CA Paris, Pôle 4 ch. 9, 23 janvier 2014, n° 11/16894
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Isotherm (SARL)
Défendeur :
Gaspais
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gimonet
Conseillers :
Mmes Lefèvre, Cléroy
Avocats :
Mes Grappotte-Benetreau, Giorno, Bettan, Delestrade
Madame Gaspais a commandé des fenêtres à la société Isotherm ;
Par jugement du 19 juillet 2011, le Tribunal d'instance de Paris 16e arrondissement a :
- prononcé la nullité du contrat ;
- condamné la société Isotherm à restituer à Madame Gaspais la somme de 4 800 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- débouté les parties de leurs plus amples demandes ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- condamné la société Isotherm à payer à Madame Gaspais la somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;
Le tribunal a considéré que Madame Gaspais, âgée de 86 ans et vulnérable du fait de son état de santé neurologique et psychologique, n'était pas en mesure d'apprécier la portée des engagements qu'elle avait pris ;
La société Isotherm a relevé appel de cette décision et a demandé à la cour, par conclusions signifiées le 15 février 2012 :
- d'infirmer le jugement ;
- de condamner Madame Gaspais au paiement de la somme de 7 182 euros en principal outre les intérêts au taux légal à compter de la date de la mise en demeure, soit le 5 octobre 2010 ;
- de condamner Madame Gaspais au paiement de la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;
- de débouter Madame Gaspais de toutes ses demandes ;
- de condamner Madame Gaspais à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel devant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Par conclusions signifiées le 5 janvier 2012, Madame Gaspais a demandé à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Isotherm à lui restituer la somme de 4 800 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- de condamner la société Isotherm à lui payer la somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et celle de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel devant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
SUR CE,
Considérant que, le 12 mars 2010, Madame Gaspais a passé commande de onze fenêtres et de deux baies coulissantes auprès de la société Isotherm pour un montant de 15 980 euros, selon bons de commande n° 1268 et n° 1269 ;
Que, le 12 avril 2010, elle a signé un document intitulé "confirmation de la commande" n° 1268 et 1269, qui porte en réalité modification de la commande puisqu'il n'est plus envisagé que la commande de 5 fenêtres et d'une baie, le prix étant réduit à 11 982 euros ;
Que la cour s'étonne, comme le tribunal, de ce que cette réduction de plus de la moitié de la commande n'entraîne qu'une réduction de prix de 25 % ;
Que Madame Gaspais a versé un acompte de 4 800 euros payé en trois chèques d'un montant de 1 600 euros chacun, à encaisser pour le premier, le jour de la confirmation, le second, le 13 avril et le dernier, le 23 mai 2010 ;
Que la société Maugin, fabricant, a livré à la société Isotherm des châssis de fenêtres correspondant à une commande du 14 avril 2010 "Gaspais" ;
Considérant que, le 29 juin 2010, Madame Gaspais a signé un bon de commande n° 2845 portant sur 3 baies coulisssantes et sur 6 fenêtres pour un montant de 13 982 euros ;
Que le 30 juin 2010, Madame Gaspais a annulé cette commande n° 2845, annulation confirmée par la société Isotherm le 9 juillet 2010 ;
Considérant qu'il n'est pas contesté par la société Isotherm que les relations entre les parties se sont nouées dans le cadre d'un démarchage à domicile, ce que confirment, d'une part, la référence faite dans le bon de commande du 12 mars 2010 aux articles L. 121-23 à L. 121-26 du Code de la consommation et, d'autre part, la teneur du courrier de la société Isotherm du 5 octobre 2010 à Madame Gaspais indiquant notamment : "Le 12 mars 2010 vous avez passé commande ... Le 12 avril 2010, soit un mois plus tard,... notre technicien métreur est retourné chez vous ..." ;
Considérant que la cour a invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen soulevé d'office de la nullité du contrat pour non-respect des prescriptions de l'article L. 121-23 (3°) du Code de la consommation ;
Que par note en délibéré du 13 décembre 2013, Madame Gaspais a demandé à la cour de soulever la nullité du contrat pour non-indication du lieu de sa conclusion ;
Que par note en délibéré du 23 décembre 2013, la société Isotherm a exposé que le bon de commande portait mention de l'adresse de Madame Gaspais et qu'il était précisé la mention fait à Paris 16e le 12 mars 2010, de sorte que le lieu de conclusion du contrat était indiqué ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-23 du Code de la consommation : "Les opérations visée à l'article L. 12-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter à peine de nullité les mentions suivantes :
...
3 ° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;
Considérant que les bons de commande n° 1268 et n° 1269 et la "confirmation de la commande" n° 1268 et 1269 du 12 avril 2010, qui porte modification de la commande, ne précisent pas le lieu de conclusion du contrat mais seulement l'adresse de Madame Gaspais ; que le simple fait que Madame Gaspais ait fait précéder sa signature sur les bons de commande de la mention manuscrite "fait à Paris 16e" ne répond pas à l'obligation légale faite au prestataire de services de mentionner l'adresse du lieu de conclusion du contrat qui n'est en tout état de cause pas précisée en l'espèce ; que la nullité de cet acte est encourue ;
Que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat et condamné la société Isotherm à restituer à Madame Gaspais la somme de 4 800 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
Que, dès lors, la société Isotherm ne peut qu'être déboutée de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive ;
Considérant par ailleurs qu'il n'est pas établi que le droit de la société Isotherm de soumettre ses prétentions aux juridictions de première instance comme d'appel aurait dégénéré en abus ; qu'il convient de débouter Madame Gaspais de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
Par ces motifs LA COUR Confirme le jugement ; Déboute la société Isotherm de l'ensemble de ses demandes ; Déboute Madame Gaspais de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive ; Condamne la société Isotherm à payer à Madame Gaspais la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel devant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.