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Décisions

Commission, 20 mars 2013, n° C-2013 1497

COMMISSION EUROPÉENNE

Décision

Concernant l'aide d'État no SA.23420 (11/C, ex NN40/10) mise à exécution par la Belgique en faveur de SA Ducroire

Commission n° C-2013 1497

20 mars 2013

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et notamment son article 108, paragraphe 2, premier alinéa (1), vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1, point a), après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément auxdits articles (2), considérant ce qui suit:

I. PROCEDURE

(1) Le 5 juin 2007, [la plaignante] (3) a adressé une plainte à la Commission européenne concernant l'apport en capital initial de 150 millions d'EUR dont la société anonyme Ducroire (ci-après "la SA Ducroire") aurait bénéficié lors de sa création en septembre 2004 par l'Office National du Ducroire (ci-après "l'ONDD").

(2) Par courrier du 7 décembre 2007, la Commission a posé des questions détaillées à la Belgique. Les réponses à ces questions, auxquelles étaient joints de nombreux documents ainsi qu'un plan d'affaires lui sont parvenues le 12 février 2008.

(3) Une réunion entre la plaignante et les services de la Commission a eu lieu le 9 septembre 2008.

(4) Une version non confidentielle de la plainte a été communiquée à la Belgique par la Commission le 4 décembre 2008.

(5) Une version non confidentielle des observations de la Belgique ainsi que des questions spécifiques ont été adressées à la plaignante les 12 et 17 décembre 2008. La plaignante y a répondu par lettre du 6 novembre 2009.

(6) Des questions supplémentaires ont été posées à la Belgique le 21 avril 2010 auxquelles la Belgique a répondu le 23 juillet 2010.

(7) Le 23 février 2011, la Commission a décidé d'ouvrir la procédure formelle d'examen prévue à l'article 108, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après "TFUE") (4) à l'égard des mesures d'aides éventuelles suivantes: (i) la garantie de l'État belge dont l'ONDD a bénéficié pour ses risques cessibles; (ii) un ou plusieurs transferts internes de ressources en faveur de l'assurance des risques cessibles et (iii) le capital souscrit par l'ONDD en faveur des activités d'assurance des risques cessibles de la SA Ducroire. La Commission a invité les intéressés à présenter leurs observations sur les mesures en cause.

(8) Deux réunions entre les autorités belges, l'ONDD, la SA Ducroire et les services de la Commission se sont tenues respectivement le 17 mars 2011 et le 28 avril 2011.

(9) Le 4 mai 2011, les autorités belges ont demandé à bénéficier d'une prolongation de quatre semaines du délai de réponse à la décision d'ouverture de la procédure formelle d'examen (ci-après "la décision d'ouverture"). Le 5 mai 2011, la Commission a informé les autorités belges qu'elle n'avait pas d'objections à la demande de prolongation de délai et a demandé des informations complémentaires relatives à la réunion du 28 avril 2011.

(10) Le 1er juin 2011, les autorités belges ont communiqué leur réponse aux observations et questions formulées par la Commission dans la décision d'ouverture. Les annexes à leur réponse ont été communiquées les 9 et 10 juin 2011.

(11) A la suite de cette réponse, la Commission a demandé le 27 juillet 2011 des informations complémentaires.

(12) Afin de préparer leur réponse aux questions de la Commission, les autorités belges ont organisé deux réunions techniques avec les services de la Commission et le bénéficiaire des mesures d'aide, respectivement les 26 septembre et 18 octobre 2011. Des informations complémentaires relatives aux sujets abordés lors de ces réunions ont été communiquées par la Belgique le 14 novembre 2011.

(13) Le 5 décembre 2011, les autorités belges ont communiqué leur réponse aux questions de la Commission datée du 27 juillet 2011.

(14) La Commission a demandé le 23 avril 2012 quelques précisions sur les différentes informations soumises, que les autorités belges ont fournies le 16 mai 2012.

(15) Une réunion entre les autorités belges, l'ONDD, la SA Ducroire et les services de la Commission s'est tenue le 21 mai 2012, à la suite de laquelle les autorités belges ont communiqué par courrier du 31 mai 2012 des explications complémentaires. Par lettre datée du 14 juin 2012, les autorités belges ont réitéré leur position sur la mesure d'allocation en capital mise en cause par la Commission.

II. DESCRIPTION DETAILLEE DE L'AIDE

II.1. LE BENEFICIAIRE ET SES ACTIVITES

(16) L'ONDD est une "institution publique autonome" opérant sur le marché de l'assurance-crédit et bénéficiant du soutien et de la garantie de l'État belge.

(17) Jusqu'au 31 août 2003, toutes les activités exercées par l'ONDD l'étaient pour son compte propre, bénéficiant de la garantie de l'État. Il n'existait pas de comptabilité séparée entre l'activité d'assurance-crédit à court terme et celle à long terme, ni en ce qui concerne les risques cessibles et non-cessibles. La communication de la Commission aux États membres, faite conformément à l'article 93, paragraphe 1, du traité, concernant l'application des articles 92 et 93 du traité à l'assurance-crédit à l'exportation à court terme (ci-après "la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation") (5) qualifie de cessibles les risques commerciaux et politiques d'une durée de moins de deux ans, afférents à des débiteurs (6) établis dans l'un des pays de l'Union européenne ou dans certains pays membres de l'OCDE, à savoir l'Australie, le Canada, l'Islande, le Japon, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, la Suisse et les États-Unis d'Amérique (7).

(18) Le 1er septembre 2003, l'ONDD a activé un compte, dit "commercial", ne bénéficiant pas, selon les autorités belges, de la garantie de l'État, qui a été affecté, à partir de cette date, à l'ensemble de l'activité relative aux risques à court terme. Un capital de [45-70] millions d'EUR avait alors été alloué à ce compte commercial, permettant d'obtenir l'agrément du régulateur national des assureurs, l'Office de Contrôle des Assurances (ci-après "l'OCA"). Il n'existait pas au sein de ce compte commercial une comptabilité séparée entre les risques cessibles et non-cessibles.

(19) En mai 2004, l'ONDD décide de filialiser ses activités existantes d'assurance-crédit à court terme en créant la SA Ducroire. D'après les autorités belges, la décision de créer la SA Ducroire a été prise afin de se conformer à la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation qui invite les États membres à modifier leur régimes d'assurance-crédit à l'exportation de façon à ce que les organismes d'assurance-crédit à l'exportation ne bénéficient plus du soutien de l'État pour ce qui concerne les risques qualifiés de "cessibles".

(20) La décision de créer la SA Ducroire et de lui allouer un capital de 150 millions d'EUR a été prise par le conseil d'administration du 11 mai 2004 sur la base d'un plan d'affaires élaboré par l'ONDD à horizon 2005-2007 dans le cadre duquel deux scénarios étaient envisagés: un scénario A) qualifié de "réaliste", basé sur la conjoncture et fondé sur une croissance des montants assurés de 3 %; et un scénario B) qualifié de "dynamique", basé sur une approche proactive en terme de conquête de marché fondé sur une hypothèse de croissance double de celle du scénario réaliste, à savoir de 6 % (8).

(21) La SA Ducroire a été constituée le 23 septembre 2004, date à laquelle l'ONDD a souscrit 150 millions d'EUR au capital de cette société, dont 100 millions d'EUR ont été libérés immédiatement tandis que les 50 millions d'EUR restants l'ont été en 2009.

(22) Le 1er janvier 2005, l'ONDD a transféré son portefeuille de risques à court terme à la SA Ducroire qui a entamé à partir de cette date ses activités. L'ONDD, quant à lui, continue à gérer les risques à long terme.

(23) Ainsi, la SA Ducroire gère l'ensemble des risques cessibles au sens de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation (qui, par définition, sont de court terme) ainsi que les risques non-cessibles à court terme, tels que les risques de moins de deux ans afférents à des débiteurs établis en dehors de l'OCDE.

(24) En 2007, la SA Ducroire a acquis 33 % du capital de Komercni ?verová pojišt'ovna EGAP (KUP) (la branche commerciale de l'agence nationale tchèque d'assurance-crédit à l'exportation) pour un montant de [12-14] millions d'EUR. Cette acquisition avait été effectuée conjointement avec SACE BT, qui avait acquis également 33 % du capital de KUP. En 2009, la SA Ducroire a racheté l'intégralité de la participation de SACE BT dans le capital de KUP pour la somme de [0-20] millions d'EUR. La SA Ducroire a ainsi acquis 66 % du capital de KUP pour un montant total de [10-35] millions d'EUR. De ce dernier montant, 12 millions d'EUR ont ensuite été actés comme une moins-value sur participation (ajustement négatif de la valeur de l'investissement).

II.2. LA PLAINTE

(25) Le 5 juin 2007, une plainte a été introduite à la Commission. Selon la plaignante, l'ONDD a effectué la dotation en capital à des conditions qu'un investisseur privé n'aurait pas pu consentir. D'une part, la rentabilité de la SA Ducroire, telle qu'escomptée lors de l'apport du capital serait inférieure à celle qu'attendrait un investisseur privé. D'autre part, le capital alloué à la SA Ducroire dépasserait le capital nécessaire, tant au regard des règles prudentielles sur les fonds propres adéquats minimaux que par rapport à la moyenne du ratio de solvabilité (primes nettes/fonds propres) des autres acteurs du secteur. Selon la plaignante, c'est grâce uniquement à leur "surcapitalisation" en 2004 que la SA Ducroire et SACE BT ont pu déposer, durant le second semestre de l'année 2006, une offre conjointe "défiant toute concurrence" pour l'achat de 66 % des actions de KUP.

II.3. RAISONS AYANT JUSTIFIE L'OUVERTURE DE LA PROCEDURE

(26) L'enquête initiée le 23 février 2011 concerne les mesures suivantes:

a) La garantie de l'État belge dont l'ONDD aurait bénéficié pour ses risques cessibles (ci-après "Mesure 1");

b) Les éventuels transferts internes (au sein de l'ONDD) de ressources de ses activités d'assurance des risques non-cessibles vers ses activités d'assurance des risques cessibles (avant le transfert des activités d'assurance des risques à court terme à la SA Ducroire) (ci-après "Mesure 2");

En effet, il n'existait pas au sein de l'ONDD, lorsque celui-ci exerçait des activités d'assurance des risques cessibles, de gestion et de comptabilité séparée pour les activités d'assurance des risques cessibles et pour celles des risques non-cessibles (à court terme), contrairement à la prescription du point 4.3 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation. Selon le point 4.3 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation, les organismes d'assurance-crédit opérant avec le soutien de l'État doivent "avoir une gestion séparée et tenir une comptabilité séparée pour les activités d'assurance des risques cessibles et des risques non-cessibles exercées pour le compte ou avec la garantie de l'État afin de prouver qu'ils ne bénéficient pas d'aides publiques dans le domaine des risques cessibles".

c) L'allocation en capital (150 millions d'EUR de capital souscrit) par l'ONDD en 2004 en faveur de sa filiale, la SA Ducroire (ci-après "Mesure 3").

(27) En ce qui concerne la Mesure 3, la décision d'ouverture aboutissait à la conclusion que les parties suivantes de l'allocation de capital à la SA Ducroire ne constituent pas une aide (9):

a) la partie du capital initial de la SA Ducroire pouvant être considérée comme supportant l'activité de risques non-cessibles (10) ne constitue pas une aide. En effet, selon les termes de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation, il est loisible aux Etats Membres de soutenir l'activité d'assurance-crédit à l'exportation dans le domaine des risques non-cessibles. Comme cette activité n'est pas supposée être exercée par les opérateurs de marché, le soutien des États n'est pas susceptible de distordre une quelconque concurrence et ne peut donc constituer une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE. La Commission invitait donc la Belgique à clarifier la partie du capital de la SA Ducroire soutenant son activité liée aux risques non-cessibles.

b) la partie du capital de la SA Ducroire profitant déjà au sein de l'ONDD à l'activité d'assurance des risques cessibles et qui a été simplement transférée à la SA Ducroire avec les activités correspondantes ne constitue pas une aide. Il s'agirait uniquement du changement de la forme juridique d'une activité économique préexistante avec le capital s'y rattachant (11).

(28) L'aide éventuelle nouvelle en cause (Mesure 3) ne concerne donc que la partie du capital allouée à la SA Ducroire qui ne soutient pas l'activité d'assurance-crédit des risques non-cessibles et qui excède la partie du capital qui profitait déjà à l'activité relative aux risques cessibles au sein de l'ONDD au 31 décembre 2004 (juste avant le transfert des activités d'assurance des risques à court terme à la SA Ducroire).

(29) Aux fins de la présente décision, les définitions suivantes s'appliquent:

a) "capital additionnel" la partie du capital alloué à la SA Ducroire qui excède la partie du capital qui profitait déjà à l'activité relative aux risques à court terme (comprenant des risques cessibles et non cessibles) au sein de l'ONDD au 31 décembre 2004 (juste avant le transfert des activités d'assurance des risques à court terme à la SA Ducroire);

b) "capital supplémentaire" la partie du capital additionnel, qui vient d'être défini, qui profite à l'activité d'assurance-crédit des risques cessibles (c'est-à-dire le capital alloué à la SA Ducroire qui profite à l'activité d'assurance-crédit des risques cessibles et qui excède la partie du capital qui profitait déjà à l'activité relative aux risques cessibles au sein de l'ONDD au 31 décembre 2004).

(30) Le capital additionnel comprend donc notamment le capital supplémentaire (voir le graphique au considérant 141).

(31) Dans la décision d'ouverture, la Commission supposait l'existence d'un capital additionnel et supplémentaire important étant donné la disproportion entre le capital de 150 millions d'EUR accordé à la SA Ducroire lors de sa création et le capital de [45-70] millions d'EUR alloué au sein de l'ONDD au compte commercial affecté, du 1er septembre 2003 au 31 décembre 2004, à l'activité relative aux risques à court terme, qui incluait les risques cessibles. La Commission a dès lors indiqué qu'il semblait exister un capital additionnel et supplémentaire et que sa profitabilité attendue semblait insuffisante.

(32) Le manquement de l'ONDD et de la SA Ducroire à se conformer au point 4.3 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation (voir les considérants 17 et 19), c'est-à-dire à établir une gestion et une comptabilité séparée distinguant les risques cessibles des risques non-cessibles, mettait la Commission dans l'impossibilité de circonscrire avec précision l'ampleur du "capital supplémentaire" au stade de l'ouverture de la procédure formelle d'examen. Dans sa décision d'ouverture, la Commission a donc invité les autorités belges à se conformer au point 4.3 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation et à lui indiquer les parties du capital qui soutenaient respectivement l'activité des risques non-cessibles à court terme et l'activité des risques cessibles, avant et après leur transfert à la SA Ducroire.

III. OBSERVATIONS DES INTERESSES

(33) La Commission n'a reçu, dans les délais fixés, aucune observation des parties intéressées concernant l'ouverture de la procédure.

IV. COMMENTAIRES DE LA Belgique

Quant aux Mesures 1 et 2: Garantie de l'Etat en faveur des risques cessibles au sein de l'ONDD et transferts internes des ressources en faveur des risques cessibles de l'ONDD

(34) La Belgique a déclaré que l'ONDD s'est toujours concentré sur les risques non-cessibles et la prédominance de ces risques dans son portefeuille était une constante. Après 1993 (12) et avant l'accession des dix nouveaux Etats Membres de l'Union européenne (UE) en mai 2004, l'activité relative aux risques cessibles au sein de l'ONDD était insignifiante. A la fin de 2003, les primes relatives à cette activité ne représentaient qu'environ [0-1 %] du portefeuille des risques à court terme et les montants assurés ne s'élevaient qu'à environ [...] millions d'EUR (voir Tableau 1 ci-dessous). Il est à noter que le très faible pourcentage de risques cessibles qui était alors couvert ne l'était qu'en raison du lien de ces risques à un risque non-cessible (13).

(35) Ce n'est qu'à partir du 1er mai 2004, lors de l'accession des dix nouveaux États membres de l'Union européenne, que l'équilibre entre risques cessibles et risques non-cessibles à court terme a été modifié au sein du portefeuille de l'ONDD puisque la part de risques cessibles dans le portefeuille de l'ONDD est passée de [0-1 %] (en termes de primes) en 2003 à [15-20 %] en 2004 (voir Tableau 1 ci-dessous). Cette modification résulte d'un basculement automatique de la catégorie non-cessible vers la catégorie cessible des risques à court terme afférents aux débiteurs situés dans les dix nouveaux États membres de l'Union européenne.

(36) En ce qui concerne la Mesure 1, les autorités belges ont également ajouté que la garantie de l'Etat belge a été désactivée dès le 1er septembre 2003 en ce qui concerne les risques cessibles de par leur transfert au compte commercial pour lequel l'ONDD a obtenu l'agrément de l'OCA (14), précisément parce que ce compte ne bénéficiait pas de la garantie de l'Etat (les activités bénéficiant de la garantie de l'Etat ne sont pas régulées par l'OCA).

(37) En ce qui concerne les transferts internes éventuels de ressources en faveur des risques cessibles au sein de l'ONDD, les autorités belges font valoir qu'étant donné l'importance insignifiante de l'activité des risques cessibles, un quelconque transfert de ressources était inconcevable et serait de toute manière de minimis (15).

(38) Les autorités belges concluent que pour la Mesure 1 et la Mesure 2, les montants en jeu sont en toutes hypothèses de minimis (16).

