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Décisions

ADLC, 15 avril 2014, n° 14-A-06

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Avis

Relatif à une demande d'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) portant sur le quatrième cycle d'analyse des marchés de gros du haut débit, du très haut débit et des services de capacités

ADLC n° 14-A-06

15 avril 2014

L'Autorité de la concurrence (commission permanente) ;

Vu la lettre enregistrée le 21 février 2014 sous le numéro 14/0018 A, par laquelle l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) a sollicité l'avis de l'Autorité de la concurrence ;

Vu le livre IV du Code de commerce ;

Vu le Code des postes et des communications électroniques ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Les rapporteurs, le rapporteur général adjoint, le commissaire du Gouvernement, les représentants de l'ARCEP entendus lors de la séance du 1er avril 2014 ;

Les représentants des sociétés Bouygues Télécom, Colt, Iliad, Numéricable, Orange, SFR, et le représentant de l'Association des Villes et Collectivités pour les Communications électroniques et l'Audiovisuel (Avicca) entendus sur le fondement de l'article L. 463-7 du Code de commerce lors de la séance du 1er avril 2014 ;

Est d'avis de répondre à la demande présentée dans le sens des observations qui suivent :

1. Par lettre du 21 février 2014 enregistrée sous le numéro 14/0018A, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ci-après ARCEP) a sollicité l'avis de l'Autorité de la concurrence dans le cadre de la procédure d'analyse des marchés de gros du haut et très haut débit et des services de capacité.

2. Il s'agit des marchés suivants :

? le marché de gros des offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire appelé " marché 4 " et identifié par la Commission " fourniture en gros d'accès (physique) à l'infrastructure du réseau (y compris l'accès partagé ou totalement dégroupé) en position déterminée " ;

? le marché de gros des offres d'accès haut débit et très haut débit activées livrées au niveau infranational appelé " marché 5 " et identifié par la Commission " marché de la fourniture en gros d'accès à large bande " ;

? le marché de gros des services de capacité du segment terminal appelé " marché 6 ".

3. Ces trois marchés de gros ont été identifiés par la Commission européenne dans sa recommandation du 17 décembre 2007 comme étant susceptibles de faire l'objet d'une régulation ex ante par les régulateurs sectoriels des États Membres, dans le cadre de la procédure d'analyse des marchés (1)

4. Cette procédure, issue du cadre communautaire du " paquet télécom ", adopté en 2002, prévoit que chacun des régulateurs sectoriels des États Membres de l'Union européenne conduit une analyse en trois volets : (i) identification des marchés de produits et de services du secteur des communications électroniques pour lesquels une intervention ex ante est nécessaire pour développer la concurrence au vu des circonstances nationales, (ii) désignation des opérateurs qui, le cas échéant, sont considérés comme étant " puissants sur le marché ", (iii) imposition à ces opérateurs des obligations ex ante nécessaires.

5. Pour compléter cette procédure, la Commission européenne a adopté, le 20 septembre 2010, une recommandation relative à la question de la prise en compte des réseaux de nouvelle génération dans l'exercice de la définition des obligations ex ante (troisième volet du processus d'analyse des marchés), désignée ci-après par l'expression " recommandation NGA " (2) et, le 11 septembre 2013, une recommandation relative aux obligations de non-discrimination et aux méthodes de calcul des coûts cohérentes pour promouvoir la concurrence et encourager l'investissement dans le haut débit (3)

6. Le dispositif de régulation envisagé par l'ARCEP porte sur la période 2014-2017 et constitue le quatrième cycle d'analyse de ces marchés. Il vise à remplacer les décisions de l'ARCEP n° 2011-06683 (marché 4), n° 2011-06694 (marché 5), n° 2010-04025 (marché 6) adoptées respectivement le 14 juin 2011 pour les deux premières et le 8 avril 2010 pour la troisième.

7. Afin d'obtenir une approche cohérente de l'ensemble des offres de gros et de détail, l'ARCEP a décidé de mener pour la première fois de manière synchrone les analyses des trois marchés 4, 5 et 6. Conformément aux articles L. 37-1, D. 301 et D. 302 du Code des postes et des communications électroniques, la demande d'avis de l'ARCEP, qui porte à titre principal sur les deux premiers volets du processus d'analyse des marchés, contient également les " projets de mesures " envisagés.

8. Après avoir exposé le contenu des projets de décisions de l'ARCEP (I), l'Autorité de la concurrence présentera ses observations sur les principales évolutions que propose d'apporter l'ARCEP au dispositif actuel de régulation et sur les perspectives de développement de ces marchés (II).

I. Présentation

9. L'Autorité s'attachera ci-après à présenter les projets de décisions en trois temps. Après avoir exposé le cadre général d'analyse des marchés de gros haut débit et très haut débit (A), l'Autorité présentera, marché par marché, les propositions en termes de délimitation de marché et d'analyse de puissance des acteurs (B), avant d'exposer les évolutions que propose d'apporter l'ARCEP au dispositif actuel de régulation (C).

A. LE CADRE GÉNÉRAL DES MARCHÉS DE GROS D'ACCÈS AU HAUT ET AU TRÈS HAUT DÉBIT

10. Les analyses de marché proposées par l'ARCEP visent, in fine, à assurer le développement de la concurrence sur les marchés de détail du haut et du très haut débit, soit par le moyen de la régulation des offres de gros amont sur la base desquelles les opérateurs construisent leur propre infrastructure en concurrence avec celle de l'opérateur historique (concurrence par les infrastructures, marché 4) soit, lorsqu'ils ne souhaitent pas investir dans leur propre infrastructure, par la régulation des offres de gros sur la base desquelles ils constituent leurs offres de détail à destination des clients résidentiels et des entreprises (concurrence par les services, marchés 5 et 6).

11. Les offres présentes dans le marché 4 correspondent à des offres dites " passives ". Il appartient aux opérateurs bénéficiant de ce type d'offre, en accédant à des infrastructures de réseaux " brutes " (par exemple un fourreau, un câble inerte ou non activé), d'y installer leurs propres équipements de réseaux permettant d'impulser un signal de communications électroniques. Ce faisant, ils sont en mesure de contrôler de bout en bout le réseau et de fournir ainsi un service qui peut se différencier de celui de l'opérateur qui offre l'accès à son infrastructure de manière passive (c'est le cas du dégroupage de la boucle locale cuivre d'Orange). Les offres présentes dans les marchés 5 et 6 correspondent quant à elles à des offres dites " actives ". Il s'agit pour les opérateurs bénéficiant de ce type d'offre d'avoir une ressource clef en main puisqu'ils louent un accès déjà activé par l'opérateur qui leur fournit la prestation (c'est le cas des offres de bitstream proposées par Orange sur la boucle locale cuivre).

Concurrence par les infrastructures et concurrence par les services

12. Le développement de la concurrence passe pour les opérateurs alternatifs par l'" échelle des investissements ". Au départ, les nouveaux opérateurs n'ont que des parts de marché limitées et ne peuvent donc investir dans des infrastructures qui représentent des coûts importants, notamment en termes de génie civil. Ils ne peuvent donc exercer qu'une concurrence par les services, qui passe par la fourniture d'offres de gros " activées " par l'opérateur dominant. Ce n'est qu'au fur et à mesure de leur développement qu'ils peuvent progressivement investir dans des réseaux ou des infrastructures en propre.

13. Les opérateurs et fournisseurs souhaitant commercialiser directement, sur les marchés de détail, des services à haut débit et à très haut débit disposent en effet de plusieurs possibilités, en fonction du niveau d'investissement qu'ils sont prêts à consentir :

? ils peuvent créer leur propre infrastructure de boucle locale (c'est-à-dire le dernier maillon du réseau jusqu'à l'abonné) : c'est le cas d'Orange, qui peut techniquement fournir des services à haut débit sur la paire de cuivre sur une zone recouvrant plus de 98 % de la population française ; c'est le cas également de Numéricable sur les réseaux câblés (moins de 40 % de la population) ainsi que des opérateurs (Orange, SFR, Free, Bouygues Télécom) qui investissent dans les réseaux de fibre optique, FTTH (fiber to the home) ou FTTO (fiber to the office). La création d'une boucle locale, qui nécessite des travaux de génie civil, représente l'investissement le plus élevé ;

? ils peuvent également recourir au dégroupage, c'est-à-dire installer leurs propres équipements actifs dans les noeuds de raccordement d'abonnés (NRA) sur une boucle locale louée à un opérateur tiers (on parle d'infrastructure passive) : c'est l'option retenue par de nombreux opérateurs (SFR, Free, Bouygues Télécom, Completel, Axione, etc.), qui connectent les paires de cuivre de leurs clients à leurs équipements actifs de technologie DSL installés au niveau des centraux téléphoniques d'Orange (DSLAM) ; afin d'assurer le haut débit plus en amont, le dégroupage implique également que les opérateurs disposent d'un réseau de collecte, généralement en fibre optique, détenu en propre ou loué à un tiers, afin de relier les centraux téléphoniques à leurs plateformes de services. Ce double investissement représente un coût moindre que la création d'une boucle locale en propre, mais reste cependant encore élevé, ce qui peut rendre économiquement difficile la poursuite du dégroupage des NRA desservant peu d'abonnés par les opérateurs alternatifs ;

? enfin, les opérateurs alternatifs peuvent acheter sur le marché de gros des accès activés par un opérateur tiers sur son infrastructure (offre d'accès au flux de données ou " bitstream "), en complément de couverture des options précédentes ; les flux de données peuvent être livrés au fournisseur de services par l'opérateur tiers en un seul point (livraison nationale) ou de manière moins agrégée pour les fournisseurs qui s'appuient sur des réseaux de collecte (livraison infranationale, par exemple régionale ou départementale). Haut débit et très haut débit

14. En France, la paire de cuivre du réseau téléphonique d'Orange est le principal réseau de boucle locale utilisé pour la fourniture des accès haut débit, par le biais de la technologie DSL (ADSL notamment). De nouveaux réseaux en fibre optique jusqu'à l'abonné ou jusqu'à l'entreprise se développent rapidement et permettent de dépasser les limites physiques de la paire de cuivre pour fournir des services à très haut débit. Le câble coaxial (environ 5 % des accès), principalement opéré par Numéricable, qui constitue également une alternative à la paire de cuivre, est en outre l'objet d'une modernisation par le remplacement partiel du réseau coaxial par de la fibre optique.

15. Comme pour le troisième cycle d'analyse de marché, l'ARCEP constate, pour l'ensemble des marchés soumis à l'avis de l'Autorité, une absence de réelle différenciation entre le haut débit et le très haut débit. Ainsi pour le marché résidentiel, l'ARCEP constate qu' " à l'horizon de la présente analyse, il apparaît difficile d'opérer une distinction claire entre haut débit et très haut débit au niveau des marchés de détail. Il existe en effet un continuum de débits entre les offres de détail fondées sur le DSL, le câble et la fibre, et aucune application spécifique au très haut débit ne semble susceptible d'induire à elle seule une rupture dans le comportement des utilisateurs à court terme. En effet, à ce stade, les services permis par le très haut débit ne sont pas encore significativement différents de ceux permis par le haut débit ".

16. L'ARCEP fait cependant évoluer la définition du très haut débit dans le cadre des présentes analyses de marché pour assurer une cohérence avec la définition du très haut débit proposée par la Commission européenne dans le cadre de la stratégie numérique pour l'Europe (4). Elle précise ainsi que " en cohérence avec les seuils de débits retenus dans l'observatoire des marchés du haut et du très haut débit fixe de l'Autorité, et sans préjudice d'une définition ultérieure plus fine du très haut débit, il est ici entendu par " offres de très haut débit fixe ", ci-après " offres très haut débit ", les offres de services de communications électroniques en situation fixe proposées sur le marché de détail avec un débit crête descendant supérieur à 30 Mbit/s incluant un service d'accès à internet ou un service d'interconnexion de sites ".

L'extension du très haut débit

17. À la fin 2013, 3 millions de logements étaient éligibles au très haut débit fibre, et sur ce total, on comptait 540 000 abonnés. Sur le câble, le total des abonnés à une offre très haut débit est estimé à 1,4 million (ce chiffre comprend le nombre d'accès vendus par Numéricable à des opérateurs tiers via ses offres de gros). Enfin, le total des abonnés à des offres offrant plus de 30 mégabits de débit (fibre, câble, et lignes desservies à très haut débit par le VDSL2) est estimé à plus de 2 millions à la même date.

B. DÉLIMITATION DES MARCHÉS ET PUISSANCE DES ACTEURS

18. Si l'ARCEP propose de procéder à une légère modification du périmètre des marchés 5 et 6 (2), elle envisage, pour l'essentiel, de reconduire les analyses qu'elle a menées pour le précédent cycle de régulation, en particulier pour le marché 4 (1).

19. Au regard de la relative stabilité du cadre proposé, l'Autorité renvoie en tant que de besoin à ses précédents avis pour disposer d'une présentation plus détaillée des marchés concernés (5).

1. LA RECONDUCTION DE LA PRÉCÉDENTE ANALYSE POUR LE MARCHÉ 4

20. Comme précédemment indiqué, le marché 4 est défini comme le marché des offres de gros d'accès aux infrastructures constitutives de la boucle locale filaire (accès passif) qui permet à des opérateurs tiers d'accéder aux réseaux ou infrastructures de réseaux de l'opérateur en position dominante. Ce type d'offre participe à l'instauration d'une concurrence par les infrastructures.

21. Dans la continuité du précédent cycle d'analyse de marché, l'ARCEP considère qu'en termes de produits et de services, ce marché regroupe les offres suivantes :

? les offres d'accès aux infrastructures de génie civil, que ces infrastructures soient souterraines ou aériennes, qu'elles soient proposées par des opérateurs de communications électroniques ou des collectivités territoriales, dès lors qu'elles sont mobilisables pour le déploiement de boucles locales optiques ;

? les offres passives de mise à disposition de réseau de fibre optique déjà déployées par des opérateurs de communications électroniques ou des collectivités territoriales ;

? les offres de dégroupage partiel et total, via l'accès à la boucle locale de cuivre ou la sous-boucle de cuivre.

22. L'ARCEP propose en revanche toujours d'exclure du périmètre de ce marché, différentes offres, notamment les offres d'accès proposées via le câble, le WiMAX ou les autres technologies alternatives.

23. Le marché 4 présente une dimension nationale. En effet, l'ARCEP constate que les conditions de concurrence apparaissent homogènes sur ce marché à l'échelle nationale dans la mesure où Orange possède et opère un réseau d'accès cuivre en situation de quasi-monopole, détenant plus de 99,99 % des paires de cuivre en France. S'agissant des offres d'accès aux infrastructures pour le très haut débit, l'ARCEP affirme de manière constante que les infrastructures d'Orange sont nationales, que les offres d'accès à son génie civil présentent des conditions identiques sur le territoire national et que la demande des opérateurs pour une offre de gros est également nationale. Elle considère en outre qu'à l'horizon du présent cycle d'analyse de marché, les réseaux FttH en cours de déploiement ne permettront pas, même dans les zones très denses, d'offrir des offres alternatives aux opérateurs tiers leur permettant de ne plus souscrire à des offres de gros fondées sur les infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire d'Orange.

24. S'agissant enfin de la désignation d'un opérateur exerçant une influence significative, l'ARCEP aboutit, comme il y a trois ans, à la conclusion qu'Orange exerce une influence significative sur le marché pertinent de gros des offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire.

2. L'AJUSTEMENT DES PÉRIMÈTRES DES MARCHÉS 5 ET 6

a) La redéfinition des périmètres des marchés 5 et 6

25. Les marchés 5 et 6 organisent la mise en place d'offres de gros activées venant instaurer, de manière complémentaire au marché 4, un ensemble de modalités d'accès relevant de la concurrence par les services.

26. Le marché 5 est défini comme le marché des offres de gros d'accès activées à haut débit et très haut débit livrées à un niveau infranational.

27. Le marché 6 est, quant à lui, défini comme le marché des offres de services de capacité du segment terminal. On entend par service de capacité tout service de transmission fourni par un opérateur de réseau ouvert au public entre deux points du réseau caractérisé par une qualité de service élevée et une transparence suffisante aux applications transportées. L'analyse menée par l'ARCEP inclut l'ensemble des services de capacité, quelle que soit l'interface (traditionnelle ou alternative), quels que soient leurs débits montants et descendants et qu'ils soient livrés sur boucle locale cuivre ou sur boucle locale optique.

28. Ces services de capacité de transmission de données sont utilisés par un client professionnel, entreprise ou administration, pour relier entre eux ses différents sites. Ces services peuvent également être utilisés par les opérateurs de communications électroniques pour leurs propres besoins, afin de raccorder entre eux certains éléments de leurs réseaux, notamment les antennes de téléphonie mobile.

29. L'ARCEP propose dans ce nouvel exercice d'analyse d'intégrer au marché 6 les offres de gros dites " bitstream entreprises " auparavant incluses dans le marché 5. En effet, certains opérateurs avaient recours à ce type d'offres de gros dans le cadre du marché 5 pour construire leurs offres de détails destinées aux entreprises, en particulier celles constituant le bas de marché (professionnels, PME). Pour le cycle de régulation à venir, les offres d'accès activées spécifiques entreprises sont incluses dans le marché 6 et les offres activées dites " généralistes " à destination des clients résidentiels sont traitées dans le cadre du marché 5.

30. Cette approche clarifie le périmètre de chacun des marchés et répond aux exigences des opérateurs en matière de qualité de service.

31. En effet, les besoins des opérateurs alternatifs en termes de qualité de service pris en compte relèvent des trois exigences suivantes :

? des délais de fourniture de services : délais de livraison, de réparation en cas de panne, délais de fourniture d'informations et d'études prévus par les offres de gros et leurs options de garantie de temps de rétablissement doivent être compatibles avec les niveaux de qualité élevés et les délais de déploiements requis sur le marché de détail entrepris, en particulier en comparaison de ceux d'Orange ;

? des délais de prévenance imposés à Orange concernant par exemple la fermeture commerciale et technique au niveau national d'offres reposant sur une technologie en voie d'obsolescence ;

? enfin, de la nécessité d'inclure dans chacune des offres de référence toutes les composantes qui peuvent satisfaire les attentes des entreprises clientes comme le service de sécurisation optique de l'offre de référence ou l'extension à la classe de débit supérieure.

32. Si la qualité de service des offres de détail commercialisées par les opérateurs alternatifs dépend en partie de la qualité de leurs propres prestations, elle est également en effet fonction de la qualité et de la composition des offres de gros achetées auprès d'Orange, à partir desquelles elles sont construites. Une situation dans laquelle Orange bénéficierait au niveau du marché de détail d'une qualité de service supérieure à celle qu'il assure aux opérateurs alternatifs conduirait à distordre la concurrence sur le marché de détail. Il convient donc d'imposer à Orange un suivi contraignant de la qualité des services des offres de gros destinées à produire des offres de détail sur le marché des entreprises, qu'il s'agisse des liaisons louées (ex-marché 6) ou du bitstream destiné aux entreprises.

33. L'Autorité note que la prise en compte de ces éléments et l'évolution des périmètres respectifs des marchés 5 et 6 ont été accueillis favorablement par les acteurs du secteur qui y voient une volonté, de la part de l'ARCEP, de clarification et de prise en considération des spécificités du marché entreprise.

b) Le marché 5

34. Le marché 5 regroupe, comme précédemment exposé, les offres de gros d'accès activés à haut débit et très haut débit livrées à un niveau infranational.

35. L'ARCEP considère qu'en termes de produits et de services, ce marché regroupe l'ensemble des offres de gros haut débit et très haut débit activées, livrées au niveau infranational, qu'elles soient fondées sur le cuivre, sur le câble coaxial ou sur la fibre optique, quelle que soit leur interface de livraison.

36. L'ARCEP propose de désigner Orange comme opérateur puissant sur ce marché. Enfin le marché 5 est, selon l'ARCEP, de dimension nationale.

c) Le marché 6

37. Ce marché repose sur deux marchés de gros :

? celui des offres activées sur les segments interterritoriaux permettant à un opérateur de relier entre eux deux territoires géographiquement non contigus, ce type de services étant principalement fourni par l'intermédiaire de câbles sous-marins, qui sont constitués d'une composante sous-marine et d'une composante terrestre permettant l'accès au câble (station d'atterrissement) (6);

? et celui des offres activées du segment terminal sur la boucle de cuivre et la boucle locale optique permettant à un opérateur de raccorder le site de son client à son point de présence sur un même territoire.

38. S'agissant de ce second marché de gros, il convient de souligner une évolution des notions utilisées par l'ARCEP dans ses projets de décisions.

39. En parallèle de la boucle locale de cuivre permettant de commercialiser aux professionnels des offres activées sur cuivre, les opérateurs déploient progressivement en effet des boucles locales en fibre optique (BLO) afin de proposer des accès à très haut débit. L'ARCEP a introduit les notions de boucles locales optiques mutualisées " BLOM ", pour désigner les déploiements capillaires de l'ensemble des sites clients d'une zone d'accès optiques, et boucles locales optiques dédiées " BLOD ", pour désigner les déploiements ponctuels et spécifiquement dédiés à la clientèle " entreprises ".

40. Si la boucle locale optique mutualisée " BLOM " est déployée conformément aux dispositions des décisions de l'Autorité n° 2009-1106 et n° 2010-1312 prises en application de l'article L. 34-8-3 du CPCE, dit " cadre symétrique ", la boucle locale optique dédiée " BLOD " est déployée en dehors de ce cadre pour raccorder de manière ad hoc des clients d'affaire. Certains opérateurs alternatifs (privés ou d'initiative publique) disposant de cette infrastructure en fibre optique propre peuvent ainsi proposer des offres de gros activées sur " BLOD " concurrentes à celles d'Orange, mais seulement sur une partie limitée du territoire.

41. Depuis le précédent cycle, la progression du nombre d'accès commercialisés sur le marché de gros s'inscrit dans un contexte plus général de forte progression du nombre total d'accès en fibre optique dédiés au raccordement de clients professionnels. Le nombre d'accès sur " BLOD " est en effet passé de 16 000 à environ 56 000 accès entre fin 2008 et fin juin 2013.

42. Sur ces 56 000 accès entreprise sur " BLOD " (dont 20 % des clients se situent à Paris), Orange détient une part de marché sur le marché de gros de 38% (contre 50 % en 2008), les opérateurs alternatifs de 47% et enfin les opérateurs d'initiative publique de 15 % (7). Néanmoins, en tenant compte de l'autoconsommation d'Orange et des opérateurs alternatifs privés (les RIP étant uniquement présents sur le marché de gros), la part des accès construits sur le réseau d'Orange et celle construite sur les réseaux d'opérateurs tiers apparaissent relativement stables (la part d'Orange est de 54 % fin juin 2013 contre 57% fin 2008).

43. S'agissant des 149 000 accès vendus sur le marché de gros du cuivre, la part de marché d'Orange est de 76 %, celle des opérateurs alternatifs de 19 % et de 5 % pour les opérateurs d'initiative publique.

44. Sur le marché des offres activées du segment terminal sur la boucle de cuivre et la boucle locale optique qui conserve d'ailleurs une dimension nationale, l'ARCEP propose de désigner Orange comme opérateur puissant.

C. SUR LA RÉGULATION PROPOSÉE

45. Le cadre de régulation s'inscrit dans la continuité s'agissant du très haut débit en raison notamment de l'existence du cadre symétrique mis en œuvre par l'ARCEP depuis 2009 (1). En revanche, par rapport au précédent cycle d'analyse de marché, il est parfois proposé de moduler l'intensité de la régulation asymétrique imposée à Orange (2).

1. L'ABSENCE D'OBLIGATION ASYMÉTRIQUE SUR LE TRÈS HAUT DÉBIT AU REGARD DE L'EXISTENCE DU CADRE SYMÉTRIQUE SUR LA FIBRE

46. Après un bref rappel du cadre de régulation symétrique de déploiements des réseaux FTTH instauré depuis 2009 (a), il conviendra de présenter les conclusions qu'en tire le régulateur sectoriel en particulier pour les marchés 4 et 5 (b).

a) Le cadre de régulation symétrique des réseaux

Sur les régulations symétriques et asymétriques

47. L'articulation entre cadre symétrique -s'appliquant à tous (par exemple l'obligation de faire droit aux demandes d'interconnexion)- et cadre asymétrique-imposant des obligations uniquement aux acteurs qui sont déclarés détenir une puissance significative au terme d'une analyse de marché (par exemple l'obligation d'encadrement tarifaire)- est un fondement incontesté de la régulation sectorielle.

48. Dans toutes ses analyses de marché, l'ARCEP détermine les obligations asymétriques minimales (c'est-à-dire strictement nécessaires et suffisantes selon elle) qui doivent être imposées aux seuls opérateurs puissants d'un marché en plus des contraintes générales ou sectorielles du cadre symétrique qui pèsent sur tous les acteurs de ce marché en vertu d'autres normes.

49. Le marché 4 présente cependant une complexité particulière. La loi française présente en effet une spécificité au regard des autres cadres nationaux en Europe en prévoyant depuis 2008 un certain nombre d'obligations symétriques pour le déploiement de la partie terminale des boucles optiques. Un sous-ensemble du marché 4 -celui de la fibre optique- est ainsi visé par des obligations spécifiques qui s'imposent à tous les opérateurs, quelle que soit leur puissance de marché.

50. Pour autant, le marché 4, dans son ensemble, fait bien l'objet par ailleurs d'une analyse de marché au terme de laquelle l'ARCEP propose de déclarer puissant un opérateur. L'opérateur étant déclaré puissant sur le marché, il pourrait être attendu que des obligations asymétriques lui soient imposées sur l'ensemble du marché. L'ARCEP estime pourtant qu'il est inutile d'imposer une redondance d'obligations asymétriques et symétriques sur le déploiement de la partie terminale des boucles optiques, car cette redondance ne respecterait pas le critère de proportionnalité. Elle propose donc dans son projet de n'imposer que les obligations asymétriques qui viennent utilement compléter les contraintes imposées par le cadre symétrique.

Rappel du cadre symétrique instauré pour le développement des services à très haut débit.

51. Si l'accès aux infrastructures de génie civil d'Orange (fourreaux, chambres souterraines, appuis aériens, etc.) fait l'objet d'une régulation asymétrique en vue de permettre à tous les opérateurs qui le souhaitent d'investir dans un réseau FttH sur un pied d'égalité avec l'opérateur historique, cette régulation asymétrique ne traite pas la question de l'accès à la fibre optique qui y est déployée et de la fibre installée dans le domaine privé.

52. En application de l'article L. 34-8-3 du CPCE issu de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, l'ARCEP a été amenée à préciser le cadre de régulation concernant l'accès à la partie terminale des réseaux en fibre optique. La décision n° 2009-1106 fixe pour l'ensemble des opérateurs d'immeuble les règles générales de l'accès à la partie terminale des réseaux en fibre optique sur l'ensemble du territoire, et précise les conditions de mutualisation pour un ensemble de communes situées en " zones très denses ", pour lesquelles le point de mutualisation peut dans certains cas se situer dans les limites de la propriété privée.

53. Par ailleurs, l'ARCEP a adopté le 14 décembre 2010 la décision n° 2010-1312 qui fixe le cadre de l'accès à la partie terminale des réseaux en fibre optique en dehors des zones très denses pour l'ensemble des opérateurs de réseaux FttH.

