CA Bordeaux, 1re ch. civ. B, 14 novembre 2013, n° 12-02309
BORDEAUX
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Kephalianos
Défendeur :
Le Carre Thoiras (SCI), Patrimoines de France (SARL), BNP Paribas Personal Finance (SA), CNP Assurances (SA), CNP IAM (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cheminade
Conseillers :
Mmes Fourniel, Bowie
Avocats :
Mes Ghinsberg, Riviere, Chapeau, Larue, Selarl Patricia Matet-Combeaud, SCP Claire Le Barazer, Laurène d'Amiens, SCP Emmanuel Joly - Carolina Cuturi-Ortega
EXPOSE DU LITIGE
Selon acte authentique en date du 20 septembre 2005, Mme Olga Kephalianos a acquis en l'état futur d'achèvement auprès de la SCI Le Carré Thoiras, moyennant le prix de 156 520 euros, un appartement T3, deux places de parking couvert et une place de parking aérien constituant les lots n° 78, 315, 316 et 240 d'un ensemble immobilier dénommé "L'Ecrin du Périgord" en cours de construction à Trelissac (Dordogne), après avoir signé le 20 décembre 2004 un contrat de réservation portant sur ce bien, lequel a été livré le 26 septembre 2006.
Cette acquisition a été intégralement financée au moyen d'un prêt consenti par la BNP Paribas Invest Immo, devenue la BNP Paribas Personal Finance, dont le remboursement en cas de décès et de perte totale et irréversible d'autonomie était garanti par une police d'assurance groupe souscrite auprès des compagnies CNP Assurances et CNP IAM.
Mme Kephalianos, estimant avoir été trompée à l'occasion de cette opération patrimoniale et de défiscalisation, a fait assigner la SCI Le Carré Thoiras, la SARL Patrimoines de France, qui avait commercialisé les lots de cet ensemble immobilier, la BNP Paribas Personal Finance, la SA CNP Assurances et la SA CNP Iam, sur le fondement des articles 1116 et 1382 du Code civil, L 111-1 du Code de la consommation et L 341-12-4° du Code monétaire et financier, en annulation de la vente avec toutes conséquences de droit, et en paiement de dommages et intérêts.
Suivant jugement en date du 3 avril 2012, rectifié par jugement du 13 avril 2012, le Tribunal de grande instance de Périgueux a au visa de l'article 30 5° du décret du 4 janvier 1955 relatif à la publicité foncière, déclaré irrecevables les demandes présentées par Mme Olga Kephalianos, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de Mme Kephalianos, de la SCI Le Carré Thoiras, de la SARL Patrimoine de France, de la SA BNP Paribas Personal Finance, de la SA CNP Assurances et de la SA CNP IAM, et a condamné Mme Kephalianos aux dépens de l'instance.
Mme Olga Kephalianos a interjeté appel de ces deux jugements par déclarations du 18 avril 2012 et du 31 mai 2012.
Ces deux instances ont été jointes le 17 juillet 2012.
