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ADLC, 10 juillet 2014, n° 14-DCC-103

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à la prise de contrôle exclusif de SIIC de Paris par Eurosic

ADLC n° 14-DCC-103

10 juillet 2014

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 12 juin 2014, relatif à la prise de contrôle exclusif de SIIC de Paris par Eurosic, formalisée par deux contrats de cession d'actions en date du 5 juin 2014 ; Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération

1. Eurosic est une société d'investissement immobilier cotée sur le marché Eurolist d'Euronext Paris. Elle détient et gère un patrimoine d'actifs immobiliers composé principalement de bureaux situés à Paris, en région parisienne et dans les grandes métropoles régionales. Eurosic détient également des actifs dans le secteur des loisirs, de la logistique et du logement.

2. SIIC de Paris est une société foncière, également cotée sur le marché Eurolist d'Euronext Paris, spécialisée dans la détention et la gestion d'actifs immobiliers de bureaux, situés quasi-exclusivement en Ile-de-France. Son actionnaire principal est depuis 2006 le groupe espagnol Realia (58,95 % du capital). Elle gère aussi marginalement des actifs immobiliers à usage de commerce et résidence dans les Bouches du Rhône.

3. L'opération notifiée, formalisée par deux contrats de cession d'actions en date du 5 juin 2014, consiste dans l'acquisition par Eurosic des participations de Realia Patrimonio (58,95 %) et de la Société Foncière Lyonnaise (29,63 %) dans le capital de SIIC de Paris. L'opération sera suivie d'un dépôt d'offre publique obligatoire, suivi, dans l'hypothèse où Eurosic viendrait à détenir au moins 95 % du capital et des droits de vote de SIIC de Paris, d'un retrait obligatoire. Au terme de l'opération, Eurosic détiendra ainsi entre 88,58 % et 100 % du capital et des droits de vote de SIIC de Paris. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle de la SIIC de Paris par Eurosic, l'opération notifiée constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du code de commerce

4. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires hors taxe mondial total de plus de 150 millions d'euros (Eurosic : 104,9 millions d'euros pour l'exercice clos au 31 décembre 2013 ; SIIC de Paris : [...] millions d'euros pour l'exercice clos au 31 décembre 2013). Deux de celles-ci réalisent en France un chiffre d'affaires supérieur à 50 millions d'euros (la totalité de leurs chiffres d'affaires est réalisé en France). Les seuils de contrôle de l'article L. 430-3 du code de commerce sont donc franchis. Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne relève pas de la compétence de l'Union européenne. La concentration est ainsi soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

A. LES MARCHÉS DE PRODUITS ET SERVICES

5. Les autorités de concurrence nationale (1) et européenne (2) ont envisagé, tout en laissant la question ouverte, différentes segmentations dans le secteur des services immobiliers selon (i) les destinataires des services, les biens étant destinés soit aux particuliers, les immeubles concernés étant alors à usage résidentiel, soit aux entreprises, les immeubles concernés étant alors à usage commercial ou professionnel, (ii) le mode de fixation des prix, entre l'immobilier résidentiel libre et les logements sociaux ou intermédiaires, ces derniers s'inscrivant dans un cadre réglementaire particulier dans lequel l'État joue un rôle important, tant en termes d'aides financières que d'attribution de logements, (iii) le type d'activité exercée dans les locaux (bureaux, les locaux commerciaux et autres locaux d'activités comme par exemple les entrepôts ou les hôtels), et (iv) la nature des services ou biens offerts.

6. Pour cette dernière segmentation, les services suivants ont été identifiés :

(i) la promotion immobilière qui comprend les activités de construction et de vente de biens immobiliers ;

(ii) la gestion d'actifs immobiliers pour compte propre ;

(iii) la gestion d'actifs immobiliers pour compte de tiers (des investisseurs institutionnels, principalement des banques et des compagnies d'assurances) qui recouvre le conseil et la gestion de portefeuille immobilier (arbitrage et valorisation d'actifs), le montage des opérations d'investissement immobilier et la gestion d'actifs immobiliers et de véhicules d'investissements spécialisés (notamment les sociétés civiles immobilières) ;

(iv) l'administration de biens immobiliers qui recouvre les activités de gestion des immeubles pour le compte de propriétaires et qui peut être segmentée entre la gestion locative et la gestion de copropriété ;

(v) l'expertise immobilière ;

(vi) le conseil immobilier ;

(vii) l'intermédiation dans les transactions immobilières pour laquelle l'intermédiation dans les opérations d'achat/vente est distinguée de l'intermédiation dans les opérations de location.