54. Cette décision précise, d'une part, que les opérateurs doivent proposer au niveau du point de mutualisation, en plus des modalités de cofinancement ab initio ou a posteriori, une offre de location passive à la ligne en fibre optique.

55. La décision indique, d'autre part, que le point de mutualisation doit regrouper en principe au moins un millier de lignes d'abonnés mais peut, sous certaines conditions, n'en regrouper que 300. Une exception à la taille de mille lignes est ainsi prévue dans la décision pour s'adapter au mieux aux contraintes liées à la structure de l'habitat. Ainsi, la zone arrière d'un point de mutualisation pourra ne rassembler que 300 logements ou locaux à usage professionnel, à condition que l'opérateur en charge du déploiement propose une offre de raccordement distant.

56. L'Autorité renvoie, en tant que de besoin, aux différents avis qu'elle a pu rendre à l'occasion de l'instauration de ce cadre symétrique.

b) Conséquences en termes de régulation

57. Comme pour le précédent cycle d'analyse de marché, l'ARCEP continue à considérer qu'il convient de ne pas imposer à Orange, opérateur puissant sur ces marchés, d'obligation de fournir les offres de gros sur les réseaux en fibre optique. Il apparaît toujours que " les offres de gros sur fibre optique feraient donc partie du champ de la régulation sectorielle mais aucune obligation les concernant ne serait imposée. Autrement dit, elles seraient " régulables " mais non régulées " (avis n° 11-A-05).

58. L'ARCEP aboutit à cette conclusion pour deux raisons. Ainsi qu'il a été précisé plus haut, le périmètre actuel de chacun des marchés définis inclut les segments de marché du haut débit et du très haut débit en raison de leur substituabilité. Par conséquent, les mesures de régulation proposées n'ont pas à dupliquer sur le segment de marché du très haut débit les offres de gros qui existent déjà sur le segment de marché du haut débit. D'autre part, l'ARCEP estime de manière complémentaire que les obligations d'accès symétriques suffisent à ce stade pour garantir une dynamique concurrentielle équilibrée.

59. Ceci se traduit sur les marchés 4,5 et 6 de la manière suivante :

Marché 4

60. En premier lieu, s'agissant d'un accès dégroupé à la boucle optique dans le cadre du marché 4, l'ARCEP n'estime à ce stade ni justifié ni proportionné d'imposer spécifiquement à Orange, au titre de sa puissance sur le marché de gros des offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire, de faire droit aux demandes d'accès dégroupé à la boucle locale optique, compte tenu des dispositions en vigueur dans le cadre réglementaire symétrique.

61. L'ARCEP constate en effet qu'Orange est déjà tenu de proposer une offre d'accès passif à la ligne en fibre optique, dans des conditions transparentes et non discriminatoires, à un niveau tarifaire raisonnable respectant les principes d'objectivité, de pertinence et d'efficacité, et doit publier une offre de gros d'accès passif aux lignes, soit sous la forme d'un droit d'usage pérenne dans le cadre du cofinancement (a priori ou a posteriori), soit sous la forme d'une offre de location à la ligne.

62. Dans ces conditions, l'ARCEP considère, d'une part, que l'obligation d'accès passif prévue dans le cadre symétrique conduit, en dehors des zones très denses, à des offres de la part des opérateurs, dont Orange, qui sont comparables à une offre de " dégroupage " de bout en bout de la boucle locale. Elle relève, d'autre part, que dans les zones très denses, les principaux opérateurs alternatifs ont souscrit à l'offre d'accès à la partie terminale des réseaux de fibre optique d'Orange dans la grande majorité des communes et peuvent ainsi proposer leurs services à très haut débit dans les immeubles équipés en fibre optique par Orange dès lors qu'ils raccordent le point de mutualisation.

63. Elle en conclut que l'état concurrentiel du marché ne semble pas nécessiter l'imposition d'obligations asymétriques supplémentaires sur les réseaux d'accès en fibre optique.

Marchés 5 et 6

64. En second lieu, dans le cadre des marchés 5 et 6, l'ARCEP estime qu'il n'est ni justifié ni proportionné d'imposer à Orange, au titre de sa puissance sur le marché, de faire droit aux demandes d'accès à très haut débit activé fondé sur son réseau de boucle locale optique sur l'ensemble du territoire national, compte tenu de la substituabilité existant entre le haut et le très haut débit, du haut niveau de capillarité de la boucle locale de cuivre d'Orange et des obligations déjà imposées par ailleurs dans les décisions d'analyse des marchés 5 et 6, qui permettent de répondre à l'ensemble des besoins, compte tenu de la continuité des débits entre les différentes offres.

2. LES ÉVOLUTIONS PROPOSÉES DANS LE CADRE DE LA RÉGULATION ASYMÉTRIQUE

65. Pour l'essentiel, l'ARCEP propose de reconduire les obligations imposées à Orange dans le cadre du précédent cycle d'analyse de marchés. Mais elle propose également d'adapter la régulation qu'elle envisage au vu de l'intensité concurrentielle observée ou attendue sur certains de ces marchés.

a) Le marché 4

66. Les obligations asymétriques imposées à Orange sur le marché 4 portent sur la fourniture d'une offre de dégroupage de la paire de cuivre et d'une offre de gros d'accès au génie civil.

67. Sur l'accès aux infrastructures de génie civil d'Orange, l'ARCEP souhaite poursuivre et améliorer la régulation menée jusqu'à présent, notamment à travers les dispositions suivantes :

? (i) compléter le périmètre de l'offre unique d'accès au génie civil qui existaient auparavant (le raccordement des clients résidentiels, des clients d'affaires et des éléments de réseaux), en y incluant l'offre d'accès dite " GC NRA-SR " (pour le déploiement de fibres optiques dans le génie civil de la boucle locale d'Orange sur le segment entre les NRA et les sous-répartiteurs pour les besoins liés à la montée en débit) ;

? (ii) accroître le périmètre d'accès au génie civil pour le déploiement de boucles locales optiques pour permettre le raccordement d'éléments de réseaux ou le mobilier urbain connecté pour des usages innovants ;

? (iii) faire évoluer certaines règles d'ingénierie (sur le principe de séparation des réseaux, sur la saturation et l'existence de fibre surnuméraire) ;

? (iv) améliorer certains processus de commande.

68. Concernant le dégroupage, l'ARCEP a principalement souhaité axer son action sur la poursuite et l'extension du dégroupage en direction de NRA de plus en plus petits, c'est-à-dire desservant un nombre de plus en plus réduit d'abonnés.

69. Sur près de 16 000 NRA existant en France, qu'Orange a fini de dégrouper en 2007, environ 7600 NRA sont aujourd'hui dégroupés par au moins un opérateur alternatif. Ces NRA dégroupés représentent 89,2 % des lignes d'abonnés.

70. La poursuite du dégroupage dans des conditions économiques de plus en plus tendues, compte tenu du faible nombre d'abonnés encore non dégroupés, a conduit l'ARCEP à mettre l'accent sur des problématiques plus opérationnelles (hébergement dans des NRA de petite taille ) et sur l'amélioration de l'offre dite LFO d'accès à la boucle locale optique de collecte nécessaire pour compléter le dégroupage.

71. Par ailleurs, elle propose aussi d'imposer à Orange les mesures suivantes :

? sur le plan opérationnel, la mise en place d'un processus de suivi des identifiants physiques des lignes cuivres et la mise en place d'un processus améliorant la gestion des cas de déménagement pour les abonnés ;

? dans le cadre de la montée en débit, l'élargissement du périmètre d'application du processus opérationnel de réaménagement à davantage de cas et la restriction du caractère raisonnable d'une opération de bi-injection.

b) Le marché 5

72. S'agissant du marché 5, l'ARCEP envisage comme dans les précédents cycles de régulation de maintenir deux zones avec des régulations concurrentielles distinctes.

73. La principale évolution dans le cadre du marché 5 porte sur la mise en place d'un cadre plus précis concernant l'émergence des services audiovisuels en zone non dégroupée avec une tarification adaptée, afin de rapprocher au niveau du détail le niveau des offres de services entre zones dégroupées et non dégroupées, en plus des offres existantes de télévision sur support hertzien (TNT) ou sur satellite.

74. Aujourd'hui, dans ces zones non dégroupées, seul Orange est techniquement en mesure de commercialiser deux types de services de télévision :

? une première offre de télévision composée de services linéaires fournis par satellite ou TNT et des services non linéaires fournis par DSL ;

? une seconde offre de télévision de services linéaires et non linéaires qui passe uniquement par le DSL.

75. Afin de permettre l'émergence de services de média audiovisuels en zone non dégroupée, l'ARCEP propose d'imposer à Orange la fourniture d'une offre de bitstream télévision pour les services de média audiovisuels non linéaires comme la télévision de rattrapage et la vidéo à la demande, dans des délais courts et à des conditions tarifaires raisonnables.

c) Le marché 6

76. Au terme de l'analyse menée dans le cadre du marché 6, l'ARCEP prévoit un allègement de la régulation tarifaire des offres de gros activées à destination des entreprises (8) et une reconduction de la régulation des câbles sous-marins.

L'allègement de la régulation des offres de gros activées à destination des entreprises

77. Dans sa notice explicative, la Commission européenne rappelle qu'un marché géographique correspond à une zone dans laquelle les conditions d'exercice de la concurrence sont suffisamment homogènes et se distinguent des zones voisines dans lesquelles ces conditions sont substantiellement différentes. L'existence d'une concurrence par les infrastructures sur certaines zones peut conduire à définir un marché limité à ces zones sur la base d'une analyse de substituabilité de l'offre et de la demande.

78. Cette même notice indique que les différences relevées entre les contraintes concurrentielles sur les différents territoires peuvent conduire, sinon à la définition de marchés géographiques distincts, du moins à une application différenciée en fonction des territoires des obligations pouvant être imposées.

79. Cette dernière option préférée par l'ARCEP à la délimitation de marchés géographiques distincts a déjà été mise en œuvre sur le marché 5, afin d'adapter la régulation (cf. §72).

80. En l'espèce, l'ARCEP définit ainsi, d'une part, une zone monopolistique où Orange est le seul opérateur offreur de bitstream et, d'autre part, une zone de concurrence pérenne où un opérateur tiers au moins propose une offre de bitstream (9).

81. Dans ce cadre, sur les zones où la concurrence est effective, les obligations de comptabilisation des coûts et de séparation comptable destinées à faciliter le contrôle ex post par l'Autorité de la concurrence d'éventuelles pratiques de ciseau tarifaire peuvent notamment être maintenues. En revanche, le maintien dans ces zones d'obligations tarifaires ex ante, notamment l'obligation d'une tarification reflétant les coûts, ne paraît pas pouvoir se justifier.

82. Ainsi, dans la lignée de la notice explicative de la Commission évoquée ci-dessus, l'ARCEP a procédé à un examen des éléments de différenciation de l'intensité concurrentielle observée sur le territoire qui la conduit à proposer des remèdes différenciés sur le marché 6 en fonction du développement de la concurrence selon les zones géographiques, pour le bitstream cuivre comme pour le bitstream fibre.

83. Sur chacune de ces zones, l'ARCEP propose également une révision annuelle du périmètre des zones géographiques ainsi que des tarifs par zones des offres.

84. S'agissant en premier lieu des offres de bitstream cuivre, l'ARCEP envisage la création de trois zones géographiques différenciées en fonction de l'ancienneté du dégroupage des opérateurs alternatifs :

? une première zone géographique dite " zone de non-concurrence par les infrastructures cuivre " (ci-après ZNCIC), correspondant à l'ensemble des zones arrière de NRA où Orange est le seul opérateur à proposer des offres de bitstream cuivre spécifiques entreprises. Sur cette zone, Orange aura l'obligation de pratiquer une tarification reflétant les coûts ;

? une deuxième zone géographique dite " zone de concurrence récente par les infrastructures cuivre " (ci-après ZCRIC), correspondant à l'ensemble des zones arrière de NRA dégroupés avec garantie de temps de rétablissement de 4h (ci-après GTR), depuis moins de [6 à 9 ans], par au moins un opérateur tiers qui propose une offre alternative aux offres bitstream cuivre spécifiques entreprises d'Orange. Dans cette zone où Orange n'est plus le seul opérateur proposant des offres de bitstream cuivre spécifiques entreprises, mais où il convient de préserver les possibilités d'amortissement des investissements consentis par les opérateurs alternatifs, Orange ne doit pas pratiquer des tarifs d'éviction ;

? une troisième zone géographique dite " zone de concurrence établie par les infrastructures cuivre " (ci-après ZCEIC), correspondant à l'ensemble des zones arrière de NRA dégroupés avec GTR 4h, depuis au moins [6 à 9 ans], par au moins un opérateur tiers qui propose une offre alternative aux offres bitstream cuivre spécifiques entreprises d'Orange. Sur cette troisième zone, l'ARCEP propose une dérégulation sous forme de levée des obligations tarifaires imposées à Orange, ce qui permettra d'obtenir des offres plus compétitives, les planchers tarifaires imposés à cet opérateur étant supprimés.

85. S'agissant des offres de gros activées sur la fibre (services de capacité), l'ARCEP prévoit la création de deux zones différenciées selon trois critères significatifs de l'animation concurrentielle : la densité des établissements professionnels, le nombre d'accès activés vendus sur le marché de détail et la présence des opérateurs alternatifs dans la commercialisation de ces accès :

? une première zone géographique dite " zone de concurrence effective par les infrastructures optiques " (ci-après ZCEIO) où la concurrence par les infrastructures a atteint un degré satisfaisant, de nature à appeler la levée de l'encadrement tarifaire des offres d'Orange sur le marché de gros ;

? une seconde zone géographique, dite " zone de concurrence insuffisante par les infrastructures optiques " (ci-après ZCIIO) où la pression concurrentielle exercée sur Orange est insuffisante en raison d'un déploiement d'infrastructures alternatives plus limité que dans la première zone. Dans cette zone, l'ARCEP propose le maintien de l'encadrement tarifaire mis en place lors des précédents cycles d'analyse de marché (Orange ne doit pas pratiquer de tarifs d'éviction) et estime nécessaire d'imposer également une obligation de non-excessivité des tarifs pratiqués.