Aux termes de ses dernières conclusions remises le 6 novembre 2012, Mme Kephalianos demande à la cour de :
- constatant l'existence d'un dol manifeste, d'un manquement au devoir d'information et de conseil, ainsi que d'un non-respect des dispositions impératives du Code de la consommation et du Code de la construction et de l'habitation, ayant entaché la formation du contrat de réservation et du contrat de vente immobilière,
- prononcer la nullité de l'acte de vente conclu entre la SCI Le Carré Thoiras et elle-même, reçu par Me Jean-René Latour le 20 septembre 2005, enregistré et publié à la conservation des hypothèques de Périgueux le 28 octobre 2005, Volume 2005 P N° 8043 ;
- condamner en conséquence la SCI Le Carré Thoiras à lui rembourser le prix de vente dudit immeuble, soit la somme de 156 520 euros, et dire que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la demande en justice, avec capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ;
- dire qu'elle ne devra restituer les biens immobiliers en cause qu'après le règlement des sommes mises à la charge de la SCI Le Carré Thoiras et de la SARL Patrimoines de France ;
- dire et juger que les loyers ainsi que les indemnités de carence locative perçus resteront au bénéfice de la concluante de même que l'avantage fiscal dont elle aurait joui, à titre de dommages et intérêts complémentaires ;
- dire que pour le cas où une procédure collective serait ouverte à l'encontre de la SCI Le Carré Thoiras, même postérieurement à la décision à intervenir mais avant que le remboursement du prix ait été intégralement opéré, seule interviendra la réduction du prix de l'immeuble ci-dessus considéré à hauteur de son prix de marché à l'époque de la survenance de cet événement ;
- constatant qu'ont participé ou profité du dol ou encore ont failli à leur devoir de renseignement le promoteur et les mandataires commerciaux,
- condamner in solidum la SCI Le Carré Thoiras et la SARL Patrimoines de France à lui payer la somme provisoirement arrêtée au 1er novembre 2012 à 90 835,75 euros à titre de dommages et intérêts ;
- dire qu'à ce montant s'ajoutera, sur présentation de justificatifs, l'ensemble des frais et des manques à gagner supportés par l'acquéreur en raison de l'opération immobilière, et ce, jusqu'à l'exécution des condamnations, ces frais comprenant notamment les intérêts versés au titre du contrat de prêt, les primes du contrat d'assurance lié au prêt, les frais de gestion immobilière (honoraires de gestion du bien, charges de copropriété, primes du contrat d'assurance de loyers), ou encore le montant de la taxe foncière et d'une manière générale, tous accessoires qui seraient alloués à l'une quelconque des parties à l'occasion de la présente instance et qui seraient mis à sa charge, les manques à gagner incluant le montant du dégrèvement d'impôt qui n'a pu être obtenu, l'absence de versement lié à la vacance locative ou au non-paiement des loyers ;
- dire que s'y ajouteront les sommes qui seraient reprises par l'administration fiscale du fait de l'annulation de la vente ;
- actualiser le préjudice moral se chiffrant à 2 000 euros par année écoulée depuis le jour de la signature de l'acte de vente au jour de l'exécution des condamnations ;
- dire que les sommes qui lui seront allouées à titre de dommages et intérêts porteront intérêts de droit à compter de la décision à intervenir, avec capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ;
- ordonner la nullité ou à tout le moins la résolution du contrat de prêt n° 60333057/AGB/06836 consenti le 21 mars 2005 par BNP Paribas Invest Immo (aujourd'hui BNP Paribas Personal Finance) pour un montant de 156 520 euros ;
- dire que de la restitution subséquente du capital mis à sa disposition et restant à rembourser sera déduit l'ensemble des sommes par elle versées comprenant le remboursement du capital mais aussi les intérêts réglés et autres frais liés au contrat de prêt, à moins qu'elle ait pu en obtenir le paiement intégral au titre des dommages et intérêts;
- ordonner la résiliation du contrat d'assurance n° 9633 W affecté au prêt résolu et souscrit auprès de CNP Assurances et CNP IAM ;
- dire que pour le cas où une procédure collective serait ouverte à l'encontre de la SCI Le Carré Thoiras, même postérieurement à la décision à intervenir mais avant que le remboursement du prix ait été intégralement opéré, à la résolution du contrat de prêt et à la résiliation du contrat d'assurance se substitueront des dommages et intérêts complémentaires à la charge de la SARL Patrimoines de France d'un montant égal à la différence entre le prix réellement payé et la valeur de l'immeuble à son prix de marché à l'époque de la survenance de la procédure collective ;
- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires ;
- condamner in solidum la SCI Le Carré Thoiras et la SARL Patrimoines de France à lui payer la somme de 6 000 euros à titre d'indemnité et par application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de la Selarl Patricia Matet Combeaud, avocat.