Évolution des primes et montants assurés pour les risques cessibles et non-cessibles à court terme (polices globales exportateurs - court terme)

<Emplacement tableau 1 >

Quant à la Mesure 3: Capital alloué par l'ONDD à la SA Ducroire

(39) Afin de justifier que le capital alloué par l'ONDD à la SA Ducroire était nécessaire et répondait au critère de l'investisseur privé, les autorités belges ont présenté les arguments suivants: 1) l'opération doit être analysée dans son contexte, celui d'un transfert d'une activité existante sous la forme d'une filialisation, 2) l'apport en capital est justifié sur base de règles de solvabilité, 3) la rentabilité attendue des activités cessibles de la SA Ducroire était suffisante pour convaincre un investisseur privé en économie de marché de réaliser cet investissement.

1. L'opération consiste en un transfert d'activité existante (18)

(40) Les autorités belges estiment que l'apport en capital doit être apprécié dans son contexte qui est celui d'un transfert d'une activité existante. L'intégralité de l'activité logée au sein de la SA Ducroire à sa création correspondait purement à un transfert de portefeuille des activités à court terme de l'ONDD.

(41) A cet effet, les autorités belges déclarent que tous les postes du bilan du compte commercial ayant trait à l'activité commerciale ont été transférés vers le bilan d'ouverture de la SA Ducroire. A l'actif, seules les créances directement liées aux polices d'assurance déjà en portefeuille ont été transférées (les placements n'ont pas été transférés). Au passif, les postes transférés concernent uniquement ceux liés au portefeuille d'assurance existant et excluent donc le capital, les réserves et provisions pour égalisation et catastrophes (19). Les autorités belges soulignent que les [45-70] millions d'EUR alloués au compte commercial ne sont pas transférés à la SA Ducroire puisque l'identification de la hauteur du capital a fait l'objet d'une appréciation spécifique.

(42) Les autorités belges soutiennent que le capital alloué au compte commercial n'est pas un comparatif pertinent pour apprécier les besoins en capital de la SA Ducroire. Le besoin en capital du compte commercial a été estimé par application mécanique des règles de la directive 2002/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 mars 2002 modifiant la directive 73/239/CEE du Conseil en ce qui concerne l'exigence de la marge de solvabilité des entreprises d'assurance non vie (20) (ci-après la "directive Solvabilité I") correspondant aux règles prudentielles afin d'obtenir l'agrément de l'OCA pour l'activité à court terme dès lors qu'elle ne bénéficiait plus de la garantie de l'Etat, mais ce capital ne correspond pas au capital économique nécessaire pour couvrir le profil de risque de cette activité.

(43) Selon les autorités belges, il existe une différence entre l'attitude d'un investisseur privé qui recherche la rentabilité d'un nouvel investissement et une entreprise mère qui filialise ses activités existantes. En juger autrement pourrait selon les autorités belges forcer une entreprise publique à céder ou cesser une activité économique si celle-ci ne présente pas une rentabilité suffisante pour un investisseur privé en économie de marché, ce qui serait une atteinte au principe de neutralité du capital public énoncé dans l'article 345 du TFUE.

2. Les méthodes utilisées pour justifier le montant du capital de la SA Ducroire

(44) Les autorités belges soutiennent qu'en 2004, deux méthodes pouvaient être envisagées pour déterminer les besoins en capital des assureurs-crédit: a) la méthode classique du secteur des assurances en générale, établie par la directive Solvabilité I et qui est basée sur la rémunération des risques (soit les primes - "premium based approach") et b) la méthode basée sur les risques encourus ("exposure based approach\"), comme par exemple la méthode des règles de Bâle appliquées au secteur bancaire et la méthode Standard & Poor's pour déterminer le capital nécessaire d'un assureur crédit.

Règles prudentielles en vigueur: Solvabilité I

(45) Dans le cas de la SA Ducroire, les autorités belges considèrent que la méthode prévue par la directive Solvabilité I ne reflète pas suffisamment le profil financier global d'un assureur.

(46) Selon la directive Solvabilité I, l'exigence de la marge de solvabilité est égale au montant le plus élevé entre deux résultats, l'un se basant sur le montant annuel des primes ou cotisations, et l'autre sur la charge moyenne des sinistres pour les trois derniers exercices sociaux. Toutefois, le seuil minimum absolu est de 3 millions d'EUR pour les années 2004 à 2006 et de 3,2 millions d'EUR pour les années 2007 à 2009.

(47) L'application de ces règles par l'ONDD conduit à un niveau de capital minimum pour la SA Ducroire d'environ 3 à 3,3 millions d'EUR (21), entre 2005 et 2007, sur la base des données du plan d'affaires (voir tableau 2 ci-dessous).

(48) La Belgique fait valoir que les besoins en capital des assureurs-crédit dépendent davantage des risques encourus que de la rémunération des risques (les primes) et que les méthodologies fondées sur les risques encourus ("exposure based approach") (comme par exemple l'article 8 de la loi de 1939 sur l'ONDD, la méthode Standard & Poor's, ou la méthode des règles de Bâle appliquées au secteur bancaire) sont plus adaptées que la directive Solvabilité I, fondée sur la rémunération des risques ("premium based approach").

(49) Selon les autorités belges, le portefeuille de risques assurés par la SA Ducroire est atypique dans la mesure où, contrairement à la plupart de ses concurrents, elle couvre majoritairement des risques non-cessibles au sens de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation. Le niveau de risque que comporte un tel portefeuille est substantiellement plus élevé que celui d'un portefeuille exclusivement ou partiellement constitué de risques cessibles et justifierait selon la Belgique l'utilisation de règles plus prudentes.

"Exposure based approach": i) Application de l'article 8 de la loi de 1939 sur l'ONDD à la SA Ducroire

(50) Les autorités belges estiment l'application de l'article 8 de la loi du 31 août 1939 sur l'ONDD (22) (ci-après "loi de 1939") appropriée dans ce cas de figure car elle s'inspire de l'"exposure based approach". Il est important de préciser que l'article 8 de la loi de 1939 n'a aucune portée réglementaire pour la SA Ducroire car il ne s'applique qu'à l'ONDD.

(51) En outre, bien que l'article 8 indique le montant maximum des engagements de l'ONDD résultant de ses activités pour son compte propre avec la garantie de l'Etat ainsi que de celles pour le compte de l'Etat, les autorités belges considèrent que l'article 8 de la loi de 1939 constitue un point de référence minimum pour la SA Ducroire, qui elle, ne bénéficie pas de la garantie de l'Etat.

(52) En appliquant l'article 8, 1o de la Loi de 1939 (23), qui indique que les engagements ne peuvent dépasser 20 fois le montant cumulé de la dotation et de la réserve générale, les autorités belges estiment (24) le besoin en capital de la SA Ducroire à environ 92 à 106 millions d'EUR entre 2005 et 2007 sur la base du plan d'affaires, (voir tableau 2 ci-dessous).

"Exposure based approach": ii) modèle développé par Standard & Poor's

(53) Dans leurs commentaires, les autorités belges se réfèrent à la méthode développée par Standard & Poor's pour déterminer le capital nécessaire d'un assureur crédit.

(54) Pour établir le niveau de ce capital (25), Standard & Poor's utilise un modèle basé sur les risques encourus ("exposure based approach") accompagné d'une évaluation de la réassurance de l'assureur. Le capital requis est déterminé selon une méthodologie qui compare les sinistres bruts avec les montants assurés bruts ("the gross loss over gross exposure method") sur une période de (normalement) 10 ans. Le ratio le plus élevé au cours de cette période est multiplié par un facteur de 1,25 et appliqué aux montants assurés projetés et ajustés pour tenir compte de la réassurance. Le modèle repose sur l'hypothèse que le portefeuille de l'assureur est raisonnablement bien diversifié géographiquement et par ligne d'activité ("line of business").

(55) Bien qu'elles s'y réfèrent, les autorités belges n'ont pas utilisé la méthode de Standard & Poor's pour déterminer le niveau de capital nécessaire à la SA Ducroire.

"Exposure based approach": iii) Application des règles de Bâle I à l'assureur crédit (le ratio Cooke)

(56) Selon les autorités belges, les règles de Bâle seraient plus adaptées pour apprécier la solvabilité des assureurs-crédit que les règles prudentielles en vigueur, à savoir la directive Solvabilité I. La nature des activités des assureurs-crédit et le principe de précaution justifient le recours aux règles de Bâle. Selon les autorités, l'assurance-crédit s'apparente à l'activité de crédit des banques au niveau du risque de la contrepartie (dont principalement le risque de non-paiement par le débiteur). De plus, l'activité de la SA Ducroire, contrairement à celle d'autres assureurs crédit privés, comprend essentiellement des risques de crédit sur des débiteurs localisés dans des pays moins avancés ou émergents [risques situés en Zone 2 (26)].

(57) Ainsi, selon les autorités belges, le ratio Cooke des règles prudentielles de Bâle I qui exige une capitalisation minimum correspondant à 8 % des engagements nets, serait plus approprié pour apprécier la solvabilité des assureurs-crédit.

(58) Il ressort du procès-verbal du conseil d'administration de l'ONDD du 20 avril 2004 que ce dernier s'est basé sur le ratio Cooke pour déterminer le capital nécessaire à la SA Ducroire tout en prenant en considération la nécessité de doter la SA d'une crédibilité suffisante face à ses concurrents.

(59) En effet, le ratio retenu par les autorités belges dans les calculs n'est pas de 8 % comme prescrit par les règles de Bâle I mais de 10 % afin de prévoir un tampon de sécurité.

(60) Le capital ainsi déterminé par l'ONDD pour la SA Ducroire et tel qu'indiqué (27) dans les plans financiers soumis au régulateur et dans la note d'information du 20 avril 2004 sur base de laquelle le conseil d'administration a donné son accord de principe à la création de la SA Ducroire avec un capital souscrit de 150 millions d'EUR, était d'environ 68 à 74 millions d'EUR pour la fin 2006, (voir tableau 2 ci-dessous). Les hypothèses retenues incluaient uniquement la couverture des risques situés en Zone 2 et dans les 10 pays ayant adhéré à l'Union européenne en mai 2004.

(61) Par contre, dans la note stratégique du 28 septembre 2004 (28), le capital estimé par l'ONDD selon le ratio Cooke (10 % des engagements nets), entre 2005 et 2007, était d'environ 74 à 101 millions d'EUR. Contrairement aux projections financières de la note d'avril 2004, les projections financières de septembre 2004 intégraient la couverture de tous les risques à court terme, englobant ainsi l'intégralité des Zones 1 et 2. Il est conclu dans cette note qu'"un capital libéré de 100 millions d'EUR suffit pour exercer l'activité court terme polices globales exportateurs jusqu'en 2007 mais devra être revu après cette période".

(62) Les autorités belges considèrent que l'application du ratio Cooke n'est pas une méthode appropriée pour scinder les besoins en capital entre l'activité cessible et l'activité non-cessible, car la méthode du ratio Cooke, qui est appliquée aux montants des engagements, induit, selon elles, une certaine linéarité en ne prenant pas suffisamment en compte la nature variée des différents risques sous-jacents.

Application de la méthodologie de la directive Solvabilité II avec modélisation interne pour les risques politiques

(63) Les règles de Solvabilité II relèvent de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice (29) (ci-après la "directive Solvabilité II").

(64) Afin d'opérer la scission des besoins en capital entre les activités cessibles d'une part et celles non-cessibles d'autre part, l'ONDD a développé en 2011 une méthodologie qu'il considère plus appropriée. Il s'agit de la formule standard de Solvabilité II (30), développée dans le cadre de la Quantitative Impact Study 5 (QIS 5), accompagnée d'une modélisation interne du besoin en capital pour couvrir le risque politique et calibrée pour satisfaire une solvabilité correspondant à un rating A et appliquée avec les paramètres correspondant à 2004.

(65) Selon les autorités belges, il peut être raisonnablement considéré qu'un investisseur privé avisé se serait fondé sur cette méthodologie en 2004.

(66) La formule standard de Solvabilité II QIS 5 a été appliquée par l'ONDD pour tous les risques à l'exception des risques politiques. Selon les autorités belges, le risque politique en assurance-crédit s'apparente à une forme de risque catastrophe. Or, selon les autorités belges, le risque catastrophe pour l'assurance-crédit est actuellement mal couvert par la formule standard de Solvabilité II QIS 5. Il est dès lors, selon elles, justifié de recourir à un modèle interne pour l'estimation du besoin en capital des risques politiques.

(67) Selon cette méthode, le besoin en capital de la SA Ducroire est estimé (31) à environ 80 à 99 millions d'EUR, entre 2005 et 2007, et à environ [125-150] millions d'EUR en 2009 sur la base du plan d'affaires (voir tableau 2 ci-dessous). La majorité de ce besoin en capital provient de la couverture du risque politique.

(68) Faisant suite à une demande de la Commission, les autorités belges ont estimé le besoin en capital de la SA Ducroire en appliquant la formule standard de Solvabilité II QIS 5 pour tous les types de risque (en ce compris, le risque politique). Dans ce cas, le besoin en capital de la SA Ducroire serait (32) inférieur de 23 à 25 millions d'EUR entre 2005 et 2007 et inférieur de [25-50] millions d'EUR pour 2009 (voir Tableau 2: ci-dessous).

Détermination du capital de la SA Ducroire par l'ONDD/les autorités belges pour les années 2005, 2007 et 2009 selon deux scénarios de croissance et selon différentes méthodes

<Emplacement tableau 2 >

(69) Dans leurs commentaires des 16 et 31 mai 2012, l'ONDD a précisé que, à la suite des décisions stratégiques prises entre 2007 et 2009 (par exemple, changement de stratégie de réassurance, évolution des paramètres des risques du portefeuille des risques non-cessibles) qui n'étaient pas prévues dans leur plan stratégique de 2004, des transferts internes de capital ont eu lieu des affaires non-cessibles vers les affaires cessibles.

3. Principe de l'investisseur privé en économie de marché

(70) Selon les autorités belges, l'apport en capital initial de l'ONDD lors de la constitution de la SA Ducroire satisfait le critère de l'investisseur privé en économie de marché.

Rentabilité selon les projections de 2004

(71) Dans la note d'avril 2004, l'ONDD escomptait, selon le scénario 1B tablant sur une croissance des activités de 6 %, un taux de rentabilité des capitaux propres ("return on equity" ou "ROE") de 1,3 % à 1,5 % pour les trois premières années d'activités de la SA Ducroire (2005, 2006, et 2007) en incluant les provisions d'égalisation, et de 2,2 % à 2,9 % pour ces mêmes années en excluant la provision d'égalisation.

Projections financières d'avril 2004 (périmètre: Zone 1 "10 pays adhérents" + Zone 2)

<Emplacement tableau 3 >

Source: l'ONDD. Il s'agit des projections financières figurant à l'annexe 8, page 70 (note intitulée "Création d'une société anonyme" présentée au Conseil d'administration de l'ONDD du 20 avril 2004) des observations des autorités belges du 1er juin 2011.

(72) Dans la note présentée à son conseil d'administration du 28 septembre 2004 - donc postérieure à la constitution de la SA Ducroire le 23 septembre 2004 - l'ONDD escomptait, selon le scénario "dynamique - croissance à 6 %", un ROE de 1,3 % à 1,9 % pour les trois années 2005, 2006, et 2007 en incluant les provisions d'égalisation, et de 2,8 % à 4,3 % pour ces mêmes années en excluant les provisions d'égalisation. Les projections financières de septembre 2004 présentent des résultats légèrement différents de celles d'avril 2004 car celles de septembre 2004 se basent sur un périmètre d'activités plus étendu (l'intégralité de la Zone 1). En outre certaines hypothèses ont été revues en septembre 2004.

Projections financières - septembre 2004 (périmètre: intégralité Zone 1 et Zone 2)

<Emplacement tableau 4 >

Source: l'ONDD. Il s'agit des projections financières figurant à la page 28 et à l'annexe 9 de la note intitulée "Lignes directrices stratégiques pour l'ONDD et sa SA" présentée au conseil d'administration de l'ONDD du 28 septembre 2004, soumise par les autorités belges le 1er juin 2011 en annexe 10 de leurs observations.

(73) Contrairement à la note d'avril 2004, le ROE est calculé sur la base de 100 millions d'EUR de capital libéré, sans tenir compte des 50 millions d'EUR supplémentaires investis mais non libérés.

(74) En ce qui concerne le ROE escompté pour l'activité des risques cessibles, les autorités belges ont expliqué que la ventilation telle qu'établie dans la note stratégique présentée au conseil d'administration de 28 septembre 2004 (37) ne doit pas être prise en compte pour l'analyse de la rentabilité des activités cessibles et non-cessibles. Les autorités belges ont expliqué (38) que ces projections sont aberrantes, puisque le niveau de sinistralité était fortement surestimé pour les risques devenus cessibles en 2004, tandis qu'il n'a pas été tenu compte de la possibilité pour un assureur d'ajuster les primes en cas de sinistralité élevée effectivement observée. Les autorités belges rappellent que le conseil d'administration de l'ONDD ne s'est pas basé sur la scission opérée dans l'annexe 9 de la note stratégique pour décider du niveau de capitalisation de la SA Ducroire.

Rentabilité selon les projections établies ex post en 2011

(75) Ces projections de 2004 n'ont dès lors pas servi de base pour la scission des projections des risques cessibles et non-cessibles soumise à la Commission en juin 2011. Les observations de juin 2011 se sont, quant à elles, basées sur l'historique antérieur à 2004 et sur les performances des concurrents de la SA Ducroire à l'époque. La Belgique est d'avis que l'approche utilisée dans les observations de juin 2011 reflète le mieux le raisonnement qu'aurait pu suivre un investisseur privé en 2004, tout en restant cohérente avec le résultat consolidé.

(76) Dans leurs observations de juin 2011, les autorités belges ont estimé la rentabilité pour les affaires cessibles par rapport au capital alloué à cette activité selon le modèle Solvabilité II (formule standard QIS 5 et modèle interne), méthode qui a été développée ex post à la suite de la demande de la Commission. Il est à noter que la différence entre le montant du capital minimum selon ce modèle, à savoir 82 millions d'EUR, et le capital effectivement libéré de 100 millions d'EUR a été affectée à l'activité cessible et non-cessible proportionnellement à leur part respective dans le capital minimum de 82 millions d'EUR. Il en résulte que le capital "ajusté" estimé par l'ONDD pour les risques cessibles s'élève à 9,8 millions d'EUR pour 2005 (39) (voir tableau 5 ci-dessous).

(77) Sur la base des projections financières revues et soumises par les autorités belges en 2011 et leurs estimations du capital alloué à l'activité relative aux risques cessibles comme expliqué au considérant 76, la rentabilité de l'activité des risques cessibles pour 2005-2007, telle que déterminée par les autorités belges est présentée ci-dessous:

Projections financières recalculées en 2011 (40)

<Emplacement tableau 5 >

(78) Le ROE est calculé par les autorités belges sur la base de 100 millions d'EUR de capital libéré, sans tenir compte des 50 millions d'EUR supplémentaires investis mais libérés uniquement en 2009.

(79) Au doute soulevé dans la décision d'ouverture qu'un investisseur privé demanderait une rémunération sur le capital non libéré étant donné qu'il le perdrait en cas de faillite, les autorités belges ont répondu qu'elles maintenaient leur position, à savoir que le capital de 50 millions d'EUR ne doit pas être pris en compte dans le calcul de la rentabilité jusqu'à ce qu'il soit effectivement libéré. Selon elles, la faillite (à supposer que celle-ci entraîne un appel du solde du capital souscrit) aurait pour seul effet de réduire la durée d'un tel placement. Elles ont également ajouté que, jusqu'à sa libération en 2009, l'ONDD était en mesure de placer librement ce capital de 50 millions d'EUR sur le marché afin de bénéficier d'un rendement correspondant.

(80) De plus, selon les autorités belges, un taux de placement de 2 %, utilisé dans les projections de 2004 et pris en considération dans les calculs présentés dans le Tableau 5, est inférieur à ce qu'un investisseur privé aurait vraisemblablement utilisé. En utilisant un taux de placement de 3,5 %, les autorités belges ont déterminé que la projection de rentabilité des affaires cessibles (ROE ajusté pour la provision d'égalisation) atteindrait entre 2005-2007 un niveau d'environ 9,7 à 10,4 % (contre environ 7,7 à 8,4 % avec un taux de placement de 2 %) (42).

L'utilisation du ratio ROR

(81) Les autorités belges estiment que le taux le plus adapté pour évaluer la rentabilité attendue de l'investissement est celui de l'Economic Return on Revenue (ci-après "ROR"), bien que ce taux soit absent des projections financières ex ante (plan d'affaires de l'ONDD). Ce taux se calcule en rapportant le revenu technique (avant dotation à la provision d'égalisation) au chiffre d'affaires (primes d'assurance). Selon les autorités belges, le ROR est le plus approprié dans la mesure où:

a) il se calcule avant la provision pour égalisation, imposée par les autorités prudentielles belges, qui vise à équilibrer les résultats dans le temps et à couvrir des pertes futures éventuelles résultant de l'activité future;

b) le ROR reflète exactement la rentabilité de l'activité d'assurance-crédit en l'isolant de la rentabilité purement financière. Il indique donc la rentabilité liée au "cœur" de l'activité d'assurance-crédit.

(82) Avec un ROR de 16,5 % et 18,5 % respectivement en 2005 et 2006, la SA Ducroire serait plus rentable (43) que les trois plus grands acteurs de l'assurance-crédit Coface, Euler Hermes et Atradius dont les ROR en 2005 et 2006 étaient respectivement de 9,7 % et 10,9 %, 16,0 % et 16,9 %, 9,3 % et 11,9 %.

Détermination de la rentabilité attendue

(83) En réponse à une remarque de la Commission qui faisait valoir qu'il était peu probable qu'un investisseur privé se base uniquement sur le ratio ROR pour apprécier la rentabilité de l'investissement qu'il envisage de consentir, les autorités belges ont proposé deux nouvelles méthodologies, afin de justifier que la rentabilité de la SA Ducroire était suffisante au moment de sa capitalisation. Il s'agit a) du modèle "Capital Asset Pricing Model" (ci-après "CAPM") (44), qui permet d'estimer le taux de rendement attendu par le marché pour un actif financier en fonction de son risque et b) d'un "benchmarking" de la rentabilité des assureurs de crédit.

(84) Selon le modèle CAPM, le coût du capital est déterminé selon la formule suivante:

Coût du capital = taux sans risque + prime de risque du capital

Coût du capital = taux sans risque + coefficient Bêta de l'actif (*) [prime de risque du marché]

Où le Bêta de l'actif représente la volatilité de la rentabilité de l'actif considéré rapportée à celle du marché

(85) Les autorités belges ont estimé le coût du capital de la SA Ducroire comme indiqué dans le graphique ci-dessous.

<Emplacement schéma>

(86) Selon les estimations de l'ONDD se basant sur le CAPM, un investisseur privé dans le secteur de l'assurance non-vie belge aurait exigé en 2004 une rentabilité de minimum 7-8 %.

(87) Pour réaliser le benchmark des rentabilités historiques du secteur, les autorités belges ont établi un échantillon d'assureurs en retenant ceux qui répondent aux critères suivants: a) acteurs européens, b) dont l'assurance-crédit est l'activité principale, c) qui sont actifs majoritairement dans le secteur des risques cessibles et ont une activité dans le secteur des risques non-cessibles, à l'exclusion des entreprises sujettes à une procédure d'aide d'Etat ou créées après 2004 et à l'exclusion des filiales d'une entreprise figurant dans l'échantillon. L'échantillon comprend 11 assureurs. Selon les autorités belges, pour les assureurs-crédit actifs majoritairement dans le secteur des risques cessibles, on observe un ROE moyen de 6 à 7,5 % selon la périodicité considérée (c'est-à-dire avec ou sans les années de crise). Le ROE moyen pour ces 11 assureurs en 2004 est de 7,8 % comparé à 13.3 % le ROE moyen des 3 acteurs de référence du marché (voir tableau 6).

Benchmark de rentabilité des assureurs-crédit soumis par la Belgique

<Emplacement tableau 6 >

(88) Selon les autorités belges, la rentabilité escomptée avant provision d'égalisation (ROE avant provision d'égalisation) de l'activité des risques cessibles, selon les projections financières recalculées par les autorités belges en 2011 sous le scénario 1B (voir tableau 5), est en ligne avec attentes de rentabilité qu'aurait eues un investisseur privé en 2004 (telles qu'estimées par les autorités belges sur la base du coût du capital selon le modèle CAPM et sur la base du benchmarking de la rentabilité des assureurs crédits, voir les considérants 86 et 87 respectivement).

Séparation des comptes

(89) A la suite de la demande de la Commission, exprimée dans la décision d'ouverture, de se conformer au point 4.3 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation imposant une gestion séparée et des comptes séparés pour les activités d'assurance des risques cessibles et des risques non-cessibles, les autorités belges ont répondu qu'une telle scission de comptes n'est pas requise. Après le 1er janvier 2005, les activités à court terme (risques cessibles et non-cessibles) sont exercées au sein de la SA Ducroire dans le cadre du transfert d'une activité existante. Selon les autorités belges, comme la SA Ducroire ne bénéficie plus du soutien de l'Etat, même pour l'activité relative aux risques non-cessibles qu'elle exerce, la Belgique est d'avis qu'il n'est pas nécessaire d'établir des comptes séparés.

V. APPRECIATION DE L'AIDE

V.1. EXISTENCE D'AIDES D'ÉTAT

(90) L'article 107, paragraphe 1, du TFUE prévoit que, sauf dérogations prévues par les traités, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.

(91) La Commission doit dans un premier temps analyser si les mesures en question constituent des aides d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE. Par conséquent, dans les prochaines sections, elle analyse les mesures au regard des différents critères constitutifs d'une aide.

V.1.1. Existence d'un avantage

V.1.1.1. Existence d'un avantage du fait de la garantie de l'État (Mesure 1) et de transferts internes éventuels de ressources en faveur des risques cessibles au sein de l'ONDD (Mesure 2)

(92) Selon les points 3.1 et 3.2 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation, la garantie d'État dont bénéficie une entreprise d'assurance-crédit à l'exportation est susceptible de lui conférer un avantage financier par rapport à ses concurrentes. Ainsi, l'enquête initiée le 23 février 2011 (voir le considérant 26) concernait notamment la garantie de l'État belge dont l'ONDD a bénéficié pour son activité relative aux risques cessibles.

(93) À partir du 1er septembre 2003, un compte dit "commercial" ne bénéficiant pas, selon les autorités belges, de la garantie de l'État a été affecté à l'activité de l'ONDD relative aux risques à court terme, en ce compris les risques cessibles.

(94) Comme il n'existait pas au sein de l'ONDD de comptes séparés permettant de distinguer l'activité d'assurance des risques cessibles et celle relative aux risques non-cessibles, les autorités belges ont été invitées à préciser la partie de la garantie de l'État pouvant être considérée comme allouée, jusqu'au 31 août 2003, à l'activité relative aux risques cessibles. Elles ont également été invitées à fournir les preuves que cette garantie aurait cessé à la date du 31 août 2003 et non lors de la création de la SA Ducroire le 1er janvier 2005.

(95) Les autorités belges ont affirmé que l'ONDD a cessé d'offrir une couverture de risques sur des débiteurs en "Zone 1" (52) en 1993. Après 1993, l'activité de l'ONDD visait exclusivement les risques non-cessibles. L'ONDD admettait à titre tout à fait exceptionnel la couverture de risques cessibles.

(96) Comme énoncé au considérant 34, la Belgique a précisé que l'activité relative aux risques cessibles au sein de l'ONDD avant mai 2004 était insignifiante. De plus, le très faible pourcentage de risques cessibles qui était alors couvert ne l'était qu'en raison du lien de ces risques avec un risque non-cessible. Le cas de figure visé (53) est le suivant: "Un assuré X vendait des biens à un intermédiaire A localisé en zone 1, lequel revendait les biens au client final B, situé en zone 2. Les biens étaient la plupart du temps directement livrés au client final B. Le paiement de la facture de l'assuré X par l'intermédiaire A était de facto lié au paiement de la facture de l'intermédiaire A par le client final B. Les assurés ne trouvaient généralement pas de couverture auprès d'un autre assureur crédit vu qu'il s'agissait d'opérations dépendantes du risque politique du pays où était localisé le client final B".

(97) Les autorités belges ont réaffirmé que ces risques ne trouvaient pas de couverture auprès d'autres assureurs-crédit privés.

(98) Au regard des éléments énoncés aux considérants 93 à 95, il est estimé que ces risques, bien que théoriquement qualifiés de cessibles (en raison de la relation principale entre l'exportateur assuré X, et l'intermédiaire A), sont à considérer dans la pratique comme des risques non-cessibles, étant donné les conditions de marché de cette période. En outre, avant mai 2004, ces risques étaient couverts par l'ONDD de manière tout à fait exceptionnelle puisqu'ils représentaient moins d'[0-2 %] des primes (sur la période 2000-2004) du portefeuille à court terme de l'ONDD (voir le considérant 34).

(99) Les autorités belges ont également apporté les preuves que la garantie de l'Etat dont bénéficiait l'ONDD pour son activité relative aux risques cessibles a cessé de courir à partir du 1er septembre 2003. En effet, cette garantie s'est éteinte dès le transfert des risques cessibles au compte commercial, compte pour lequel l'ONDD a obtenu l'agrément de l'OCA (54), précisément parce que ce compte ne bénéficiait pas de la garantie de l'Etat. L'Arrêté Royal définissant les activités exercées par l'ONDD pour son compte propre sans la garantie de l'Etat, publié le 1er septembre 2003, date à laquelle il est entré en vigueur, définit les opérations à imputer sur ce compte. Suite à l'entrée en vigueur de l'Arrêté Royal (55), toute couverture de risques par une police exportateur et d'une durée de moins de 2 ans est régie par l'article 3, 2 de la Loi de 1939 (activité pour le compte de l'ONDD sans la garantie de l'État).

(100) En conclusion, les doutes soulevés par la Commission dans la décision d'ouverture et qui concernaient l'existence d'un avantage pour l'activité d'assurance des risques cessibles du fait de la garantie de l'État sont levés. Il est, en effet, considéré que la garantie de l'Etat dont l'ONDD a bénéficié pour son activité relative aux risques cessibles jusqu'en août 2003 n'a pas conféré à cette activité un avantage concurrentiel par rapport à ses concurrents, puisqu'il n'existait pas d'activité réellement cessible. En outre, il n'y a eu aucune tentative de développer une activité réellement cessible sur la base de la garantie étatique. Il peut également être conclu que l'intégralité de l'activité relative aux risques à court terme a cessé de bénéficier de la garantie de l'Etat à partir du 1er septembre 2003.

(101) Il n'y a pas eu de transferts internes de ressources en faveur des risques cessibles au sein de l'ONDD étant donné qu'il n'existait pas d'activité des risques réellement cessibles. Il n'y a eu aucune tentative de développer une activité réellement cessible sur la base de transfert de ressources de l'activité non-cessible (voir le considérant 98). En conclusion, il n'y a pas d'éléments probants qui soutiennent l'existence de transferts de ressources en faveur des risques cessibles au sein de l'ONDD ou de quelconque avantage dont aurait pu bénéficier l'ONDD à la suite de tels transferts.

(102) En conclusion, la Mesure 1 et la Mesure 2 ne confèrent pas un avantage au sens de l'article 107 du TFUE. Par conséquent, elles ne constituent pas une aide d'Etat.

(103) Il en résulte que l'analyse des autres critères constitutifs d'une aide (ressources d'État, sélectivité, distorsion de concurrence) ne sera pas développée pour les Mesures 1 et 2 dans les parties ci-dessous.

V.1.1.2. Existence d'un avantage du fait de l'allocation de capital à la SA Ducroire (Mesure 3)

Champ couvert pour apprécier si l'allocation de capital à la SA Ducroire constitue une aide

(104) Selon la décision d'ouverture (voir les considérants 27 et 28 de la présente décision), les deux montants suivants doivent être déduits du montant de l'allocation initiale de capital de la SA Ducroire car ils ne constituent pas des aides:

a) la partie du capital supportant l'activité des risques non-cessibles (premier critère d'exclusion);

b)

la partie du capital profitant déjà, au sein de l'ONDD, à l'activité relative aux risques cessibles, et simplement transférée à la SA Ducroire avec les activités correspondantes. En effet, il s'agirait alors uniquement du changement de la forme juridique d'une activité économique préexistante, avec le capital s'y rattachant. Sur la base de l'approche suivie dans la décision sur la création de la Banque Postale (56), un tel transfert de capital n'octroie pas un nouvel avantage à l'activité économique en question et ne peut donc constituer une aide en tant que telle (deuxième critère d'exclusion).

(105) Pour suivre l'approche développée dans la décision d'ouverture, la Commission devrait commencer par appliquer ces deux critères d'exclusion.

(106) Cependant, la Belgique a invoqué un argument qui s'inspire du second critère d'exclusion et qui, s'il s'avérait correct, permettrait d'exclure immédiatement la qualification d'aide de l'ensemble de la mesure 3. La Commission va donc d'abord démontrer que cet argument n'est pas valable, avant d'appliquer les deux critères d'exclusion présentés dans la décision d'ouverture.

Rejet de l'affirmation de la Belgique selon laquelle la totalité des 150 millions d'EUR était liée à l'activité transférée en 2004

(107) En réponse à la décision d'ouverture, la Belgique a invoqué à son profit et amplifié le deuxième critère d'exclusion selon lequel le capital qui, au sein de l'ONDD, profitait déjà aux activités cessibles existantes juste avant leur transfert à la SA Ducroire le 1er janvier 2005 ne constitue pas une aide. Plus précisément, la Belgique considère que l'ensemble du capital initial de 150 millions d'EUR alloué à la SA Ducroire constituait le capital économique associé aux activités d'assurance à court terme (cessibles et non-cessibles) transférées. Elle considère que la création de la SA Ducroire avec son capital initial de 150 millions d'EUR n'est qu'un changement de forme juridique d'une activité existante et du capital s'y rapportant. La totalité de l'allocation initiale de capital ne serait donc pas une aide. Par conséquent, selon la Belgique, il n'y a pas lieu de vérifier comment ce capital a été utilisé par la suite par la SA Ducroire (c'est-à-dire, s'il a été utilisé pour les risques cessibles ou non-cessibles - premier critère d'exclusion) étant donné que ce capital ne saurait constituer une aide.

(108) Pour soutenir cette affirmation, les autorités belges font valoir que la souscription de 150 millions d'EUR au capital de la SA Ducroire était nécessaire, et ce, dès le début de 2005. Les autorités belges justifient ce niveau de capitalisation sur la base des "standards actuels" développés dans le cadre de l'adoption de la directive Solvabilité II (57) (méthode dite "standard" selon les paramètres techniques tels qu'établis dans une étude d'impact ("QIS 5" pour la Belgique, datant de mars 2011) pour tous les risques de la SA Ducroire à l'exception des risques politiques pour lesquels une modélisation interne a été utilisée afin de déterminer le besoin en capital pour couvrir ces risques. Comme indiqué dans la rubrique "Solvabilité II avec modélisation interne pour les risques politiques" du tableau 2, un capital de [125-150] millions d'EUR était nécessaire pour couvrir le niveau d'activité prévu en 2009.

(109) La Commission observe que la notion de "capital se rattachant aux activités transférées" est définie dans la décision de la Commission du 21 décembre 2005"Mesures liées à la création et au fonctionnement de la Banque Postale" (58). Dans ce cas, il a été conclu que le transfert ne comportait pas de capital nouveau car seuls les fonds propres attachés aux activités des services financiers de La Poste étaient transférés à l'entité juridique nouvellement créée "La Banque Postale". En d'autres termes, il s'agissait exclusivement des fonds propres existants et clairement précédemment affectés aux biens, droits et obligations transférés. L'analyse portait donc sur le capital qui était déjà formellement attaché aux activités transférées et non sur une estimation prospective du capital qu'il aurait été opportun d'attribuer à la nouvelle entité pour supporter son développement futur.

(110) Comme expliqué précédemment, l'activité relative aux risques à court terme (cessibles et non-cessibles) transférée à la SA Ducroire était gérée au sein de l'ONDD au travers du compte commercial depuis le 1er septembre 2003. Un capital de [45-70] millions d'EUR avait été affecté à ce compte. De plus, comme énoncé au considérant 99, l'ONDD a obtenu spécifiquement et uniquement pour le compte commercial (et le capital de [45-70] millions d'EUR y afférent) l'agrément du régulateur national des assureurs (l'OCA). Les règles et contrôle de l'OCA portaient entre autres sur le respect des règles de solvabilité (fonds de garantie minimum, marge de solvabilité à constituer) (59). Il s'ensuit que, sur la base des règles prudentielles en vigueur à l'époque, ces activités à court terme logées dans le compte commercial étaient suffisamment capitalisées.

(111) A ce propos, la Commission observe que, selon la note interne du 20 avril 2004 (60) sur la base de laquelle la décision de créer la SA Ducroire et de lui allouer un capital de 150 millions d'EUR a été prise, le capital strictement alloué à l'activité relative aux risques à court terme était le capital enregistré dans le compte commercial plus le bénéfice d'une période de 16 mois (du 1er septembre 2003 au 31 décembre 2004) estimé à [0-5] millions d'EUR. La note précise que "sur le capital de 150 millions d'EUR de la SA, [45-70] millions proviendraient du transfert des fonds propres du compte commercial". La Commission conclut donc qu'au moment de décider de créer la SA Ducroire, le capital qui pouvait être considéré comme formellement alloué aux activités à court terme au 31 décembre 2004 ne s'élevait qu'à [45-75] millions d'EUR (à [45-70] millions d'EUR plus le bénéfice estimé de [0-5] millions d'EUR). Dès lors, seul le transfert de ce capital pour un montant de [45-75] millions d'EUR constitue la partie du capital profitant déjà au sein de l'ONDD à l'activité relative aux risques à court terme et simplement transférée à la SA Ducroire. Ce transfert ne peut dès lors constituer un nouvel avantage pour cette activité et ne peut donc constituer une aide.

(112) La Commission rejette donc l'affirmation de la Belgique selon laquelle l'intégralité du capital initial d'un montant de 150 millions d'EUR constitue le capital simplement transféré, qui était déjà alloué au sein de l'ONDD à l'activité transférée et, ne peut dès lors être considéré comme un avantage. La Commission considère que la différence entre les [45-75] millions d'EUR et le capital effectivement souscrit de 150 millions d'EUR constitue donc un capital additionnel représentant un nouvel avantage pour cette activité.

(113) À titre subsidiaire, la Commission observe que les notes internes de 2004, qui ont soutenu la décision de l'ONDD de doter la SA Ducroire d'un capital de 150 millions d'EUR (largement supérieur aux [45-75] millions d'EUR affectés au compte commercial), indiquent que l'ONDD a considéré différents scénarios de croissance d'activités pour la future SA Ducroire. Le besoin en capital de 150 millions d'EUR a donc été déterminé sur la base d'hypothèses de croissance future des activités de la SA Ducroire. Il peut donc en être conclu que l'approche des autorités belges équivaut à exclure du champ d'analyse de l'existence d'un avantage l'ensemble du capital dont on pouvait estimer que la nouvelle entité aurait besoin pour soutenir son développement futur. Cette approche ne peut être acceptée. Seul le capital, dont bénéficiaient déjà formellement les activités transférées au sein de l'entité juridique existante (activités d'assurance à court terme au sein de l'ONDD), ne constitue pas un nouvel avantage puisque précisément les activités en question en bénéficiaient déjà. Inversement, tout capital additionnel constitue un nouvel avantage puisque l'activité en question ne bénéficiait pas de ce capital avant le transfert. La décision de créer la SA Ducroire et de lui allouer un capital de 150 millions d'EUR ne peut donc être considérée comme un simple changement de forme juridique d'une activité existante avec un simple transfert du capital alloué à l'activité transférée. Dès lors, l'affirmation des autorités belges selon laquelle dès 2004 on pouvait prévoir que la SA Ducroire aurait besoin d'un capital de 150 millions d'EUR en 2009 sur la base de la croissance attendue de ses activités est hors de propos. Les autorités belges ne démontrent en effet en rien que ce capital de 150 millions d'EUR était déjà alloué aux activités à court terme au sein de l'ONDD avant leur transfert à la SA Ducroire et que ce capital de 150 millions d'EUR n'inclut dès lors pas un nouvel avantage pour ces activités.

(114) À titre tout à fait subsidiaire, même si le capital nécessaire pour soutenir la croissance attendue des activités était un critère pertinent pour la présente analyse (ce que la Commission conteste), la Commission observe ce qui suit:

a) premièrement, les projections financières existantes en 2004 couvraient uniquement la période 2005-2007. Dès lors, même si le capital nécessaire pour soutenir la croissance des activités était un critère pertinent pour la présente analyse (ce que la Commission conteste), il ne pourrait être accepté qu'il soit basé sur le niveau attendu d'activité en 2009 puisque ce niveau d'activité n'avait même pas été estimé en 2004;

b) deuxièmement, la méthodologie de la directive Solvabilité II accompagnée d'une modélisation interne pour les risques politiques, proposée par la Belgique pour estimer le capital nécessaire ne peut pas être acceptée. En effet, cette méthode était absente des notes internes de 2004 sur lesquelles le conseil d'administration de l'ONDD du 20 avril 2004 s'est fondé pour décider de la création de la SA Ducroire et du capital à y allouer puisque cette méthode était inexistante à l'époque (sa date d'entrée en vigueur est seulement prévue pour le 1er janvier 2014). Elle a été appliquée par l'ONDD pour la première fois en 2011 et continue à être développée. Par conséquent, la modélisation interne pour les risques politiques n'a pas encore été validée par le régulateur d'assurance belge, contrairement aux exigences de la directive Solvabilité II (61). L'utilisation d'une méthodologie inexistante en 2004, telle que Solvabilité II, pour laquelle de nombreux paramètres de calcul ainsi qu'un calendrier de mise en œuvre n'ont pas encore été finalisés à ce jour (ils en sont encore au stade de la QIS) n'est pas appropriée. Considérer que le capital économique nécessaire à la SA Ducroire à sa création en 2005 pour continuer l'activité préexistante au sein de l'ONDD doit être déterminé sur la base des exigences de la directive Solvabilité II qui n'existaient même pas à l'époque et pour lesquelles les régulateurs auraient de toute façon prévu un régime de transition paraît excessif. De plus, en conclure autrement reviendrait à contredire la validation du niveau de capital (marge de solvabilité) (62) du compte commercial ([45-70] millions d'EUR) par le régulateur qui avait considéré à l'époque ce capital comme suffisant au regard des règles prudentielles en vigueur.

(115) Le conseil d'administration de l'ONDD du 20 avril 2004 s'est basé sur une autre méthode pour déterminer le capital nécessaire à la SA Ducroire, à savoir le ratio Cooke, tout en prenant en considération la nécessité de doter la SA Ducroire d'une crédibilité suffisante face à ses concurrents. En effet, le ratio retenu dans les calculs n'est pas de 8 % comme prescrit par les règles de Bâle I mais de 10 %. Ainsi, les calculs du besoin en capital faits en 2004 incluaient un tampon de sécurité de 2 %. Il est à noter que le capital ainsi déterminé pour la fin de l'année 2004 s'élevait à 66 millions d'EUR (63) et est donc bien inférieur aux 150 millions d'EUR de capital souscrit.

(116) A propos de l'utilisation du ratio Cooke pour déterminer le capital nécessaire, la Commission a critiqué, dans la décision d'ouverture, la pertinence d'appliquer des règles bancaires (comme le ratio Cooke) à des assureurs crédit, eu égard aux nombreuses différences entre les risques assumés par les assureurs crédit et par les banques (voir considérant 90 de la décision d'ouverture). A cet égard, la Belgique n'a pas apporté la preuve que les règles de Bâle (ratio Cooke) - qui, en droit, s'appliquent exclusivement au secteur bancaire - seraient en pratique appliquées par les organismes d'assurance-crédit ou recommandées par les agences de notation ou par les instances de contrôles des assurances.

(117) En ce qui concerne l'application de l'article 8 de la loi de 1939 sur l'ONDD, les autorités belges ont confirmé que cette loi ne s'applique pas à la SA Ducroire. De plus, cet article concerne uniquement les activités pour compte propre de l'ONDD avec la garantie de l'Etat ainsi que celles pour le compte de l'Etat.

(118) Bien que la Belgique se réfère à la méthode de Standard & Poor's, qui existait à l'époque pour déterminer les besoins en capital des assureurs-crédit, il est à noter que les autorités belges n'ont soumis aucune estimation de capital selon cette méthode. Elle n'a d'ailleurs pas été utilisée par l'ONDD en 2004.

(119) En conclusion, même à supposer que le capital nécessaire pour soutenir la croissance attendue des activités de la SA Ducroire soit un critère pertinent pour la présente analyse (ce que la Commission conteste), les autorités belges n'ont apporté aucun élément permettant de démontrer de manière probante que le besoin en capital relatif aux risques à court terme et transféré à la SA Ducroire devait être supérieur au capital existant sur le compte commercial de l'ONDD à la fin de 2004.

(120) Dans la présente section, la Commission a démontré qu'il fallait rejeter l'affirmation des autorités belges selon laquelle l'allocation d'un capital initial de 150 millions d'EUR à la SA Ducroire en 2004 constitue uniquement le transfert du capital qui profitait déjà à l'activité relative aux risques à court terme au sein de l'ONDD. La Commission a en effet conclu que le capital qui profitait déjà à l'activité relative aux risques à court terme au sein de l'ONDD avant le transfert de cette activité à la SA Ducroire s'élevait à [45-75] millions d'EUR et qu'il existait donc un capital additionnel de [75-100] millions d'EUR pour cette activité.

(121) Il convient à présent d'examiner l'application des deux critères d'exclusion décrits dans la décision d'ouverture. Le second critère d'exclusion sera d'abord développé, ensuite le premier.

Partie du capital profitant déjà, au sein de l'ONDD, aux risques cessibles, et simplement transférée à la SA Ducroire avec les activités correspondantes (deuxième critère d'exclusion décrit dans la décision d'ouverture)

(122) Dans le considérant 111, la Commission a conclu qu'au sein de l'ONDD un capital de [45-75] millions d'EUR était alloué à l'activité relative aux risques à court terme au 31 décembre 2004. Pour appliquer le deuxième critère d'exclusion, il faut donc estimer, sur les [45-75] millions d'EUR alloués à l'activité des risques à court terme fin 2004, la partie du capital relative aux risques cessibles (64). Comme décrit précédemment, ces risques cessibles étaient exclusivement composés de risques afférents à des débiteurs localisés dans les dix Etats ayant adhéré à l'Union européenne en mai 2004.

(123) Comme également décrit précédemment, le compte commercial qui bénéficiait d'un capital de [45-75] millions d'EUR fin 2004 ne contenait pas de comptes séparés permettant d'identifier précisément le capital profitant uniquement à l'activité relative aux risques cessibles. Il s'agit donc d'estimer la part des [45-75] millions d'EUR dont on peut raisonnablement considérer qu'elle profitait à l'activité relative aux risques cessibles.

(124) Selon les données soumises au régulateur en 2004, les montants des engagements nets étaient de 141,6 millions d'EUR pour les risques relatifs aux dix nouveaux Etats adhérents et de 661,4 millions d'EUR pour l'ensemble des polices exportateurs de court terme à la fin de 2004 (65). Sur la base d'une répartition des [45-75] millions d'EUR au pro rata sur la base des engagements nets, [10-25] millions d'EUR peuvent donc être considérés comme constituant le capital lié aux risques relatifs aux dix nouveaux Etats adhérents avant leur transfert du compte commercial de l'ONDD à la SA Ducroire.

(125) La Commission constate qu'une telle répartition du capital en fonction des engagements nets est cohérente avec l'approche suivie par l'ONDD lui-même en 2004 (66).

(126) La Commission observe également que les autorités belges et l'ONDD/SA Ducroire ont constamment affirmé au cours de la procédure que les risques non-cessibles requéraient, pour un montant assuré donné, plus de capital que les risques cessibles. Dès lors, le montant de [10-25] millions d'EUR constitue plutôt un plafond qu'un plancher. La Commission considère néanmoins raisonnable de retenir ce chiffre car il est cohérent avec l'approche suivie par l'ONDD lui-même en 2004.

(127) La Commission en conclut que, sur le montant de capital initial de 150 millions d'EUR, on peut considérer que le montant de [10-25] millions d'EUR ne constitue pas un avantage en faveur de l'activité des risques cessibles, car il profitait déjà à cette activité au sein de l'ONDD (67). Il s'agit dans ce cas uniquement du changement de forme juridique d'une même activité économique et du capital dont celle-ci bénéficiait. Le transfert vers la SA Ducroire de ce capital avec l'activité en question ne peut donc constituer une aide.

(128) Par analogie, il faut appliquer le même raisonnement au montant du capital relatif aux risques afférents à des débiteurs localisés en Roumanie et en Bulgarie. En effet, en 2007, il a y eu une reclassification des risques non-cessibles afférents à des débiteurs localisés en Roumanie et Bulgarie vers la catégorie des risques cessibles, du fait de l'adhésion de ces Etats à l'Union européenne. Le capital qui profitait déjà à ces risques lorsqu'ils n'étaient pas cessibles ne peut donc constituer un nouvel avantage du simple fait que ces risques sont devenus cessibles par la suite. Il convient donc d'exclure également ce capital de la qualification d'aide.

(129) Ainsi, le capital relatif aux risques non-cessibles devenus cessibles est exclu de l'analyse de l'existence d'un avantage. Dans leurs commentaires du 16 mai 2012, les autorités belges ont estimé le capital relatif aux risques afférents à des débiteurs localisés en Roumanie et Bulgarie à concurrence de [0-2] millions d'EUR en partant de l'hypothèse que ces risques étaient cessibles en 2005. Par contre, elles n'ont pas fourni d'estimation du capital associé à ces risques au 31 décembre 2006. Comme les risques en question n'étaient précisément pas cessibles en 2005, l'estimation des autorités belges du capital alloué à ces risques tend donc à être sous-estimée. Les comptes séparés recréés rétrospectivement par l'ONDD dans le cadre de la présente procédure (les commentaires du 16 mai 2012), font apparaître que le capital alloué aux risques non-cessibles diminue de [0-5] millions d'EUR en 2007 par rapport à 2006. Cette diminution s'explique par le changement de qualification des risques liés à la Roumanie et à la Bulgarie (considérés comme risques cessibles à partir de 2007), mais aussi par d'autres facteurs, comme le changement de politique de réassurance. Sur la base de l'ensemble des éléments disponibles, on peut raisonnablement considérer que le capital dont les risques liés à la Bulgarie et à la Roumanie bénéficiaient avant de devenir cessibles s'élevait à [0-5] millions d'EUR.

(130) Au vu de ce qui précède, la Commission conclut qu'un montant de [10-25] millions d'EUR profitait déjà aux risques cessibles avant le 1er janvier 2005 et que le transfert de ce capital avec les activités en question ne peut dès lors constituer un avantage. De même, un montant de [0-5] millions d'EUR profitait déjà aux risques devenus cessibles le 1er janvier 2007 (Roumanie et Bulgarie) avant qu'ils ne deviennent cessibles.

Partie du capital soutenant l'activité des risques non-cessibles (premier critère d'exclusion décrit dans la décision d'ouverture)

(131) Comme décrit précédemment, un capital de [45-75]millions d'EUR profitait déjà aux risques à court terme avant leur transfert à l'ONDD (voir considérant 120). Parmi ces [45-75] millions d'EUR, il a été conclu précédemment qu'on peut raisonnablement estimer la part des risques cessibles à [10-25] millions d'EUR. Dès lors, on peut raisonnablement estimer la part des risques non-cessibles à [35-50] millions d'EUR (dont [0-5] millions d'EUR, relatifs aux risques liés à la Bulgarie et à la Roumanie, sont devenus cessibles en 2007).

(132) Pour les mêmes raisons que celles expliquées au considérant 127, le transfert de l'ensemble des [45-75] millions d'EUR (y compris la part des risques non-cessibles estimée à [35-50] millions d'EUR) ne constituant pas un avantage, celui-ci est exclu de l'analyse de l'existence d'aide.

(133) En conclusion, sur le capital initial de 150 millions d'EUR alloué à la SA Ducroire, seuls [75-100] millions d'EUR constituent un capital additionnel, c'est-à-dire du capital nouveau. Seul l'octroi de ces [75-100] millions d'EUR pourrait donc constituer un avantage (voir considérant 120).

(134) Comme il est rappelé au considérant 65 de la décision d'ouverture, il est loisible aux Etats Membres de soutenir l'activité d'assurance de risques non-cessibles, étant donné que la Commission considère qu'il n'existe pas de marché pour ces risques. Il ne peut donc y avoir de distorsion de concurrence vis-à-vis d'autres assureurs. Cependant, la Commission observe qu'il n'existait aucune séparation des comptes entre l'activité des risques cessibles et celle des risques non-cessible au sein de la SA Ducroire. Formellement, aucun capital n'était alloué à l'activité des risques non-cessibles. Aucune partie du capital de 150 millions d'EUR n'a été isolée pour financer l'activité des risques non-cessibles. Dès lors, une approche purement formelle pourrait conduire à n'exclure aucune partie du capital additionnel de [75-100] millions d'EUR. Une telle approche serait d'autant plus justifiée que l'obligation d'introduire des comptes séparés est expressément prévue au point 4.3 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation qui était en vigueur depuis 1998. Cependant, il est manifeste qu'une partie importante des activités de la SA Ducroire concerne l'assurance des risques non-cessibles. La SA Ducroire n'aurait pas pu assurer ces risques sans capital approprié. Dès lors, en plus des [45-75] millions d'EUR (dont [35-50] millions d'EUR pour les risques non-cessibles), la Commission peut accepter d'exclure également de la qualification d'aide la partie du capital dont il peut être raisonnablement démontré qu'elle a été utilisée pour soutenir l'activité d'assurance des risques non-cessibles.

(135) Dans la décision d'ouverture, la Belgique a été invitée à mettre au point une méthode permettant de déterminer la partie du capital de la SA Ducroire pouvant être considérée comme soutenant l'activité des risques cessibles et celle soutenant l'activité des risques non-cessibles. Suite à cette demande de la Commission, les autorités belges ont soumis pour la période 2005-2011 un bilan et un compte de résultat séparés pour l'activité des risques cessibles et celle des risques non-cessibles. Le bilan des risques non-cessibles au 31 décembre 2011 comprend un capital de [70-110] millions d'EUR et celui des risques cessibles un capital de [40-80] millions d'EUR. Bien que la séparation des comptes se base sur certaines hypothèses ou données partiellement vérifiables dans un contexte de reconstruction rétrospective, les niveaux de capital pour l'activité des risques cessibles et non cessibles au 31 décembre 2011 sont considérés par la Commission comme étant raisonnables.

(136) La Commission accepte donc d'exclure de la qualification d'aide [70-110] millions d'EUR car de facto ils supportent une activité ne faisant pas l'objet de concurrence selon la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation.

(137) Le capital profitant aux risques à court terme non-cessibles est donc passé de [35-50] millions d'EUR fin 2004 à [70-110] millions d'EUR fin décembre 2011, soit une augmentation de [35-60] millions d'EUR. Comme le montant de [35-50] millions d'EUR de capital lié à l'activité des risques non cessibles inclut les [0-5] millions d'EUR relatifs aux risques liés à la Roumanie et à la Bulgarie, requalifiés comme cessibles en 2007, l'augmentation brute du capital bénéficiant aux risques non-cessibles est de [35-65] millions d'EUR. En d'autres termes, sur le capital additionnel de [75-100] millions d'EUR, [35-65] millions d'EUR ont de facto soutenu l'activité des risques non-cessibles.

Conclusion sur l'application des deux critères d'exclusion et sur le montant du capital supplémentaire

(138) Un montant de [70-110] millions d'EUR a été exclu de la qualification d'aide car ce montant a pu être considéré comme soutenant l'activité des risques non-cessibles à la date du 31 décembre 2011 (premier critère d'exclusion). Un montant de [10-25] millions d'EUR a également été exclu de la qualification d'aide car il a pu être considéré comme ne constituant pas un avantage vu qu'il profitait déjà aux risques cessibles avant le transfert de ces risques à la SA Ducroire le 31 décembre 2004 (deuxième critère d'exclusion). Par ailleurs, un montant de [0-5] millions d'EUR doit également être exclu car il bénéficiait déjà aux risques liés à la Bulgarie et à la Roumanie avant qu'ils ne deviennent cessibles le 1er janvier 2007.

(139) En conclusion, seuls 36,6 millions d'EUR de l'allocation initiale de capital de 150 millions d'EUR pourraient constituer un avantage et une aide d'état au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE.

(140) Une autre façon de présenter le résultat de 36,6 millions d'EUR consiste à soustraire, du capital initial de 150 millions d'EUR octroyé à la SA Ducroire, 1) les [45-75] millions d'EUR dont les risques à court terme profitaient déjà avant leur transfert à la SA Ducroire (y compris les [0-5] millions d'EUR liés aux risques afférents à des débiteurs établis en Roumanie et Bulgarie qui sont devenus cessibles le 1er janvier 2007); et 2) les [35-65] millions d'EUR additionnels qui soutenaient de facto les risques non-cessibles. On obtient dès lors 36,6 millions d'EUR.

(141) Cette analyse de la répartition du capital est présentée dans le graphique suivant:

<Emplacement schéma>

(142) A titre subsidiaire, la Commission observe ce qui suit. Les autorités belges affirment qu'à l'exception d'environ 7 à 13 millions d'EUR (voir tableau 2), l'intégralité du capital de 150 millions d'EUR était implicitement allouée en 2004 aux risques non-cessibles. Sur la base de cette première affirmation, la Belgique affirme que ce n'est que plus tard (en 2007 et 2008), qu'une partie du capital initialement alloué aux risques non-cessibles a été transférée vers les risques cessibles. La Belgique affirme dès lors que seuls ces transferts de capital pourraient constituer des aides et que le test de l'investisseur privé doit être appliqué à ces montants au moment de leurs transferts internes et non au moment de l'allocation initiale de capital en 2004. Ce raisonnement ne peut pas être accepté.

(143) En effet, lors de la création de la SA Ducroire et dans les années qui suivirent, le capital de 150 millions d'EUR n'a jamais été formellement alloué à l'activité relative aux risques cessibles et à celle relative aux risques non-cessibles respectivement. Ce capital pouvait être utilisé librement pour soutenir l'activité relative aux risques cessibles ou celle relative aux risques non-cessibles (dans des proportions indéfinies) selon les occasions du marché et les choix stratégiques de la SA Ducroire. L'allocation de capital entre l'activité des risques cessibles et celle des risques non cessibles n'a été recréée que rétroactivement dans le cadre de la présente procédure. Les documents de 2004, tels que soumis par les autorités belges, ne présentaient pas d'allocation du capital entre les différentes activités. La Commission ne peut donc accepter d'exclure de l'analyse de l'existence d'une aide une partie des [75-100] millions d'EUR de capital additionnel de la SA Ducroire sur la seule base du fait qu'à cette époque ce montant aurait pu servir à soutenir l'activité de risques non-cessibles. Comme indiqué précédemment, seule la partie du capital additionnel de [75-100] millions d'EUR dont il peut être démontré qu'elle a effectivement soutenu l'activité des risques non-cessibles peut être exclue de l'analyse de l'existence d'une aide.

(144) A titre tout à fait subsidiaire, la Commission observe que, même si l'on devait accepter l'argument de la Belgique selon lequel une partie du capital initial de la SA Ducroire était affectée aux risques non-cessibles et dès lors ne pouvait entrer dans le champ d'application de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE, cet argument ne s'appliquerait au montant de 36,6 millions d'EUR que si la Belgique parvenait à démontrer que le capital alloué aux risques non-cessibles était supérieur à [70-110] millions d'EUR. (En effet, pour calculer les 36,6 millions d'EUR, un montant de [70-110] millions d'EUR supportant l'activité relative aux risques non-cessibles a déjà été déduit des 150 millions d'EUR). Or, il est évident qu'un tel montant n'a jamais été alloué aux risques non-cessibles en 2004 puisque les documents internes indiquent qu'un capital de 100 millions d'EUR était suffisant pour couvrir l'ensemble des risques à court terme (non-cessibles et cessibles) jusqu'en 2007.

L'application du principe de l'investisseur privé en économie de marché

(145) Selon une jurisprudence constante, afin d'établir qu'une mesure accorde un avantage économique, il y a lieu d'apprécier si, dans des circonstances similaires, un investisseur privé dans une économie de marché d'une taille comparable à celle de l'entreprise concernée aurait procédé à un apport de capital de la même importance (68), eu égard notamment à l'information disponible et aux développements prévisibles lors de cet investissement.

(146) Dans le cas présent, il s'agit d'analyser si le capital supplémentaire de 36,6 millions d'EUR accordé en 2004 présentait une rentabilité suffisante pour convaincre un investisseur privé en économie de marché. Cependant, la rentabilité de ce capital supplémentaire ne peut être analysée séparément de l'ensemble du capital car ce capital supplémentaire résulte d'une division artificielle du capital de 150 millions d'EUR souscrit en 2004. Aucun flux de revenu précis ne peut être identifié comme provenant de ces 36,6 millions d'EUR. En d'autres termes, le profit d'une activité spécifique n'était pas assigné à ces 36,6 millions d'EUR, puisqu'il n'existait pas de comptes séparés. La Commission considère donc qu'afin d'appliquer correctement le test de l'investisseur privé, il faut vérifier que l'ensemble du capital de 150 millions d'EUR présentait une rentabilité attendue suffisante. Si tel n'est pas le cas, il faudra en conclure que les 36,6 millions d'EUR constituent un avantage.

(147) A titre tout à fait subsidiaire, une autre possibilité serait d'appliquer une méthode au pro rata sur le résultat généré, ce qui donnerait le même résultat.

(148) La Commission ne considère pas non plus qu'il faille analyser uniquement la rentabilité du capital additionnel de [75-100] millions d'EUR et exclure les [45-75] millions d'EUR alloués à l'activité des risques à court terme avant leur transfert à la SA Ducroire. En effet, l'ONDD aurait pu décider d'arrêter son activité liée aux risques à court terme et récupérer le montant de capital alloué à cette activité à l'époque, c'est-à-dire [45-75] millions d'EUR (69). Ces [45-75] millions d'EUR ne peuvent donc pas être considérés comme un coût supporté dans le passé et irrécupérable ("sunk cost").

(149) Dans les considérants suivants, la Commission démontrera que la rentabilité attendue des 150 millions d'EUR était insuffisante pour convaincre un investisseur privé d'effectuer un tel investissement. A titre subsidiaire, elle montrera que, même si on considère que l'activité des risques cessibles bénéficiait virtuellement d'un capital de [45-65] millions d'EUR (36,6 million EUR plus [10-25] millions d'EUR) et des bénéfices attendus liés à cette activité spécifique, la rentabilité attendue de cette activité était également insuffisante.

(150) Le critère de l'investisseur privé en économie de marché doit être appliqué ex ante. C'est au moment où l'apport en capital a été octroyé qu'il convient de se placer afin d'apprécier si un investisseur privé aurait lui aussi procédé à un tel apport. Dans l'appréciation du critère de l'investisseur privé, il convient de s'abstenir de tenir compte des développements postérieurs à l'apport en capital. En outre, la conformité au critère de l'investisseur privé en économie de marché peut être démontrée par un plan d'affaires ex ante sur la base duquel la décision d'investir a été prise (70). Selon la jurisprudence récente (71), un État membre ne peut invoquer que des éléments objectifs et vérifiables qu'il a pris en compte, préalablement ou simultanément à la décision de procéder à un investissement. Peuvent notamment être requis, à cet égard, des éléments faisant apparaître que cette décision est fondée sur des évaluations économiques comparables à celles qu'un investisseur privé rationnel, se trouvant dans une situation comparable, aurait fait établir avant de procéder audit investissement aux fins de déterminer sa rentabilité future. En revanche, des évaluations économiques établies après l'octroi dudit avantage, le constat rétrospectif de la rentabilité effective de l'investissement réalisé ou des justifications ultérieures du choix du procédé effectivement retenu ne sauraient suffire à établir qu'un État membre a pris la décision d'investissement comme un actionnaire privé en économie de marché.

(151) Etant donné qu'aucun investisseur privé n'a pris part à la mesure en cause et que la SA Ducroire n'est pas cotée en bourse, le paramètre dont la validité doit être appréciée est la rentabilité attendue de l'investissement, telle qu'elle pouvait être escomptée sur la base de l'information disponible et des développements prévisibles à l'époque (comme figurant, en principe, dans le plan d'affaires défini par l'ONDD en 2004). En effet, selon la jurisprudence de la Cour (72) et la pratique décisionnelle de la Commission (73), le fait que l'apport en capital soit prétendument nécessaire à la poursuite de l'activité de l'entreprise ou à la capitalisation adéquate de l'activité, en vertu des règles prudentielles ou d'une estimation des risques encourus, ne permet pas de considérer que le critère de l'investisseur privé en économie de marché soit rempli. Un investisseur privé dans des conditions normales de marché ne procéderait à un tel apport en capital que si la rentabilité attendue était suffisante, lors dudit apport, eu égard aux informations disponibles et aux évolutions prévisibles à ce moment précis (74). La Commission observe dès lors que les arguments avancés par la Belgique pour justifier qu'un niveau de capital de 150 millions d'EUR était "nécessaire" économiquement et/ou sur la base des règles prudentielles sont inopérants pour démontrer que cet investissement présentait une rentabilité suffisante pour un investisseur de marché.

(152) Les autorités belges fondent leur analyse de la rentabilité sur le plan d'affaires du 28 septembre 2004. Or, la création de la SA Ducroire date du 23 septembre 2004. Elle n'a cependant commencé réellement ses activités économiques que le 1er janvier 2005, vu que le portefeuille de risques à court terme a continué à appartenir à l'ONDD jusqu'au 31 décembre 2004, date à laquelle il a été transféré. On peut donc considérer que jusqu'à peu avant cette date, l'ONDD aurait pu revenir sur sa décision d'investissement dans cette activité en ne transférant pas les risques en question et en liquidant l'entité juridique nouvellement créée. Il est donc acceptable de prendre en compte le plan d'affaires de l'ONDD du 28 septembre 2004, ainsi que le demandent les autorités belges.

(153) Il ressort des notes et procès-verbaux de 2004 que la décision de l'ONDD de doter la SA Ducroire d'un capital de 150 millions d'EUR répondait essentiellement à la volonté de l'ONDD de doter sa filiale d'un capital initial jugé "suffisant" pour assurer le développement de ses activités et pour [...] - "un capital libéré de 100 millions d'EUR suffit pour exercer l'activité court terme polices globales exportateurs jusqu'en 2007 mais devra être revu après cette période" (75), sans qu'il soit réellement et précisément démontré que la rentabilité future attendue était satisfaisante du point de vue d'un investisseur privé. En termes d'analyse de la profitabilité attendue, seul un résultat positif anticipé pour l'ensemble des activités pour les trois premières années semble avoir suffi à convaincre l'ONDD de procéder à l'investissement.

(154) En effet, selon les projections du scénario B du plan d'affaires du 28 septembre 2004, l'ONDD escomptait un ROE sur la totalité des activités de 1,3 % à 1,9 % pour les années 2005, 2006 et 2007 selon le scénario "dynamique - croissance à 6 %" du plan d'affaires du 28 septembre 2004 (le ROE avant provision d'égalisation s'élevait à 2,8-4,3 %) (voir tableau 4). Il est à préciser que cette rentabilité est calculée sur la base d'un capital de 100 millions d'EUR sans tenir compte des 50 millions non libérés, ce qui rend le résultat de la rentabilité plus favorable qu'il n'est en réalité. Le taux de rentabilité attendu dans les projections financières du 20 avril 2004 n'était pas supérieur (voir tableau 3).

(155) Au vu de ce qui précède, il apparaît que la rentabilité attendue de la future SA Ducroire était insuffisante pour convaincre un investisseur privé en économie de marché de procéder à un tel investissement. En effet, la rentabilité attendue était inférieure au taux sans risque (rendement des obligations d'État belge à long terme) pour les trois premières années [le taux moyen des obligations d'Etat belge à long terme en 2004 était de 4,15 % (76)]. Même en prenant en compte la provision d'égalisation, le taux de rentabilité attendu ne faisait qu'atteindre le taux sans risque.

(156) Un investisseur privé en économie de marché n'accepterait une aussi faible rentabilité durant les premières années qu'à la condition qu'il puisse raisonnablement escompter une compensation ultérieure par des profits nettement supérieurs à ceux de la moyenne du secteur, de sorte que le retour total sur investissement (après application d'un taux d'actualisation approprié) soit suffisant (77).