Le marché de gros des câbles sous-marins

86. Sur les marchés de gros des câbles sous-marins, l'ARCEP avait distingué dans ses précédentes décisions de 2010 et 2013 la situation concurrentielle prévalant sur les routes desservant les différents territoires, selon la présence d'une ou de plusieurs infrastructures sous-marines.

87. Ainsi, en Guadeloupe et en Martinique, la coexistence de délégations de service public déployées parallèlement aux câbles exploités par des consortia privés a amené l'ARCEP à lever en 2010 la régulation sur les parties sous-marines.

88. En Guyane et à la Réunion, il n'existait jusqu'à récemment qu'un seul câble sous-marin (10), avec plusieurs opérateurs susceptibles de commercialiser des capacités sous-marines mais un monopole de l'opérateur historique sur la station d'atterrissement. S'il existait plusieurs offreurs disposant de capacités sous-marines sur le câble déployé par un consortium, Orange détient en revanche le monopole de l'accès aux stations d'atterrissement. L'ARCEP a par conséquent maintenu la régulation sur complément terrestre et de déport optique à un tarif orienté vers les coûts sur les stations d'atterrissement de Cayenne, Saint-Paul et Sainte-Marie.

89. À Mayotte, desservie depuis 2012 par le câble LION II, déployé par un consortium composé notamment d'Orange et SRR (11), l'ARCEP estime que ces deux opérateurs sont en mesure de fournir des offres de capacités sur la partie sous-marine. Plus particulièrement, les engagements pris par Orange dans le cadre du dispositif de défiscalisation dont elle a demandé à bénéficier l'obligent à fournir aux opérateurs présents à Mayotte des offres de gros permettant de relier ce territoire au Kenya et à la Réunion à des tarifs non excessifs. L'ARCEP n'a pas non plus proposé d'obligation à Orange sur la station d'atterrissement dont elle est propriétaire à Mayotte.

90. Enfin, à Saint-Barthélemy, la société Global Caribean Network (GCN) détenant le monopole sur la commercialisation aussi bien de la partie sous-marine que sur la partie terrestre de l'unique câble desservant l'île, l'ARCEP a imposé une obligation d'orientation vers les coûts.

91. Dans son projet de décision, l'ARCEP propose de reconduire les obligations antérieures et de mettre en place un dispositif de surveillance des tarifs de tous les segments interterritoriaux (parties terrestres et parties sous-marines).

II. Analyse

92. À titre liminaire, l'Autorité souhaite préciser que les remarques qu'elle pourrait être amenée à formuler sur le cadre de régulation proposé par l'ARCEP ne valent qu'à périmètre d'analyse constant. En effet, les éventuels mouvements de consolidation à venir du secteur, qui ne peuvent être appréhendés à ce stade de manière précise, pourraient être de nature à modifier le contexte concurrentiel décrit par l'ARCEP à partir duquel notamment l'Autorité élabore le présent avis.

93. Certains acteurs du secteur appellent l'attention des pouvoirs publics sur les conséquences possibles de la consolidation du secteur et s'interrogent sur la possibilité de repousser l'analyse des marchés 4, 5 et 6. À cet égard, l'Autorité souhaite rappeler que l'ARCEP ne peut s'abstenir d'une prise de décision formelle par rapport au présent cycle de régulation qui expire en juin 2014. Repousser la mise en place d'un nouveau cycle d'analyse de marché passerait ainsi par l'adoption d'une décision de l'ARCEP visant à proroger le cadre actuel.

94. L'Autorité estime pour sa part que cette hypothèse n'est pas souhaitable pour différentes raisons et considère qu'il convient de distinguer entre le court et le long terme.

95. Compte tenu des délais de mise en œuvre et des incertitudes encore associées au rachat de la société SFR par Numéricable, il ne semble pas opportun de suspendre le processus d'analyse de marché, tant au vu des mesures que l'ARCEP propose d'introduire au regard des évolutions de marché d'ores et déjà constatées au terme du précédent cycle de régulation, qu'au vu de la prorogation d'une année de la régulation du marché 6 déjà intervenue en 2013 en vue de sa synchronisation avec les marchés 4 et 5 (cf. avis 13-A-10).

96. À cet égard, ce n'est pas parce que l'ARCEP adopte un nouveau cadre de régulation pour trois années qu'il lui est impossible de le modifier avant son terme. En effet, l'ARCEP est tenue de réexaminer à tout moment le cadre de sa régulation en cas de modification substantielle du contexte économique et concurrentiel du marché.

97. Par ailleurs, la mise en place immédiate d'un nouveau cadre de régulation sectorielle reste sans incidence sur la mise en œuvre des pouvoirs propres de l'Autorité de la concurrence qui pourrait être amenée, au titre de ses compétences en matière de contrôle des concentrations, à accompagner sa décision d'éventuelles mesures d'ordre structurel ou comportemental.

98. Sans préjudice de ces différentes hypothèses, l'Autorité estime nécessaire de présenter les évolutions de marché susceptibles, à terme, d'entraîner une refonte du cadre de régulation applicable. Dans cette perspective, les conséquences envisageables de la consolidation du secteur doivent être appréhendées dans le contexte plus large de la transition du haut débit vers le très haut débit.

99. Ainsi, après avoir formulé différentes observations sur les évolutions à court terme des marchés 4, 5 et 6 et de la régulation de marché qui leur est applicable (A), l'Autorité soulignera la nécessité de veiller, à terme, à l'évolution de la dynamique concurrentielle liée au passage du haut débit vers le très haut débit (B).

A. SUR LES ÉVOLUTIONS A COURT TERME SUR LES MARCHÉS 4, 5 ET 6

100. À mesure que la concurrence se développe sur les marchés des communications électroniques, l'intensité de la régulation sectorielle a vocation à s'adapter et à se concentrer, à terme, sur l'accès aux infrastructures et aux réseaux qui sont indispensables à l'exercice de la concurrence (" goulot d'étranglement " ou " facilité essentielle "). Dans ce cadre, l'Autorité se félicite de l'adaptation de la régulation pour tenir compte de l'évolution rapide des marchés.

101. À cet égard, l'Autorité :

? souligne que l'introduction de nouvelles technologies disponibles à la boucle locale de cuivre doit permettre de garantir la dynamique concurrentielle (1) ;

? soutient les mesures prises par l'ARCEP sur les marchés 4 et 5 pour renforcer la présence des opérateurs alternatifs sur l'ensemble du territoire (2) ;

? se prononce sur les évolutions des deux segments, interterritorial et intraterritorial, du marché 6 (3) ;

? et aborde enfin, pour l'ensemble des marchés, l'évolution des règles prévues pour garantir l'absence de discrimination entre les acteurs (4).

1. SUR L'INTRODUCTION DE LA TECHNOLOGIE VDSL2

102. Le réseau de cuivre qui assure le service téléphonique assure également le service internet grâce aux technologies dites " DSL ". L'ADSL est actuellement la technologie DSL la plus répandue. Le VDSL2 (12) est une technologie applicable aux lignes de cuivre qui permet d'augmenter de façon significative le débit par rapport à l'ADSL. Toutefois, en raison de contraintes physiques inhérentes à cette technologie, le gain de performance du VDSL2 se limite aux lignes de cuivre dont la longueur n'excède pas 1 km. Pour les lignes de longueur supérieure, les performances du VDSL2 sont équivalentes à celles fournies par l'ADSL2+.

103. Un certain nombre d'opérateurs alternatifs ont appelé l'attention de l'Autorité sur la récente décision du Comité d'experts autorisant l'introduction de la technologie VDSL2 sur la boucle locale cuivre au niveau du répartiteur. Ainsi, les représentants de collectivités territoriales ont souligné leurs craintes quant à la concurrence du VDSL2 pour la commercialisation des réseaux fibrés d'initiative publique. Le VDSL2 permet en effet théoriquement d'atteindre des débits proches de ceux de la fibre pour les lignes les plus courtes, soit celles inférieures à 500 m. est une technologie applicable aux lignes de cuivre qui permet d'augmenter de façon significative le débit par rapport à l'ADSL. Toutefois, en raison de contraintes physiques inhérentes à cette technologie, le gain de performance du VDSL2 se limite aux lignes de cuivre dont la longueur n'excède pas 1 km. Pour les lignes de longueur supérieure, les performances du VDSL2 sont équivalentes à celles fournies par l'ADSL2+.

104. Plus largement et comme cela sera développé ci-après, si la généralisation du VDSL2 permet d'apporter une solution pragmatique à court terme au déploiement du très haut débit et offre l'opportunité d'une nouvelle dynamique concurrentielle, les conditions de sa mise en œuvre amènent à rester vigilant au regard de l'opportunité qu'offre le déploiement de boucles locales alternatives de s'abstraire davantage des infrastructures de l'opérateur historique et en particulier de ne plus faire appel à son offre de dégroupage de la boucle locale cuivre.

105. Cette analyse n'est pas menée par le Comité d'expert qui ne se prononce que d'un point de vue technique. Pourtant, comme le souligne l'ARCEP dans son document relatif à l'analyse de marché 4, " l'introduction de nouvelles technologies à la boucle ou la sous-boucle peut venir perturber le fonctionnement de systèmes déjà en place, voire restreindre le développement de futures technologies en cours de déploiement ".

106. Les effets de l'autorisation du VDSL2 par le Comité d'experts au niveau du répartiteur (pour les seules lignes en distribution directe (13)) depuis octobre 2013 devraient être assez limités en nombre de bénéficiaires. Ainsi, l'ARCEP estime que sur le périmètre des lignes concernées par l'avis du Comité, seules 6 % d'entre elles pourront effectivement bénéficier du très haut débit à l'échelle nationale et que seules 10 % des lignes bénéficieront d'un meilleur débit que celui possible avec la technologie actuellement utilisée de l'ADSL2+. Ces lignes " courtes " étant majoritairement situées en zones denses, cette technologie en l'absence d'aménagement de montée en débit en zone rurale devrait principalement bénéficier aux abonnés urbains.

107. Par ailleurs, il convient de souligner que l'autorisation du VDSL2 pour les lignes indirectes est en cours d'étude actuellement. Si cette utilisation venait à être autorisée, cela augmenterait davantage le nombre de lignes éligibles.

108. Dans tous les cas, reconsidérée dans le cadre d'un réaménagement de la boucle locale (14), l'utilisation du VDSL2 tant en distribution directe qu'en distribution indirecte est susceptible d'impacter un nombre de lignes bien supérieur selon les opérateurs, bien que ce nombre de lignes ne soit pas quantifié à ce jour.

109. Dans cette hypothèse, les considérations concurrentielles liées au réaménagement de la sous-boucle locale cuivre d'Orange évoquées par l'Autorité dans de nombreux avis (n° 09-A-57 §40 à 45, 10-A-07 §73, 11-A-05) gardent leur pertinence.

110. En particulier, comme cela a été souligné dans l'avis n° 10-A-07, un acteur qui souhaiterait installer un réseau FttH n'a aucune certitude quant au fait que la branche de détail d'Orange puisse être cliente de son réseau. En effet, Orange peut choisir de procéder à la modernisation de son réseau cuivre sans proposer d'offres sur le réseau FttH du tiers. Cette option a, du point de vue d'Orange, l'avantage de réduire les économies d'échelle des déploiements FttH des tiers et donc de rendre ces déploiements plus difficiles à rentabiliser. Sans contester la liberté d'une entreprise à déterminer les conditions dans lesquelles elle souhaite s'approvisionner sur le marché et, le cas échéant, à décider de s'intégrer verticalement, il convient de relever qu'en l'espèce, le comportement d'Orange peut très fortement influer sur les décisions d'investissement des acteurs tiers. Aussi, l'introduction du VDSL2 ne doit pas être l'occasion de venir contrecarrer d'éventuels projets FttH publics ou privés en dehors d'une concurrence fondée sur les mérites.

111. Pour autant, l'Autorité rappelle que le développement du VDSL2 doit s'inscrire dans le corpus des principes du droit de la concurrence, et en particulier tenir le plus grand compte du principe de neutralité technologique. En effet, comme le rappelait le Conseil de la concurrence dans son avis n° 08-A-06 § 35 " le libre jeu du marché permet, en principe, que les technologies les plus efficaces l'emportent sur les moins efficaces, les opérateurs privilégiant, de manière rationnelle, les solutions qui leur paraissent optimales sur le plan technique ou économique. Dans cette optique, il est souhaitable que la réglementation ne constitue pas une entrave à ce processus de sélection des technologies par le marché et soit la plus neutre possible. Par ailleurs, la violation de ce principe de neutralité technologique pourrait conduire à privilégier certains opérateurs par rapport à d'autres et engendrer ainsi des distorsions de concurrence susceptibles de perturber le libre jeu d'une concurrence par les mérites. "

112. Enfin, l'Autorité note que l'ARCEP, à travers sa régulation, reste très attentive à la préservation de la dynamique concurrentielle sur le dégroupage, aussi bien dans la cadre du réaménagement de la boucle locale que dans le cadre de la mise en œuvre de l'accès à la sous-boucle, en particulier dans l'hypothèse d'un réaménagement de la boucle locale en cas d'accès à la sous-boucle en mono-injection. L'Autorité ne doute pas que l'ARCEP restera attentive, dans le cadre des travaux multilatéraux qu'elle entend mener, aux considérations concurrentielles précitées au regard des nouvelles perspectives d'analyse soulevées par l'introduction du VDSL2.