Suivant dernières conclusions signifiées et déposées le 2 janvier 2013, la SCI Le Carré Thoiras demande à la juridiction :
- à titre principal, de dire et juger l'appel de Mme Kephalianos irrégulier en raison du cumul des fondements ;
- à titre subsidiaire, de :
- constater qu'il n'est pas fait de démonstration de dol, ni de manquement du vendeur à ses obligations d'information et de débouter Mme Kephalianos,
- constater qu'au jour de l'assignation, l'action en matière de démarchage était prescrite et débouter Mme Kephalianos,
- subsidiairement, constater l'existence d'un bordereau de rétractation clair stipulant en gras les modalités formelles et les délais et les coordonnant dans le même acte, et au surplus la volonté de Mme Kephalianos de réitérer l'acte en n'exerçant pas le droit de rétractation, en réitérant l'acte encore ultérieurement et en attendant plus de cinq ans pour entamer une quelconque action de ce chef,
- débouter Mme Kephalianos de l'ensemble de ses demandes,
- subsidiairement, condamner la société Patrimoines de France à la relever indemne de toutes condamnations à titre de dommages et intérêts,
- en toute hypothèse, de lui allouer une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.
La SARL Patrimoines de France conclut en dernier lieu selon écritures remises le 30 août 2013 à la confirmation des jugements des 3 et 13 avril 2012, sauf en ce que Mme Kephalianos a été déclarée irrecevable en son action en l'absence de justification de la publication de son assignation à la conservation des hypothèques, et statuant à nouveau de :
- déclarer irrecevable et non fondée Mme Kephalianos en son appel et ses demandes ;
- constater que la concluante n'a commis aucune manœuvre dolosive, et son absence de mauvaise foi ;
- constater que Mme Kephalianos ne justifie pas avoir subi le moindre préjudice financier ;
- constater la validité du contrat préliminaire de réservation signé par l'appelante, et en toute hypothèse, que l'acte authentique en date du 31 janvier 2005 est venu se substituer à ce contrat, lequel de facto n'existe plus depuis la signature de l'acte notarié ;
- constater que l'acte authentique en date du 31 janvier 2005 n'a pas perdu son caractère authentique et demeure exécutoire ;
en conséquence,
- rejeter l'intégralité des demandes, fins et conclusions de Mme Kephalianos en ce qu'elles sont totalement injustifiées ;
- déclarer irrecevable ou à tout le moins infondé le recours en garantie dirigé en cause d'appel par la SCI Le Carré Thoiras à son encontre ;
- dire et juger qu'il s'agit là de demandes nouvelles et irrecevables en ce qu'elles sont présentées pour la première fois en appel ;
- constater que le recours en garantie dirigé par la SCI Le Carré Thoiras à son encontre est totalement injustifié ;
- déclarer irrecevable ou à tout le moins non fondée la SA BNP Paribas Personal Finance en ses demandes en ce qu'elles sont injustifiées tant dans leur principe que dans leur quantum ;
- condamner Mme Kephalianos à lui verser la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, et aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP Le Barazer et d'Amiens, avocat postulant.
Aux termes de ses dernières conclusions remises le 15 juillet 2013, La BNP Paribas Personal Finance demande de statuer ce que de droit sur la recevabilité des demandes formulées par Mme Kephalianos, et :
- dans l'hypothèse où la cour ferait droit à l'appel de cette dernière, de :
- statuer ce que de droit sur la responsabilité des autres défendeurs assignés par Mme Kephalianos ;
- statuer ce que de droit sur les demandes de Mme Olga Kephalianos sollicitant la nullité du contrat de vente, et la nullité ou la résolution du contrat de prêt comme conséquence de la nullité du contrat de vente ;
- dans l'hypothèse où la cour ferait droit à la demande de nullité du contrat de vente et par voie de conséquence à la demande de nullité ou de résolution du contrat de prêt, de :
- condamner Mme Kephalianos à lui restituer les fonds qui lui ont été remis en vertu du contrat de prêt, à savoir la somme de 156 520 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, déduction faite des règlements effectués par Mme Kephalianos depuis l'origine du prêt jusqu'à l'arrêt de la cour ;
- condamner in solidum les parties qui seront jugées responsables de la nullité du contrat de vente et par voie de conséquence de la nullité ou de la résolution du contrat de prêt à réparer son préjudice et à lui payer les intérêts contractuels dus par l'emprunteur depuis l'origine du prêt jusqu'à la restitution des fonds débloqués au titre du prêt, dont la somme à parfaire s'élevait à 49 799 euros au 8 août 2012, ainsi que l'indemnité de remboursement anticipée contractuelle due au jour du prononcé de la nullité ou de la résolution du prêt, dont la somme à parfaire s'élevait à 3 408,31 euros au 9 septembre 2012, et les intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir.
