CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 13 juin 2014, n° 13-01097
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Ferrero Spa (Sté), Soremartec (SA), Ferrero France (SA)
Défendeur :
Globus France (SARL), Swisslion Group D.o.o (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Aimar
Conseillers :
Mmes Nerot, Renard
Avocats :
Mes Flauraud, Becker, Pascal, Vignes, Melot
La société de droit italien Ferrero Spa qui commercialise avec succès, sous diverses marques, des produits de chocolaterie, de confiserie et de biscuiterie est notamment titulaire de la marque figurative internationale n° 782 786 désignant la France (en relation avec les présentation, signes et éléments d'identification des produits "Kinder"), enregistrée le 23 mai 2002 et dûment renouvelée pour désigner des "biscuits, gâteaux, pâtisserie et confiserie, chocolat glaces comestibles" relevant de la classe 30, étant précisé que cette marque, ainsi décrite au registre international des marques : "la marque consiste en une empreinte rectangulaire dont les côtés majeurs sont horizontaux avec un fin contour gris comprenant une surface supérieure blanche avec des effets d'ombre en gris et une surface inférieure orangée délimitée par une ligne à ondulation irrégulière", était revendiquée en première instance n'est plus visée dans le dispositif des dernières conclusions des appelantes.
La société anonyme de droit luxembourgeois Société de Recherches Techniques et de Marketing (Soremartec), venant désormais aux droits de la société de droit belge Soremartec SA par suite du transfert de l'enregistrement de marque communautaire, est titulaire de la marque figurative communautaire n° 001 482 942 déposée le 31 janvier 2000, dûment renouvelée pour désigner en classe 30, des "produits de pâtisserie, en particulier pan di spagna fourré contenant du chocolat et du lait", étant précisé qu'à l'empreinte orangée inférieure délimitée par une ligne à ondulation irrégulière composant la marque précitée sont ajoutés, sur la partie droite, le dessin d'une cruche de lait (blanche à pois bleus), d'un petit pot de miel (jaune), de deux épis de blé, d'un bouton d'or avec son feuillage jouxtant une barre chocolatée de triple épaisseur (de couleur blanche entourée de deux fines épaisseurs de couleur brune) figurée en diagonale.
Informées, le 10 février 2010, par la Direction Régionale des Douanes de Paris-Est de l'entrée sur le territoire français de 1 725 tonnes de barres chocolatées présentées dans un conditionnement portant les signes "Eurocrem Blok", expédiées par la société de droit serbe Swisslion Group D.o.o. et destinées à la société française Globus France, lesquelles ont fait l'objet d'une retenue douanière, et estimant qu'était très proche l'impression d'ensemble produite sur le consommateur par la marque invoquée et ce conditionnement, les sociétés Ferrero Spa, Ferrero France et la société de droit belge Soremartec SA ont assigné les sociétés Globus France et Swisslion en contrefaçon de marques ainsi qu'en concurrence déloyale et parasitisme, selon exploits des 19 février et 15 mars 2010.
Par jugement contradictoire rendu le 14 décembre 2012, le Tribunal de grande instance de Paris a, en substance et avec exécution provisoire :
- débouté les requérantes de leurs demandes en contrefaçon de leurs marques figuratives respectives ainsi que celles formées au titre de la concurrence déloyale et du parasitisme, débouté, par ailleurs la société Swisslion Groupe D.o.o de sa demande au titre du remboursement des marchandises ayant fait l'objet des retenues douanières ;
- condamné in solidum les requérantes :
à rembourser à la société Globus France la somme de 1 276,69 euros au titre des marchandises ayant fait l'objet de cette retenue,
à verser au profit de chacune des sociétés défenderesses la somme de 10 000 euros au titre de leur manque à gagner,
à payer à chacune la somme 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens, en déboutant les défenderesses de leurs demandes indemnitaires pour procédure abusive.
Par dernières conclusions signifiées le 18 février 2014, la société de droit italien Ferrero Spa, la société anonyme Ferrero France et la société anonyme de droit luxembourgeois Soremartec (venant aux droits de la société anonyme de droit belge Soremartec), appelantes, demandent en substance à la cour :
- de recevoir, notamment la société de droit luxembourgeois Soremartec en son intervention volontaire ;
- de débouter les intimées de toutes leurs prétentions ;
- d'infirmer le jugement en ses dispositions qui leur sont défavorables et en considérant que le conditionnement incriminé constitue le contrefaçon par imitation de la marque communautaire précitée en application de l'article 9 sous b) du règlement CE 40-94 du 20 décembre 1993, que ces atteintes sont également constituées par des actes d'usage non autorisé, que lesdits actes sont autant d'actes fautifs de concurrence déloyale préjudiciables à la société Ferrero France et relèvent d'actes de concurrence parasitaire préjudiciables à elles trois ;
- de les condamner pour contrefaçon de la marque communautaire n° 001 482 942, concurrence déloyale et concurrence parasitaire ;
- d'ordonner les mesures réparatrice d'usage - interdiction sous astreinte, destruction sous astreinte,
publication par voie de presse ;
- de condamner les intimées in solidum à leur payer une indemnité globale de 50 000 euros ;
- d'ordonner le remboursement des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire (17 276,69 euros), la libération de toutes sommes consignées entre les mains du Bâtonnier de l'ordre des avocats et le remboursement in solidum de tous les coûts (soit un total provisoire de 4 249,67 euros TTC au 31 décembre 2013) liés aux opérations de manutention, stockage, garde, assurances des produits durant les opérations douanières d'inspection puis durant la procédure judiciaire jusqu'à épuisement des voies de recours et complète destruction des produits ;
- de condamner enfin les appelantes à leur verser la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter tous les dépens.
Par dernières conclusions signifiées le 28 février 2014 la société à responsabilité limitée Globus France prie en substance la cour, au visa notamment des articles L. 716-1, L. 713-3 du Code de la propriété intellectuelle et 1382 du Code civil :
- de considérer qu'elle n'a pas commis d'actes de contrefaçon et que sa responsabilité délictuelle n'est pas engagée ;
- de débouter les appelantes de l'ensemble de leurs prétentions ;
- de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné "solidairement" les sociétés Ferrero Spa, Ferrero France et Soremartec à lui verser la somme indemnitaire de 1 276,69 euros correspondant au prix des marchandises saisies sur ses sites ;
- de condamner "solidairement" ces trois sociétés à lui verser la somme indemnitaire de 4 502,40 euros (au titre du prix des marchandises retenues en douane), celle de 25 000 euros (correspondant au manque à gagner), celle de 20 000 euros sanctionnant une procédure abusive, celle de 25 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter tous les dépens.
Par dernières conclusions signifiées le 12 mars 2014 la société de droit serbe Swisslion Group D.o.o. demande pour l'essentiel à la cour, au visa notamment des Livres I et III du Code de la propriété intellectuelle et 1382 et suivants du Code civil :
- de considérer qu'elle n'a pas commis d'actes de contrefaçon et que sa responsabilité délictuelle n'est pas engagée ;
- de débouter les appelantes de l'ensemble de leurs prétentions et, formant appel incident;
- de considérer que les sociétés Ferrero Spa, Ferrero France et Soremartec SA ont commis des actes de concurrence déloyale à son préjudice, que l'action engagée à son encontre est abusive ;
- de les condamner in solidum à lui verser la somme indemnitaire de 25 559,23 euros au titre de son manque à gagner, celle de 20 000 euros sanctionnant une procédure abusive en les condamnant, en tout état de cause, in solidum à lui verser la somme de 25 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter tous les dépens.