2. MARCHÉS 4 ET 5 : LA PRÉSENCE DES OPÉRATEURS À TRAVERS LA COMPLÉMENTARITÉ DES OFFRES ACTIVES ET PASSIVES D'ACCÈS À LA BOUCLE DE CUIVRE

113. Les propositions de l'ARCEP concernant l'encadrement des commandes de " LFO " (location de fibre optique permettant la collecte en amont des répartiteurs), afin de hâter la poursuite du dégroupage, y compris pour les plus petits répartiteurs, ainsi que la mise en place d'obligations pour Orange de fournir une offre de bitstream télévision sont susceptibles de renforcer la compétitivité des opérateurs alternatifs.

114. Dans son avis n°11-A-05, l'Autorité avait souligné, au vu de la position de dominance d'Orange dans les zones non dégroupées (100 % de part de marché sur les offres de gros activées grand public et plus de 60 % de part de marché sur le marché de détail), qu'il appartenait à l'ARCEP de trouver le juste équilibre entre concurrence par les infrastructures (c'est-à-dire la possibilité pour les opérateurs alternatifs d'étendre leur zone de dégroupage) et concurrence par les services (c'est-à-dire la possibilité d'accéder à une offre activée de type bitstream) pour permettre une émulation concurrentielle plus forte dans ces zones.

115. Pour le cycle de régulation à venir, la fourniture de services haut débit par les opérateurs alternatifs et notamment d'offres de services de média audiovisuels non linéaires ne sera possible que si ces opérateurs poursuivent les opérations de dégroupage de répartiteurs (volet concurrence par les infrastructures), qui desservent désormais des nombres d'abonnés de plus en plus réduits, et s'ils peuvent, de manière complémentaire, recourir à une offre de bitstream satisfaisante offrant un accès à la télévision non linéaire (volet concurrence par les services).

Sur le volet de la concurrence par les services : la fourniture d'une offre de bitstream de TV non linéaire

116. Afin de permettre l'émergence de services média audiovisuels en zone non dégroupée, l'ARCEP propose d'imposer à Orange la fourniture d'une offre de bitstream télévision pour les services de média audiovisuels non linéaires comme la télévision de rattrapage et la vidéo à la demande, dans des délais courts et à des conditions tarifaires raisonnables.

117. Si l'obligation faite à Orange de proposer une offre de bitstream TV pour les services de média audiovisuels non linéaires, à des conditions tarifaires assurant un équilibre économique lié à l'utilisation de ces services, devrait permettre de renforcer la compétitivité des opérateurs alternatifs en zone non dégroupée, sa mise en œuvre doit être surveillée et encadrée afin que cette obligation ne soit pas l'occasion pour Orange de commercialiser simultanément ses offres de télévision sur l'ensemble des répartiteurs déjà opticalisés (c'est-à-dire raccordés par un lien en fibre optique) par Orange pour ses propres besoins. Un contrôle plus poussé de la tarification de l'offre de bitstream d'Orange pourrait ainsi être envisagé afin de ne pas rendre cette obligation inopérante.

Sur le volet de la concurrence par les infrastructures : l'encadrement de l'offre " LFO "

118. L'imposition seule d'une offre activée ne permet pas aux opérateurs alternatifs, comme l'ont souligné en séance les représentants de Free, de suffisamment se différencier sur le marché de détail et doit s'accompagner nécessairement d'un volet complémentaire permettant aux opérateurs alternatifs d'investir dans l'extension du dégroupage, seul susceptible de leur permettre de contrôler de bout en bout le réseau et de fournir un service, qui se distingue de celui de l'opérateur historique.

119. La fourniture de services à haut débit dans les zones moins denses reste coûteuse pour les opérateurs alternatifs, eu égard aux coûts fixes importants liés au dégroupage dans ces zones et notamment au regard du coût élevé de la collecte via l'offre " LFO ".

120. Bouygues Télécom indique ainsi ne pas être en mesure d'étendre de manière significative sa couverture en dégroupage et devoir se reposer dans les zones peu denses sur les offres de gros fournies par des opérateurs tiers. SFR, Bouygues et Free déplorent que l'offre " LFO " de location de liens de collecte en fibre optique d'Orange ne soit pas adaptée à la collecte de tous les types de flux sans distinction de technologie et dénoncent le caractère excessif des tarifs d'Orange qui ne sont pas adaptés au dégroupage des répartiteurs de petite taille. En outre, l'avantage d'Orange serait renforcé par le nombre de répartiteurs qu'il a déjà raccordés par un lien en fibre optique.

121. Au-delà de la question tarifaire, il existe des difficultés opérationnelles liées au volume de production de l'offre LFO. Il apparaît cependant essentiel que les modalités d'accès à cette offre de collecte ne soient pas limitatives.

122. L'Autorité note que l'ARCEP prévoit plusieurs mesures pour encadrer ce risque :

? d'une part, afin d'éviter la mise en place d'une limite de production de cette offre qui viendrait restreindre artificiellement le rythme de dégroupage des opérateurs alternatifs, il est prévu qu'Orange fournisse tous les éléments objectifs justifiant d'éventuelles limitations de volume de production à mesure que les opérateurs alternatifs font leurs prévisions de commandes " LFO " auprès d'Orange ;

? d'autre part, il est également prévu que l'offre " LFO " permette, a minima, aux opérateurs alternatifs de bénéficier des mêmes conditions qu'Orange, tant en termes de volume de répartiteurs dégroupables qu'en termes de délais de mise en œuvre.

123. Ces éléments pourraient justifier une surveillance du rythme d'ouverture par Orange des services de TV en zone moins dense.

124. En conclusion, si l'ensemble de ces obligations permet effectivement aux opérateurs alternatifs de proposer des services de média audiovisuels s'appuyant sur le dégroupage dans des conditions équivalentes tant en termes de volume de répartiteurs, que de délais, que celles dont bénéficie Orange pour l'ouverture des services de télévision à ses propres clients sur les répartiteurs non dégroupés à ce jour, l'Autorité estime que les craintes des opérateurs relatives à l'ouverture par Orange de services de télévision en zones peu denses devraient se dissiper.

3. SUR LE MARCHÉ 6

125. Les deux segments du marché, interterritorial et intraterritorial, seront successivement examinés.

a) Sur les câbles sous-marins (segment interterritorial)

126. Les câbles sous-marins sont généralement déployés par des consortia composés d'opérateurs de communications électroniques, dont de nombreux opérateurs historiques, qui bénéficient de droits de bande passante entre différents points géographiques en fonction de leurs participations respectives. En pratique, un opérateur membre du consortium disposera d'un pourcentage de la capacité de transmission disponible sur le câble en rapport avec son investissement financier. Par ailleurs, des opérateurs tiers au consortium peuvent acheter des capacités sur le câble, soit sous la forme de prestations de transport tarifées au Mbit/s consommé, soit via des contrats d'IRU (Indefeasible Right of Use) (15) sur des capacités plus importantes.

127. Dans son projet, l'ARCEP, tout en soulignant que certains acteurs jugent toujours trop élevé le niveau tarifaire des prestations vendues par les opérateurs de câbles sous-marins, propose de reconduire la régulation antérieure.

128. Sur ces points, l'Autorité avait rappelé, dans ses précédents avis n° 09-A-53 et n° 13-A-10, que l'examen des contraintes concurrentielles s'exerçant sur le marché de gros des câbles sous-marins ne saurait se limiter à la comptabilisation des différents câbles desservant les territoires ultra-marins, et nécessite une appréciation de la concurrence effective, tant sur la partie sous-marine des câbles que sur la partie terrestre, et avait invité l'ARCEP à approfondir son analyse de la situation concurrentielle sur ce marché, avant d'envisager le cas échéant des voies d'amélioration des conditions d'accès aux capacités sous-marines offertes aux opérateurs de services de communications électroniques présents aux Antilles.

129. Ainsi, l'Autorité avait précisé en 2013 " qu'un nouvel examen du fonctionnement de la concurrence sur le marché de gros des capacités sous-marines, mené par l'ARCEP à l'occasion de la révision de l'analyse des marchés des services de capacité, permettrait d'apprécier le bien-fondé d'une absence complète de régulation ex ante (point 26) " (16).

130. Or, les éléments recueillis à l'occasion de l'instruction du présent avis semblent indiquer que la situation concurrentielle n'est toujours pas satisfaisante sur le marché de gros des capacités sous-marines pour la desserte des Antilles (depuis la levée de la régulation en 2010), de la Guyane et de la zone Réunion-Mayotte. Les acheteurs sur ces marchés, majoritairement les fournisseurs d'accès à Internet alternatifs, ont ainsi confirmé qu'ils jugeaient trop élevés le prix des capacités sous-marines.

131. En tout état de cause, le projet de décision ne comporte pas d'éléments permettant de s'assurer que des offres de gros concurrentes sont effectivement proposées par les membres des consortia des câbles et ainsi d'apprécier la réalité de l'animation concurrentielle.

132. Enfin, l'Autorité souhaite que la mise en place, annoncée par l'ARCEP, d'un dispositif de surveillance des tarifs de tous les segments interterritoriaux (parties terrestres et parties sous-marines) soit l'occasion d'un suivi attentif permettant de mesurer de manière précise l'efficacité de la régulation proposée.

b) Sur le segment terminal du marché 6

133. Dans son projet d'analyse du marché 6, l'ARCEP indique qu'Orange détient une part de marché de 76 % sur les offres activées du segment terminal sur cuivre et de 54 % sur les accès aux offres activées sur fibre optique (17) Orange est reconnu opérateur puissant sur ce marché, sur lequel ses parts de marché ont peu évolué ces dernières années.

134. Le marché entreprise reste le marché sur lequel l'ouverture à la concurrence est la plus limitée. C'est pourquoi l'Autorité estime que l'ARCEP devrait demeurer attentive :

? d'une part, aux conséquences possibles de la différenciation des zones de régulation dans le cas des offres activées sur cuivre et sur fibre ;

? d'autre part, aux bouleversements que peut introduire la généralisation des boucles optiques mutualisées (BLOM) sur l'équilibre des offres sur boucle dédiée (BLOD).

La différenciation des zones dans le cas des offres activées sur cuivre et sur fibre

135. Comme il est décrit aux paragraphes 77 et suivants, l'ARCEP propose, pour les offres activées sur cuivre, la création de trois zones géographiques complémentaires différenciées en fonction de l'ancienneté du dégroupage des opérateurs alternatifs et, pour les offres activées sur fibre, la création de deux zones différenciées selon trois critères significatifs de l'animation concurrentielle : la densité des établissements professionnels, le nombre d'accès activés vendus sur le marché de détail et la présence des opérateurs alternatifs dans la commercialisation de ces accès. Sur chacune de ces zones, l'ARCEP propose des remèdes différenciés (cf. développements supra) et prévoit une révision annuelle du périmètre des zones géographiques ainsi que des tarifs par zones des offres.

136. S'agissant des offres activées sur fibre, l'ARCEP a procédé à une analyse très fine à partir d'un modèle topologique lui permettant d'évaluer la capillarité des réseaux et de leur accès à la maille des communes.

137. S'agissant des offres activées sur cuivre, l'attention de l'ARCEP est appelée sur la modulation de cette régulation inspirée du schéma mis en place sur le marché généraliste et particulièrement sur la multiplication des zones et sur les effets prévisibles sur la zone de non-concurrence. Ainsi, la zone sur laquelle Orange est le seul opérateur (ZNCEI) proposant des offres de bitstream cuivre, se voit imposer une obligation de tarifs orientés vers les coûts. Cette zone se réduit progressivement aux zones où les coûts unitaires sont plus élevés. Cet effet observé lors des cycles précédents avait été compensé sur le marché généraliste par l'augmentation du taux de pénétration des abonnés, ce qui permettait d'éviter une augmentation mécanique des tarifs orientés vers les coûts, mais pour le cycle à venir et plus particulièrement s'agissant du marché professionnel, il est difficile de prévoir lequel des deux effets l'emportera.

Sur l'articulation des boucles locales optiques Blom- Blod

138. Sur le marché entreprise, la question du type d'obligations d'accès aux réseaux qui pourront être imposées et du choix des outils dont dispose le régulateur sectoriel pour en assurer le respect semble devoir faire l'objet d'une vigilance particulière dans les années à venir, au regard de l'évolution du déploiement des réseaux de boucle locale optique.

139. Jusqu'à présent, si les opérateurs présents sur ce marché entreprise ont accès, à travers les offres régulées dans le cadre du marché 6, à des offres de services de capacité répondant à des exigences de qualité de service, qu'ils soient livrés sur boucle locale cuivre ou boucle locale optique, ils peuvent également bénéficier de diverses offres d'accès passifs du marché 4 (offre de dégroupage, accès aux infrastructures de génie civil et accès mutualisé à la boucle locale optique Fttx).

140. Dans un avenir proche, les déploiements de boucles optiques mutualisées " BLOM ", qui consistent à déployer de manière capillaire un réseau pour l'ensemble des sites clients d'une zone d'accès optique, que ces clients soient résidentiels ou entreprises, sont de nature à impacter les équilibres concurrentiels du marché entreprise.

141. En effet les opérateurs présents à la fois sur le marché résidentiel et sur le marché entreprise (ci-après opérateurs mixtes) auront l'opportunité de desservir l'ensemble de leurs clients à travers le même déploiement, mutualisant ainsi leurs coûts. Cette situation, bénéfique pour les opérateurs déployant une BLOM en termes d'économie d'échelle et d'effet de levier au niveau de la capacité d'investissement, est de nature à leur procurer un avantage concurrentiel important.

142. À l'inverse, les opérateurs uniquement présents sur le marché des entreprises verront leur capacité de développement impactée dès lors qu'ils ne pourront bénéficier directement de la mutualisation des coûts entre résidentiel et entreprise sans pouvoir non plus accéder à des offres sur le marché de gros leur permettant de pallier cette situation, ces offres étant actuellement inexistantes.

143. En particulier, même s'ils peuvent avoir accès de manière passive au point de mutualisation d'une BLOM au titre de la régulation symétrique, ils restent confrontés, en particulier en zone dense en raison du positionnement des points de mutualisation en pied d'immeuble, à la question de l'investissement potentiellement élevé nécessaire à la collecte de chacun de ces points d'accès. Cette difficulté a été confirmée par un opérateur lors de la séance.

144. Il apparaît ainsi que, si les barrières à l'entrée directement dues à la capacité d'investissement s'élèvent à mesure que les déploiements mutualisés s'intensifient, ces opérateurs risquent de voir leur position s'affaiblir.

145. Comme il a été précisé supra, à ce stade, l'ARCEP estime, compte tenu de la substituabilité entre le haut débit et le très haut débit, qu'il n'apparaît pas nécessaire d'imposer de nouvelles obligations d'accès aux BLOM dans le cadre de la régulation symétrique. Elle estime notamment qu'il n'est pas utile d'imposer la fourniture d'une offre activée sur fibre optique mutualisée, en raison du haut niveau de capillarité de la boucle locale de cuivre et des obligations déjà imposées par ailleurs dans les décisions d'analyse des marchés 5 et 6.

146. L'Autorité estime que les orientations actuelles de l'ARCEP impliquent une vigilance soutenue de sa part à plusieurs égards.

147. D'une part, il conviendra de prêter une attention particulière à la dynamique des déploiements de " BLOM " réalisés par les opérateurs présents à la fois sur le marché résidentiel et entreprise, d'observer la vitesse de migration vers ces nouveaux réseaux de leurs clients entreprise bénéficiant actuellement d'un accès cuivre et, enfin, de prêter attention aux prestations de services associés dont pourraient bénéficier leurs clients à cette occasion (notamment en termes de sécurisation de l'accès et de qualité de service).

148. D'autre part, il conviendra d'observer si ces évolutions de marché s'accompagnent spontanément de l'apparition d'offres de gros (passives ou actives) qui pourraient émerger sur le marché et dont pourraient bénéficier les nouveaux entrants ou les opérateurs uniquement actifs sur le marché des entreprises.

149. À cet égard, l'Autorité note que l'ARCEP annonce qu'elle restera attentive au maintien d'une concurrence effective sur le marché de détail du haut et très haut débit, le cas échéant via l'émergence d'offres activées sur les réseaux mutualisés à très haut débit en fibre optique, en particulier au fur et à mesure que le volume d'accès commercialisés sur ces réseaux représentera une part croissante du marché de détail.

4. SUR L'APPLICATION DU PRINCIPE DE NON-DISCRIMINATION

150. Comme le rappelait l'Autorité dans son avis 11-A-05 §47, dans un secteur comme celui des communications électroniques " le contrôle, par le régulateur sectoriel, du respect du principe de non-discrimination est particulièrement crucial. En se réservant des conditions d'accès au réseau (information, fonctionnalités, délais de fourniture, qualité de service, service après-vente, etc.) privilégiées, un opérateur verticalement intégré bénéficierait d'un avantage compétitif indu sur les marchés de détail en termes de niveau de service ".

151. Le principe de non-discrimination a ainsi vocation à s'appliquer dans les années à venir avec une acuité grandissante à mesure que le champ de la régulation sectorielle se réduira au vu de l'état de développement de la concurrence sur les marchés des communications électroniques et qu'elle se concentrera sur les principaux goulots d'étranglement du secteur.

152. Après un bref rappel des différents outils juridiques permettant d'assurer le respect du principe de non-discrimination, l'Autorité mettra en perspective le cadre de régulation proposé par l'ARCEP.

a) Rappel du cadre

153. Des mesures structurelles aux obligations comportementales, il existe un large panel d'outils susceptibles d'assurer le respect du principe de non-discrimination.

154. Dans son avis n° 11-A-05 (§46 à 54), l'Autorité avait en particulier souligné le rôle des mesures structurelles dans la " boîte à outils " du régulateur sectoriel. Avec la séparation de propriété et la séparation juridique, la séparation fonctionnelle apparaît comme une des mesures structurelles les plus abouties et les plus poussées. Il s'agit de la possibilité d'" imposer à une entreprise verticalement intégrée l'obligation de confier ses activités de fourniture en gros des produits concernés à une entité économique fonctionnellement indépendante. Cette entité économique fournit des produits et services d'accès à toutes les entreprises, y compris aux autres entités économiques au sein de la société mère, aux mêmes échéances et conditions, y compris en termes de tarif et de niveaux de service, et à l'aide des mêmes systèmes et procédés " (18).

155. Dans sa récente recommandation 2013-466-UE du 11 septembre 2013, la Commission procède d'une analyse graduelle du même type en partant du constat suivant : comme " l'un des principaux obstacles à l'instauration de conditions de concurrence réellement équitables pour les demandeurs d'accès aux réseaux de communications électroniques est le régime de faveur dont bénéficient les entreprises en aval, par exemple la branche de détail d'un opérateur verticalement intégré disposant d'une puissance sur le marché (opérateur PSM), sous la forme de discrimination tarifaire et non tarifaire (par exemple, en termes de qualité de service, d'accès aux informations, de manœuvres dilatoires, d'exigences indues et de conception stratégique des caractéristiques essentielles des produits) " et comme " il est particulièrement difficile de détecter une pratique discriminatoire non tarifaire et d'y remédier par la simple application d'une obligation générale de non-discrimination ", il importe " d'assurer une réelle équivalence d'accès en appliquant des obligations strictes de non-discrimination ".

156. Ainsi, et sans préjudice de l'imposition potentielle d'une obligation de séparation fonctionnelle en vertu de l'article 13 bis de la directive 2002-19-CE, la Commission indique différents outils susceptibles d'être utilisés par les autorités de régulation nationales pour assurer cette équivalence d'accès au titre du principe de non-discrimination.

157. La Commission considère ainsi que l'équivalence d'accès peut prendre deux formes, à savoir l'équivalence des intrants (ou Equivalence of Inputs, ci-après " EoI ") et l'équivalence des extrants (ou Equivalence of Outputs, ci-après " EoO "), pour lesquelles la recommandation est venue instaurer une hiérarchie.

158. Selon elle, l'équivalence des intrants (EoI) constitue le meilleur moyen d'assurer une protection efficace contre la discrimination. Il s'agit pour les demandeurs d'accès d'être en mesure de concurrencer l'activité en aval de l'opérateur disposant d'une puissance sur le marché verticalement intégré en recourant exactement au même ensemble de produits de gros réglementés, aux mêmes tarifs et aux mêmes processus transactionnels.

159. Une autre possibilité, moins contraignante pour l'opérateur disposant d'une puissance sur le marché, consiste à appliquer le concept d'équivalence des extrants (EoO). Dans cette hypothèse, les demandeurs d'accès n'utilisent pas les mêmes systèmes et processus que l'opérateur disposant d'une puissance sur le marché. Néanmoins, les extrants de gros qui leur sont fournis doivent être comparables, en termes de fonctionnalité et de prix. À l'inverse du concept d'équivalence des intrants (EoI), l'équivalence des extrants (EoO), si elle est censée aboutir au même résultat, est moins adaptée pour assurer la transparence et remédier au problème d'asymétrie des informations.

160. Ce cadre fixé, la Commission précise qu'il revient aux autorités de régulation nationales (ARN) de déterminer s'il convient d'obliger les opérateurs puissants sur le marché à fournir les intrants de gros pertinents sur la base de l'EoI ou de l'EoO au terme d'une analyse de proportionnalité tenant compte de différents éléments d'appréciation. Il revient en particulier aux ARN de mettre en balance les coûts de mise en conformité induits par le concept d'équivalence choisi avec les avantages d'une concurrence et d'une innovation plus vive escomptée en aval. À cet égard, la Commission estime, a priori, que l'application du concept d'EoI aux intrants de gros basés sur le réseau historique en cuivre " est moins susceptible de procurer des avantages nets suffisants pour satisfaire au critère de proportionnalité en raison des coûts plus élevés de reconfiguration des systèmes existants " alors que son application est susceptible de procurer des avantages nets suffisants s'agissant des réseaux NGA, " en raison du surcoût comparativement moins élevé qu'entraînerait la mise en conformité à l'EoI des systèmes nouvellement réalisés ".

161. Au-delà du choix du type d'équivalence d'accès opéré au niveau national, la Commission complète le dispositif par d'autres outils permettant d'assurer le respect du principe de non-discrimination, en particulier à travers l'établissement d'indicateurs de performance clés et de contrats de niveau de service et de garanties de niveau de service. Par ailleurs, indépendamment du concept d'équivalence imposé par l'ARN, elle estime qu'il convient d'assurer au minimum la reproductibilité technique des nouvelles offres de détail de l'opérateur détenant une puissance sur le marché.

162. Ainsi, la régulation sectorielle dispose d'un large spectre d'outils dont il lui revient de faire application de manière proportionnée.

b) Mise en œuvre

163. L'ARCEP constate qu'Orange est un opérateur verticalement intégré actif sur l'ensemble des marchés 4, 5 et 6, en particulier sur l'ensemble des marchés de détail sous-jacents (à travers la marque Orange sur le segment " grand public " et à travers Orange Business Services sur le segment " entreprises "), et qu'elle utilise les mêmes ressources amont pour produire sur les marchés aval, d'une part, ses propres offres de détail et, d'autre part, les offres de gros destinées à ses concurrents pour construire leurs offres de détail. Partant de ce constat, l'ARCEP estime qu'en l'absence d'une obligation de non-discrimination, Orange pourrait être incité à offrir à ses concurrents des conditions techniques ou tarifaires moins avantageuses que celles qu'il s'accorde à lui-même ou à ses partenaires, afin de renforcer sa position sur les marchés aval, ce qui aurait pour effet de limiter artificiellement le développement de la concurrence sur ces marchés. Orange serait par ailleurs susceptible de bénéficier d'un échange d'informations facilité entre ses différentes entités, lui permettant ainsi une plus grande réactivité et une plus grande fluidité dans la réponse aux besoins des entreprises clients finals, moins standardisés que ceux du grand public.

164. Dans ces conditions, l'ARCEP estime nécessaire d'imposer à Orange une obligation de non-discrimination sur l'ensemble de ces marchés et de mettre en œuvre le principe d'équivalence d'accès.

165. Néanmoins, le concept d'équivalence des intrants (EoI), considéré par la Commission comme le meilleur moyen d'assurer une protection efficace contre la discrimination, n'est appliqué que pour l'offre d'accès aux infrastructures de génie civil d'Orange. Pour le reste du marché 4, ainsi que pour les marchés 5 et 6, l'ARCEP n'estime pas proportionné d'appliquer une telle équivalence d'accès et met en œuvre l'obligation de non-discrimination dans le respect du principe d'EoO.

166. De la même manière que pour le précédent cycle de régulation, le principe de non-discrimination imposé à Orange n'engendre pas, pour l'essentiel, d'obligation contraignante en termes d'équivalence d'accès : si l'opérateur historique doit fournir aux concurrents un accès au réseau qui permette in fine à ces derniers d'assurer auprès de leurs clients un niveau de service équivalent à celui que fournit la branche aval d'Orange, cette dernière continue à ne pas être tenue de s'approvisionner auprès de la branche amont dans des conditions strictement identiques aux concurrents, par exemple en termes d'interlocuteur, de processus et de systèmes d'information.

167. De son côté, l'ARCEP précise, à chaque fois qu'elle entend mettre en œuvre l'obligation de non-discrimination dans le respect du principe d'EoO, que la reconfiguration des processus et des systèmes utilisés par Orange qui seraient nécessaires à la mise en conformité avec le principe d'EoI entraînerait des coûts de mise en œuvre importants qui ne paraissent pas proportionnés au regard des avantages très limités qu'apporterait la mise en œuvre du principe d'EoI, en particulier au regard des indicateurs de qualité de service existant par ailleurs.

168. S'il revient à l'ARCEP de procéder à cette analyse de proportionnalité, certains acteurs regrettent que les projets d'analyse de marché ne proposent pas d'éléments chiffrés permettant d'évaluer concrètement le coût réel qu'entraînerait pour chacune des offres de gros concernées la mise en œuvre du principe d'EoI.

169. Plusieurs acteurs entendus dans le cadre de l'instruction regrettent ainsi que la priorité de recours établie par la Commission entre le concept d'équivalence des intrants et celui d'équivalence des extrants, au profit du premier, soit renversée dans le cadre de régulation proposé.

170. Concernant par ailleurs le très haut débit, le fait que l'ARCEP n'envisage pas d'imposer, comme précédemment exposé, d'obligation asymétrique spécifique à l'opérateur exerçant une puissance significative sur les marchés 4, 5 et 6 en raison des mesures prévues dans le cadre de la régulation symétrique la conduit finalement à ne pas aborder la question du type d'équivalence d'accès à mettre en œuvre. Or, cette question, qui pourrait tout aussi bien en principe être abordée dans un cadre symétrique, se posera de manière aiguë dans l'hypothèse de l'avènement futur d'un cadre de régulation asymétrique. Il serait particulièrement dommageable dans ce cas de constater que, faute d'avoir imposé suffisamment tôt une obligation d'EoI en raison des coûts subséquents de reconfiguration, il faille renoncer aux bénéfices importants d'une telle équivalence d'accès. Ainsi que l'indique la Commission dans sa recommandation 2013/466/UE, l'Autorité considère en effet que le déploiement des réseaux NGA semble présenter le terrain de jeu naturel de mise en œuvre de l'obligation de non-discrimination dans le respect du principe d'EoI.