En toute hypothèse, elle sollicite la condamnation de Mme Kephalianos et des parties qui succomberont à lui verser solidairement la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile , ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Par conclusions remises le 16 août 2012, la SA CNP Assurances et la SA CNP IAM demandent à la cour de leur donner acte de ce qu'elles s'en remettent à justice sur les mérites de l'action de Mme Kephalianos, dans l'hypothèse de la mise à néant de la vente et du contrat de prêt, de dire et juger que les primes d'assurance d'ores et déjà versées doivent leur demeurer acquises, et de condamner la partie qui succombe à leur payer la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la régularité de l'appel
Dans le dispositif de ses dernières écritures, la SCI Le Carré Thoiras demande à titre principal de "dire et juger l'appel de Mme Kephalianos irrégulier en raison du cumul de fondements".
Le cumul de fondements juridiques invoqués par l'appelante dans ses conclusions ne constitue pas une cause d'irrégularité de l'appel.
Sur la publication de l'assignation à la conservation des hypothèques
Mme Kephalianos justifie de la publication et de l'enregistrement de son assignation à la conservation des hypothèques de Périgueux le 30 septembre 2010 Volume P N° 6050.
Aucune irrecevabilité n'est donc encourue de ce chef.
Sur la demande de nullité de la vente fondée sur le dol
Selon l'article 1116 du Code civil, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.
Il ne se présume pas, et doit être prouvé.
Le dol peut résulter d'informations erronées fournies au cocontractant, et de la réticence de la partie qui était soumise à une obligation d'information.
Par ailleurs des informations fallacieuses émanant d'un mandataire du cocontractant engagent la responsabilité de ce dernier dès lors qu'il avait connaissance de ces informations et qu'elles lui ont bénéficié.
En toute hypothèse il appartient au demandeur de démontrer que les manœuvres, le caractère mensonger des informations données ou la simple réticence imputables à l'une des parties ont été des éléments déterminants du consentement de l'autre partie à contracter.
En l'espèce Mme Kephalianos prétend avoir été trompée par une présentation fallacieuse du commercial formé par le groupe dont est issu la société venderesse, qui l'a incitée à opérer ce qu'elle croyait être un placement sans risque et surtout sans incidence financière autre qu'un accroissement de son patrimoine doublé d'un avantage fiscal certain, alors que la réalité s'est révélée toute autre.
Elle fait valoir qu'elle a découvert que la résidence dans laquelle est situé son appartement est de faible standing, mal située, à proximité immédiate d'une zone commerciale peu avenante, et peu desservie, dans une zone particulièrement inondable, que l'absence de locataire du 26 septembre 2006, jour de la livraison, au 12 mars 2008 a entraîné une augmentation sensible du montant de son effort financier, que les modalités réelles de l'emprunt ne lui ont pas été expliquées, que le prix de vente de ce bien a été surévalué par la venderesse, que la résidence est affectée de multiples malfaçons et se dégrade de façon anormalement rapide, de sorte qu'elle ne peut revendre amiablement son bien sans générer une moins-value, et que la DRCCRF qu'elle a alertée à rédigé un procès-verbal pour publicité fausse ou de nature à induire en erreur à l'encontre de plusieurs sociétés dont Patrimoines de France.
Il résulte des pièces produites qu'un procès-verbal de livraison daté du 26 septembre 2006 et assorti de réserves ne mettant pas en cause l'habitabilité de l'appartement, a été signé par le mandataire de l'acquéreur et le représentant du promoteur vendeur.
L'existence de malfaçons essentiellement à type de fissures affectant le gros œuvre ayant donné lieu à une procédure judiciaire apparemment encore en cours n'est pas de nature à constituer un élément dolosif imputable au vendeur et au commercialisateur .