Sur ce, la cour
Sur la contrefaçon de la marque figurative communautaire n° 001 482 942
Considérant que la société Swisslion soutient à nouveau dans ses dernières écritures que les sociétés appelantes prétendent incriminer une "présentation" de l'emballage des produits "Eurocrem blok" alors que celui-ci a fait l'objet, en 2008, d'un enregistrement en Serbie, n° 2008-000774 et d'un enregistrement international de marque sous le n° 993 248 de couleurs rouge, or, brun, beige, vert et blanc pour désigner des produits de la classe 30 pièces 16 et 17), ceci sans plus d'éléments de contestation sur la motivation des premiers juges ;
Que, statuant dans un préliminaire, le tribunal a cependant à juste titre rejeté cette prétention, comme le font valoir les sociétés appelantes, dès lors que ces enregistrements de marque ne visent pas le territoire français, si bien que la contrefaçon sera appréciée en contemplation de l'emballage de présentation du produit saisi ;
Considérant que les sociétés appelantes, qui fondent leur action sur les dispositions de l'article 9 du règlement CE n° 40-94 du 20 décembre 1993, acquiescent à l'appréciation du tribunal quant à la similitude des produits concernés mais le critiquent en son appréciation du risque de confusion entre les signes purement figuratifs en conflit en lui reprochant de s'être affranchi de la nécessaire recherche de l'impression globale perçue par un consommateur moyen et de s'être livré à une analyse séparée et successive, de surcroît partielle, des éléments composant les signes respectifs pour en déduire soit un défaut de distinctivité, soit un défaut de reprise ;
Qu'elles font valoir que la "combinatoire" particulièrement originale et distinctive de la marque revendiquée a d'autant plus d'impact sur ce consommateur que cette représentation, dans cette architecture-ci, de lignes, formes et couleurs particulières, à l'appui d'un dessin-graphisme très lisse et en aplats, est tout à fait arbitraire et rare dans le secteur de la chocolaterie-biscuiterie et surtout que le visuel horizontal bicolore rouge-orangé -blanc séparé par une ligne ondulée ou horizontale à courbes renvoie prioritairement à la marque "Kinder", première marque associée à 60 % d'attribution totale par les consommateurs, ainsi que le démontre le rapport intitulé "test de reconnaissance" GFK d'avril 2005-visuel bicolore qu'elle produit ;
Que le consommateur sera, selon elles, inattentif aux quelques différences de détail entre les deux signes, tels la cruche de lait de couleur blanche sur fond blanc, les épis de blé et le pot de miel de faible proportion, à l'instar des dénominations sur le conditionnement incriminé dont elle relève qu'il est différent d'un précédent emballage et n'a pas été choisi, estiment-elles, par hasard, d'autant que le consommateur pourra y voir une diversification de produits ayant même origine ;
Qu'elles critiquent enfin l'argumentation adverse qui reprend, à tort à leur sens, un examen analytique des "présentations" en présence sans se préoccuper de l'impression d'ensemble produite, mais ne réfutent pas moins chacun des éléments de leur analyse, s'agissant des couleurs, de la forme géométrique, des mentions apposées sur l'emballage incriminé, du visuel, du produit en lui-même ou encore des circuits de distribution ;
Considérant, ceci exposé, qu'il est constant que le graphisme du conditionnement critiqué ne constituant pas la reproduction à l'identique de la marque qui lui est opposée, il convient de rechercher s'il n'existe pas entre les deux signes un risque de confusion (lequel comprend le risque d'association) qui doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ; que cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par celles-ci en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants ;
Qu'en outre, un faible degré de similitude entre les produits ou services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les signes et inversement ;
Sur la comparaison des produits
Considérant qu'alors que le tribunal a retenu la similitude des produits en cause, la société Swisslion soutient qu'ils sont "totalement et absolument différents", faisant valoir que le produit Eurocrem est une tablette de chocolat avec une couche de chocolat au lait et noisettes directement dérivé de sa propre pâte à tartiner qui se déguste en fin de repas et a un goût plutôt amer alors que le produit Kinder est une barre chocolatée d'une épaisseur supérieure à son produit au contenu et au goût laitiers chocolatés qui se déguste en milieu de matinée et d'après-midi ; qu'en outre, leurs circuits de distribution sont radicalement différents puisque les produits Kinder sont largement diffusés et apparaissent, dans les grandes surfaces, en têtes de gondoles en faisant l'objet d'achats d'impulsion tandis que les produits Eurocrem, notoires dans leur marché de l'ex-Yougoslavie d'origine, sont distribués dans des magasins spécialisés et acquis par de nostalgiques expatriés ;
Mais considérant qu'en application de la jurisprudence communautaire, les facteurs pertinents pour déterminer la similitude des produits incluent en particulier leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent et complémentaire ;
Qu'à cet égard la barre chocolatée vendue dans l'emballage incriminé, si elle n'est pas identique aux produits visés à l'enregistrement (à savoir : "produits de pâtisserie, pan di spagna fourré contenant du chocolat et du lait") ne peut être considérée que comme similaire à ces derniers dans la mesure où ces produits ont la même nature, s'agissant de produits à base de produits laitiers et de cacao, peu importe leur goût, confectionnés en barres, qu'ils ont pour même destination d'assouvir sans préparation ni accessoires un besoin alimentaire en sus du repas proprement dit, peu important la nationalité du consommateur, et semblable utilisation et qu'il n'est, de plus, pas démontré (à examiner les 22 pièces de la société Globus) qu'ils ne se retrouvent pas dans les mêmes lieux de vente;
Que la similitude retenue par les premiers juges ne saurait, par conséquent, être contestée;
Sur la similitude des signes
Considérant que la marque figurative communautaire revendiquée a été précédemment décrite ;
Que la présentation d'emballage contestée dont la photographie figure dans les conclusions des parties se présente, quant à elle, sous la forme d'un rectangle dont la partie supérieure, à proportion de moitié et de couleur rouge, présente à sa base une ondulation régulière selon des formes nettement arrondies soulignées de beige ainsi qu'un fond blanc dans en sa partie inférieure, avec, à la droite du visuel et en diagonale, une barre chocolatée composée de trois épaisseurs d'égale dimension (brun, blanc, brun) surmontée de petits cœurs dans la partie rouge et surmontant, en partie basse, trois noisettes avec leurs feuilles ; qu'y figurent en outre les mentions, de haut en bas et centré à gauche, "Takovo" (en petits caractères verts) "Eurocrem(r)" (en caractère épais de couleur blanche sur fond rouge), "SL" (en lettres dorées dans un écusson vert) suivi de "Blok" (en lettres brunes épaisses sur fond blanc) puis "35 godina" (en lettres rouges) "Rastemo zajedno!" (en petits caractères italiques verts) ;
Que s'il est vrai que la composition d'ensemble de la marque figurative et de l'emballage de présentation présentent des éléments qui pourraient les rapprocher du fait de la reprise d'un fond dans des teintes proches se caractérisant par une même ligne séparative présentant des ondulations et par le positionnement, à droite du visuel, d'éléments décoratifs suggérant des composants du produit qui jouxtent une barre en diagonale de triple épaisseur, il n'en demeure pas moins que ces éléments de rapprochement n'apparaissent pas significatifs ;
Que l'appréciation globale de la marque et du conditionnement opposés conduit à considérer, du fait de l'inversion des deux couleurs de fond et de leurs proportions respectives alliées aux caractéristiques propres à chacune des ondulations séparatives des deux masses composant le fond et en raison à la fois de la présence massive, sur ces deux fonds, d'éléments verbaux que le consommateur moyen ne pourra ignorer et de ce que suggèrent les végétaux et objets entrant dans la composition de l'une et de l'autre, que ce consommateur d'attention moyenne pourra percevoir la présentation d'emballage du produit "Eurocrem" comme la figuration d'un store du commerce offrant à la vente une barre fortement chocolatée à base de noisettes ;
Qu'il ne le confondra pas ni ne l'associera aux produits provenant de l'entreprise Kinder dès lors que la marque figurative revendiquée, quand bien il n'est pas contesté qu'elle jouit d'une certaine renommée, se caractérise, selon les termes du tribunal, par un "coulis dégoulinant" à base de produits laitiers fortement suggéré par la présence majoritaire de blanc dans la barre chocolatée ainsi que par une goutte de lait et une cruche à pois bleus qui ne se confond pas, contrairement à ce qui est prétendu, avec le fond blanc, jouxtant immédiatement une masse plus importante de composants, affectant la composition d'ensemble, que les simples noisettes nettement détachées de la barre chocolatée "Eurocrem" ;
Qu'il résulte de l'analyse globale ainsi menée qu'en dépit de la similarité des produits couverts par la marque revendiquée et offerts à la vente dans l'emballage de présentation incriminé, le consommateur ne pourra se méprendre sur l'origine respective des produits en cause, tant les différences dans la composition d'ensemble des signes affectent ce qu'ils suggèrent ; qu'il ne sera pas conduit à les confondre ni même à les associer en pensant qu'ils proviennent d'une même entreprise ou d'entreprises liées économiquement, si bien que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté l'action en contrefaçon de la société titulaire de cette marque communautaire ;
Sur la concurrence déloyale et les actes de "concurrence parasitaire" incriminés