171. En tout état de cause, si l'ARCEP reste la mieux placée pour déterminer s'il convient d'obliger les opérateurs puissants à fournir les intrants de gros pertinents sur la base de l'EoI ou de l'EoO au terme d'une analyse de proportionnalité, elle semble également la mieux outillée pour accompagner au quotidien la mise en œuvre de chacune de ces deux formes d'équivalence d'accès.

172. À cet égard, l'Autorité note avec satisfaction les avancées que comporte le cadre de régulation proposé par l'ARCEP à travers l'introduction de précisions concernant tant la reproductibilité technique des offres de détails que la reprise opérationnelle des offres couplées de l'opérateur puissant. Il semble en particulier bienvenu que les critères d'analyse tiennent compte des coûts opérationnels de sortie susceptibles d'impacter la fluidité du marché. Ces éléments apparaissent primordiaux, en particulier sur le marché entreprise qui semble, comme l'a reconnu l'ARCEP en séance, ne pas avoir connu le même niveau de développement concurrentiel que le marché résidentiel.

173. Au-delà de ces outils de suivi que propose de mettre en place l'ARCEP pour s'assurer du respect de l'obligation de non-discrimination, l'Autorité souhaite explorer la mise en œuvre de mesures complémentaires, qu'elle juge également nécessaires au vu du stade de développement concurrentiel du marché entreprise.

174. Ainsi, s'agissant en premier lieu de la mise en œuvre de l'équivalence des intrants, et sans préjudice de la mise en œuvre d'enquêtes spécifiques par l'ARCEP sur les processus internes de l'opérateur historique, le présent cycle d'analyse de marché pourrait être l'occasion d'imposer à Orange le fait d'identifier, à l'occasion de la transmission des protocoles de cession interne, les différences de traitement qui pourraient subsister tant dans l'application des processus que dans l'application des règles d'ingénierie, et de préciser les différences de situation objective qui pourraient les expliquer.

175. S'agissant en second lieu du concept d'équivalence des extrants dont le contrôle passe principalement par le fait de savoir si les opérateurs bénéficient d'une qualité de service comparable à celle dont bénéficie Orange au détail, plusieurs acteurs du secteur s'interrogent sur la pertinence des indicateurs choisis. En effet, le choix des indicateurs actuels semble, à ce jour, ne pas reposer de manière suffisamment complémentaire sur un élément de comparaison qui apparaît pourtant essentiel, à savoir la connaissance des processus d'échanges internes de l'opérateur qui fournit les offres de gros. Aussi, et sans qu'il soit pour autant question d'accéder aux intrants de gros pertinents sur la base de l'EoI, il conviendrait à tout le moins d'imposer à Orange le fait de formaliser précisément auprès de l'ARCEP les processus et les règles suivis par la branche de détail d'Orange afin qu'ils soient objectivés et précisément mis en regard des processus équivalents prévus pour les opérateurs tiers. Cette mesure, dont chacun souligne le coût raisonnable de mise en œuvre, permettrait de déterminer, par comparaison entre les processus suivis en interne par Orange et ceux proposés aux opérateurs tiers, les indicateurs de qualité de service les plus pertinents et, par suite, de modifier le périmètre des indicateurs actuels.

176. Enfin, l'Autorité souhaite rappeler que la possibilité de recourir au concept de l'équivalence des intrants pour assurer le respect du principe de non-discrimination doit être mise en perspective avec le constat dressé par l'Autorité dans son avis n° 11-A-05. L'Autorité y avait en effet rappelé que, parmi les industries de réseau régulées, le secteur des communications électroniques est celui pour lequel les mesures de séparation prévues à ce jour sont les moins fortes et que cette situation pouvait, à terme, faire obstacle au processus de transition devant conduire in fine à l'effacement de la régulation ex ante au profit de la seule application ex post du droit de la concurrence.

B. SUR LA PRISE EN COMPTE, À TERME, DE LA DYNAMIQUE CONCURRENTIELLE LIÉE AU PASSAGE DU HAUT DÉBIT VERS LE TRÈS HAUT DÉBIT

177. L'ensemble des mesures proposées par l'ARCEP s'inscrit dans la continuité au regard de l'absence de différenciation opérée à ce stade entre le segment de marché du haut débit et celui du très haut débit.

178. Cependant, comme le précise l'ARCEP, si " les offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale de cuivre et des boucles locales optiques apparaissent substituables, à l'horizon de la présente analyse ", " il n'est cependant pas exclu qu'à terme ces deux segments constituent des marchés distincts ".

179. Or, l'appréciation qui peut être portée sur ce point est susceptible d'amener à reconsidérer les analyses menées jusqu'à présent, s'agissant tant des périmètres de marchés retenus, de l'analyse de la puissance des acteurs du type d'offres de gros à considérer ou encore du type de régulation à mettre en œuvre.

180. C'est pourquoi l'Autorité souhaite aborder de manière prospective la question du positionnement du très haut débit par rapport à celui du haut débit, en examinant les perspectives à plus long terme d'évolution de la définition de ces marchés (1), la mise en œuvre d'une régulation reconsidérée tant dans son champ que dans le choix des outils dont dispose le régulateur sectoriel (2) et les conditions attachées à l'extinction du cuivre (3).

1. SUR L'ÉVOLUTION DE LA DÉLIMITATION DES MARCHÉS

181. Sans qu'il soit besoin de procéder à nouveau à l'intégralité de l'analyse menée dans son avis n° 11-A-05 (§58 à 60) précité, l'Autorité estime que les conclusions tirées du continuum de débits observé par l'ARCEP entre haut débit et très haut débit restent cohérentes du point de vue de l'exercice de délimitation des marchés pertinents spécifique au cadre communautaire de l'analyse des marchés.

182. L'Autorité estime cependant qu'il convient de rester vigilant dans les prochaines années à l'évolution du positionnement du très haut débit par rapport à celui du haut débit.

183. S'il existe actuellement un continuum de débits entre les offres de détails ou de gros fondées sur le cuivre, le câble et la fibre et si aucune application spécifique au très haut débit ne semble susceptible d'induire à elle seule une rupture dans le comportement des utilisateurs à court terme, l'Autorité relève que ce constat peut évoluer rapidement.

184. Du point de vue de la demande sur les marchés de détail, les éléments d'appréciation restent à ce stade prospectifs et relativement peu documentés. Néanmoins, il conviendra d'apprécier dans le temps à partir de quel moment un client ayant migré sur le très haut débit n'est plus incité à revenir à une offre de base à haut débit. Pour répondre à cette question, sans doute faudra-t-il rester attentif à l'effet de seuil dû au confort d'utilisation des services à très haut débit.

185. Par exemple, s'agissant de la clientèle résidentielle, l'utilisation accrue de plusieurs appareils de manière simultanée (aujourd'hui la vente des tablettes dépasse celle des ordinateurs) et l'utilisation de services toujours plus consommateurs (télévision à haute définition, télévision en 3 D, jeux en ligne interactifs) peut conduire à un changement des standards de consommation et à une diffusion plus importante des offres de services à très haut débit.

186. S'agissant plus encore de la clientèle professionnelle, le développement de services en pleine expansion tel que le " cloud computing " (19), qui nécessite des débits à la fois importants et symétriques et aussi une faible latence pour une réelle intégration, et plus généralement la croissance des besoins en connectivité des entreprises peuvent conduire ces dernières à choisir de plus en plus les offres de services à très haut débit, les équipements nécessaires à cet effet rendant le choix probablement irréversible.

187. S'agissant de la demande sur les marchés de gros, les raisonnements à mener semblent plus classiques, en particulier au regard de l'expérience des opérateurs sur le marché du haut débit. Comme cela a pu être observé à travers l'échelle des investissements suivie par les opérateurs pour passer du bitstream cuivre au dégroupage cuivre, il est vraisemblable à terme que les niveaux d'investissements devant être engagés par les opérateurs présents sur les marchés résidentiels et entreprises pour le déploiement du très haut débit (en particulier le FttH) puissent engendrer un effet de seuil au-delà duquel il devient difficile de revenir en arrière.

188. La manifestation sur le marché de ces effets " cliquet ", en particulier au niveau des marchés de gros, pourra annoncer l'émergence d'un marché spécifique du très haut débit.

189. Une distinction entre les offres à haut débit et les offres à très haut débit pourrait dès lors être plus précisément retenue, quitte à ne consacrer une telle évolution que de manière progressive. Il n'est en effet pas exclu que les évolutions de marché interviennent d'abord sur le marché entreprise avant de se poursuivre sur le marché résidentiel.

190. D'une manière générale, tout rapprochement entre opérateurs avant la fin des trois années du cycle de régulation à venir peut constituer une modification substantielle des équilibres du marché de nature à amener l'ARCEP à procéder à un nouvel examen de son cadre de régulation.

191. Le mouvement de concentration du secteur peut apparaître en effet comme l'un des facteurs d'analyse à prendre en compte dans la mesure où le rapprochement annoncé de SFR avec le câblo-opérateur devrait s'accompagner d'une migration des clients " haut débit " du premier vers le réseau à très haut débit du second. Ce type d'évolution du marché a vocation à modifier les équilibres concurrentiels et est de nature à accélérer les mutations du secteur, tant sur le marché de gros que sur le marché de détail.

192. Indépendamment des analyses que l'ARCEP pourrait mener dans les prochaines années sur ces questions dans le cadre de l'exercice spécifique de délimitation des marchés pertinents issus du cadre communautaire de l'analyse des marchés, l'Autorité souhaite rappeler que la jurisprudence reconnaît que " la définition des marchés pertinents pour l'application d'une réglementation sectorielle ne lie pas les autorités de concurrence saisies au contentieux, qui peuvent retenir des marchés différents en tenant compte des circonstances propres à chaque affaire " et que dans l'hypothèse d'une délimitation de marché différente, " il importe que la définition retenue soit motivée par des considérations, relatives aux caractéristiques du service demandé et de l'offre élaborée pour y répondre, contemporaines des pratiques en cause " (Arrêt de la cour d'appel de Paris n° 13 du 27 janvier 2011).

2. LES CONSÉQUENCES ENVISAGEABLES EN TERMES DE RÉGULATION

193. La mise en place d'une régulation sectorielle ex ante vise notamment à définir un cadre d'investissement prévisible permettant aux acteurs de prendre des décisions d'investissement efficaces. Dans cette perspective, le développement attendu du très haut débit dans les prochaines années peut conduire à réexaminer l'équilibre actuellement tenu entre régulation asymétrique et régulation symétrique.

194. Au-delà de la question de savoir si les services à haut débit et les services à très haut débit sont substituables et peuvent être englobés dans un seul marché ou devront, à terme, être considérés comme des marchés distincts, la diversité des outils auxquels la régulation sectorielle peut recourir permet également une adaptation aux évolutions du marché. Si, comme cela a été constaté dans la première partie du présent avis, l'accès aux boucles locales en fibre optique fait l'objet d'une régulation " symétrique ", la question de l'adoption de mesures s'inscrivant dans un cadre " asymétrique " peut se poser.

a) Les principes d'analyse

195. Comme le rappelait l'Autorité dans son avis n° 11-A-05, la Commission européenne recommande aux régulateurs sectoriels des États membres, dans sa recommandation NGA précitée, d'imposer dans le cadre de l'analyse des marchés des mesures de régulation " asymétriques " portant non seulement sur le génie civil mais aussi sur la fibre elle-même : (i) accès au " segment terminal " de la fibre, installé dans les immeubles et à proximité ; (ii) dégroupage de la fibre ; (iii) fourniture d'une offre très haut débit activée de type " bitstream ".

196. Néanmoins, la Commission estime que le dégroupage de la fibre pourrait ne pas être justifié " dans les zones géographiques où la coexistence de plusieurs infrastructures, comme des réseaux FTTH et/ou câblés, associée à des offres d'accès concurrentielles, serait susceptible de produire une concurrence effective en aval ". S'agissant de l'obligation de proposer une offre de gros activée à très haut débit, la Commission estime que celle-ci pourrait ne pas être justifiée dans les zones où " l'accès dégroupé à la boucle optique (…) est effectif et que cet accès est susceptible de produire une concurrence effective en aval ".

197. Comme précédemment rappelé, le cadre de régulation instauré par l'ARCEP s'inspire d'une manière générale du cadre communautaire mais découle, s'agissant de l'accès terminal aux boucles locales optiques de la loi française (article L. 34-8-3 du CPCE issu de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie). En cela, il constitue une singularité sur la scène européenne.

198. C'est donc dans ce cadre que la régulation du très haut débit s'articule autour de deux axes : celui d'une régulation asymétrique s'agissant des infrastructures de génie civil détenues par Orange, qui vise à permettre à ses concurrents d'y déployer leurs câbles en fibre optique ; celui d'une régulation symétrique s'agissant du raccordement des logements à ces réseaux, auquel s'applique le principe de mutualisation posé par la loi de modernisation de l'économie.

199. L'Autorité a indiqué au moment de la mise en place de ce cadre (avis n° 10-A-18 §20 à 23) que le choix entre régulation symétrique ou asymétrique, s'il peut se justifier pour des questions d'équilibre et d'incitation à l'investissement, ne devait pas conduire in fine à un cadre réglementaire incomplet ou moins favorable à la concurrence. Cette préoccupation vaut non seulement pour le type d'obligations d'accès aux réseaux qui pourront être imposées (présence ou non d'une offre de dégroupage de la fibre et d'une offre de bitstream très haut débit) mais aussi pour les outils dont dispose le régulateur sectoriel pour en assurer le respect (séparation comptable, offres de référence, informations sur les coûts, etc.) et qui peuvent justifier son intervention ex ante.