La plaquette publicitaire versée aux débats met en exergue le bon standing des logements de la résidence "L'Ecrin du Périgord", les points forts de l'environnement et des projets d'aménagement de la communauté d'agglomération périgourdine, ainsi que les commodités offertes par la résidence.
Les documents produits par Mme Kephalianos pour critiquer la qualité des prestations offertes par cet ensemble immobilier sont démentis par une analyse réalisée par Mme Benhaim, expert en estimations immobilières, en juin 2009, dont il ressort :
- que la résidence "L'Ecrin du Périgord" peut être qualifiée de 'standing' en raison de ses qualités intrinsèques et extrinsèques au regard des critères habituellement retenus en la matière, concernant le quartier, la conception du bien, le nombre de logements par unité, la qualité des matériaux et des finitions, les équipements supplémentaires, la qualité des prestataires et la comparaison avec l'immobilier déjà existant dans la commune ;
- que la résidence se situe dans un environnement immédiat boisé, et qu'il est difficile d'isoler la commune de Trelissac de celle de Périgueux en raison de sa proximité immédiate, à 10 mm de l'hyper centre, et de son intégration dans la communauté d'agglomération périgourdine.
Le fait, attesté par un courrier du 21 novembre 2008 adressé à l'appelante par l'inspecteur principal de la DDCCRF, qu'un procès-verbal pour publicité fausse ou de nature à induire en erreur ait été rédigé à l'encontre des sociétés Patrimoines de France, Elience et Groupe Triangle Investissements, ne suffit pas à établir le caractère mensonger de la publicité spécifique à la résidence en cause, d'autant qu'il n'est pas justifié de la suite judiciaire donnée à ce procès-verbal.
Mme Kephalianos ne démontre pas que les mentions de cette plaquette publicitaire excédaient à l'époque où elle a été rédigée le caractère nécessairement flatteur admis en la matière.
Quant à la situation de l'ensemble immobilier au regard des risques d'inondation, l'extrait cartographique versé aux débats par la société Patrimoines de France fait apparaître que le lieu d'implantation de la résidence litigieuse n'est pas en zone inondable, de sorte qu'aucune réticence dolosive ne peut être retenue à l'encontre de la SCI venderesse ni de la société de commercialisation sur ce point.
Les difficultés locatives invoquées par l'appelante, qui n'a pu louer son bien que 18 mois après sa livraison, et mentionnées par quelques propriétaires dans des mails adressés à Mme Kephalianos, ne sont pas en elles-mêmes révélatrices d'un comportement dolosif du vendeur, étant souligné qu'un investissement immobilier est par nature soumis à certaines fluctuations qui ne peuvent être déterminées à l'avance, telles que les crises économiques, les aléas du marché locatif, que tout acquéreur même profane mais doté de bon sens ne peut ignorer.
La garantie de 12 mois mise en œuvre en cas de carence locative est bien la démonstration du caractère aléatoire de l'opération.
Le revenu locatif mensuel de 520 euros annoncé n'était pas éloigné de la réalité du marché, puisque les contrats de location pour les années 2010 et 2011, le bail initial de 2008 n'étant pas produit, font ressortir des loyers de 508 euros et de 517 euros.
Si la durée anormalement longue de carence locative pendant les premiers mois peut témoigner d'un potentiel locatif mal apprécié par le commercialisateur, les documents versés aux débats ne permettent pas d'affirmer que la SCI venderesse et la société Patrimoines de France disposaient lors de la mise en place de l'opération litigieuse de données leur permettant de connaître ou d'anticiper cette insuffisance de potentiel locatif.
En ce qui concerne la surévaluation du prix alléguée par l'appelante, elle n'est pas démontrée à suffisance par l'expertise réalisée en 2008 d'un bien dont il n'est pas établi qu'il présentait exactement les mêmes caractéristiques que celui de Mme Kephalianos, ni par la revente en 2012 d'un autre appartement au prix de 85 000 euros, eu égard à l'évolution défavorable de la conjoncture économique, étant observé que selon la cote annuelle des valeurs vénales immobilières et foncières au 1er janvier 2004, année précédant l'acquisition en cause, le prix moyen au mètre carré à Périgueux pour un logement de ce type était de 2 330 euros, alors que le prix de l'appartement de l'appelante ressort à 2 100 euros, ce qui prend en compte sa situation dans une commune proche.