7. Au cas d'espèce, les parties à l'opération sont simultanément actives sur les marchés de la gestion pour compte propre d'actifs immobiliers résidentiels (à l'exclusion des actifs résidentiels à usage social) et destinés aux entreprises, notamment des immeubles à usage de bureaux et de commerces (3).

8. La pratique décisionnelle (4), tout en laissant la question ouverte, a envisagé une segmentation entre centres commerciaux et locaux commerciaux en pied d'immeuble. En l'espèce, les activités des parties se chevauchent exclusivement sur les locaux commerciaux en pied d'immeuble.

B. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

9. La pratique décisionnelle (5) considère que les marchés relatifs au secteur immobilier sont de dimension locale, tout en laissant la question ouverte. L'analyse a toutefois déjà pu être menée au niveau national pour les services immobiliers à destination des entreprises lorsque les opérations étaient réalisées par des groupes d'envergure nationale suivant une stratégie d'implantation selon une logique de maillage du territoire.

10. Pour la région Île-de-France, le ministre de l'économie a relevé que " la région parisienne possède des propriétés particulières de continuité des zones urbaines. En effet, il existe une vaste zone très urbanisée et homogène recouvrant la majeure partie de l'Île-de-France, desservie par un réseau global de transport ; les habitants sont toujours en mesure d'arbitrer entre différentes parties de la région. Cette substituabilité entraîne une convergence au niveau des prix. Dès lors le niveau régional est le plus approprié pour l'analyse concurrentielle. " (6). Pour les autres régions, les autorités de concurrence ont mené leurs analyses concurrentielles au niveau régional ou infrarégional.

11. En l'espèce, les activités des parties dans le secteur des services immobiliers ne se chevauchent qu'en Île-de-France, et plus précisément à Paris (75) et dans les Hauts-de-Seine (92).

III. Analyse concurrentielle

12. La partie notifiante estime qu'à l'issue de l'opération, le nouvel ensemble ne représentera pas plus de [0-5] % des différents marchés de produits et services concernés, quelle que soit la dimension géographique retenue (niveau régional ou départemental).

13. L'Autorité de la concurrence a en outre déjà eu l'occasion de noter que le marché de la gestion et de la détention pour compte propre d'actifs immobiliers à usage de bureaux en Île-de-France se caractérisait par une forte atomisation. De nombreux opérateurs y sont actifs, notamment des sociétés foncières, des compagnies d'assurance, des fonds d'investissement et des banques.

14. L'opération n'est donc pas de nature à présenter un risque concurrentiel par le biais d'effets horizontaux sur les différents marchés de la gestion pour compte propre d'actifs immobiliers.

DECIDE

Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 14-094 est autorisée.

Notes :

1 Voir notamment la décision de l'Autorité de la concurrence n° 09-DCC-16 du 22 juin 2009 relative à la fusion entre les groupes Caisse d'Épargne et Banque Populaire, la décision n° 14-DCC-46 du 1er avril 2014 relative à la prise de contrôle conjointe d'un actif immobilier industriel en Moselle par la Norges Bank et Prologis ainsi que la décision C2008-79 / Lettre du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi du 22 août 2008, aux conseils des sociétés CDC et Eurosic, relative à une concentration dans le secteur de l'immobilier, BOCCRF N° 8 bis du 23 octobre 2008.

2 Voir les décisions de la Commission européenne COMP/M.2110 Deutsche Bank / SEI / JV du 25 septembre 2000, IV/M.2825 Fortis AG SA / Bernheim-Comofi SA du 9 juillet 2002 COMP/M.3370 BNP Paribas/ARI du 9 mars 2004.

3 Eurosic gère également des actifs immobiliers pour compte de tiers, mais SIIC de Paris n'est pas actif sur ce marché.

4 Voir les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 11-DCC-178 du 13 décembre 2011et n° 14-DCC36 du 18 mars 2014 et la lettre du ministre de l'économie C2007-52 du 22 mai 2007.

5 Voir notamment les décisions n° 09-DCC-16 précitée et C2005-108 / Lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du 25 novembre 2005 aux conseils de la société Foncière des Régions relative à une concentration dans le secteur immobilier, BOCCRF n°6 bis du 21 juin 2006 ainsi que la décision de la Commission M. 2825 précitée.

6 Voir la décision C2006-151/ Lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du 10 janvier 2007 au conseil du groupe Société Nationale Immobilière, relative à une concentration dans le secteur du développement et de la gestion de parc immobilier à vocation essentiellement résidentielle, BOCCRF n° 3 bis du 23 mars 2007.