Considérant, sur la concurrence déloyale, que la société Ferrero France qui exploite en France des produits sous la marque communautaire poursuit l'infirmation du jugement en se référant à la motivation de la présente cour d'appel dans deux précédents litiges qui l'ont opposée à des sociétés tierces à la présente procédure ;
Mais considérant qu'elle n'explicite aucunement en quoi les intimées auraient fautivement manqué aux usages loyaux et honnêtes du commerce et ne peut valablement réduire son argumentation au seul renvoi de la cour à des espèces différentes de la présente dans lesquelles, qui plus est, les faits de contrefaçon au préjudice du titulaire de la marque avaient été retenus ;
Considérant, sur la "concurrence parasitaire" distinctement incriminée, que l'appelante se prévaut de la notoriété de la famille de produits de chocolaterie (notamment dénommés: Kinder délice, Kinder tranche au lait, Kinder bueno, Kinder céréales) qui atteint 96 % de reconnaissance sur le marché français, générait un chiffre d'affaires de plus de 500 millions d'euros en 2006-2007 avec des investissements publicitaires de 80 millions d'euros, lesdits produits bénéficiant, expose-t-elle, d'un "identité ombrelle" permanente et inchangée depuis ses origines consistant en la combinaison d'un visuel bicolore rouge-orangé-blanc séparé par une ligne ondulée et en la représentation stylisée et en perspective cavalière vue de gauche d'un produit de chocolaterie-confiserie situé à droite du conditionnement ;
Qu'elle fait grief au tribunal d'avoir "balayé d'un revers de main" son moyen et lui reprochent de ne pas avoir indiqué en quoi les actes déloyaux seraient constitutifs d'une atteinte à sa notoriété ou par quels moyens déloyaux les défenderesses tireraient indûment profit de cette renommée, ajoutant qu'est inopérante l'argumentation adverse tenant à la nécessaire démonstration d'actes distincts, aux quantités de produits vendus ou à la qualification de "produits ethniques" des produits Eurocrem ;
Qu'elle soutient, enfin, que les intimées ont volontairement adopté la combinaison revendiquée afin de s'insérer dans la famille de produits Kinder et profiter indûment de son fort pouvoir attractif, de sa réputation et de l'image de prestige qu'elle développe depuis 45 ans, au prix d'efforts et de lourds investissements, en voulant pour preuve le contenu de sites internet de vente en ligne qui présentent régulièrement le produit incriminé en renvoyant aux produits de la famille Kinder avec un impact visuel selon elle identique et tout à fait significatif, y compris en présence d'autres produits concurrents du secteur ;
Mais considérant qu'outre le fait que la société Kinder France ne rapporte pas la preuve des faits qu'elle dénonce en se contentant de produire des copies d'écran de pages internet à l'origine et à la date incertaines, elle ne démontre pas que les sociétés intimées qui commercialisent leurs produits dans un emballage dont il a été dit qu'il ne se présentait pas selon la combinaison revendiquée aient indûment tiré profit de sa notoriété ou se soient fautivement approprié la valeur économique qu'elle a, par ses investissements humains et financiers, créée ;
Que la cour ne peut donc retenir, comme l'a fait le tribunal, les faits de concurrence déloyale tels qu'imputés à faute, pas plus que les faits de concurrence par parasitisme dont il est fait état et confirme, par voie de conséquence, le jugement sur cet autre point ;
Sur les demandes reconventionnelles des intimées
Considérant qu'alors que le tribunal a considéré que la demande indemnitaire au titre des marchandises ayant fait l'objet de la retenue douanière ne pouvait prospérer qu'au profit de la société Globus France et à l'encontre des seuls titulaires d'une marque enregistrée ou du bénéficiaire d'un droit exclusif, soit les sociétés Ferrero Spa et Soremartec, en en fixant le montant à la somme réclamée par la société Globus de 1 276,69 euros correspondant aux prix habituellement pratiqués et, par ailleurs, considéré que devait être retenu le manque à gagner par les deux sociétés défenderesses en fixant la réparation de ce poste de préjudice imputable aux trois sociétés demanderesses à l'action à une somme globale de 10 000 euros au profit de chacune, les appelantes poursuivent l'infirmation de l'ensemble des dispositions du jugement tandis que les sociétés intimées forment appel incident ;
Que, plus précisément, les trois sociétés appelantes, qui rappellent qu'elles disposent depuis fort longtemps, comme la loi les y invite et les autorise, d'une surveillance douanière sur leurs marques, se prévalent du bien fondé de leurs actions, compte tenu de leurs légitimes droits et intérêts, et estiment qu'en tout état de cause, il ne peut être fait droit aux nouvelles demandes indemnitaires des sociétés Globus et Swisslion ;