Aucun dol n'est démontré à l'encontre du vendeur de ce chef.
Enfin le grief tiré d'une absence d'explications claires sur les modalités réelles de l'emprunt souscrit par Mme Kephalianos, qui n'aurait pas compris le mécanisme de révision non capé du taux d'intérêt de ce prêt, ne peut être valablement opposé à la SCI venderesse et à la société qui a commercialisé le bien.
La preuve de manœuvres dolosives, d'un mensonge, ou d'une simple réticence dolosive imputable à la SCI Le Carré Thoiras ou à la SARL Patrimoines de France n'est pas rapportée.
La demande d'annulation de la vente sur le fondement du dol sera donc rejetée.
Sur la nullité de la vente au titre du manquement au devoir d'information et de conseil du vendeur professionnel
En application de l'article L 111-1 du Code de la consommation, le professionnel doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou de la prestation de service.
L'article L 120-1 du même Code interdit les pratiques commerciales trompeuses, définies par l'article L 121-1 notamment comme étant celles reposant sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur portant sur les caractéristiques essentielles du bien ou service telles que ses qualités substantielles, ses propriétés, son aptitude à l'usage et les résultats attendus de son utilisation.
En l'espèce la SCI Le Carré Thoiras n'a pas procédé à la commercialisation du bien, laquelle a été confiée à la SARL Patrimoines de France.
Le contrat préliminaire de réservation souscrit en décembre 2004 par Mme Kephalianos ne porte que sur l'acquisition d'un bien en l'état futur d'achèvement, ne mentionne nullement que l'acquéreur entend procéder à un investissement locatif, et la plaquette commerciale de fait aucune référence aux possibilités de défiscalisation.
Dès lors même si la SCI venderesse ne pouvait ignorer que l'investissement était susceptible d'être réalisé dans le cadre de la loi De Robien, il ne peut lui être reproché un manquement à son obligation d'information et de conseil à ce titre, ni d'avoir été à l'initiative d'un processus de "désinformation" en encourageant le mandataire commercial à occulter la description des caractéristiques essentielles du bien immobilier, et à en livrer une présentation volontairement inexacte.
Les caractéristiques du bien immobilier lui-même telles que stipulées dans l'acte de vente et les documents qui y sont annexés ne sont pas sérieusement mises en cause.
Les garanties locatives offertes et consenties pour une durée déterminée à l'acquéreur lui permettaient parfaitement de cerner les risques inhérents à tout investissement locatif, et la simulation proposée ne pouvait être considérée comme la garantie d'un placement financier dépourvu de tout risque.
Il n'est pas établi, au vu des éléments d'appréciation examinés précédemment, que le mandataire commercial ait disposé de renseignements le mettant en mesure d'informer l'acquéreur de l'éventualité de l'absence initiale de location telle qu'elle s'est finalement réalisée, ni des périodes de vacances locatives survenues par la suite, observation faite que le bien a été reloué à des conditions pratiquement identiques à celles annoncées lors de la réservation.
Il ne peut valablement être reproché à la SARL Patrimoines de France d'avoir manqué à l'obligation d'informer la personne démarchée des risques particuliers que peuvent comporter les produits proposés, édictée par l'article L 341-12 4° du Code monétaire et financier visé par l'appelante dans le dispositif de ses écritures.
Aucun manquement au devoir d'obligation et de conseil ne peut être retenu à son encontre.
Sur l'annulation du contrat en raison du non-respect des dispositions impératives relatives au démarchage et à la protection de l'acquéreur immobilier
Mme Kephalianos soutient que le contrat préliminaire de réservation ne répond que partiellement aux dispositions impératives du Code de la consommation ;
qu'en effet il ne comporte pas le nom du démarcheur exigé par l'article L 121-23 du Code de la consommation, ni la mention requise par l'article R 121-3, et que le formulaire offrant une faculté de renonciation et de rétractation ne répond pas aux exigences d'ordre public des articles R 121-4 et R 121-5 du même Code, ce qui entraînerait la nullité de ce contrat et de l'acte authentique qui n'est que son prolongement.