(157) Or, aucune étude sérieuse n'existait en 2004 permettant d'escompter que cette faible rentabilité initiale serait compensée par une rentabilité beaucoup plus élevée les années suivantes. La Commission observe également que les projections financières disponibles à l'époque montraient une certaine linéarité des performances entre 2005 et 2007, ou du moins une croissance lente (voir tableau 4), et rien ne laissait dès lors présumer une amélioration très rapide des résultats pour les années postérieures à 2007. A cet égard, il est à noter que la filialisation de la SA Ducroire ne peut pas être considérée comme le lancement d'une nouvelle entreprise (au sens de "start-up"), car il a été prévu à l'époque qu'elle continuerait les activités précédemment exercées par la compagnie mère et les actifs et les passifs correspondants ont simplement été transférés de l'ONDD à la SA Ducroire dans ce but. Cette conclusion se base également sur la façon dont les projections financières ont été préparées à l'époque. Il en ressort qu'en 2004, l'ONDD, en faisant des projections financières de la future SA Ducroire, s'est basée sur les performances passées de l'activité en question (risques à court terme, y inclus risques cessibles) au sein de l'ONDD. Les hypothèses en termes de primes et de coûts ont été basées principalement sur la moyenne des données financières historiques des cinq années précédentes, sauf quelques ajustements liés aux changements de circonstances du marché, comme par exemple une diminution appliquée sur des primes pour les risques devenus cessibles en 2004 suite à l'adhésion à l'Union européenne de dix nouveaux Etats membres.

(158) En outre, il ressort des notes internes qu'il était prévu que le total du capital libéré de 100 millions d'EUR soit absorbé principalement par la croissance progressive des activités exercées par l'ONDD dans le passé et ceci jusqu'à la fin de l'année 2007 (voir considérant 61). Il s'agissait donc de la croissance organique des activités existantes (aucune expansion vers d'autres activités plus rentables n'a été prévue en 2004).

(159) En ce qui concerne le capital souscrit mais non libéré (de 50 millions d'EUR), aucun projet précis n'a été préparé pour l'utilisation de ce capital à l'époque et, ainsi, aucune projection n'a été faite sur la rentabilité attendue de ce capital. Par ailleurs ni l'acquisition de KUP ni plus généralement une stratégie d'acquisitions n'a été prise en considération en conférant le capital à la SA Ducroire.

(160) Il faut également souligner que les projections pour la période 2005-2014 n'ont été faites qu'ex post, après que la Commission a initié la procédure formelle d'examen. En effet, les seules projections financières réalisées ex ante par l'ONDD étaient limitées à une période de trois ans (les trois premières années d'activité de la future SA Ducroire, à savoir les années 2005, 2006 et 2007), période relativement courte pour satisfaire aux exigences d'un investisseur privé.

(161) La Commission conclut que la rentabilité attendue du capital était insuffisante, et dès lors que les 36,6 millions d'EUR constituent un avantage en faveur de l'activité des risques cessibles de la SA Ducroire.

(162) A titre subsidiaire, la Commission analyse dans les considérants suivants la rentabilité attendue de l'activité des risques cessibles.

(163) La Commission observe que, selon l'annexe 9 de la note stratégique du 28 septembre 2004, les projections financières telles qu'établies par l'ONDD prévoyaient un résultat négatif pour l'activité d'assurance relative aux risques cessibles (c'est-à-dire pour les pays à risques cessibles selon la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation à court terme) (78) pour toute la période projetée de 2005 à 2007 de sorte que l'activité des risques non-cessibles subventionnait l'activité des risques cessibles. On en déduit donc, que l'estimation de la profitabilité des risques cessibles était moindre que celle estimée pour la totalité des activités, elle-même insuffisante pour un investisseur privé. La Commission conclut donc que même en analysant séparément la rentabilité attendue de l'activité de risques cessibles sur la base des projections financières existantes en 2004 (79), il faudrait conclure que la rentabilité attendue était négative, et donc manifestement insuffisante pour convaincre un investisseur privé de procéder à un tel investissement.

(164) Les autorités belges font valoir, pour les raisons évoquées au considérant 74, que les projections de septembre 2004 ne doivent pas être prises en compte pour l'analyse de la rentabilité des activités cessibles et non-cessibles car "elles donnent des résultats aberrants". Les autorités belges affirment que la méthode, telle que développée en 2011, pour scinder les risques cessibles et non-cessibles reflète mieux le raisonnement qu'un investisseur privé aurait pu suivre au moment de la décision en 2004. Les autorités belges semblent donc indiquer a posteriori que les projections de 2004 pour les risques cessibles (80) reposaient sur des hypothèses erronées. En effet, la sinistralité prévue était élevée mais constante alors que le niveau des primes prévu (censé rémunérer les risques encourus), était fortement réduit. Il en résultait un taux de sinistres ("Loss ratio") de 94 %. La Commission ne peut accepter une modification rétrospective de la rentabilité projetée d'une activité (voir considérant 150). A titre subsidiaire, la Commission observe que cet argument des autorités belges revient à confirmer qu'il n'y a pas eu d'analyse sérieuse séparée de la rentabilité attendue pour les risques cessibles et que dès lors, pour une application correcte du test de l'investisseur privé, il convient d'analyser la profitabilité de l'ensemble du capital accordé à la SA Ducroire.

(165) La Commission observe à titre tout à fait subsidiaire que, même si l'on prenait en considération les projections du résultat de l'activité des risques cessibles telles que revues et soumises par les autorités belges en 2011 (81) - ce que la Commission n'accepte pas puisqu'elles n'existaient pas à l'époque de l'investissement - et, que l'on divisait ce résultat par le capital relatif aux risques cessibles tel qu'estimé par la Commission (c'est-à-dire [45-65] millions d'EUR), le ROE estimé pour 2005-2007 resterait en dessous du taux sans risque.

(166) L'estimation de la rentabilité attendue, telle qu'indiquée au considérant précédent, se fonde sur l'intégralité du capital estimé relatif aux risques cessibles, en ce compris la partie non libérée du capital, contrairement aux calculs de rentabilité faits par l'ONDD. L'argument des autorités belges (voir le considérant 79, selon lequel la partie du capital souscrite en 2004 mais libérée en 2009 ne doit pas être prise en considération dans les calculs de profitabilité estimée avant 2009 ne peut être accepté. En effet, bien que ce capital n'ait pas été libéré en 2004, il pouvait être appelé à tout moment puisqu'il avait été souscrit dès la création de la SA Ducroire. Un investisseur privé en économie de marché demanderait donc une rémunération pour les risques encourus liés à cet investissement, étant donné qu'il pourrait perdre une partie ou l'intégralité de son investissement en cas de faillite. Les calculs des autorités belges ne peuvent donc être acceptés.

(167) Toutefois, il doit être reconnu que cet investisseur peut placer le montant du capital non libéré correspondant à son investissement, et ce aussi longtemps que ce capital n'a pas été appelé, dans des placements sans risque, liquides à court ou à moyen terme, et dès lors bénéficier du taux de rentabilité applicable pour ce type de placement. Il en résulte qu'un tel investisseur escompterait une rémunération pour un investissement en capital non libéré correspondant uniquement à la prime de risque de la société dans laquelle il investit (c'est-à-dire la différence entre le taux de rentabilité attendu d'un investissement en capital dans une entreprise similaire et le taux de rentabilité de placements sans risque liquides de court à moyen terme) (82).

(168) En conséquence, la rentabilité attendue d'un investissement en capital, qui est partiellement libéré, doit être estimée en prenant en compte l'intégralité du capital souscrit, mais en ajustant le résultat d'un taux de rendement attendu pour le capital non libéré. La Commission a simulé différents scénarios dont le cas le plus favorable pour la rentabilité attendue, c'est-à-dire celui qui consiste à accepter que, sur les [45-65] millions d'EUR profitant à l'activité relative aux risques cessibles, seuls [10-25] millions d'EUR étaient libérés en 2004 (c'est-à-dire le capital profitant déjà à l'activité relative aux risques cessibles au sein de l'ONDD) et le surplus de 36,6 millions d'EUR était considéré comme capital non libéré et n'exigeait donc qu'une prime de risque. Cette simulation a été faite en ajoutant, à la profitabilité attendue des activités cessibles, le revenu correspondant au rendement d'un investissement sans risque à moyen terme d'un montant de 36,6 millions d'EUR. Plus précisément, au résultat prévisionnel des activités cessibles (83) est ajoutée la partie du capital non libérée multipliée par le taux de rentabilité attendue à l'époque pour des placements sans risque liquides à moyen terme (84). Ensuite cette somme est divisée par le capital moyen profitant à l'activité relative aux risques cessibles. Ainsi, on obtient une rentabilité attendue sur les capitaux propres moyens ("return on average equity" ou "ROAE") estimée pour l'investissement à environ 4 % pour 2005-2007. La rentabilité attendue, ainsi calculée, est à peine égale au taux moyen des obligations d'Etat belges à long terme en 2004 (voir considérant 155).

(169) Même en utilisant un taux de placement de 3,5 %, comme suggéré par la Belgique (voir considérant 80), la rentabilité attendue ne changerait pas significativement et n'atteindrait pas le coût du capital estimé par la Belgique elle-même.

(170) La rentabilité estimée (mentionnée au considérant 168) tient compte des dotations pour la provision pour égalisation contrairement à ce que les autorités belges préconisent. Comme la constitution de cette provision, imposée par les autorités prudentielles belges, vise à équilibrer les résultats dans le temps et à couvrir des pertes futures éventuelles résultant de l'activité future, il est plus approprié d'en tenir compte dans le calcul de la rentabilité. L'approche de la Commission est conforme à l'approche comptable, qui considère cette provision comme un coût qui réduit le profit. Même si elle n'était pas prise en compte (comme charge dans l'estimation du profit), la rentabilité attendue n'atteindrait pas le coût du capital estimé par les autorités belges elles-mêmes (dans la présente décision, la Commission ne se prononce pas sur la validité de l'estimation faite par les autorités belges du coût du capital vu que le raisonnement exposé dans la présente décision ne repose pas sur ce chiffre).

(171) Il apparaît donc que même en utilisant les éléments avancés par les autorités belges - éléments que la Commission considère comme erronés -, la rentabilité attendue de l'activité liée aux risques cessibles était insuffisante pour convaincre un investisseur privé en économie de marché de procéder à un tel investissement.

(172) A titre subsidiaire, s'agissant de la méthode préconisée par les autorités belges, dans le cadre de leur réponse à la demande de renseignements de la Commission de décembre 2007, pour estimer la rentabilité, à savoir le ratio ROR, la Commission relève que ce ratio n'a pas été utilisé dans les projections financières ex ante (le plan d'affaires) de l'ONDD. De plus, un tel ratio met en évidence le revenu technique sur le chiffre d'affaires, ne prend pas en compte le capital investi et n'indique pas la profitabilité en rapport avec celui-ci. Il ne tient pas compte non plus du résultat des activités purement financières, qui fait pourtant partie du profit comptable et distribuable aux actionnaires. Un investisseur de fonds propres (tel qu'un actionnaire) n'aurait donc pas eu recours à ce seul taux - qui n'indique pas la rentabilité des fonds propres ou de celle des montants investis - pour apprécier la rentabilité de l'investissement qu'il aurait envisagé de consentir.

(173) En conclusion, les 36,6 millions d'EUR constituent un avantage accordé par l'ONDD à la SA Ducroire sous la forme de capital, qu'elle n'aurait pas pu obtenir sur le marché aux mêmes conditions.

V.1.2. Imputabilité et ressources d'État

(174) L'allocation de capital en faveur de la SA Ducroire est une décision de l'ONDD imputable à l'État belge puisque l'ONDD est une "institution publique autonome" au sens du droit public belge, instituée par une loi organique du 31 août 1939. Les membres de son conseil d'administration sont nommés (par arrêté délibéré en conseil des ministres) et peuvent être révoqués par le Roi des Belges (qui fixe également leurs indemnités et émoluments) sur proposition, pour la plupart d'entre eux, des ministres fédéraux de tutelle et du gouvernement régional des trois régions de Belgique (85). Qualifiés de "délégués ministériels" les membres du conseil d'administration nommés sur proposition des ministres de tutelle peuvent, lors des délibérations du conseil d'administration, suspendre les décisions qu'ils jugeraient contraires aux intérêts de l'État. Dans ce cas, le délégué ministériel qui a suspendu la décision fait immédiatement rapport au ministre duquel il tient son mandat. Enfin, l'ONDD bénéficie de la garantie de l'État belge et peut intervenir pour le compte de l'État belge.

(175) L'État belge, représenté au conseil d'administration de l'ONDD et averti des décisions qui y sont prises, a donc été directement impliqué dans la mesure d'allocation de capital à la SA Ducroire par l'ONDD. Les autorités belges n'ont pas contesté l'imputabilité à l'État belge de la mesure d'allocation de capital.

(176) L'allocation de capital à la SA Ducroire par l'ONDD, organisme public dont le comportement est imputable à l'État belge, constitue donc une ressource d'État au sens de l'article 107 du TFUE.

V.1.3. Sélectivité

(177) L'allocation de capital intervenue en 2004 est sélective dès lors qu'elle profite directement et seulement à la SA Ducroire.

V.1.4. Distorsion de concurrence

(178) Dès lors que l'ONDD a procédé à l'allocation de capital en cause sans escompter une rentabilité suffisante, la SA Ducroire a bénéficié d'un avantage concurrentiel par rapport à des organismes privés d'assurance-crédit dont les actionnaires attendent un retour sur leur investissement qui soit à la hauteur du retour sur investissement qu'ils pourraient obtenir d'investissements comparables.

(179) Surtout, la SA Ducroire n'aurait pas pu se procurer un tel capital sur le marché dans la mesure où la rentabilité de l'investissement était insuffisante. Cela signifie que, sans le capital apporté par l'État via l'ONDD, la SA Ducroire n'aurait pas pu étendre ses activités sur le marché comme elle l'a fait.

(180) À cet égard, le point 3.2 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation précise que les apports en capital par l'État accordés à certaines entreprises, et qui comportent un élément d'aide d'État si celui-ci n'agit pas comme un investisseur privé en économie de marché, faussent la concurrence.

(181) Conformément à la jurisprudence de la Cour, une amélioration de la position concurrentielle d'une entreprise à la suite d'une aide d'État constitue généralement la preuve que la concurrence est faussée avec les autres entreprises qui n'ont pas bénéficié d'une aide semblable (86).

(182) Le soutien apporté par l'État à l'ONDD sous forme d'allocation de capital en faveur des risques cessibles fausse ou menace donc de fausser la concurrence.

V.1.5. Affectation du commerce entre États membres

(183) La SA Ducroire se trouve en concurrence avec d'autres entreprises de l'Union européenne sur le marché de l'assurance-crédit. Il en allait de même de l'ONDD en ce qui concerne les risques cessibles avant que la SA Ducroire se voie transférer les activités d'assurance-crédit de l'ONDD pour les risques à court terme, y compris les risques cessibles.

(184) De plus, l'ONDD et la SA Ducroire sont actives dans les autres États membres, notamment grâce à l'acquisition de KUP, la branche commerciale de l'agence nationale tchèque d'assurance-crédit à l'exportation.

(185) Le point 3.2 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation indique que lorsque l'État apporte à un organisme d'assurance-crédit à l'exportation, en ce qui concerne les risques cessibles, une garantie ou du capital sans agir comme un investisseur privé le ferait en économie de marché, une telle garantie ou un tel apport de capital constitue une aide faussant les échanges intracommunautaires.

(186) Selon une jurisprudence constante, il y a affectation des échanges entre Etats membres dès lors que le ou les entreprise(s) bénéficiaires de l'aide exercent leurs activités dans un domaine ouvert à la concurrence et qui fait l'objet d'échanges entre États membres (87).

(187) Le fait que, à l'origine de cette procédure, un concurrent d'un autre Etat Membre que la Belgique se soit plaint de la distorsion de concurrence créée par l'intervention de la SA Ducroire dans un troisième Etat Membre (République tchèque) ne fait que confirmer que la SA Ducroire est active dans un secteur sujet aux échanges entre Etats Membres.

(188) Les échanges entre les États membres sont donc suffisamment affectés par la Mesure 3.

V.2. ILLEGALITE DES AIDES EVENTUELLES

(189) À la lumière de ce qui précède, la Mesure 3 constitue une aide.

(190) La Commission estime que cette aide est une aide nouvelle qui ne lui a pas été notifiée au préalable, donc une aide illégale.

(191) L'ONDD a souscrit le capital en cause en septembre 2004 et la SA Ducroire s'est vu transférer l'activité relative aux risques à court terme (en ce compris les risques cessibles) le 1er janvier 2005.

(192) Cette mesure:

- est donc postérieure à la date du 17 septembre 1998 à compter de laquelle la Belgique est tenue, du fait de son acceptation de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation, de ne pas accorder d'aide nouvelle, et

- ne bénéficie pas de la prescription prévue par l'article 15 du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d'application de l'article 93 du traité CE puisqu'elle a été adoptée il y a moins de 10 ans.

(193) La partie du capital, à hauteur de 36,6 millions d'EUR accordée par l'ONDD à la SA Ducroire, qui n'a pas été notifiée au préalable à la Commission, constitue donc, dès l'origine, une aide nouvelle illégale.

V.3. ÉVALUATION DE LA COMPATIBILITE DES AIDES EVENTUELLES AVEC LE MARCHE INTERIEUR

(194) La Commission vérifie la compatibilité de la Mesure 3 selon les dispositions de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation, applicable à cette période. La nouvelle communication aux États membres concernant l'application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne à l'assurance-crédit à l'exportation à court terme (ci-après "la nouvelle communication sur l'assurance-crédit à l'exportation"), publiée le 19 décembre 2012, s'applique à compter du 1er janvier 2013.

