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Décisions

CA Aix-en-Provence, 1re ch. C, 19 juin 2014, n° 13-14727

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Benamar

Défendeur :

Agimo (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Kerraudren

Conseillers :

Mme Bourrel, M. Fournier

Avocat :

Me Martin

TGI Brignoles, du 2 juill. 2013

2 juillet 2013

EXPOSE DU LITIGE

Après lui avoir délivré le 8 janvier 2013 un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail, la SCI Agimo (la SCI) a assigné sa locataire, Madame Benamar, devant le juge des référés du Tribunal d'instance de Brignoles.

Une ordonnance réputée contradictoire du 2 juillet 2013 a constaté la résiliation du bail à la date du 8 mars 2013, ordonné l'expulsion de Madame Benamar et de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique, fixé à une somme mensuelle de 326,60 euro l'indemnité d'occupation due à compter du 1er avril 2013, condamné Madame Benamar à payer à la SCI une somme de 3 000 euro à titre de provision sur les loyers et charges échus impayés, condamné Madame Benamar aux dépens et au paiement d'une somme de 100 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Madame Benamar est appelante de cette ordonnance par déclaration du 15 juillet 2013.

Dans des conclusions du 15 octobre 2013, Madame Benamar, bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, expose les difficultés de santé et financières qui l'ont conduite à ne plus pouvoir faire face au paiement de son loyer et à n'avoir pas été en mesure de régler en temps utile les causes du commandement de payer.

Elle indique que sa situation, qui a été pris en compte par les services du Conseil général et le fonds de solidarité au logement, s'est améliorée, que le loyer courant est pris en charge par ledit fonds, et que depuis le mois d'avril 2013, elle apure progressivement sa dette.

Elle fait valoir qu'il serait inéquitable de mettre à sa charge un montant de 172 euro au titre de l'application d'une clause pénale, ce type de clause ayant de surcroît fait l'objet d'une recommandation publiée par la commission des clauses abusives.

Elle reconnaît à la date de ses écritures une dette d'un montant de 2 780,75 euro.

Elle demande à la cour de dire que sa dette se monte à cette seule somme, de suspendre les effets de la clause résolutoire, de l'autoriser à se libérer au moyen de 24 versements mensuels de 120 euro en sus du loyer, de dire que chacune des parties supporte la charge de ses dépens, et de ne pas mettre à sa charge d'indemnité au titre des frais irrépétibles.

La SCI a été assignée le 20 janvier 2014, à l'adresse de son siège social figurant au registre du commerce et des sociétés, par voie de procès-verbal de recherche infructueuse, et n'a pas constitué avocat.

MOTIFS

1) Le bail prévoit à défaut de paiement à son échéance exacte d'un terme de loyer une majoration de plein droit de 10 % à titre de clause pénale.

Cette clause ne revêt pas de caractère, ni manifestement excessif au sens de l'article 1152 du Code civil, ni manifestement disproportionné au sens de l'article R. 132-2 du Code de la consommation, et si une recommandation 00-01 du 22 juin 2000 de la commission des clauses abusives recommande d'interdire dans les contrats de location conclus entre un professionnel et un consommateur toute clause mettant à la charge du consommateur une indemnité forfaitaire en cas d'inexécution de ses obligations sans prévoir une clause identique pesant sur le professionnel, une telle recommandation n'a pas en elle-même de valeur normative et ne lie pas la cour.

Il s'ensuit, en tenant compte par ailleurs d'un décompte établi le 1er octobre 2013, de frais de relance dont la mise en compte est sérieusement contestable, et de règlements partiels, que la créance de la SCI se montait à la date du 15 octobre 2013 à la somme de 2 952,75 euro, au paiement de laquelle Madame Benamar doit être condamnée à titre provisionnel.

2) Madame Benamar justifie de sa bonne foi et de sa capacité à régler ses loyers courants et à apurer son arriéré.

Il sera donc fait droit à sa demande de délais et de suspension des effets de la clause résolutoire selon les termes du dispositif du présent arrêt.

3) Madame Benamar supporte les dépens de première instance (incluant le coût du commandement de payer) et les dépens d'appel.

Il est équitable de laisser à la SCI la charge de ses frais irrépétibles de première instance.

Il suit de l'ensemble de ce qui précède que l'ordonnance doit être infirmée sauf en ce qu'elle a condamné Madame Benamar aux dépens.

Par ces motifs LA COUR, Infirme l'ordonnance sauf en ce qu'elle a condamné Madame Benamar aux dépens, Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées et y ajoutant, Condamne Madame Benamar à payer à la SCI Agimo une somme de 2 952,75 euro à titre provisionnel en paiement d'un arriéré de loyers et de charges au 15 octobre 2013, Dit que Madame Benamar pourra se libérer de sa dette, en sus du paiement du loyer courant (y inclus la provision pour charges), en 23 mensualités de 123 euro et une 24ème mensualité du solde, la première mensualité devant être payée le 15 du mois suivant le jour de la signification du présent arrêt, Constate le jeu de la clause résolutoire du bail à la date du 8 mars 2013 mais en suspend les effets durant le délai ainsi octroyé, Dit qu'en cas de règlement de la dette d'arriéré selon l'échéancier fixé la clause résolutoire sera réputée n'avoir jamais joué, Dit qu'en cas de non-paiement d'une seule mensualité à son échéance, ou d'un seul terme de loyer courant (incluant la provision pour charges), l'intégralité de la créance restant due redeviendra exigible de plein droit, la résiliation du bail sera acquise de plein droit, l'expulsion de Madame Benamar et celle de tous occupants de son chef pourra être poursuivie avec au besoin le concours de la force publique, et Madame Benamar sera redevable à titre provisionnel d'une indemnité d'occupation égale au montant du dernier loyer (incluant la provision pour charges) jusqu'à son départ effectif des lieux, Dit que Madame Benamar supporte les dépens de l'appel, Déboute la SCI Agimo de sa demande au titre de ses frais irrépétibles de première instance.