ès qualités, déposée le 18 mars 2013, à l'infirmation de la décision entreprise et statuant à nouveau, au débouté des époux Cornilleau de toutes leurs demandes formées à son encontre et reconventionnellement à leur condamnation solidaire à lui verser la somme de 2 401,15 euro arrêtée au 4 août 2009 outre les intérêts conventionnels ayant continué à courir depuis cette date jusqu'au jour de l'arrêt avec capitalisation, et ceux-ci étant condamnés aux entiers dépens distraits au profit de leur conseil, à la somme de 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'instruction de la procédure a été clôturée par ordonnance du 19 mars 2013 à effet au 6 juin 2013.

SUR CE

La fiche d'appel communiquée aux débats par l'appelante révèle que monsieur Daniel Cornilleau a appelé l'entreprise le 28 novembre 2008 à la suite d'une "promo" et que rendez-vous a été pris à son domicile pour le 8 décembre 2008. Le contrat de vente a été conclu deux jours plus tard, le 10 décembre 2008. au Thor, au domicile des époux Cornilleau.

Une telle opération publicitaire par l'insertion dans un journal ou par la distribution en boîte aux lettres de documents publicitaires non personnalisés par laquelle une société sollicite un client en lui annonçant

une promotion sur certains produits ou matériaux particulièrement ciblés suivie, même à la demande de ce client, d'une visite à domicile d'un agent commercial pour offrir des prestations de services doit être assimilée à une opération de démarchage à domicile. Le fait que cette première visite à domicile n'ait consisté qu'en des pourparlers au cours desquels aucun engagement n'a été contracté par les époux Cornilleau n'exclut pas l'application des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation à la vente finalisée deux jours plus tard, au domicile de ces mêmes clients.

Le contrat conclu le 10 septembre 2008 fait expressément référence aux articles L. 121-23 à L. 121-26 du Code de la consommation qui protège l'intégrité de la personne démarchée.

Le tribunal a donc à bon droit appliqué à la vente conclue le 10 septembre 2008 entre la SARL Energie Voltaico et les époux Cornilleau les articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation relatifs à la protection des consommateurs en matière de démarchage et vente à domicile.

Maître Roussel, liquidateur de la SARL Energie Voltaico ne conclut pas devant la cour sur le non-respect dans le contrat de vente des mentions prescrites à peine de nullité par l'article L. 121-23 du Code de la consommation.

Comme le tribunal, la cour ne peut que constater que les exigences de l'article L. 122-23 du Code de la consommation ne sont pas remplies dès lors que les caractéristiques du matériel vendu sont imprécises, les modalités et les délais de livraison omis, le mode de paiement et de financement non spécifiés et par suite, les acheteurs ayant recours à un crédit, le taux nominal et le taux effectif global non mentionnés, enfin, le formulaire de rétractation non détachable.

Tenant l'absence de ces mentions, alors qu'une seule d'entre elle suffit, le contrat de vente du 10 septembre 2008 est nul.

La méconnaissance des dispositions de la loi est certes sanctionnée par une nullité relative. Cependant la Cour ne peut déduire tel la SARL Energie Voltaico du seul fait que les époux Cornilleau ont laissé le contrat s'exécuter sans y mettre fin en engageant l'action en nullité, leur volonté d'en poursuivre l'exécution, alors même que la confirmation d'une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d'un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l'obligation et l'intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l'époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée. Il n'est pas en l'espèce caractérisé l'une ou l'autre de ces conditions.

La nullité du contrat de vente souscrit le 10 septembre 2008 par les époux Cornilleau sera donc confirmée.

Le prêt du 10 décembre 2008, d'un montant de 27 000 euro a été contracté auprès de la SA Sofemo par les époux Cornilleau pour le financement de l'installation des panneaux photovoltaïques sur le toit de leur habitation. La vente de cette installation est donc intervenue à l'égard de particuliers qui se sont présentés dans la fiche des renseignements afférents au prêt comme étant pré-retraité pour le mari et animatrice commerciale pour l'épouse. L'installation vendue devait leur permettre d'améliorer leur bien immobilier par la production de leur propre électricité. Les mentions de l'offre préalable de prêt du 10 décembre

2008 revêtue de la signature du prêteur corroborent cette affectation puisqu'il y est coché que le prêt a pour objet l'amélioration de l'habitat. La seule circonstance que partie de l'électricité produite puisse être revendue à EDF, ainsi que l'affirme Sofemo sans au demeurant la moindre preuve, ne suffit pas à conférer aux époux Cornilleau la qualité de professionnels et c'est à juste titre que les premiers juges ont décidé que le prêt souscrit par eux était régi par les dispositions des articles L. 312-2 et suivants du Code de la consommation.

En application des dispositions combinées des articles L. 312-12 du Code de la consommation et 1184 du Code civil, l'annulation de la vente de panneaux solaires, entraîne en raison de son effet rétroactif, l'annulation de plein droit du contrat de prêt souscrit pour assurer le financement de l'installation des dits panneaux.

C'est donc à juste titre que les premiers juges ont également annulé le prêt en conséquence de l'annulation de la vente principale.

La nullité du contrat emporte effacement rétroactif du contrat.

En conséquence de l'annulation de la vente, la SARL Energie Voltaico doit rembourser le prix qui lui a été versé par Sofemo pour le compte des époux Cornilleau et corrélativement les époux Cornilleau doivent restituer l'ensemble photovoltaïque vendu.

En conséquence de l'annulation du prêt, les époux Cornilleau doivent restituer le capital de 27 000 euro reçu de Sofemo et versé directement pour leur compte à la SARL Energie Voltaico.

Les époux Cornilleau - Masselin ont le 4 août 2009 remboursé à la SA Sofemo qui le reconnaît la somme de 27 000 euro et déclaré leur créance à l'encontre de la SARL Energie Voltaico entre les mains de maître Bernard Roussel, liquidateur de ladite société, par lettre recommandée avec avis de réception signé de son destinataire le 30 mai 2012 à hauteur de 27 000 euro au titre de la nullité du contrat et 6 000 euro à titre de dommages et intérêts.

La SA Sofemo a par contre encaissé la somme de 795, 35 euro prélevée sur le compte des emprunteurs au titre des frais de dossier et d' un prélèvement qu'elle se doit de rembourser aux époux Cornilleau, augmentée des intérêts au taux légal depuis la date de l'assignation valant mise en demeure.

Du fait de sa liquidation judiciaire prononcée le 11 avril 2012, aucune condamnation à paiement ni obligation de faire ne peut être mise à la charge de la SARL Energie Voltaico. Maître Roussel. ès qualités inscrira au passif de la liquidation de la société la créance des époux Cornilleau à hauteur de 27 000 euro, lesquels restitueront l'ensemble photovoltaïque sans que puisse être mise à la charge de maître Roussel, ès qualités une quelconque obligation de démontage, au surplus, sous astreinte.

Du fait de l'annulation du contrat de prêt la SA Sofemo n'est pas fondée à solliciter l'application des conditions générales du contrat et plus particulièrement des clauses relatives au paiement par anticipation de l'emprunteur. Cette société ne peut qu'être déboutée de sa demande en paiement de la somme de 2 401,15 euro dirigée à l'encontre des époux Cornilleau.

Les premiers juge ont bien apprécié le préjudice subi par les époux Cornilleau du fait des désagréments liés à l'annulation de la vente imputable à la SARL Energie Voltaico et le montant de la réparation d'un tel préjudice à hauteur de 2 000 euro. Maître Roussel. ès qualités, inscrira au passif de la liquidation de la SARL Energie Voltaico cette créance des époux Cornilleau à hauteur de 2 000 euro ;

Ces derniers ne démontrent pas avoir été victimes de malversations de la part de la société Sofemo, n'étant pas rapportés en preuve autrement que par voie d'affirmation un taux nominal du crédit et un taux effectif global usuraire tel que prétendu, le différé de remboursement du crédit à 270 jours ayant été contractuellement prévu, le financement ayant été débloqué sur une attestation de livraison signée des deux époux Cornilleau datée du 4 mars 2009 et d'une bonne fin des travaux du chantier photovoltaïque, datée du 5 mars 2009 signée de monsieur Cornilleau qui a porté en observations "RAS. Très belle installation malgré le temps. Equipe soudée et motivée...", enfin, un tel paiement ne caractérisant aucunement un manquement à l'obligation de conseil.

Quant aux irrégularités du contrat elles sont sanctionnées pour l'inobservation des règles de forme par la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et pour la méconnaissance du délai d'acceptation de dix jours, par la nullité du contrat de prêt.

Les époux Cornilleau seront donc déboutés de leur demande en paiement de dommages et intérêts formée à l'encontre de la SA Sofemo.

Par ces motifs LA COUR Après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, en matière civile, contradictoirement et en dernier ressort, Déclare recevable l'appel formé par la SARL Energie Voltaico ; Confirme la décision déférée en ce qu'elle a prononcé la nullité du contrat de vente intervenu le 10 décembre 2008 entre la SARL Energie Voltaico et les époux Cornilleau, la nullité du contrat de crédit intervenu le même jour entre la SA Sofemo et les époux Cornilleau et condamné la SA Sofemo à payer aux époux Cornilleau la somme de 795,35 euro avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 28 avril 2010; Réforme pour le surplus ; Statuant à nouveau, Fixe la créance de monsieur Daniel Cornilleau et de madame Claudine Masselin son épouse, à la liquidation judiciaire de la SARL Energie Voltaico à : - la somme de 27 000 euro au titre de restitution du prix du contrat de vente du 10 décembre 2008, - la somme de 2 000 euro à titre de dommages et intérêts ; Dit que les époux Cornilleau devront restituer simultanément les panneaux photovoltaïques ; Déboute les parties de toutes leurs autres demandes ; Emploie les dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de liquidation judiciaire ; Accorde à la SCP Curat-Jarricot le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile. Dit n'y avoir lieu à application du bénéfice des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile