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Décisions

CA Riom, ch. com., 4 juin 2014, n° 13-01150

RIOM

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Barem (SARL)

Défendeur :

Tichit (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Andrieux

Conseillers :

Mmes Javion, Millerand

Avocats :

Mes Duval, Peltier, Hussar

T. com. Clermont-Ferrand, du 11 févr. 20…

11 février 2013

FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES :

La SARL Barem, qui a pour activité la création d'éléments mobiliers pour la réalisation d'expositions permanentes dans les musées a confié à la SA Tichit la fabrication d'éléments en tôle perforée représentant des motifs maori, destinées selon elle à une exposition au musée Branly à Paris, selon la SA Tichit au musée Pouchkine à Moscou ;

La SA Tichit a émis le 15/09/11 une facture de 29 000 euro HT que la SARL Barem a contestée ;

La SA Tichit a obtenu une ordonnance du 16/01/12 portant injonction de payer la somme de 19 684 euro en principal outre intérêts au taux légal ;

La SARL Barem a formé opposition ;

Par jugement du 11/02/13, le Tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a débouté la SARL Barem de sa demande d'expertise, l'a condamnée à payer à la SA Tichit la somme de 19 684 euro outre intérêts au taux légal à compter du 15/10/11 et à supporter les dépens, en écartant la demande d'indemnité de procédure ;

Par déclaration reçue le 15/04/13, la SARL Barem a interjeté appel ;

Selon conclusions transmises le 28/06/13, la SARL Barem indique n'avoir pu obtenir malgré ses demandes un devis, mais avoir reçu une facture de 29 000 euro HT pour la réalisation d'un décor composé uniquement de trois éléments en tôle qui présentaient des défauts de réalisation ; elle a contesté cette facture ;

Elle a obtenu un devis d'une autre société pour une prestation identique s'élevant à seulement 18 607 euro HT ;

Elle s'est acquittée d'une somme de 15 000 euro TTC ;

Elle déplore que le tribunal de commerce ait rejeté sa demande d'expertise ; une autre société (Billaud Métallerie) a établi un devis pour les mêmes panneaux, la même technique de découpe, les mêmes finitions, s'élevant à 15 750 euro HT ;

Ce qui fait ressortir le caractère prohibitif du prix de la prestation de la SA Tichit, qui n'a pas contesté les désordres affectant les panneaux ; source de reprises, donc de retard dans la livraison, et de frais (personnel supplémentaire) ;

La SA Tichit en acceptant le marché a méconnu les dispositions de l'article 1710 du Code civil en ne produisant pas de devis, et en effectuant un travail non exempt de vices et à un prix non conforme à celui du marché, a engagé sa responsabilité ; elle a profité de l'urgence de la commande pour surfacturer ;

La SARL Barem conclut à la réformation du jugement en toutes ses dispositions pour voir ordonner une expertise, débouter la SA Tichit de ses demandes, ordonner la restitution par cette dernière de la somme de 19 684 euro à la SARL Barem, réglée le 27/05/13, dire n'y avoir lieu à paiement des intérêts au bénéfice de la SA Tichit, la voir condamner à payer une indemnité de procédure de 3 000 euro et à supporter les entiers dépens ;

Par conclusions transmises le 19/08/13, la SA Tichit expose avoir été sollicitée fin juillet 2011 pour une commande urgente de 21 panneaux en tôle aluminium à découper au laser suivant des motifs maori à réaliser pour fin août ; la priorité étant le délai, il n'a jamais été question de prix ;

La livraison a eu lieu début septembre ; sur la facture du 15/09/11 d'un montant de 29 000 euro HT, la SARL Barem n'a acquitté que la somme de 15 000 euro ;

Deux mois plus tard, par lettre du 16/11/11, la SARL Barem a contesté la facture ; essentiellement le poste découpe au laser sur 21 tôles aluminium ; et invoquant de nombreuses malfaçons ;

La SA Tichit fait valoir que le contrat d'entreprise demeure valable, bien que le prix n'ait pas été fixé lors de sa formation ;

Le travail a du être accompli au mois d'août, période de fermeture de l'entreprise ; la SARL Barem n'a pas sollicité de devis ;

Elle conteste les éléments du devis de la société Allier Découpe dont se prévaut la SARL Barem ; de même pour le devis de la société Billaud ;

Quant à la demande d'expertise, elle n'est pas pertinente ;

La SARL Barem n'a formulé aucune réserve à la livraison de l'ouvrage, aucune protestation de la direction de l'exposition n'a été évoquée ; aucun délai n'avait été contractualisé ;

S'agissant des intérêts moratoires, il résulte des dispositions de l'article L. 441-6 du Code de commerce que le délai de règlement des sommes dues est fixé au 30e jour suivant la livraison des marchandises ou l'exécution de la prestation ; n'ayant pas payé dans le délai, la SARL Barel doit être condamnée à des pénalités à un taux d'intérêt égal à celui appliqué par la Banque Centrale Européenne, majoré de 10 points, soit 0,75 + 10 = 10,75 %, à compter de l'expiration du délai pour régler soit le 15/10/11 ;

La SA Tichit conclut par conséquent à la confirmation du jugement querellé sauf à dire que les sommes porteront intérêts au taux de 10,75 %, et à condamner la SARL BAREL à une nouvelle indemnité de procédure de 3 000 euro et en tous les dépens ;

La procédure a été clôturée par une ordonnance du 20/02/14.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur l'appel principal :

Attendu que le premier juge a retenu à juste titre que c'était le montant de la facture qui constituait l'objet principal du litige, dans la mesure où il est constant que les 21 panneaux en tôle commandés par la SARL Barem à la SA Tichit ont été livrés en septembre 2011 et que ce n'est que par un courrier du 16/11/11(sa pièce 16) que la SARL Barem a évoqué des malfaçons dont auraient été affectés les panneaux ;

Que l'article 1710 du Code civil n'impose pas l'établissement d'un devis, se bornant à définir le louage d'ouvrage comme un contrat par lequel l'une des parties s'engage à faire quelque chose pour l'autre moyennant un prix convenu, de la même façon que, selon l'article 1583, la vente est parfaite entre les parties dès qu'elles ont convenu de la chose et du prix ;

Que la SARL Barem n'établit pas le caractère excessif de la facturation effectuée par la SA Tichit en versant aux débats une offre de prix (sa pièce 9) émanant de l'entreprise Billaud, et une autre offre (sa pièce 4) de la SARL Allier Découpe, dès lors qu'aucun rapprochement utile ne peut être effectué avec la facture contestée (sa pièce 3) ;

Qu'en effet, aucun de ces documents ne permet d'établir le prix de revient de chacun des panneaux, par addition du coût de la fourniture de la matière première, eu égard à son format, de celui de la découpe au laser ou au jet d'eau haute pression des motifs "maori", des autres prestations (pliage, roulage, ponçage, soudure, meulage, fixation de cornières, peinture epoxy, poudrage et emballage, frais d'expédition, à supposer cette liste exhaustive), permettant d'effectuer une comparaison utile ;

Qu'il n'y a pas lieu, au regard des dispositions de l'article 146 du Code de procédure civile, de faire droit à la demande d'expertise formulée par l'appelante ;

Qu'il apparaît que les relations entre les parties se sont nouées dans un contexte particulier où la notion de délai de réalisation était essentielle, aucune référence n'étant faite à un devis, ou au versement d'un acompte à intégrer dans le champ contractuel ;

Qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la SARL Barem recevable mais mal fondée en son opposition, l'a déboutée de sa demande d'expertise et condamnée à payer à la SA Tichit la somme de 19 684 euro en principal outre intérêts au taux légal à compter du 15/10/11, et aux dépens ;

Sur les intérêts moratoires :

Attendu que la SA Tichit poursuit la réformation du jugement pour voir substituer un taux d'intérêt de 10,75 % à celui du taux légal, et ce sur le fondement des dispositions de l'article L. 441-6 du Code de commerce ;

Qu'il ressort effectivement des dispositions en cause que le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date d'exécution de la prestation demandée, et ne peut dépasser 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la date d'émission de la facture, sous peine d'application d'un taux qui ne peut être inférieur à 3 fois le taux d'intérêt légal, et qui est égal au taux appliqué par la BCE à son opération de refinancement la plus récente ;

Mais qu'avant tout elles font obligation à tout prestataire de services de communiquer ses conditions générales de vente à tout demandeur, et notamment les conditions de règlement qui doivent énoncer les dispositions évoquées ci-dessus ;

Qu'à défaut ce prestataire s'expose aux peines prévues à l'article L. 442-6 du Code de commerce (dispositions I - 9° et III), sans conséquence ici dans la mesure où aucune action n'est introduite à l'encontre de la SA Tichit aux fins de faire sanctionner ce manquement ;

Que le Tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a encore à juste titre relevé que cette dernière s'était affranchie du respect des dispositions de l'article L. 441-6 du Code de commerce ;

Sur les autres demandes :

Attendu qu'aucune considération d'équité ne commande qu'il soit fait droit à la demande d'indemnité de procédure formée par la SA Tichit ;

Que l'appelante qui succombe aura à supporter les dépens d'appel.

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et après en avoir délibéré ; Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; Y ajoutant ; Condamne la SARL Barem aux dépens d'appel ; Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires.