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Décisions

Cass. 2e civ., 15 mai 2014, n° 13-17.362

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Herport (SAS)

Défendeur :

Cargo logistic (SARL) , Cargo services (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Flise

Rapporteur :

Mme Robineau

Avocats :

SCP Waquet, Farge, Hazan, SCP Coutard, Munier-Apaire

Rennes, du 5 févr. 2013

5 février 2013

LA COUR : Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 5 février 2013), qu'invoquant des actes de concurrence déloyale par détournement de clientèle et débauchage massif de salariés qu'elles imputaient à la société Herport, les sociétés Cargo logistic et International Cargo services (les sociétés Cargo) ont obtenu, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, du président d'un tribunal de commerce, statuant sur requête, la désignation d'un huissier de justice aux fins de constatations et investigations dans les locaux de cette société ; que cette dernière a demandé, en référé, la rétractation de l'ordonnance sur requête ;

Attendu que la société Herport fait grief à l'arrêt de la débouter de l'ensemble de ses demandes et de confirmer la mesure d'instruction alors, selon le moyen : que le juge est tenu de respecter et de faire respecter la loyauté des débats ; que dans une procédure sur requête, l'absence de contradiction impose au requérant d'exposer les faits avec loyauté sans avoir recours ni au mensonge, ni à la dissimulation, la violation de cette obligation devant entraîner la rétractation de l'ordonnance ayant fait droit à la requête et ce, même si d'autres faits, cités dans la requête, pouvaient suffire à justifier la décision ; qu'en l'espèce, la société Herport faisait valoir, dans ses conclusions, que les requérantes avaient manqué à leur devoir de loyauté en tronquant et dissimulant certains faits (le transfert par la société International cargo services à la société Herport du bureau de Trégueux avec son mobilier, son système informatique et ses lignes téléphoniques, la mission confiée par M. Leclair à M. Froideval, pendant plusieurs mois après la démission de ce dernier, de recouvrer les créances dues aux sociétés Cargo logistic et International Cargo services par ses clients du secteur avicole, et de solder les comptes de ces clients, l'existence d'une procédure opposant M. Froideval à la société Cargo logistic devant le conseil de prud'hommes) ou même en mentant (en feignant d'avoir appris fortuitement, par la consultation d'un site Internet, l'identité de l'employeur de ses anciens salariés, pourtant déjà connue par les échanges de mails, ou la domiciliation d'un bureau de la société Herport à la même adresse que l'établissement secondaire de la société International cargo services, alors qu'il s'agissait du même bureau transféré d'une société à l'autre, ou encore en feignant d'avoir découvert tardivement l'utilisation par M. Morin d'adresses personnelles de mail, bien que cette utilisation ait été conclue et justifiée par des contraintes techniques) ; qu'en se bornant à retenir que la portée des accords conclus entre les parties était sujette à discussion et devait être débattue devant le juge du fond, tout en relevant que "la présentation des relations entre les parties, telle qu'elle ressort de la requête, (a) pu être incomplète, voire équivoque", la cour d'appel qui n'a pas recherché si les sociétés Cargo logistic et International Cargo services n'avaient pas dissimulé des éléments importants de nature à caractériser leur défaut de loyauté, a privé sa décision de base légale au regard des articles 3, 145, 493, 494 du code de procédure civile, et 10, alinéa 1er, du code civil ;

Mais attendu que le juge, saisi d'une demande de rétractation de l'ordonnance sur requête ayant ordonné une mesure sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile et tenu d'apprécier au jour où il statue les mérites de la requête, doit s'assurer seulement de l'existence d'un motif légitime à ordonner la mesure probatoire et des circonstances justifiant de ne pas y procéder contradictoirement ;

Et attendu qu'ayant relevé que la matérialité du départ concomitant et concerté de tous les salariés des sociétés Cargo affectés à l'activité de transport avicole, de leur embauche immédiate par la société Herport et de la perte de la majeure partie du chiffre d'affaires afférent à cette activité, dont partie au moins avait été transférée au nouvel employeur, n'était pas contestée, de sorte que ces sociétés justifiaient d'un motif légitime à établir l'existence de faits de concurrence déloyale, que les documents produits quant aux conditions de ces départs nécessitaient une interprétation de la seule compétence d'un juge du fond et que ces sociétés avaient démontré dans leur requête des circonstances suffisantes à caractériser la nécessité de procéder non contradictoirement, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à la recherche inopérante prétendument délaissée, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.