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Décisions

ADLC, 24 mars 2014, n° 14-DCC-39

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle exclusif de 12 points de vente sous enseigne Atlas et Fly par Conforama Développement

ADLC n° 14-DCC-39

24 mars 2014

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé au service des concentrations le 21 janvier 2014 et déclaré complet le 21 février 2014, relatif à l'acquisition de douze points de vente sous enseigne Atlas et Fly par Conforama Développement, formalisée par un accord-cadre signé le 20 décembre 2013 ; Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l'instruction ; Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération

1. Conforama Développement (ci-après "Conforama") est une société par actions simplifiée, détenue à 100 % par Conforama Investissement, elle-même détenue exclusivement par le groupe sud-africain Steinhoff, lequel est notamment actif en Europe dans la production et la distribution de meubles. Le groupe Conforama contrôle un ensemble de filiales actives dans le commerce de détail de produits d'ameublement, de décoration et d'électrodomestique et exploite 268 magasins dont 195 en France métropolitaine. Le réseau compte également 13 points de vente franchisés sous enseigne Conforama.

2. Les douze points de vente (ci-après "la cible") qui font l'objet de l'opération sont détenus par la société d'exploitation Rapp, filiale à 100 % de la société Mobilier Européen, elle-même détenue à 100 % par la société Meubles Rapp (ci-après avec ses filiales le "groupe Rapp"), qui est contrôlée par la famille Rapp. Le groupe Rapp est un groupe familial actif dans le secteur de l'équipement de la maison et exploite en France et à l'étranger 133 points de vente en propre. Le réseau compte également 112 franchisés. Sur ces 245 points de vente, 135 sont exploités sous enseigne Fly (82 détenus en propre et 53 franchisés), 59 sous enseigne Atlas (36 détenus en propre et 23 franchisés) et 51 sous enseigne Crozatier (15 détenus en propre et 36 franchisés). Les douze points de vente concernés par l'opération sont actuellement exploités sous enseigne Atlas (dix points de vente (1)) et Fly (deux points de vente(2)).

3. Un accord-cadre, signé le 20 décembre 2013, prévoit la cession à Conforama Développement de ces douze points de vente. Le même accord-cadre met en place une coopération entre le groupe Conforma et le groupe Mobilier européen, à travers plusieurs dispositions.

4. En premier lieu, Mobilier Européen aura la possibilité d'utiliser les services de référencement et de négociation de la société d'approvisionnement du groupe Steinhoff, la société Steinhoff International Sourcing Logistics (SISL) pour ses achats de meubles et d'objets de décoration par le biais d'un mandat d'une durée de [...] ans (tacitement renouvelable pour [...] mois). Il s'agit d'un accord non exclusif, Mobilier européen restant libre de s'approvisionner chez d'autres fournisseurs et il ne prévoit aucun engagement de volume minimum. [Confidentiel]. Il est par ailleurs prévu que Mobilier Européen puisse à terme partager contre rémunération le réseau logistique de Conforama. Enfin, Conforama pourra assister Mobilier Européen dans la constitution et le recrutement à l'extérieur du groupe Steinhoff, d'une équipe d'experts susceptibles de renforcer les directions d'exploitation et marketing ainsi que dans la mise en place d'un site Internet.

5. En deuxième lieu, l'accord confère à Conforama un droit de premier refus sur la cession des fonds de commerce ou actifs immobiliers sous-jacents aux points de vente Fly ainsi qu'un droit de préemption sur la cession des fonds de commerce ou actifs immobiliers sous-jacents aux points de vente Atlas et Fly quand une offre est faite par certains concurrents de Conforama [confidentiel]. De plus, Mobilier Européen s'est engagé à ne pas vendre à ces mêmes concurrents les points de vente [confidentiel].

6. En troisième lieu, l'accord-cadre prévoit la cession de 19 points de vente Fly en Suisse. De plus, il stipule une option de vente pour le groupe Rapp et une option d'achat pour le groupe Steinhoff portant sur les actions d'une société devant être créée [confidentiel].

7. En ce qui concerne les droits de préemption dont disposera le groupe Steinhoff en cas de projets de cession des points de vente Atlas et Fly à certains concurrents [confidentiel] et l'interdiction de vendre à ces mêmes concurrents les points de vente [confidentiel], ces dispositions ne peuvent être analysées comme des exclusivités de négociation au bénéfice du groupe Steinhoff dans la mesure où Mobilier Européen peut librement céder ces points de vente à tous les autres concurrents non visés par l'accord-cadre [confidentiel] mais également à toute autre enseigne qui serait active sur un secteur différent de l'ameublement ou de l'électroménager. De nombreuses enseignes nationales pourraient donc se porter acquéreurs.

8. En ce qui concerne les dispositions de l'accord relatives à l'approvisionnement de Mobilier Européen, l'absence d'exclusivité au bénéfice de SISL et d'engagement de volume minimum d'approvisionnement ne permettent pas de considérer qu'elles donnent au groupe Steinhoff la possibilité d'exercer une influence déterminante sur le groupe Rapp.

9. Enfin, le droit de premier refus accordé à Conforama en cas de cession des points de vente Fly et l'option d'achat détenue par le groupe Steinhoff sur une société [confidentiel] ne donnent au groupe Steinhoff que la possibilité d'acquérir ces actifs à terme. Leur exercice, et donc la réalisation de ce qui consisterait alors une opération de concentration au sens de l'article L. 430-1 du code de commerce, n'est pas certaine.

10. Au total, l'accord-cadre signé le 20 décembre ne peut être considéré comme donnant au groupe Steinhoff une influence déterminante sur d'autres actifs du groupe RAPP que les douze points de vente dont la cession a été notifiée à l'Autorité.

11. Par ailleurs, ces dispositions ne peuvent être considérées comme accessoires, c'est-à-dire directement liées et nécessaires à la réalisation de l'opération, car en leur absence, la concentration pourrait tout de même être réalisée sans que la viabilité des magasins concernés soit remise en cause. Dans sa communication relative aux restrictions directement liées et nécessaires à la réalisation des opérations de concentration publiée le 5 mars 2005, la Commission explique que : "pour que des restrictions soient considérées comme directement liées à la réalisation de la concentration, il faut qu'elles soient étroitement liées à la concentration proprement dite. Il ne suffit pas qu'un accord ait été conclu dans le même contexte ou au même moment que l'opération de concentration. Les restrictions directement liées à la concentration se rapportent, d'un point de vue économique, à la transaction principale et visent à permettre une transition en douceur entre l'ancienne structure de l'entreprise et la nouvelle après l'achèvement de l'opération de concentration". La présente décision ne prononce donc pas sur l'objet ou les effets des différents accords de coopération prévus dans l'accord-cadre.

12. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle exclusif de douze points de vente Atlas et Fly par Conforama Développement, filiale du groupe Steinhoff, l'opération notifiée constitue une opération de concentration au sens de l'article L. 430-1 du code de commerce.

13. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 75 millions d'euros (groupe Steinhoff : [...] d'euros pour l'exercice clos le 30 juin 2013 ; cible : [...] d'euros pour l'exercice clos le 31 mars 2013). Chacune réalise en France dans le secteur du commerce de détail un chiffre d'affaires supérieur à 15 millions d'euros (groupe Steinhoff : [...] d'euros pour l'exercice clos le 30 juin 2013 ; cible : [...] d'euros pour l'exercice clos le 31 mars 2013). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne relève pas de la compétence de l'Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle relatifs au commerce de détail mentionnés au point II de l'article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

A. DÉLIMITATION DES MARCHÉS EN TERMES DE PRODUITS ET SERVICES

14. Dans le secteur du commerce de détail, les autorités de concurrence retiennent généralement deux catégories de marchés : (i) les marchés aval, de dimension locale, qui mettent en présence les entreprises de commerce de détail et les consommateurs finals, et (ii) les marchés amont de l'approvisionnement des entreprises de commerce de détail.

15. Comme l'a rappelé le Conseil de la concurrence dans l'avis Cafom/Fincar, "le type de produits vendus est l'un des critères les plus importants pour délimiter les marchés dans le domaine du commerce de détail". De plus "le format et la taille de magasin sont également des critères importants de délimitation des marchés en ce que, notamment, ils déterminent l'aptitude du point de vente considéré à commercialiser un plus ou moins grand nombre de produits ou à offrir certains services annexes. Les grandes surfaces spécialisées (GSS) se distinguent ainsi des grandes surfaces alimentaires (GSA) et du commerce de proximité" (3).

16. En l'espèce, les parties sont simultanément actives dans le secteur du commerce de détail de produits d'ameublement, de produits de décoration et de bazar et de produits électrodomestiques. En outre, le groupe Steinhoff est présent sur le marché amont de la fourniture de meubles. L'analyse concurrentielle devra donc porter sur ces activités en distinguant, le cas échéant, selon les types de magasins concernés.

1. MARCHÉS AMONT DE L'APPROVISIONNEMENT DE PRODUITS D'AMEUBLEMENT, DE PRODUITS DE BAZAR ET DE DÉCORATION ET DE PRODUITS ÉLECTRODOMESTIQUES

17. En ce qui concerne les marchés amont de l'approvisionnement, les autorités de concurrence ont relevé que "les producteurs fabriquent des produits ou groupes de produits particuliers et ne sont pas techniquement en mesure de se reconvertir facilement dans la fabrication d'autres produits sans coûts conséquents"(4). De plus, le Conseil de la concurrence a indiqué "qu'au niveau des approvisionnements, on peut considérer qu'il existe autant de marchés que de familles de produits sur lesquels porte la négociation, chaque distributeur mettant en concurrence les divers fournisseurs sur chacun des marchés"(5).

18. Aussi, une répartition par groupe de produits peut être considérée comme pertinente.

19. En ce qui concerne plus spécifiquement l'approvisionnement en produits électrodomestiques, d'ameublement et de bazar et de décoration, la pratique décisionnelle, prenant en considération l'organisation des divisions "achat" des distributeurs, a identifié les marchés suivants (6) :

- meubles ;

- bazar-décoration ;

- petit électroménager ;

- gros électroménager ;

- appareils photo/cinéma ;

- appareils Hi-fi/son ;

- appareils TV/vidéo ;

- ordinateurs/périphériques.

20. Il n'y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l'occasion de la présente opération.

21. En l'espèce, les parties à l'opération sont toutes deux actives, en tant qu'acheteurs, sur les marchés de l'approvisionnement en meubles, en produits de bazar et de décoration, et en petit et gros électroménagers. Conforama, par le biais du groupe Steinhoff, est également actif dans la production de meubles.

2. MARCHÉ AVAL DE LA DISTRIBUTION AU DÉTAIL DE PRODUITS D'AMEUBLEMENT

22. Les produits d'ameublement et de décoration regroupent tous les produits destinés à meubler les pièces d'un logement (chaises, canapés, tables, éléments de cuisines, éléments de salles de bains, literie, buffets, rangements, bureaux, etc.) (7).

23. S'agissant de la vente au détail des produits d'ameublement, les autorités de concurrence ont envisagé un marché de la distribution de produits d'ameublement segmenté par canal de distribution (8). Les magasins concernés par la présente opération appartiennent à la catégorie des GSS et interviennent dans "la distribution de meubles via des points de vente proposant au consommateur final un large assortiment de produits, hors objets de décoration, tout au long de l'année"(9).