Que la société Globus demande que l'indemnisation du préjudice financier subi du fait de la retenue, par le bureau des douanes du Blanc-Mesnil, des marchandises qu'elle avait achetées à la société Swisslion pour une somme de 4 502,40 euros s'ajoute à celui des marchandises de ses sites de La Courneuve, Bagnolet, Aulnay-sous-Bois, aujourd'hui invendables du fait de leur péremption, la valeur des produits saisis étant de 1 276,69 euros ; qu'elle se plaint également de son impossibilité d'importer des produits "Eurocrem" depuis cette date alors qu'un concurrent comme la société France Bosnie distribue toujours en France ces mêmes produits, et que l'indemnisation fixée par le tribunal est insuffisante eu égard au délai écoulé et à un chiffre d'affaires d'environ 8 500 euros pour l'année 2010 ; que son préjudice réel peut être évalué à 25 000 euros ;
Que la société Swisslion, sous la qualification d'actes de concurrence déloyale, fait valoir que les appelantes, faussant le jeu de la concurrence et dans le dessein de la discréditer, ont demandé que les produits soient retenus en douane alors qu'elles n'ont pas contesté l'enregistrement des marques "Eurocrem" et "Eurocrem Blok" et qu'elle peut se prévaloir de ses marques qui ne sont pas, comme prétendu, des "présentations" ; qu'elle poursuit l'indemnisation du préjudice que lui cause l'entrave à l'importation dont elle est victime depuis février 2010 et estime avoir subi, de ce fait, une perte de chiffre d'affaires de 7 390,08 pour les biens retenus, outre celle de 18 169,15 euros du fait de la suspension de ses exportations vers la France et du préjudice moral résultant de l'atteinte à sa réputation ;
Considérant, ceci exposé et s'agissant des marchandises périssables ayant fait l'objet d'une retenue en douane depuis le mois de février 2010 dont il n'est pas contesté qu'elle sont devenues invendables, que par motifs pertinents que la cour fait siens, le tribunal a considéré que la responsabilité des sociétés Ferrero Spa et Soremartec était engagée en évaluant exactement le préjudice subi par la société Globus selon le détail des procès-verbaux de constat explicité dans le jugement, de sorte que la demande de condamnation supplémentaire de cette dernière, étayée par une facture comprenant des produits divers (pièce 18) et qui conduirait, pour partie, à une double indemnisation ne peut prospérer ; que la demande formée à ce titre par la société Swisslion dont il apparaît qu'elle a été payée pour le prix de ces marchandises doit être rejetée, comme en a jugé le tribunal ;
Que pour ce qui est du manque à gagner dont l'une et l'autre des sociétés intimées se prévaut, qu'il s'agit d'un préjudice certain qui doit être indemnisé en considération de la perte de chance de réaliser des gains sur la commercialisation de produits Eurocrem, sur le territoire français, depuis février 2010, en raison du risque encouru de nouvelles retenues douanière en lien avec la présente procédure ; qu'à cet égard, et étant relevé que compte tenu de ce qui précède, est inopérante l'argumentation de la société Swisslion portant sur les marques dont elle est titulaire, si le tribunal a été conduit à évaluer le montant du préjudice subi par chacune à ce titre à la somme de 10 000 euros en relevant que ne lui était pas fourni d'éléments d'appréciation exploitables, force est de relever qu'elles ne produisent aucune pièce susceptible de reconsidérer à la hausse cette évaluation ; que sur cet autre chef de préjudice, le jugement doit, par conséquent, être confirmé ;
Sur les autres demandes
Considérant que les intimées réitèrent leurs demandes au titre de l'abus de procédure ; qu'il convient, toutefois, de considérer que la société Globus se contente d'affirmer que la procédure est "incontestablement" abusive, à l'instar de l'appel, alors que la société Swisslion évoque des demandes clairement "irrecevables" (sic) présentées de mauvaise foi et sans moyens sérieux, sans davantage circonstancier l'abus ;
Qu'il apparaît qu'en dépit de la solution donnée au présent litige, les appelantes ont pu, sans faute, ester en justice afin de présenter des demandes qu'elles ont pu croire fondées et que, de la même façon, elles ont pu user des voies de recours que leur offraient les textes ; qu'il n'y a donc pas lieu à infirmation ;
Considérant, en revanche, que l'équité commande d'allouer à chacune des sociétés intimées une somme complémentaire de 6 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Que, déboutées de ce dernier chef de prétentions, les sociétés appelantes qui succombent seront condamnées in solidum aux dépens d'appel ;
Par ces motifs Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris et, y ajoutant ; Condamne in solidum la société de droit italien Ferrero Spa, la société Ferrero SA et la société de droit luxembourgeois Soremartec à verser à la société Globus France SARL et à la société de droit serbe Swisslion D.o.o. la somme complémentaire de 6 000 euros, ceci au profit de chacune, en application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens d'appel avec faculté de recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.