CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 22 mai 2014, n° 12-10413
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Assistance Technique et Etude de Malteries Electroniques (Sté)
Défendeur :
Castaing, Guillaumet, Ittiam Systems Europe (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mime Perrin
Conseillers :
Mme Michel-Amsellem, M. Douvreleur
Avocats :
Mes Guizard, Cier, Belfayol Broquet, Blanc de la Naulte, Fontaine-Louzoun, Albertin
FAITS ET PROCÉDURE
La société Assistance Technique et Etude de Matériels Electroniques (la société Ateme) a pour activité l'ingénierie informatique qui se décline en une activité de conseil et une activité de commercialisation, notamment de logiciels pour DSP de Texas Instruments.
M. Guillaumet, qui était employé par la société Ateme depuis 1992, en a démissionné le 23 février 2007. Il a ultérieurement saisi le conseil des prud'hommes pour demander la requalification de sa démission en licenciement mais cette demande a été rejetée. De même, son subordonné M. Castaing, employé par la société Ateme depuis 2005, a sollicité en vain la résiliation judiciaire de son contrat de travail puis a pris acte de la rupture de son contrat le 14 avril 2007. Mme Charbonnier a également démissionné de la société Ateme le 27 février 2007 et elle aussi, sans davantage obtenir satisfaction, sollicité la requalification de sa démission en licenciement.
Le 1er mars 2007 MM. Guillaumet et Castaing ainsi que Mme Charbonnier ont créé la société IMOD qui a été immatriculée au registre du commerce le 6 avril 2007, puis, par cession de parts sociales, cette société est devenue en juin 2007 une filiale du groupe Ittiam sous le nom de Ittiam Systèmes Europe (la société Ittiam). Elle développe une activité d'ingénierie informatique.
Le 27 novembre 2007, la société Ateme, invoquant la commission d'actes de concurrence déloyale à son encontre, a fait assigner la société Ittiam Systèmes Europe, M. Guillaumet et M. Castaing devant le Tribunal de grande instance de Paris en réparation de son préjudice.
Par jugement du 10 mai 2012, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de grande instance de Paris a :
- débouté la société Ateme de toutes ses demandes ;
- condamné la société Ateme à payer à la société Ittiam Systèmes Europe la somme de 15 000 à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- condamné la société Ateme à payer à M. Guillaumet la somme de 10 000 à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- condamné la société Ateme à payer à M. Castaing la somme de 8 000 à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- condamné la société Ateme à payer à la société Ittiam Systèmes Europe la somme de 2 500 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamné la société Ateme à payer à M. Guillaumet la somme de 2 500 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamné la société Ateme à payer à M. Castaing la somme de 2 500 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Vu l'appel interjeté par la société Ateme le 7 juin 2012 contre cette décision.
Vu les dernières conclusions, signifiées par la société Ateme le 4 février 2014, par lesquelles il est demandé à la cour de :
- infirmer en totalité la décision rendue par le Tribunal de grande instance de Paris et en particulier en ce qu'elle a retenu que la société Ateme avait abusivement maintenu sa procédure
Statuant à nouveau,
- dire et juger que le comportement de la société Ittiam Systems Europe et de M. Guillaumet et de M. Castaing est constitutif d'un acte de concurrence déloyale au préjudice de la société Ateme,
- constater que ces agissements déloyaux ont entraîné de surcroît une désorganisation de l'entreprise ;
Par conséquent,
- condamner la société Ittiam Systems Europe, solidairement ou à tout le moins in solidum avec M. Guillaumet et M. Castaing au paiement au bénéfice de la société Ateme d'une somme de 500 000 au titre du préjudice subi, sauf à parfaire
- ordonner la désignation de tel expert qu'il lui plaira de désigner avec pour mission de :
convoquer les parties ;
- constater techniquement que le secteur d'activité des sociétés Ittiam et Ateme est bien concurrent ;
- se faire remettre le fichier client et/ou prospects de la société Ittiam Systems Europe et à partir du fichier client de la société Ateme, de consulter et de se faire remettre une copie des fichiers clients et/ou prospect, de comparer les fichiers afin de déterminer la date de la prospection et de la première transaction commerciale ;
- établir le chiffre d'affaires réalisé par la société Ittiam Systems Europe (ou par la société Ittiam grâce à la société Ittiam Systems Europe agissant comme intermédiaire tel qu'un agent commercial) avec les clients et/ou partenaires de la société Ateme, notamment avec les sociétés Texas Instruments, Archos et Cezzer,
- établir le chiffre d'affaires réalisé par la société Ittiam Europe Systems avec les clients ou prospects de la société Ateme ;
- évaluer le préjudice subi par la société Ateme du fait de ces actes qu'il s'agisse de la perte de bénéfice ou de la dépréciation de la valeur des fonds de commerce,
- établir un état relatant l'embauche par la société Ittiam Europe Systems d'anciens salariés de la société Ateme ou de leur emploi à travers sa maison mère Ittiam Inc, des sociétés de prestation de service, ou en tant que consultants indépendants ;
- se faire communiquer tous documents utiles et entendre tout sachant susceptible de lui permettre de mener à bien sa mission
- condamner la société Ittiam Systems Europe, solidairement ou à tout le moins in solidum avec M. Guillaumet et M. Castaing au paiement au bénéfice de la société Ateme d'une de 15 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
- ordonner toute mesure propre à assurer la cessation des agissements déloyaux sous astreinte de 10 000 par infraction constatée et la publication dans un ou deux journaux spécialisés aux frais des défendeurs.
A titre liminaire, la société Ateme demande que les pièces rédigées en langue anglaise, de compréhension aisée ou accompagnées de traductions établies par un traducteur assermenté, soient admises au débat.
Sur le fond, elle fait valoir que la société Ittiam, en complicité avec MM Guillaumet et Castaing, a commis des actes de concurrence déloyale à son détriment. Elle précise à ce sujet que la création de la société Ittiam s'est accompagnée du débauchage illicite de ses salariés, lesquels n'ont pas respecté le délai de préavis prévu dans leur contrat de travail et ont été soit associés, soit salariés au sein de la société Ittiam. Elle ajoute que ce débauchage illicite a conduit à une désorganisation volontaire du service d'origine de ces salariés.
La société Ateme fait aussi valoir que ses anciens salariés ont organisé leur départ en diffusant préalablement de fausses informations sur une prétendue cessation de l'activité pour laquelle ils travaillaient afin de détourner et capter sa clientèle, ce qui lui a causé un préjudice important de perte de chiffre d'affaires.
Elle soutient, enfin, avoir agi avec diligence tout au long de la procédure judiciaire, dont la longueur n'est due qu'au comportement des intimés, et qu'elle ne peut dès lors se voir reprocher d'avoir abusivement intenté la procédure en cours.
Vu les dernières conclusions, signifiées par la société Ittiam le 9 octobre 2012, par lesquelles il est demandé à la cour de :
A titre liminaire,
- rejeter des débats les pièces n° 60 et 64 produites par la société Ateme ;
Au fond,
- déclarer la société Ateme mal fondée en son appel et toutes fins qu'il comporte ;
- confirmer le jugement du 10 mai 2012 en toutes ses dispositions ;
A titre incident,
- recevoir la société Ittiam Systems Europe en son appel incident en l'y déclarant bien fondé
- condamner la société Ateme au paiement d'une somme de 100 000 sur le fondement de l'article 32-1 du Code de procédure civile et de l'article 1382 du Code civil.
- condamner la société Ateme au paiement d'une somme de 10 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
A titre liminaire, la société Ittiam demande que les pièces versées au débat par la société Ateme sous les n° 60 et 64, exclusivement rédigées en anglais soient écartées des débats.
Elle conteste avoir commis un quelconque acte de concurrence déloyale, puisque les salariés en cause n'étaient liés par aucune clause de non concurrence et qu'il avait été mis fin à leurs contrats de travail lors de leur intégration auprès d'elle.