24. Les magasins sous enseigne Conforama, Atlas et Fly proposent un assortiment complet et permanent de meubles pour toute la maison et peuvent, à ce titre, être qualifiés de généralistes. A ce propos, la partie notifiante estime que les distributeurs de meubles de cuisine, de produits de literie et salons devraient être regardés comme des concurrents significatifs des distributeurs d'ameublement généralistes. Conforama et les enseignes Fly/Atlas réalisent par exemple respectivement [20-30] % et [10-20] % de leurs chiffres d'affaires sur le segment de la literie ; [10-20] % et [10-20] % pour les meubles de cuisine. Toutefois, si les distributeurs spécialistes constituent une réelle alternative pour une partie de la clientèle ayant des besoins d'ameublement spécifiques et limités, ils n'apparaissent pas comme les concurrents les plus proches des généralistes auprès desquels il est possible de satisfaire l'intégralité de ses besoins d'ameublement.

25. Enfin, les autorités françaises de concurrence (10) ont envisagé une segmentation en termes de gamme de produits compte tenu des différences de prix et de service proposés. En l'espèce, la cible est active sur la commercialisation de meubles de "bas de gamme" et de "moyenne gamme", par opposition aux magasins "haut de gamme", notamment représentés par les enseignes Roche Bobois, Ligne Roset ou Cinna. Selon la partie notifiante, la segmentation du marché en fonction du niveau de gamme n'apparaît pas totalement pertinente. Les acteurs du bas-moyen de gamme développeraient de plus en plus de produits stylistiquement voisins d'un certain nombre de produits haut de gamme.

26. Au cas d'espèce, la définition exacte des marchés aval peut être laissée ouverte dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées, quelles que soient les hypothèses retenues.

3. MARCHÉ AVAL DE LA DISTRIBUTION AU DÉTAIL DE PRODUITS DE BAZAR ET DE DÉCORATION

27. Les autorités de concurrence ont distingué la distribution de produits de bazar et de décoration, définis comme des objets divers associés à la distribution de meubles "meublants" pour équiper la maison et la décorer, de celle de l'ameublement, en raison de différences dans l'assortiment des offreurs, dans les comportements d'achat ainsi que dans les fonctions des produits concernés, les produits de bazar-décoration étant complémentaires à l'ameublement (11). Pour ces produits, l'analyse concurrentielle portera sur les ventes en GSS.

28. En toute hypothèse, la délimitation exacte du marché aval des produits de bazar et de décoration peut être laissée ouverte, dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées, quelles que soient les hypothèses retenues.

4. MARCHÉS AVAL DE LA DISTRIBUTION AU DÉTAIL DE PRODUITS ÉLECTRODOMESTIQUES

29. En ce qui concerne la vente au détail de produits électrodomestiques, les autorités de concurrence distinguent usuellement trois catégories de produits : les produits "blancs", "bruns" et "gris" (12).

30. La catégorie de produits "blancs" inclut notamment les tables de cuisson, les cuisinières, les fours, les ensembles encastrables, les hottes, les lave-linges, les sèche-linges, les lave-vaisselles, les réfrigérateurs, les congélateurs, le petit électroménager de préparation culinaire et les produits de climatisation. En ce qui concerne la distribution de produits blancs, la pratique décisionnelle a laissé ouverte la question d'une éventuelle sous-segmentation entre petit et gros électroménager (13). Il n'est pas nécessaire de trancher cette question au cas d'espèce.

31. La catégorie de produits "bruns" inclut notamment les téléviseurs, les magnétoscopes, les caméscopes, les équipements hi-fi et audio, les appareils numériques et les lecteurs DVD.

32. La catégorie des produits "gris" inclut notamment les micro-ordinateurs personnels, les écrans, les périphériques (comme les imprimantes ou les scanners), les claviers, les accessoires ou pièces détachées modulaires (comme les cartes mémoires ou les disques durs additionnels par exemple), et peut s'étendre aux logiciels et à la téléphonie.