(195) En principe, selon les points 3.2 et 4.1 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation, les dérogations prévues par les dispositions du traité relatives aux aides d'État ne s'appliquent pas aux aides consenties pour l'assurance des risques cessibles. En effet, ces aides faussent certes la concurrence entre assureurs mais entraînent surtout "des différences entre les États membres dans la couverture d'assurance disponible pour les risques cessibles; de ce fait, [elles] faussent la concurrence entre les entreprises des États membres et exercent des effets secondaires sur les échanges intracommunautaires, qu'il s'agisse d'exportations intracommunautaires ou à destination de pays tiers. Les dérogations prévues à l'article 92 du traité ne s'appliquent pas aux aides consenties pour l'assurance des risques cessibles. Les effets de distorsion exercés par ces aides dans la Communauté ne sont pas compensés par les avantages qu'il peut y avoir sur le plan national ou communautaire à soutenir les exportateurs" (88). En d'autres termes, ces aides ne sont en principe éligibles à aucune des exemptions prévues à l'article 107, paragraphe 3, du TFUE, en particulier à celle prévue à l'article 107, paragraphe 3, point c) - parce qu'elles constituent une distorsion trop importante de la concurrence au sein du marché intérieur.

196) De plus, l'aide en question ne remplit pas les conditions pour être éligible à l'une ou plusieurs des exemptions prévues à l'article 107, paragraphe 3, du TFUE. En particulier, comme il a été indiqué dans la décision d'ouverture, l'aide en question ne peut pas constituer une aide au sauvetage ou à la restructuration selon les Lignes directrices communautaires concernant les aides d'État au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté (89), notamment pour les raisons suivantes:

1) les autorités belges n'ont pas prouvé que la SA Ducroire était éligible à une telle aide, notamment, qu'elle était en difficulté au sens des lignes directrices concernant les aides d'État au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté. Il est également à noter que selon le point 12 de ces lignes directrices, les entreprises considérées comme nouvellement créées ne sont pas éligibles à une aide d'Etat au sauvetage ou à la restructuration.

2) l'aide n'a pas été limitée au minimum nécessaire. En particulier, l'allocation de capital à la SA Ducroire était suffisamment élevée pour lui permettre de procéder à des acquisitions. Le plan d'affaires tel que présenté en 2004, sous forme de notes internes, ne prévoyait pas de contribution propre du bénéficiaire;

3) le plan d'affaires pour la SA Ducroire ne prévoyait pas de mesures limitant les distorsions de concurrence.

(197) Les dispositions de la nouvelle communication sur l'assurance-crédit à l'exportation ne sont pas de nature à modifier l'évaluation de la Commission.

(198) En conséquence, la mesure en cause ne peut pas être déclarée compatible avec le marché intérieur en vertu de l'article 107, paragraphe 3, du TFUE.

V.4. L'OBLIGATION D'ETABLIR ET DE MAINTENIR UNE GESTION ET UNE COMPTABILITE SEPAREE

(199) Selon le point 4.3 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation, dans la mesure où l'activité de risques non-cessibles bénéficie du soutien de l'Etat, pour assurer que le capital alloué à l'activité relative aux risques non-cessibles ne profite pas à l'activité relative aux risques cessibles et ainsi ne fausse pas la concurrence, la compagnie devrait, à tout le moins, disposer d'une gestion séparée et tenir des comptes séparés pour les activités d'assurance des risques cessibles et celles des risques non-cessibles.

(200) Selon les autorités belges, les activités à court terme sont exercées depuis le 1er janvier 2005 au sein de la SA Ducroire dans le cadre du transfert d'une activité existante avec son capital existant (sans allocation d'un capital supplémentaire). A titre subsidiaire, la Belgique considère que le capital a été accordé selon des termes acceptables pour un investisseur privé. Comme, selon les autorités belges, la SA Ducroire ne bénéficie pas du soutien de l'Etat - même pour l'activité relative aux risques non-cessibles qu'elle exerce -, il ne serait pas nécessaire d'établir des comptes séparés.

(201) Dans la section V.1.1.2, il a été conclu que le capital alloué à l'activité transférée s'élevait à [45-75] millions d'EUR et qu'il y avait donc un capital additionnel de [75-100] millions d'EUR, dont [35-65] millions d'EUR profitant de facto à l'activité relative aux risques non-cessibles. Ces [35-65] millions d'EUR ont été exclus de la qualification d'aide pour cette raison. L'argument des autorités belges selon lequel l'activité des risques non-cessibles ne bénéficie pas d'un soutien étatique doit donc être rejeté puisque l'existence d'un capital additionnel dont a bénéficié pour partie l'activité des risques non-cessibles a pu être démontrée. De plus, les projections financières de 2004 sur l'ensemble de l'activité de la SA Ducroire prévoyaient une rentabilité attendue inférieure au taux sans risque de l'époque (90). La rentabilité attendue était donc insuffisante pour satisfaire aux exigences d'un investisseur privé en économie de marché. Il peut donc être conclu que l'activité relative aux risques non-cessibles a continué à bénéficier d'un soutien étatique.

(202) Comme l'activité des risques non-cessibles a bénéficié et bénéficie d'un soutien étatique, la SA Ducroire aurait dû dès sa création se conformer au point 4.3 de la communication sur l'assurance-crédit imposant une gestion et une comptabilité séparées permettant de distinguer les activités relatives aux risques cessibles et celles relatives aux risques non-cessibles et ce tant qu'elle exerce son activité relative aux risques cessibles. Les dispositions de la nouvelle communication sur l'assurance-crédit à l'exportation maintiennent cette obligation (cf. point 15 de la nouvelle communication sur l'assurance-crédit à l'exportation).

(203) La SA Ducroire était et reste donc toujours liée par cette obligation. Une gestion séparée et des comptes séparés pour l'activité des risques non-cessibles et celle des risques cessibles doivent donc être introduits immédiatement. A défaut, le soutien de [35-65] millions d'EUR octroyé à l'activité relative aux risques non-cessibles n'échapperait plus à la qualification d'aide. En effet, la conclusion de la présente décision selon laquelle ce montant de [35-65] millions d'EUR profite à l'activité relative aux risques non-cessibles est fondée sur certaines hypothèses partiellement non vérifiables dans un contexte de reconstruction rétrospective de comptes séparés (en effet, il n'existe formellement aucune séparation des comptes au sein de la SA Ducroire). La Commission n'acceptera plus une telle reconstruction rétrospective si elle doit à nouveau se pencher sur l'utilisation du capital de la SA Ducroire dans le futur. L'obligation de tenir une gestion séparée et des comptes séparés vise précisément à ne pas devoir recourir à un tel travail rétrospectif reposant nécessairement sur un certain nombre d'hypothèses partiellement non vérifiables.

(204) La présente décision et en particulier le calcul du montant de 36,6 millions d'EUR se basent sur des comptes (bilan et comptes de résultat) séparés pour les risques cessibles et non-cessibles au 31 décembre 2011 tels que soumis par les autorités belges en mai 2012. Il ne serait donc pas acceptable que l'introduction d'une gestion séparée et de comptes séparés se fasse sur la base d'autres hypothèses et méthodes que celles utilisées pour déterminer les montants soumis dans le cadre de la présente procédure. En particulier, il ne serait pas acceptable d'allouer à l'activité relative aux risques non-cessibles moins de capital - donc plus de capital à l'activité relative aux risques cessibles - que celui mentionné dans le bilan séparé au 31 décembre 2011 soumis par les autorités belges en mai 2012.

(205) A titre subsidiaire, la Commission souligne que l'absence de comptes séparés depuis la création de la SA Ducroire a considérablement compliqué l'analyse de la Mesure 3 et a obligé la Commission à effectuer son analyse à partir de certaines hypothèses. Etant donné que l'obligation de tenir des comptes séparés incombait à la SA Ducroire, cette dernière ne saurait reprocher à la Commission d'avoir pris certaines hypothèses ou d'avoir développé une approche complexe dans le cadre de son analyse. En effet, en l'absence de cette approche complexe, la Commission aurait pu simplement considérer l'ensemble des [75-100] millions d'EUR comme étant constitutif d'un avantage au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE.

V.5. L'OBLIGATION QUE L'ACTIVITE NON-CESSIBLE NE CONTRIBUE PAS AU REMBOURSEMENT DE L'AIDE

(206) Dans la présente décision, la Commission a exclu de la qualification d'aide la partie du capital profitant de facto à l'activité relative aux risques non-cessibles, même si cette partie du capital constituait un soutien qui ne répondait pas aux exigences d'un investisseur privé. Le montant de l'aide incompatible ne comprend donc pas le soutien aux activités non-cessibles. Il est donc dans la logique de la présente décision que le remboursement de l'aide incompatible soit strictement financé par les activités cessibles et le capital s'y rapportant, seul moyen permettant de rétablir la situation concurrentielle sur le marché des risques cessibles qui existait avant l'octroi de l'aide incompatible. Comme indiqué précédemment, cette récupération doit se faire sur la base de comptes séparés de manière cohérente avec les commentaires des autorités belges de mai 2012.

VI. CONCLUSIONS

(207) La Commission constate que, parmi les trois mesures sur lesquelles portait la procédure formelle d'examen, les Mesures 1 et 2 (la garantie de l'État et les transferts internes éventuels de ressources en faveur des risques cessibles au sein de l'ONDD) ne constituent pas des aides au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE. Par contre, l'analyse de la Mesure 3 permet de conclure à l'existence d'une aide au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE, s'élevant à 36,6 million EUR. Etant donné que l'ONDD (pour le compte de l'Etat belge) a illégalement mis à exécution la Mesure 3 en violation de l'article 108, paragraphe 3, du TFUE, et que cette aide est incompatible avec le marché intérieur, elle doit être récupérée. Le remboursement de cette aide doit être financé par l'activité relative aux risques cessibles de la SA Ducroire.

A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

La garantie accordée par la Belgique à l'ONDD n'ayant pas profité à l'activité relative aux risques cessibles de l'ONDD, elle ne constitue pas une aide.

Article 2

Les transferts internes éventuels de ressources en faveur de l'activité relative aux risques cessibles au sein de l'ONDD, dont l'existence n'a pas été prouvée, ne constituent pas une aide.

Article 3

L'allocation initiale en capital accordée par l'ONDD en faveur de la SA Ducroire à concurrence de 113,4 millions d'EUR, ne constitue pas une aide.

Article 4

L'allocation initiale en capital accordée par l'ONDD en faveur de la SA Ducroire à concurrence de 36,6 millions d'EUR, mise à exécution le 23 septembre 2004 en violation de l'article 108, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, constitue une aide illégale et incompatible avec le marché intérieur au sens dudit traité.

Article 5

1. La Belgique, à travers l'ONDD est tenue de récupérer l'aide visée à l'article 4 auprès de la SA Ducroire. La Belgique est tenue de présenter des données détaillées - y compris une attestation délivrée par une société d'audit indépendante qui vérifie ces comptes - prouvant que le remboursement a été financé exclusivement par l'activité relative aux risques cessibles de la SA Ducroire.

2. Les sommes à récupérer produisent des intérêts à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition de la SA Ducroire (le 1er janvier 2005), jusqu'à leur récupération effective.

3. Les intérêts sont calculés sur une base composée conformément au chapitre V du règlement (CE) no 794/2004 de la Commission (91).

4. La récupération de l'aide est immédiate et effective.

Article 6

Une gestion séparée et des comptes séparés pour l'activité relative aux risques non-cessibles et celle relative aux risques cessibles doivent être introduits sans délai et maintenus tant que l'activité relative aux risques non-cessibles bénéficiera d'un soutien étatique. La séparation des comptes doit tenir compte des données financières fournies par les autorités belges en mai 2012. Notamment, la ventilation du capital qui en résulte doit être faite de la même manière qu'elle l'a été en mai 2012.

Article 7

1. Dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, la Belgique communique à la Commission les informations suivantes:

a) le montant total en principal et intérêts de l'aide à récupérer auprès de la SA Ducroire;

b) une description détaillée des mesures déjà prises et prévues pour se conformer à la présente décision;

c) les documents prouvant que la SA Ducroire a été mise en demeure de rembourser l'aide.

2. La Belgique tient la Commission informée de l'avancement des mesures nationales prises pour mettre en œuvre la présente décision jusqu'à la récupération complète de l'aide visé à l'article 4. Elle transmet immédiatement, sur simple demande de la Commission, toute information sur les mesures déjà prises et prévues pour se conformer à la présente décision. Elle fournit aussi des informations détaillées concernant les montants de l'aide et les intérêts déjà récupérés auprès de la SA Ducroire.

Article 8

La Belgique prend les mesures nécessaires à l'exécution de la présente décision dans un délai de quatre mois à compter de la date de sa notification.

Article 9

Le Royaume de Belgique est destinataire de la présente décision.

Notes :

(1) À compter du 1er décembre 2009, les articles 87 et 88 du traité CE sont devenus respectivement les articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ("TFUE"). Dans les deux cas, les dispositions sont, en substance, identiques. Aux fins de la présente décision, les références faites aux articles 107 et 108 du TFUE s'entendent, s'il y a lieu, comme faites respectivement aux articles 87 et 88 du traité CE. Le TFUE a également introduit certaines modifications de terminologie, telles que le remplacement de "Communauté" par "Union", de "marché commun" par "marché intérieur" et de "Tribunal de première instance" par "Tribunal". La terminologie du TFUE est utilisée dans la présente décision.

(2) JO C 163 du 1.6.2011, p. 1.

(3) Information confidentielle.

(4) JO C 163 du 1.6.2011, p. 1.

(5) JO C 281 du 17.9.1997, p. 4. À compter du 1er janvier 2013, la Commission applique la nouvelle communication aux États membres concernant l'application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne à l'assurance-crédit à l'exportation à court terme publiée le 19 décembre 2012 (JO C 392 du 19.12.2012, p. 1).

(6) Que ces débiteurs soient publics ou non publics.

(7) Voir le point 2.5 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation.

(8) Voir pages 60 et 69 de l'annexe 8 des "Observations de la Belgique concernant la Décision de la Commission Européenne du 24 février 2011" soumises par les autorités belges le 1er juin 2011.

(9) Voir section 4.1.2.2.1 de la décision d'ouverture.

(10) Ce capital exclu, relatif aux risques non cessibles, comprend le capital de la SA Ducroire qui, lors du transfert des activités d'assurance des risques à court terme à la SA Ducroire, profitait à l'activité d'assurance des risques afférents à des débiteurs établis en Roumanie et en Bulgarie car ces risques étaient alors non cessibles, ces pays ayant accédé à l'Union européenne le 1er janvier 2007, soit après le transfert des activités à la SA Ducroire.

(11) Voir la décision de la Commission du 21 décembre 2005 dans l'affaire N 531/2005 "Mesures liées à la création et au fonctionnement de la Banque Postale", considérant 54 (JO C 21 du 28.1.2006, p. 2) disponible sur le site: http://ec.europa.eu/eu_law/state_aids/comp-2005/n531-05.pdf.

(12) Selon les autorités belges, l'ONDD a couvert les risques sur des débiteurs en Zone 1 jusqu'en 1993 ([...], voir note de bas de page 24) et a cessé d'offrir cette couverture depuis lors. Même avant 1993, l'ONDD n'a jamais eu un portefeuille important de risques cessibles.

(13) Voir l'exemple donné aux pages 13-14 des "Observations de la Belgique concernant la Décision de la Commission Européenne du 24 février 2011" soumises par les autorités belges le 1er juin 2011.

(14) La Commission bancaire, financière et des assurances (CBFA) est née de l'intégration de l'Office de contrôle des assurances (OCA) au sein de la Commission bancaire et financière (CBF) le 1er janvier 2004.

(15) Clarification de la Commission: les autorités belges se réfèrent à la règle de minimis. L'article 108, paragraphe 3, du TFUE énonce l'obligation de notification des aides d'État à la Commission afin d'établir leur compatibilité avec le marché intérieur selon les critères de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE. La règle de minimis indique que sont exemptées de cette obligation les aides accordées sur une période de trois ans et n'excédant pas un certain plafond. Au moment de l'application de la Mesure 1 et la Mesure 2, le plafond en vigueur était fixé à 100 000 EUR par le règlement (CE) no 69/2001 de la Commission du 12 janvier 2001 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de minimis (JO L 10 du 13.1.2001, p. 30).

(16) Voir note de bas de page no 14.

(17) Voir page 7 du document "Réponse de la Belgique au courrier de la Commission européenne du 7 décembre 2007" soumis par les autorités belges le 12 février 2008 (Les autorités belges y font référence à la page 14 de leur soumission du 1er juin 2011).

(18) Voir les "Observations de la Belgique concernant la Décision de la Commission Européenne du 24 février 2011" soumises par les autorités belges le 1er juin 2011, p. 22-24.

(19) Le détail des postes transférés a été soumis par les autorités belges le 14 février 2007 à la page 3 de la note des autorités belges en réponse au courrier de la Commission du 17 Janvier 2007 dans l'affaire CP 8/2007 (SA.22302) et est repris au point 70 de la décision d'ouverture.

(20) JO L 77 du 20.3.2002, p. 17 à 22.

(21) Voir la "Réponse au questionnaire de la Commission européenne du 28 juillet 2011" soumise par les autorités belges le 5 décembre 2011, pages 9 à 11 (les calculs détaillés ont été soumis le 14 novembre 2011).

(22) M.B., 4 octobre 1939.

(23) Relatif aux activités de l'ONDD exercées pour son compte propre avec la garantie de l'État.

(24) Voir la "Réponse au questionnaire de la Commission européenne du 28 juillet 2011", soumise par les autorités belges le 5 décembre 2011, page 16.

(25) Voir l'annexe B14 de la "Réponse au questionnaire de la Commission européenne du 28 juillet 2011" soumise par les autorités belges le 5 décembre 2011.

(26) Voir le document soumis par les autorités belges le 1er juin 2011"Observations de la Belgique concernant la Décision de la Commission Européenne du 24 février 2011", p. 10: "Selon les catégories utilisées par l'ONDD, [...]".

(27) Voir l'annexe 8 (page 70) et l'annexe 13 des "Observations de la Belgique concernant la Décision de la Commission Européenne du 24 février 2011" soumises par les autorités belges le 1 juin 2011.

(28) Voir page 28 de la note stratégique du 28 septembre 2004 intitulée "Lignes directrices stratégiques pour l'ONDD et sa SA" présentée au conseil d'administration de l'ONDD et figurant à l'annexe 10 des "Observations de la Belgique concernant la Décision de la Commission Européenne du 24 février 2011" soumises par les autorités belges le 1er juin 2011.

(29) JO L 335, 17.12.2009, p. 1. La directive Solvabilité II est entrée en vigueur le 6 janvier 2010.

(30) Solvabilité II est une réforme réglementaire européenne du monde de l'assurance. Dans la lignée de Bâle II, son objectif est de mieux adapter les fonds propres exigés des compagnies d'assurances et de réassurance avec les risques que celles-ci encourent dans leur activité. Après Solvabilité I qui prévoyait une marge de solvabilité déterminée en fonction de pourcentages sur les primes et les sinistres, la réglementation des assurances passe à des règles plus complexes intégrant le risque, soit par l'application d'une formule standard, soit par la prise en compte d'un modèle interne. L'approche de la formule standard est actuellement en cours de définition et calibrage au travers des Quantitative Impact Studies (ci-après "QIS"). Ce sont les consultations qui permettent au Comité européen des contrôleurs des assurances et des pensions professionnelles - CECAPP ("the Committee of European Insurance and Occupational Pensions Supervisors" ou "CEIOPS") de tester les formules et calibrages envisagées). Pour les compagnies voulant opter pour un modèle interne, une validation de l'autorité de contrôle est requise préalablement à la détermination effective du Capital de Solvabilité Requis - CSR ("Solvency Capital Requirement" ou "SCR") à partir de ce modèle interne.

(31) Voir la "Réponse au questionnaire de la Commission européenne du 28 juillet 2011" soumise par les autorités belges le 5 décembre 2011, page 22.

(32) Voir la "Réponse au questionnaire de la Commission européenne du 28 juillet 2011" soumise par les autorités belges le 5 décembre 2011, page 32.

(33) Entre parenthèse: taux annuel de croissance de l'activité attendu dans le scénario en question

(34) Les besoins en capital pour les risques cessibles et non-cessibles ne s'ajoutent pas pour donner le total car il existe un seuil minimum absolu de 3 millions d'EUR pour les années 2004 à 2006 et de 3,2 millions d'EUR pour les années 2007 à 2009.

(35) Voir les documents soumis par les autorités belges le 14 novembre 2011 (fichiers Excel, page "Capital"). Il apparaît que la méthode QIS 2005 plus modélisation interne a été utilisée uniquement pour déterminer le capital alloué aux risques cessibles et non-cessibles en 2005. Pour les années postérieures à 2005, le capital a été déterminé en [...]. Il est à noter que [...], raison pour laquelle les résultats sont identiques entre le scénario 1A et 1B pour 2005. Les autorités belges n'ont pris en compte le capital non libéré de 50 millions EUR qu'à partir de 2009. Ce sont ces chiffres qui ont alimenté les calculs du "return on equity" dans la section suivante.

(36) La Commission a constaté des erreurs de calcul dans les projections financières. En particulier, la somme des résultats d'activité d'assurance pour les différents périmètres diffère du montant total du résultat d'activité d'assurance pour la SA Ducroire. Des erreurs de sommes se sont glissées lors du calcul du résultat de l'activité d'assurance pour l'ensemble de la SA Ducroire. Ces différences n'ont cependant pas d'impact matériel sur l'estimation du ROE.

(37) Voir les "Observations de la Belgique concernant la Décision de la Commission Européenne du 24 février 2011" soumises par les autorités belges le 1er juin 2011, Annexe 10.

(38) Voir la "Réponse au questionnaire de la Commission européenne du 28 juillet 2011" soumise par les autorités belges le 5 décembre 2011, page 33.

(39) Le calcul fait par la Belgique est le suivant pour les risques cessibles: 8 millions EUR + [(100 millions d'EUR - 82 millions d'EUR) × (8 millions d'EUR/82 millions d'EUR)]. Il en va de même pour les risques non cessibles.

(40) Voir les observations des autorités belges du 14 novembre 2011 (fichiers Excel "201105 P&L et Bilan Business Plan Scenario 1B", pages P&L_cessibles et PL_non_cessibles).

(41) Il apparaît que la méthode QIS 2005 plus modélisation interne a été utilisée uniquement pour déterminer le capital alloué aux risques cessibles et non cessibles en 2005. Le capital pour les années 2006 et 2007 a été déterminé sur base du capital de 2005 plus les bénéfices prévisionnels cumulés sur la période.

(42) Voir le document soumis par les autorités belges le 5 décembre 2011"Réponse au questionnaire de la Commission européenne du 28 juillet 2011.", pages 38 et 39.

(43) Voir les "Observations de la Belgique concernant la Décision de la Commission Européenne du 24 février 2011" soumises par les autorités belges le 1er juin 2011, p. 38.

(44) Modèle d'évaluation des actifs financiers (MEDAF).

(45) Seuls les acteurs ayant une activité estimée majoritairement cessible (i.e. supérieurs à 50 % en termes de primes ou d'exposition totale selon la disponibilité des informations) ont été retenus.

(46) Ajusté par la provision d'égalisation.

(47) Sur base de l'information géographique communiquée. e g., expositions, primes (varie selon les entreprises).

(48) Associations internationales des assureurs crédits.

(49) Primes nettes.

(50) Moyenne non pondérée.

(51) En 2004 ou dans un proche avenir.

(52) Voir note de bas de page no 21.

(53) Voir les "Observations de la Belgique concernant la Décision de la Commission Européenne du 24 février 2011" soumises par les autorités belges le 1er juin 2011, p. 13-14.

(54) Sur la base de l'article 2.2d de la directive 73/239/CEE du Conseil (alors en vigueur), l'ONDD ne devait pas être agréé par l'OCA dès lors que ses opérations étaient couvertes par la garantie de l'Etat belge. En exerçant, dorénavant, au travers du compte dit "commercial", des activités non garanties par l'Etat belge, l'ONDD ne bénéficiait plus de l'exemption inscrite à l'article 2.2d et devait obtenir l'agrément auprès de l'OCA.

(55) Voir page 15 de la soumission des autorités belges du 1er juin 2011.

(56) Voir la décision de la Commission du 21 décembre 2005 dans l'affaire N 531/2005 "Mesures liées à la création et au fonctionnement de la Banque Postale", JO C 21 du 28.1.2006, p. 2, disponible sur le site: http://ec.europa.eu/eu_law/state_aids/comp-2005/n531-05.pdf.

(57) Voir note de bas de page no 28.

(58) Voir note de bas de page no 10.

(59) Voir l'Annexe 4 aux observations des autorités belges du 1er juin 2011.

(60) Voir pages 62 et 70 de ladite note (soumise en Annexe 8 aux observations des autorités belges du 1er juin 2011).

(61) Le rapport Solvency 2 QIS 5 de la CBFA (mars 2011) indique en page 17 que très peu de participants ont été capables de fournir des informations sur leur utilisation et les caractéristiques des modèles internes et ce, parce que ces modèles sont toujours en phase de développement. La CBFA a d'ailleurs même décidé de ne tirer aucune conclusion à ce stade. De tels propos suggèrent que même des sociétés d'assurance privées ont encore du mal, à ce jour, à produire des modèles internes pour le calcul du capital pour couvrir certains risques.

(62) Voir pages 11 et 13-16 de l'Annexe 4 aux observations des autorités belges du 1er juin 2011.

(63) Calculé selon la méthode utilisée en 2004 sur la base des engagements nets projetés pour la fin de 2004. Les données utilisées pour le calcul figurent à la page 16 de l'annexe 13 des observations des autorités belges du 1er juin 2011.

(64) Comme il est expliqué au considérant 140, une présentation alternative consisterait à exclure l'intégralité du montant de [45-75] millions EUR. Toutefois, afin de pouvoir calculer la partie du capital profitant à l'activité relative aux risques cessibles dans le capital additionnel de [75-100] millions EUR, il est nécessaire de ventiler le capital préexistant entre les risques cessibles et non-cessibles. Ceci est dû au fait que la séparation du capital profitant à l'activité relative aux risques cessibles et non-cessibles se fait sur l'intégralité du capital (voir tableau 2 et considérant 135).

(65) Les chiffres étaient obtenus en multipliant les engagements de la fin de 2004 par le taux de rétention (ou 100 % moins le taux de cession réassurance). Les données proviennent de l'annexe 13 "Plan financier 2005, 2006 et 2007 soumis à la CBFA" du document soumis par les autorités belges le 1er juin 2011, "Observations de la Belgique concernant la Décision de la Commission Européenne du 24 février 2011".

(66) Comme indiqué précédemment, la méthode utilisée par l'ONDD en 2004 pour estimer les besoins de capital de la SA Ducroire se basait sur le montant des engagements nets multiplié par un certain pourcentage (ratio Cooke). Aucune distinction n'était faite lors de l'application de cette méthode par l'ONDD entre les engagements nets relatifs à des risques afférents à des débiteurs localisés dans les dix pays ayant adhéré à l'Union en 2004 et les engagements nets relatifs aux autres risques non cessibles. Par conséquent, l'application de la méthode de calcul au pro rata sur la base des engagements nets (après cession) est cohérente avec l'approche suivie par l'ONDD.

(67) Comme il ressort du tableau 1 et des considérants 96 à 98, ce capital ne profitait qu'aux risques afférents à des débiteurs établis dans les dix pays ayant adhéré à l'Union européenne le 1er mai 2004 et d'autres risques dans la pratique considérés comme des risques non cessibles.

(68) Arrêt du 3.10.1991, Italie c. Commission, C 261/89, Rec. 1991 p. I-4437, point 8; arrêt du 14.9.1994, Espagne c. Commission, affaires jointes C-278/92 à C-280/92, Rec. 1994 p. I-4013, point 21; arrêt du 14.9.1994, Espagne c. Commission, C-42/93, Rec. 1994 p. I-4175, point 13.

(69) A l'exclusion des coûts limités liés à l'arrêt de cette activité, comme [...]. L'ordre de grandeur potentiel de tels coûts n'est pas de nature à affecter les conclusions de la Commission.

(70) Voir la décision 2000/600/CE de la Commission du 10 novembre 1999 portant autorisation conditionnelle de l'aide accordée par l'Italie aux banques publiques siciliennes Banco di Sicilia et Sicilcassa (JO L 256 du 10.10.2000, p. 21), considérants 58 à 61.

Voir les décisions de la Commission de 2005 relatives à la recapitalisation des "Landesbanken" allemandes, telles que NN 71/2005, HSH Nordbank (JO C 241 du 6.10.2006, p. 12), et NN 72/2005, Bayern LB (JO C 242 du 7.10.2006, p. 18).

Voir également la décision dans l'affaire Shetland Shellfish (décision 2006/226/CE de la Commission, JO L 81 du 18.3.2006, p. 36), où la Commission a rejeté deux rapports produits par l'autorité publique des îles Shetland en vue de l'investissement, qui contenaient un compte de résultats prévisionnel, un bilan prévisionnel et un tableau des flux de trésorerie prévisionnel pour les années 2000, 2001 et 2002. Le Royaume-Uni a fait valoir le caractère exante des études et le caractère "conservateur et prudent" des hypothèses sur lesquelles elles se basent, mais la Commission a conclu qu'elles auraient été jugées insuffisantes par un investisseur privé en économie de marché, en dépit des montants relativement modestes qui étaient en cause.

(71) Arrêt du 5.6.2012, Commission c. EDF, C-124/10 P, Rec. 2012 p. I-0000, points 82-86 et 105.

(72) Voir, par exemple, l'arrêt "West LB" du 6 mars 2003 rendu dans les affaires jointes T-228/99 et T-223/99, Westdeutsche Landesbank Girozentrale c. Commission, Rec. 2003, p. II-435, point 255.

(73) Voir, par exemple, la décision de la Commission concernant la restructuration de la banque Dexia (décision du 26 février 2010 dans l'affaire C 9/2009, JO L 274 du 19.10.2010, p. 54, considérant 127) où la Commission a rejeté l'argument des États membres concernés selon lequel le critère de l'investisseur privé en économie de marché devrait être appliqué moins strictement dans la mesure où les entités publiques ayant recapitalisé Dexia étaient des actionnaires "historiques" de la banque.

(74) Voir l'arrêt du 30 avril 1998 dans l'affaire T-16/96, Cityflyer Express c. Commission, Rec. 1998, p. II-757, point 76.

(75) Voir page 28 de la note stratégique du 28 septembre 2004 intitulée "Lignes directrices stratégiques pour l'ONDD et sa SA" présentée au conseil d'administration de l'ONDD à l'annexe 10 du document soumis par les autorités belges le 1er juin 2011"Observations de la Belgique concernant la Décision de la Commission Européenne du 24 février 2011".

(76) Source: Eurostat.

(77) Dans son arrêt du 21 janvier 1999 dans les affaires jointes T-129/95, T-2/96 et T-97/96, Neue Maxhütte Stahlwerke GmbH et Lech-Stahlwerke GmbH c. Commission, Rec. 1999, p. II-17, points 116 à 121, le Tribunal a précisé que si, dans le secteur privé, une société mère peut assumer les pertes de sa filiale, il convient qu'il existe une probabilité suffisante d'un retour de la filiale à la rentabilité. En effet, un investisseur privé ne se permettrait pas d'apporter du capital supplémentaire après des années de pertes continues si un tel apport lui revenait plus cher que la liquidation de la filiale.

Voir également la décision Banco di Sicilia et Sicilcassa précitée, considérants 63 à 66.

(78) Voir la note de bas de page no 24.

(79) Il ressort du procès-verbal de la réunion du conseil de l'administration de l'ONDD du 20 avril 2004 que la contribution respective de chaque secteur d'activité au résultat global a été demandée par le conseil (voir p. 4 de l'Annexe 9 à la soumission du 1er juin 2011).

(80) Spécifiquement aux risques afférents aux dix pays adhérents.

(81) Pour les risques cessibles, le taux de primes a été revu à la hausse (de 0,2 % initialement à 0,3 % des montants assurés) augmentant ainsi d'un tiers les recettes d'assurance pour l'entreprise. Les projections concernant la sinistralité ont quant à elles été revues à la baisse.

(82) Une analogie d'une telle division de la rémunération peut être trouvée dans les autres décisions de la Commission concernant les aides d'Etat. Voir, par exemple, la décision de la Commission du 11 février 2009 dans l'affaire NN 3/2009 "Amendments to the Public support measures to JSC Parex Banka", considérants 36-40, JO C 147 du 27.6.2009, p. 2. Il est à noter que la prime de risque dépend du risque de l'investissement.

(83) Après avoir ajusté à la hausse le résultat financier puisque que le capital libéré estimé relatif aux risques cessibles est légèrement plus élevé que celui estimé par les autorités belges ([10-25] millions d'EUR contre 9,8 millions d'EUR respectivement).

(84) Dans le bénéfice du doute, on considère que le taux de rentabilité attendue à l'époque pour des placements sans risque liquides à moyen terme correspondait à la moyenne des taux de rendement en 2004, sur le marché secondaire, des obligations d'Etat d'une durée restante de 4 à 6 ans, c'est-à-dire 3,5 %.

Voir http://www.nbb.be/belgostat/GlobalDispatcher?TARGET=/TreeviewLinker&rowID=2685&prop=treeview&action=open&Lang=F#2685.

(85) Régions de Bruxelles-Capitale, Flandres et Wallonie.

(86) Arrêt de la Cour du 17 septembre 1980, Philip Morris (C-730/79, Rec. 1980, p. 2671), points 11 et 12.

(87) Arrêt de la Cour du 13 juillet 1988, France c. Commission (C-102/87, Rec. 1988 p. 4067), point 19.

(88) Voir les 2e et 3e phrases du 3e paragraphe du point 3.2 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation. Voir également le point 4.1 de la communication sur l'assurance-crédit à l'exportation selon lequel "Les types d'aides d'État énumérés au point 3.1. [...] ne sauraient donc faire l'objet des dérogations prévues par les dispositions du traité relatives aux aides d'État".

(89) JO C 244 du 1.10.2004, p. 2.

(90) Même si on considérait isolément l'activité des risques non-cessibles, la rentabilité resterait bien en dessous du coût du capital estimé par les autorités belges elles-mêmes.

(91) JO L 140 du 30.4.2004, p. 1