Par ailleurs, la société Ittiam fait valoir que la société Ateme ne prouve ni le débauchage de ses salariés, ni le détournement de clientèle qu'elle allègue. Elle expose que l'appelante avait préalablement choisi de recentrer ses activités dans ses deux autres spécialités et que leurs offres sont différentes et complémentaires.
Elle soutient que la demande d'expertise de l'appelante ne vise qu'à suppléer sa carence dans l'administration de la preuve notamment du préjudice qu'elle allègue.
Elle expose enfin que la procédure intentée par la société Ateme n'avait d'autre but que de la décrédibiliser auprès de ses clients, ce qui justifie qu'elle soit condamnée à lui verser une indemnité pour procédure abusive.
Vu les dernières conclusions, signifiées par M. Guillaumet le 9 octobre 2012, par lesquelles il est demandé à la cour de :
A titre liminaire,
- rejeter des débats les pièces n° 60 et 64 produites par la société Ateme ;
Au fond,
- déclarer la société Ateme mal fondée en son appel et toutes fins qu'il comporte ;
- confirmer le jugement du 10 mai 2012 en toutes ses dispositions ;
A titre incident,
- recevoir la société Ittiam Systems Europe en son appel incident en l'y déclarant bien fondé
- condamner la société Ateme au paiement d'une somme de 30 000 sur le fondement de l'article 32-1 du Code de procédure civile et de l'article 1382 du Code civil.
- condamner la société Ateme au paiement d'une somme de 5 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
M. Guillaumet fait valoir les mêmes moyens que la société Ittiam.
Vu les dernières conclusions, signifiées par M. Castaing le 21 janvier 2014, par lesquelles il est demandé à la cour de :
- rejeter des débats les pièces n° 60 et 64 produites par la société Ateme.
- déclarer la société Ateme mal fondée en son appel à toutes fins qu'il comporte.
- confirmer le jugement prononcé le 10 mai 2012 par la 5ème chambre 2ème section du Tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il l'a :
- déboutée de l'ensemble de ses demandes,
- condamnée au paiement d'une indemnité de 2 500 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile
- recevoir M. Castaing en son appel incident et l'y déclarant bien-fondé :
- condamner la société Ateme au paiement d'une somme de 20 000 pour procédure abusive en application de l'article 32-1 du Code de procédure civile et de l'article 1382 du Code civil.
- condamner la société Ateme au paiement d'une somme de 15 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.
A titre liminaire, M. Castaing demande que les pièces produites par la société Ateme, sous les numéros 60 et 64, rédigées exclusivement en langue anglaise, soient rejetées.
Il expose que la société Ateme a décidé de cesser l'activité de la Business Unit "Consumer Electronics" dès la fin de l'année 2006, ce qu'atteste une communication de son président et l'annonce à l'ensemble de la société en janvier 2007.
Il précise que c'est en raison de la fermeture de fait de l'unité en cause qu'il a démissionné en février 2007, et que l'action en concurrence déloyale intentée par la société Ateme est abusive en ce qu'elle n'a pour but que de discréditer ses anciens salariés.
Il affirme enfin que la société Ateme n'apporte à son encontre aucun élément constitutif de concurrence déloyale.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée, ainsi qu'aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la recevabilité des pièces non traduites
Dans leurs dernières conclusions la société Ittiam ainsi que MM Castaing et Guillaumet, ne demandent plus que le retrait des pièces de la société Ateme numérotées 60 et 64, rédigées en anglais sans traduction. La société Ateme s'oppose à ce retrait en indiquant que la pièce 60 consiste simplement en une proposition de recrutement et la pièce 64 est seulement destinée à montrer sa communication sur la discussion "Flash média solution Partner programme", ces pièces ne nécessitant aucune traduction. Cependant, il convient de rappeler que la langue des procédures menées en France est le français et que, dans ces conditions, une partie ne saurait s'appuyer sur des pièces rédigées en anglais en chargeant la juridiction de les traduire. En effet, quand bien même le juge serait-il apte à procéder à cette démarche, sa traduction n'aurait alors pas été soumise à la contradiction des parties, ce qui, s'agissant de contenus techniques et spécifiques, pourrait avoir des conséquences importantes, et ceci quelle que soit l'importance des pièces en cause au regard de la thèse qu'elles sont censées soutenir.