33. La cible n'a qu'une activité marginale de distribution de produits électrodomestiques, uniquement de produits "blancs" et quasi-exclusivement de gros électroménager dans la mesure où les produits qu'elle propose sont généralement encastrables et en complément de son activité de cuisiniste. L'opération n'entraîne donc de chevauchement que pour cette catégorie de produits.

B. DÉLIMITATION GÉOGRAPHIQUE DES MARCHÉS

1. MARCHÉS AMONT DE L'APPROVISIONNEMENT DE PRODUITS ÉLECTRODOMESTIQUES, DE PRODUITS D'AMEUBLEMENT ET DE PRODUITS DE BAZAR ET DE DÉCORATION

34. En ce qui concerne les marchés de l'approvisionnement, la pratique décisionnelle des autorités de concurrence a retenu une dimension au moins nationale, voire européenne (14).

35. Il n'y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l'occasion de la présente opération.

2. MARCHÉS AVAL DE LA DISTRIBUTION DE PRODUITS D'AMEUBLEMENT, DE PRODUITS DE BAZAR ET DE DÉCORATION ET DE PRODUITS ÉLECTRODOMESTIQUES

36. En ce qui concerne les marchés aval de la distribution au détail de produits d'ameublement, de produits de bazar et de décoration et de produits électrodomestiques, les autorités de concurrence considèrent qu'ils sont de dimension locale (15). Il a été envisagé que, pour ce type d'achat, les consommateurs étaient prêts à réaliser un trajet d'une durée de 20 à 45 minutes pour atteindre un magasin (16). Cette durée varie cependant en fonction des caractéristiques de chaque zone, telles que la géographie, la densité de population ou l'état de l'offre lui-même. Le comportement réel des consommateurs sur une zone donnée peut être précisé avec les données collectées par les magasins sur la localisation de leurs clients pondérées par les chiffres d'affaires concernés (17). Il est généralement considéré que la zone de chalandise du magasin peut être limitée à celle sur laquelle 80 % du chiffre d'affaires du magasin est réalisé (18), le solde étant considéré comme une clientèle ponctuelle (ci-après appelée "l'empreinte réelle").

37. En l'espèce, la partie notifiante a réalisé son analyse sur la base des deux méthodologies. Les conclusions de l'analyse concurrentielle restent inchangées quelle que soit la méthode retenue.

III. Analyse concurrentielle

38. L'analyse concurrentielle s'appuie, au niveau national, sur une estimation des parts de marché en valeur. Au niveau local, en revanche, conformément à la pratique décisionnelle et compte tenu de la difficulté d'estimer de manière fiable le chiffre d'affaires réalisé par les magasins concurrents dans une zone, les parts de marché sont évaluées en surfaces de vente.

A. ANALYSE DES EFFETS HORIZONTAUX

1. MARCHÉS AMONT DE L'APPROVISIONNEMENT DE PRODUITS D'AMEUBLEMENT, DE PRODUITS DE BAZAR ET DE DÉCORATION ET DE PRODUITS ÉLECTRODOMESTIQUES

39. La partie notifiante n'a pas été en mesure de fournir les positions de la cible et de l'acquéreur sur le marché amont de l'approvisionnement. Elle a toutefois fait valoir qu'elles n'étaient pas sensiblement différentes de leurs parts de marché sur les marchés aval de la distribution au détail des produits concernés et qu'une part importante de leur approvisionnement en meubles et en produits de décoration/bazar est en tout état de cause réalisée hors de France. Sur ces marchés aval, les parts de marché de Conforama sont estimées par la partie notifiante à [10-20] % sur le marché de l'ameublement, [0-5] % sur le marché des produits de décoration/bazar et inférieures à 10 % sur les marchés du petit et gros électroménager. Les douze points de vente objet de l'acquisition représentent quant à eux moins de [0-5] % de ces marchés.

40. Il existe par ailleurs en France d'autres groupes majeurs présents sur la distribution de meubles et de produits de décoration/bazar, tels que Ikea et But, et sur la distribution de produits blancs, tels que Darty et Boulanger.

41. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur les marchés de l'approvisionnement par le biais d'effets horizontaux.

2. MARCHÉS AVAL DE LA DISTRIBUTION AU DÉTAIL DE PRODUITS D'AMEUBLEMENT, DE DÉCORATION ET BAZAR ET DE PRODUITS ÉLECTRODOMESTIQUES

42. La conclusion le 20 décembre 2013 d'un accord d'approvisionnement entre Mobilier Européen et SISL ne peut être considérée comme limitant l'autonomie commerciale des points de vente aux enseignes Fly, Atlas et Crozatier par rapport aux points de vente Conforama dans la mesure où cet accord ne prévoit aucune exclusivité d'approvisionnement au bénéfice de SISL et aucun engagement de volume minimum. Il a donc été considéré que les enseignes du groupe Rapp, d'une part, et Conforama, d'autre part restaient concurrentes sur les marchés de produits concernés.

43. Sauf mentions contraires, les parts de marché locales présentées ont été estimées à l'aide de la méthode de l'empreinte réelle (19).

a) Le marché des produits électrodomestiques

44. Au niveau national, la partie notifiante estime que les parts de marché en valeur de Conforama sur le marché des produits électrodomestiques s'élèvent à 5 % et à moins de 10 % sur le segment du gros électroménager, les points de vente cible représentant moins de 0,1 % des ventes quelle que soit la segmentation retenue. L'activité des points de vente cible est marginale sur ce marché dans la mesure où elle ne propose que des produits généralement encastrables et quasi-exclusivement accessoires aux offres de cuisine intégrées.

45. Au niveau local, les parts de marché cumulées des parties sur la vente au détail de produits blancs sont inférieures à 10 % sur chacune des zones concernées. La partie notifiante n'a pas été en mesure de fournir les parts de marché sur le seul segment du gros électroménager pour les zones locales. Toutefois, les risques d'atteinte à la concurrence peuvent être écartés compte tenu de la part de marché limitée de Conforama au niveau national sur le gros électroménager, du niveau marginal des produits blancs dans l'activité de la cible et de la présence de nombreux concurrents spécialistes en électroménager dans les zones de chacun des magasins concernés par l'opération.

b) Le marché des produits de décoration et bazar

46. A l'issue de l'opération, les parts de marché combinées des parties dans les différentes zones de chalandise concernées resteront inférieures à 20 %.

<Emplacement Tableau (20) >

47. Dans chacune des zones de chalandise concernées, l'entité issue de l'opération restera confrontée à la concurrence de nombreux points de vente, parmi lesquelles plusieurs enseignes nationales (dont par exemple Ikea, Alinéa et Habitat).

48. Dans ces conditions, l'opération n'est pas susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur les marchés locaux concernés.

c) Le marché des produits d'ameublement

49. La partie notifiante a estimé la part de marché en valeur de Conforama, au niveau national, à [20-30] % sur le marché de la distribution de produits d'ameublement. Les magasins cibles représentent quant à eux environ [0-5] % du marché. L'opération n'entraîne donc qu'un faible renforcement du groupe Conforama au niveau national.

50. Au niveau local, à l'issue de l'opération, la part de marché de Conforama ne dépassera pas 25 % dans les zones des magasins cible situés à Saint-Egrève (38) (21), Orange (84), Gorron (53), Salaise-sur-Sanne (38) et la Chapelle-des-Fougeretz (35).

51. Dans les zones de chalandise des autres points de vente concernés par l'opération, les parts de marché des parties sont les suivantes :

<Emplacement Tableau (22) >

52. A Exincourt (25), Saint-Bonnet-de-Mure (69) et Vendenheim (67), la part de marché de Conforama à l'issue de l'opération se situerait aux alentours de [30-40] %. Conforama restera confronté dans ces zones à la concurrence de nombreux concurrents, parmi lesquelles plusieurs enseignes nationales (dont par exemple But, Ikea, Géant du Meuble ou Mobilier de France).