Elle ajoute que le délai de 7 jours prévu par l'article L 271-1 du Code de la construction et de l'habitation n'a été prétendument respecté qu'à l'occasion de l'envoi du contrat de réservation irrégulier, et que si en application de l'article R 261-30 du même Code le projet d'acte notarié lui a été communiqué parmi d'autres documents, le délai de réflexion de l'article L 271-1 de ce Code n'était nullement indiqué de sorte qu'elle n'en a pas effectivement bénéficié.
La SCI Le Carré Thoiras oppose la prescription de la demande de nullité du contrat de réservation pour non-respect des dispositions relatives au démarchage, dès lors qu'elle a été invoquée le 7 juillet 2011, plus de 5 ans après la signature de ce contrat intervenue le 20 décembre 2004.
Mme Kephalianos prétend que le point de départ du délai de prescription n'est pas le jour de la signature du contrat mais celui où le dol a été découvert, et au plus tôt le jour de la livraison du bien soit le 27septembre 2006, et qu'en toute hypothèse l'effet interruptif de prescription s'étend aux actions qui procédant d'une cause distincte, tendent à un but identique.
Le fondement juridique de la demande en nullité pour non-respect des dispositions relatives au démarchage et à la protection de l'acquéreur immobilier n'est pas le dol, et Mme Kephalianos n'explique pas en quoi le jour de la livraison du bien serait celui de la découverte par elle des irrégularités affectant ce contrat signé le 20 décembre 2004, qu'elle aurait dû connaître lors de sa signature.
A la date de l'assignation le délai de cinq ans à compter de la signature du contrat préliminaire était expiré, de sorte que cette assignation n'a pu avoir d'effet interruptif de ce délai, et que la demande formée à ce titre est prescrite.
Sur le défaut d'annexion de la procuration à l'acte authentique de vente
L'inobservation de l'obligation pour le notaire de faire figurer les procurations en annexe de l'acte authentique ou de les déposer au rang de ses minutes, invoquée par l'appelante pour conclure au prononcé de la nullité de l'acte de vente, ne fait pas perdre à l'acte son caractère authentique, et partant son caractère exécutoire.
La nullité de la vente n'est donc pas encourue à ce titre.
Sur les autres demandes
Le rejet de la demande principale en nullité de la vente entraîne celui des demandes subséquentes en dommages et intérêts et en annulation du prêt consenti par la BNP Paribas ainsi que des contrats d'assurances souscrites auprès des SA CNP Assurances et CNP IAM.
Du fait du rejet des prétentions de Mme Kephalianos, la demande de garantie formée par la SCI Le Carré Thoiras à l'encontre de la SARL Patrimoines de France, les demandes présentées par la BNP Paribas Personal Finance, dans l'hypothèse d'une annulation de la vente et par voie de conséquence du contrat de prêt, ainsi que celles des SA CNP Assurances et CNP IAM, sont dépourvues d'objet.
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais non compris dans les dépens exposés à l'occasion du présent litige.
Sur les dépens
Mme Kephalianos qui succombe en ses prétentions doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Par ces motifs : LA COUR, Infirme le jugement du 3 avril 2012 et le jugement rectificatif du 13 avril 2012 en ce que Mme Olga Kephalianos a été déclarée irrecevable en ses demandes, Statuant à nouveau : Dit que la demande en nullité du contrat préliminaire de réservation est prescrite, Déclare recevables mais non fondées les autres demandes formées par Mme Kephalianos, Dit sans objet les demandes présentées par la SCI Le Carré Thoiras, la SA BNP Paribas Personal Finance et les SA CNP Assurances et CNP IAM dans l'hypothèse où il aurait été fait droit aux demandes de Mme Kephalianos, Confirme le jugement du 13 avril 2012 en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette toutes autres demandes, Condamne Mme Olga Kephalianos aux dépens de première instance et d'appel, et dit que les dépens d'appel pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.