Les pièces produites par la société Ateme sous les numéros 60 et 64, qui sont rédigées en anglais et ne comportent pas de traduction doivent donc être écartées des débats.
Sur les actes de concurrence déloyale imputés aux intimés
La société Ateme soutient qu'en constituant une société concurrente de la sienne, la société Ittiam a en débauchant les seuls salariés du service "Consumer Electronics" qui ont exercé une activité concurrente, créé une grande désorganisation, alors que ces salariés étaient encore tenus par les liens de leurs contrats de travail.
Il convient de rappeler à titre liminaire que la société Imod a été constituée le 1er mars 2007, que M. Guillaumet avait démissionné de la société Ateme le 23 février 2007, que M. Castaing a pris acte de la rupture de son contrat le 14 avril 2007 et que Mme Charbonnier a également démissionné de la société Ateme le 27 février 2007. Par ailleurs, M. Guillaumet a été dispensé d'accomplir son préavis, quant à celui de Mme Charbonnier, la société Ateme a accepté de l'écourter au 2 mars 2007. S'agissant de M. Castaing sa démission est intervenue le 12 avril 2007, par une lettre reçue le 14 avril, dans des conditions particulièrement conflictuelles puisque celui-ci avait préalablement fait assigner la société Ateme en rupture de contrat.
La création par d'anciens salariés d'une société concurrente à celle qui les avait employés précédemment n'est pas par elle-même constitutive d'un acte de concurrence déloyale, dès lors qu'elle n'est pas accompagnée de pratiques déloyales. Il en est de même de leur embauche par une société concurrente qui n'est pas en soi un acte de concurrence déloyale, à moins qu'elle n'ait été accompagnée de manœuvres destinées à les détourner de leur employeur initial ou ayant eu pour effet de déstabiliser ou désorganiser l'entreprise qui soutient être victime de tels agissements.
Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la société Ateme ne rapporte pas la preuve que M. Guillaumet, Mme Charbonnier ou M. Castaing auraient été embauchés alors qu'ils étaient encore liés à la société Ateme par leur contrat de travail ou pendant la durée de leur préavis. Elle ne produit, par ailleurs, aucun élément permettant de constater que la société Ittiam aurait utilisé des manœuvres quelconques pour les attirer et les convaincre de travailler pour elle. Le fait invoqué par la société Ateme selon lequel Mme Musai, salariée de l'un de ses distributeurs, aurait vu M. Guillaumet et Mme Charbonnier dans un salon organisé par la société Texas Instruments à la fin du mois de mars 2007 et que ce dernier lui aurait dit avoir démissionné de la société Ateme pour travailler pour la société Ittiam en lui recommandant de "(...) ne pas en parler" (pièce Ateme n° 51), ne rapporte pas la preuve, ni de ce que M. Guillaumet aurait été embauché par la société Ittiam avant d'être libéré des obligations de son contrat avec la société Ateme, ou qu'il aurait cédé à des manœuvres de la société Ittiam ou encore aurait eu un comportement déloyal.
Par ailleurs, la société Ateme, ne saurait invoquer la désorganisation de son service "Consumer électronique", alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'en décembre 2006, elle avait décidé de ne plus allouer de budget Recherche et développement à cette unité, ce qui a d'ailleurs motivé la démission de M. Guillaumet lequel expliquait dans sa lettre du 23 février 2007 que de ce fait, il n'avait plus d'avenir au sein de la société, n'ayant pas les moyens d'être productif et que sa charge de travail avait rapidement décru. Cet abandon du développement de ce service, est aussi invoqué dans la lettre de démission de Mme Charbonnier qui indiquait "Vous m'avez annoncé lors de notre entretien du 16 janvier 2007 de l'arrêt de la business unit Consumer Electronics (...) En conséquence de cette décision mes produits n'ayant plus d'investissement de R&D pour 2007, mon travail de réalisation d'études marketing s'est nettement et rapidement amoindri et les tâches restantes ne sont pas intéressantes. Par la suite, ne m'a été proposé que verbalement un poste dans une autre activité de la société pour des fonctions de marketing/communication, ce qui constitue un ensemble de tâches me ramenant deux ans en arrière dans ma carrière". Il ressort encore d'un courrier électronique de M. Edelin de la société Ateme à Mme Charbonnier qu'en janvier 2007, avant sa démission, il lui était proposé de l'affecter dans un autre service. Il est en outre établi par un courrier électronique adressé par M. Artières, dirigeant de la société à différents personnels de celle-ci, le 8 février 2007, qu'il a été décidé pour des raisons stratégiques "(...) de ne pas faire de R&D (recherche et développement) sur CE (Consumer Electronics)" en 2007 et que cette décision ne faisait que prolonger ce qui avait été décidé pour 2006. Ce message précisait que "Donc l'info, c'est qu'il n'y a pas de roadmap définie pour enrichir cette plateforme de demo PMP. Par contre on continue bien sûr de vendre ce qu'on a (...)" et qu'il était prévu de réaliser en 2007 le même chiffre d'affaires qu'en 2006. Ainsi, il ressort clairement de ces éléments que la société Ateme avait décidé de ne pas accorder de financement de recherche et développement au service "Consumer Electronics", auquel étaient seuls affectés M. Guillaumet, Mme Charbonnier et M. Castaing et même d'en retirer Mme Charbonnier, après la démission de M. Guillaumet. Dans ces circonstances, le fait pour la société Ittiam d'avoir embauché ces trois personnes, ne peut être considéré comme ayant désorganisé ce service que la société Ateme souhaitait, à tout le moins, ne pas développer et s'apprêtait à maintenir avec pour seule activité celle réduite à la vente des seuls produits existants et ceci avant même que les personnes en cause soient embauchées par la société Ittiam. Dans ces conditions, le fait que ces personnes n'aient pas été immédiatement remplacées est inopérant.
Par ailleurs, l'embauche ultérieure par la société Ittiam de M. Le Guen, ancien salarié de la société Ateme, ne saurait constituer non plus une pratique de concurrence déloyale, dès lors que la fiche du réseau social Linkedin ne permet nullement de constater que celui-ci aurait été détourné par des manœuvres de la société Ittiam, ni qu'il n'aurait pas respecté les obligations afférentes à son engagement de salarié de la société Ateme.
La société Ateme ne démontre pas non plus que M. Castaing n'aurait pas répondu aux questions de clients, ni qu'une telle abstention aurait été motivée par l'intention de détourner ceux-ci de la société Ateme., les seuls courriers électroniques invoqués par elle ne faisant pas état de carence de sa part, mais seulement, d'une part, d'interrogations sur des clauses d'un contrat à signer, d'autre part, de la nécessité du suivi d'un client au mois de mai 2007, alors même que M. Castaing avait pris acte de la rupture de son contrat de travail depuis le mois d'avril.
En outre, la société Ateme ne rapporte pas la preuve de ce que M. Castaing aurait diffusé de fausses rumeurs, dénigré ou démarché ses clients au profit de son prochain employeur. En effet, les éléments détaillés précédemment montrent, comme il a déjà été relevé, que la société Ateme avait manifesté la volonté de ne plus accorder de budget de recherches et développement au service "Consumer Electronics" et souhaitait se limiter à la vente des produits existants, ce qui a d'ailleurs été rappelé par ses dirigeants dans une réunion d'information des salariés sur l'activité de ce service en mars 2007 (pièce 23). La copie du document produit à l'occasion de cette réunion ne fait état d'aucune décision inverse ou d'attente pour un développement ultérieur et il conclut d'ailleurs en faisant état d'un échec commercial du projet qui avait été soutenu sous la direction de M. Guillaumet jusqu'à la fin de 2006. Par ailleurs, les messages produits et cités par l'appelante ne démontrent en rien que M. Castaing aurait manqué de loyauté à la société Ateme et l'aurait mise dans une situation difficile vis-à-vis de ses clients ou même lui aurait fait perdre des clients au profit de la société Ittiam. À cet égard, la cour relève que le document précité qui a servi de support à la réunion du mois de mars 2007 précité fait état de la volonté de mettre fin au service rendu à la société Cezzer en indiquant "C'est une affaire de service sur laquelle on va perdre de l'argent ' on l'arrête". Il n'est, de plus, pas établi que MM. Guillaumet et Castaing auraient volontairement fait traîner la signature de contrats pour détourner les clients concernés et les pièces relatives à l'outil intitulé "DaVinci" ne rapportent aucune preuve d'un manquement quelconque de leur part. Enfin, la société Ateme ne peut reprocher à M. Castaing de ne lui avoir rendu son ordinateur que tardivement, alors que celui-ci indiquait à ce sujet, dans sa lettre de rupture du 12 avril 2007 "(...) il est à ton entière disposition et je te serais reconnaissant de bien vouloir me donner un rendez-vous afin que je puisse vous le remettre ou à défaut de m'indiquer la procédure de remise que vous souhaitez" et qu'elle ne démontre pas qu'elle aurait fixé un rendez-vous ou précisé un mode de remise que M. Castaing n'aurait pas respecté.
Enfin, la société Ateme ne rapporte aucune preuve de ce que la société Ittiam, ou MM Castaing et Guillaumet auraient détourné la clientèle de la société Texas-Instruments, ni qu'ils auraient utilisé des moyens déloyaux pour conquérir au moyen d'une politique agressive de prix celle de la société Archos.
Il résulte ainsi de l'ensemble de ces éléments que c'est à juste titre que le tribunal a jugé par des motifs dont la cour adopte pour le surplus les motifs non contraires, qu'il n'était pas établi que La société Ittiam, ainsi que MM Castaing et Guillaumet, auraient mis en œuvre à son préjudice des pratiques déloyales. Le jugement doit en conséquence être confirmé en tous ses dispositions.
Sur les demandes de MM. Castaing et Guillaumet de dommages-intérêts pour procédure abusive
La société Ateme a déjà été condamnée pour procédure abusive par le tribunal. Il n'est pas rapporté la preuve qu'elle aurait communiqué à l'extérieur sur l'appel diligenté, ni qu'elle aurait dénigré à cette occasion la société Ittiam ou MM Castaing et Guillaumet. Il n'apparaît pas non plus qu'elle ait diligenté cet appel avec légèreté ou mauvaise foi, alors qu'elle s'est contentée de contester par la voie de l'appel un jugement qui lui était défavorable. Dans ces conditions, les demandes de dommages-intérêts présentées par les intimés doivent être rejetées.
Sur la demande de réformation du jugement en ce qui concerne la condamnation au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive
La société Ateme affirme sans le démontrer que ce sont les intimés qui ont fait durer excessivement la procédure de première instance. Par ailleurs, les demandes de production de la jurisprudence ne peuvent être considérées comme abusives. La demande de réformation de cette condamnation doit donc être rejetée.
Sur les frais irrépétibles
Il est justifié de ne pas laisser à la charge des intimés la totalité des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. En conséquence, la société Ateme sera condamnée à payer à la société Ateme, M. Guillaumet et M. Castaing, chacun, la somme de 5 000 euros.
Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort : Dit que les pièces par la société Ateme sous les numéros 60 et 64 seront écartées des débats ; Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ; Y ajoutant, Rejette les demandes de la société Ittiam ainsi que de MM Guillaumet et Castaing de dommages-intérêts au titre de la procédure abusive ; Condamne la société Ateme à verser à la société Ittiam ainsi qu'à MM Guillaumet et Castaing la somme de 5 000 euros chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; Rejette toutes demandes autres, plus amples ou contraires des parties ; Condamne la société Ateme au dépens de l'instance qui seront recouvrés dans les conditions énoncées par l'article 699 du Code de procédure civile.