53. A Gondreville (54), à l'issue de l'opération, Conforama détiendrait une part de marché de [30-40] %. La nouvelle entité y restera toutefois confrontée à la concurrence de nombreux autres points de vente, parmi lesquels plusieurs enseignes nationales, parmi lesquels un magasin Géant du Meuble ([10-20] %), un magasin Alinéa ([10-20] %), un magasin But ([5-10] %), un magasin Fly ([5-10] %) et un magasin Mobilier de France ([0-5] %).

54. A Villeneuve-Loubet (06), l'opération concerne deux points de vente, respectivement sous enseignes Atlas et Fly. A l'issue de celle-ci, la part de marché de Conforama s'élèvera à [30-40] %. Conforama restera toutefois confronté dans cette zone à la concurrence de plusieurs enseignes nationales, dont un magasin Basika ([10-20] %), un magasin Fly ([10-20] %), un magasin But ([5-10] %), un magasin Habitat ([5-10] %), un magasin Crozatier ([5-10] %), un magasin Mobilier de France ([5-10] %).

55. L'opération n'est donc pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur les zones locales concernées.

B. ANALYSE DES EFFETS VERTICAUX

56. Une concentration verticale peut restreindre la concurrence en rendant plus difficile l'accès aux marchés sur lesquels la nouvelle entité sera active, voire en évinçant potentiellement les concurrents ou en les pénalisant par une augmentation de leurs coûts. Ce verrouillage peut viser les marchés aval, lorsque l'entreprise intégrée refuse de vendre un intrant à ses concurrents en aval. La stratégie de verrouillage peut également concerner les marchés amont lorsque la branche aval de l'entreprise intégrée refuse d'acheter les produits des fabricants actifs en amont et réduit ainsi leurs débouchés commerciaux. Cependant, la pratique décisionnelle des autorités de la concurrence écarte en principe ces risques de verrouillage lorsque la part de l'entreprise issue de l'opération sur les marchés concernés ne dépasse pas 30 %.

57. Le groupe Steinhoff est présent sur le marché de l'approvisionnement en tant que fabricant et fournisseur de meubles. Il ne fabrique ni produits de bazar/décoration ni produits électrodomestiques. En France, le groupe Steinhoff représente [10-20] % de l'offre de meubles. La quasi-totalité de ses ventes est toutefois réalisée en interne, auprès du groupe Conforama. En excluant les ventes internes auprès de Conforama, la part de marché du groupe Steinhoff sur le marché de l'approvisionnement est quasi-nulle au niveau national.

58. En l'état, Conforama comme Mobilier Européen recourent à des fournisseurs alternatifs pour la grande majorité de leur approvisionnement (Conforama ne s'approvisionne qu'à hauteur d'environ [5-10] % de ses achats auprès du groupe Steinhoff et Mobilier Européen à hauteur de moins de [0-5] %). En outre, l'opération ne porte que sur un nombre limité de points de vente et n'a qu'un impact marginal sur la position de Conforama en tant qu'acheteur sur le marché de l'approvisionnement.

59. Enfin, compte tenu des parts de marché des parties en aval, les fournisseurs alternatifs disposent au surplus de multiples autres débouchés que Conforama et Mobilier Européen.

60. Compte tenu des éléments qui précèdent, l'opération n'est pas susceptible d'entraîner une atteinte à la concurrence par le biais d'effets verticaux.

DECIDE

Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 13-245 est autorisée.

Notes :

1 Les points de vente Atlas concernés par l'opération sont situés à La-Chapelle-des-Fougeretz (35), Exincourt (25), Gondreville (54), Gorron (53), Vendenheim (67), Saint-Egrève (38), Salaise-sur-Sanne (38), Orange (84), Saint-Bonnet-de-Mure (69), et Villeneuve Loubet (06).

2 Les points de vente Fly concernés par l'opération sont situés à Saint-Egrève (38) et Villeneuve-Loubet (06).

3 Voir la lettre du ministre de l'économie C2006-155 Cafom / Fincar du 31 août 2007 et l'avis du Conseil de la concurrence 07-A-06 sur cette même opération du 16 juillet 2007.

4 Voir la lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en date du 7 avril 2004, au conseil de la société Leroy-Merlin, relative à une concentration dans le secteur de la distribution au détail d'articles de bricolage et d'amélioration de l'habitat.

5 Voir l'avis du Conseil de la concurrence n° 97-A-04 du 21 janvier 1997 relatif à diverses questions portant sur la concentration de la distribution.

6 Voir la lettre du ministre de l'économie du 31 août 2007 et l'avis du Conseil de la Concurrence du 16 juillet 2007 précités.

7 Voir notamment la lettre du ministre C2006-155 et l'avis du Conseil de la concurrence 07-A-06 précités et les décisions de l'Autorité de la Concurrence n°11-DCC-78 du 18 mai 2011 relative à l'acquisition du groupe Titouan par le groupe Conforama et n°11-DCC-136 du 14 septembre 2011 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Habitat France SAS, Compania de Equipamientos del Hogar - Habitat SA et Habitat Deutschland GmBH par la société Cafom.

8 Voir notamment la lettre du ministre C2006-155 précitée et les décisions de l'Autorité de la Concurrence n°09-DCC-26 du 24 juillet 2009 relative à l'acquisition par la société Camif collectivités par la société Manutan international, et les décisions de la Commission européenne M.4226 DGSI/Fotovista du 29 juin 2006 et M.5721 du 16 février 2010, Otto/Primondo Assets.

9 Voir la lettre du ministre C2006-155 précitée.

10 Voir notamment l'avis du Conseil de la concurrence du 16 juillet 2007 précité.

11 Voir notamment la lettre du ministre C2006-155 et l'avis du Conseil de la concurrence 07-A-06 précités.

12 Voir notamment les décisions de l'Autorité de la concurrence n°9-DCC-12 du 9 juin 2009 relative à l'acquisition de la société Surcouf par M. Hugues Mulliez et n°11-DCC-87 du 10 juin 2011 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Media Concorde SNC par la société High Tech Multicanal Group .

13 Voir notamment l'avis du Conseil de la concurrence 07-A-06, la décision de l'Autorité de la concurrence n°11-DCC-87 et la décision de la Commission européenne M.5721 précitée.

14 Voir notamment la décision de la Commission européenne M.4392 du 30 novembre 2006 DSGI/FR-Invest/F-Group JV et la décision de la Commission européenne M .4226 précitée du 26 juin 2006.

15 Voir notamment les décisions de l'autorité de la concurrence n°11-DCC-78 du 18 mai 2011 et décision n°11-DCC-87 précitées.

16 Voir notamment l'avis du Conseil de la concurrence n°07-A-06 précité.

17 Les codes postaux des clients leur sont demandés lors de leur passage en caisse.

18 Voir notamment les décisions de l'Autorité de la concurrence n°11-DCC-78 du 18 mai 2011 et décision n°11-DCC-87 précitées.

19 L'analyse concurrentielle reste en toute hypothèse inchangée sur la base des estimations des positions des parties sur des marchés locaux définis selon la méthode fondée sur le temps de trajet.

20 Dans cette même commune, un magasin Atlas et un magasin Fly sont concernés par l'opération ; les parts de marché sont identiques.

21 Dans cette même commune, un magasin Atlas et un magasin Fly sont concernés par l'opération.

22 Dans cette même commune, un magasin Atlas et un magasin Fly sont concernés par l'opération.