200. L'Autorité réaffirme ce point dans le cadre de l'émergence du marché du très haut débit : si le cadre de régulation symétrique venait à se révéler insuffisant à l'avenir, la question des conséquences d'une vacance de la régulation asymétrique se posera. En effet, il faut veiller à ce que tout déséquilibre intervenant lors du développement d'un nouveau marché n'entraîne pas des conséquences structurantes sur le long terme. Le Conseil a ainsi déjà eu l'occasion de souligner dans son avis n° 08-A-06 §21 les effets structurants des distorsions de concurrence affectant les nouveaux marchés en soulignant, d'une part, l'importance des effets volume et d'apprentissage sur ces marchés émergents et, d'autre part, la permanence de ces effets.

b) Mise en œuvre

201. Au regard des orientations prises par la Commission dans sa recommandation NGA, il apparaît que les dispositions proposées par l'ARCEP instaurent finalement, indépendamment de savoir si elles s'inscrivent dans un cadre symétrique ou asymétrique, un ensemble de mesures potentiellement similaires dans leur objectif.

202. Ce constat effectué, il convient de se demander si ce cadre de régulation proposé restera, à terme, pertinent dans son périmètre (imposition ou non d'une offre de dégroupage de la fibre et d'une offre de bitstream très haut débit) et si le choix de l'inscrire dans une régulation symétrique restera suffisant au vu des outils dont disposerait le régulateur sectoriel pour en assurer le respect.

Sur la complétude des offres de gros

203. Sur cette question, l'Autorité renvoie aux considérations qu'elle a déjà développées dans de précédents avis.

204. À cadre de marché constant, les modalités d'accès à la partie terminale, telles qu'envisagées par l'ARCEP, sont de nature à créer une dynamique concurrentielle de laquelle peuvent émerger spontanément les offres de gros attendues par d'éventuels nouveaux entrants, ce qui permettra d'assurer le caractère complet de la gamme des offres disponibles pour ceux-ci. (cf. avis n° 09-A-47 §72).

205. Néanmoins, un examen régulier des espaces économiques entre les différentes offres de gros est indispensable au vu de la situation du marché français, caractérisé par un faible nombre d'acteurs. En effet, comme l'a souligné l'Autorité dans son avis n° 11-A-05 §79, " l'absence d'offres de gros sur fibre optique limitera la liberté de choix des consommateurs, particulièrement dans la phase de déploiement des réseaux horizontaux et de raccordement des immeubles et des points de mutualisation par les différents opérateurs investissant dans les réseaux FTTH. À plus long terme, il existe un risque de fermeture du marché autour d'un nombre réduit d'acteurs maîtrisant leur infrastructure et ne fournissant pas spontanément d'offres de gros ".

206. Pour l'Autorité, ces éléments d'analyse restent d'actualité au moment où les réseaux à très haut débit continuent à être déployés. L'évolution des conditions de marché implique donc une vigilance soutenue de la part de l'ARCEP qui reste la mieux placée pour apprécier dans quelles conditions et à quel moment un marché de gros doit émerger et, d'une manière plus générale, il lui revient de définir, pour chaque marché, le bon équilibre et le phasage adéquat entre concurrence par les infrastructures et concurrence par les services, dans l'objectif d'inciter à l'investissement sans pour autant laisser le marché se restreindre exagérément.

207. Dans cette perspective, l'Autorité estime qu'il convient non seulement de tenir compte des déploiements réalisés à ce jour, mais également de tenir compte des annonces effectuées par les opérateurs et de la dynamique des déploiements de chacun. Sur ce point, l'Autorité rappelle avoir indiqué dans son avis n° 10-A-07 qu'Orange disposait de capacités d'investissement supérieures à celles de ses concurrents (§83) et qu'il n'était pas exclu qu'elle puisse mobiliser des capacités d'étude et de déploiement supérieures à celles de ses concurrents, en raison des synergies existantes avec son activité de gestionnaire du réseau cuivre (§84). La consolidation actuelle du secteur constitue également un élément à prendre en compte dans les prochains mois.

208. Au-delà de cette analyse à cadre constant, il convient également d'anticiper les conséquences d'une éventuelle délimitation de marché distinguant le haut débit du très haut débit. Dans cette hypothèse, il apparaît indispensable de s'assurer, avant de procéder à une telle distinction, que les offres de gros qui seraient disponibles à terme sur le seul segment du marché à très haut débit soient en mesure de garantir que la dynamique concurrentielle ne soit pas amoindrie. Comme cela a été précédemment rappelé, si la régulation proposée à ce stade ne prévoit pas d'imposer certaines offres de gros à très haut débit (dégroupage des réseaux Fttx, offre de bitstream), c'est parce que ces offres existent dans le cadre de la régulation du haut débit et que les services à haut et très haut débit sont aujourd'hui considérés comme substituables.

Sur l'articulation entre cadres symétrique et asymétrique

209. Sur cette question, l'Autorité constate que, si en principe les obligations relevant de l'un ou l'autre cadre peuvent être identiques dans leur objet, les outils qui en découlent en pratique peuvent être moins contraignants dans un cadre symétrique que dans un cadre symétrique. À titre d'exemple, l'obligation de non-discrimination ne s'accompagne pas dans un cadre symétrique d'une formalisation des échanges internes comme cela peut être le cas dans un cadre asymétrique. Dès lors, il est important de veiller à ce que la mise en œuvre d'obligations prises en application d'un cadre symétrique soit en pratique d'une efficacité comparable à celle découlant du cadre asymétrique. À ce titre, le cadre asymétrique offre la possibilité au régulateur de s'appuyer plus facilement sur les outils mis en œuvre en Europe.

210. Là encore, l'ARCEP reste la mieux placée pour apprécier à partir de quel moment les conditions de développement concurrentiel du marché du très haut débit appellent la mise en place d'un cadre de régulation plus contraignant pour permettre de maintenir la dynamique concurrentielle dans un contexte du renforcement du très haut débit.

3. SUR LES CONDITIONS D'EXTINCTION DU CUIVRE

211. Sans préjudice des travaux d'évaluation réalisés par une commission spécialisée concernant l'éventualité d'une extinction programmée de la boucle locale cuivre au profit de réseaux de nouvelle génération, et de l'appréciation que pourra porter l'Autorité sur ces questions, un certain nombre d'observations peuvent d'ores et déjà être formulées.

212. Les réseaux de fibre optique jusqu'à l'abonné seront déployés, à moyen et long terme, en parallèle du réseau de boucle locale de cuivre d'Orange. Il est ainsi anticipé que, lorsqu'une zone est fibrée, c'est-à-dire lorsqu'une majorité des immeubles de la zone est raccordée en fibre optique, les opérateurs tiers migrent progressivement leurs accès en dégroupage vers la fibre optique. Étant donné la vitesse de déploiement des réseaux de fibre optique, il n'est pas exclu que certains quartiers, voire certaines communes, soient entièrement fibrés à l'horizon de la présente analyse de marché. Lorsqu'un tel processus de migration est amplement engagé au niveau de la zone arrière d'un NRA donné, Orange souhaiterait être en mesure d'annoncer la fermeture à terme de ce NRA.

213. L'ARCEP estime en premier lieu nécessaire pour les opérateurs de disposer d'une visibilité suffisante pour anticiper la fermeture du NRA concerné. À cet égard, l'Autorité note que l'ARCEP reprend le raisonnement de la recommandation NGA de la Commission précitée ( point 39), " les obligations actuelles en matière de [puissance sur le marché (PSM)] devraient être maintenues et ne devraient pas être annulées par des changements apportés à l'architecture et aux technologies de réseau existantes, à moins qu'un accord ne soit conclu concernant un processus approprié de migration entre l'opérateur PSM et les opérateurs bénéficiant actuellement d'un accès au réseau de l'opérateur PSM. Faute d'accord, les ARN devraient veiller à ce que les autres opérateurs soient informés au moins cinq ans à l'avance, compte tenu éventuellement de la situation nationale, de toute suppression de points d'interconnexion tels qu'un répartiteur de la boucle locale. Cette période peut être inférieure à cinq ans si un accès totalement équivalent est fourni au point d'interconnexion ".

214. L'ARCEP estime donc raisonnable de prévoir à ce stade, et en l'absence d'un accord conclu entre Orange et les opérateurs utilisateurs des offres de gros en question concernant un processus approprié de migration, un délai de prévenance de 5 ans pour la fermeture d'un NRA ou d'un sous-répartiteur, à compter du moment où au moins un réseau de fibre optique a été intégralement déployé sur la partie horizontale pour couvrir l'ensemble de la zone arrière du NRA ou du sous-répartiteur concerné, en permettant de desservir l'ensemble des utilisateurs et des sites qui pouvaient être atteints par la boucle locale de cuivre.

215. En second lieu, cette possibilité doit répondre à des conditions techniques et économiques d'accès à la boucle locale de substitution de manière satisfaisante. Comme le précise justement l'ARCEP, " bien que l'existence d'un réseau de fibre optique jusqu'à l'abonné totalement déployé soit une condition préalable indispensable à la fermeture d'un NRA, elle pourrait ne pas être suffisante pour garantir l'émergence de conditions concurrentielles équivalentes à celles observées sur la boucle locale de cuivre. C'est pourquoi les boucles locales optiques destinées à remplacer la boucle locale de cuivre dans la zone arrière du NRA faisant l'objet d'un projet de fermeture devraient en particulier offrir des conditions techniques et économiques d'accès satisfaisantes ".

216. L'Autorité souscrit pleinement à ce développement et souhaite y apporter les précisions suivantes.

217. Dix à quinze années ont été nécessaires pour aboutir à la situation concurrentielle actuelle sur le réseau de cuivre, en particulier au niveau de la clientèle résidentielle. Ces acquis doivent être préservés. À cet égard, la transition vers les réseaux à très haut débit est une étape majeure qui peut porter en elle le risque d'un arrêt de la dynamique concurrentielle aujourd'hui observée.

218. Dans ce contexte, la transition envisagée doit intervenir en tenant compte du caractère d'infrastructure essentielle de la boucle locale cuivre (cf. décision 05-D-59 de l'Autorité, validée par la Cour de Cassation en 2007).

219. Une telle qualification repose sur des critères précis dont l'existence ne peut être ignorée dans l'hypothèse d'une modification des conditions d'accès à l'infrastructure, en particulier s'il s'agit de la suppression de cet accès au profit d'un autre. Il ressort de l'avis n° 02-A-08 du Conseil de la concurrence qu'une infrastructure revêt un caractère essentiel, notamment lorsque :

? l'accès à cette infrastructure est strictement nécessaire (ou indispensable) pour exercer une activité concurrente sur un marché amont, aval ou complémentaire de celui sur lequel le détenteur de l'infrastructure détient un monopole (ou une position dominante) ;

? et que l'infrastructure ne peut être reproduite dans des conditions économiques raisonnables par les concurrents de l'entreprise qui la gère.

220. Ainsi, la qualification d'infrastructure essentielle de la boucle locale cuivre d'Orange doit amener à se demander si son accès reste, au vu de l'accès de substitution proposé, encore indispensable aux acteurs du marché pour exercer une activité concurrente sur un marché amont, aval ou complémentaire et si le nouvel accès envisagé permet de répondre dans des conditions économiques raisonnables à la demande sur l'ensemble des marchés auxquels donne accès la boucle locale cuivre.

221. En effet, si la régulation proposée à ce stade ne prévoit pas d'imposer des offres de gros à très haut débit (dégroupage des réseaux Fttx, offre de bitstream), c'est essentiellement parce que ces offres existent dans le cadre de la régulation du haut débit sur les infrastructures cuivre et que les services à haut et très haut débit sont aujourd'hui considérés comme substituables (cf. continuum de débit précédemment évoqués). Aussi, il conviendra de s'assurer, avant d'envisager l'extinction du réseau cuivre de l'opérateur historique, que les offres de gros disponibles à terme sur le seul segment du marché très haut débit seront en mesure de garantir que la dynamique concurrentielle ne soit pas amoindrie.

CONCLUSION

222. L'Autorité de la concurrence a pris connaissance avec intérêt des mesures d'adaptation prises par l'ARCEP à l'issue de l'analyse synchronisée des trois marchés de gros concernés par le dispositif de régulation portant sur la période 2014-2017. En particulier, elle note la poursuite de la dynamique concurrentielle engagée depuis plusieurs années sur le marché résidentiel, bien que des efforts ponctuels de régulation, comme les mesures envisagées pour la poursuite du dégroupage, soient toujours nécessaires.

223. Elle relève aussi que la dynamique concurrentielle liée au passage du haut débit vers le très haut débit, nonobstant les éventuelles opérations de consolidation du secteur, peut plaider en faveur de l'émergence à terme d'un marché spécifique du très haut débit qui pourrait conduire l'ARCEP à de nouvelles analyses de marché et à repenser, le cas échéant, l'équilibre actuellement tenu entre les mesures de régulation symétrique et celles relevant du cadre asymétrique.

224. L'Autorité de la concurrence invite, par ailleurs, l'ARCEP à veiller à ce que le cadre de régulation proposé soit de nature à favoriser une concurrence plus active sur le marché à destination des entreprises. Il conviendra en particulier à cet égard de faire une application plus déterminée des mesures de non-discrimination afin de garantir une réelle réplicabilité tant tarifaire qu'opérationnelle à tous les stades de la compétition (réponse aux appels d'offres, construction et vie des offres,..) et de surveiller par ailleurs l'émergence d'un segment de marché du très haut débit de sorte que les offres de gros proposées sur le marché soient complètes et garantissent une émulation concurrentielle de ce marché.

Notes :

1 2007-879-CE : recommandation de la Commission du 17 décembre 2007 concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d'être soumis à une réglementation ex ante conformément à la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques. Cette recommandation est accompagnée d'un document issu des services de la Commission " notice explicative ".

2013-466-UE : recommandation de la Commission du 13 septembre 2013 sur des obligations de non-discrimination et des méthodes de calcul des coûts cohérentes pour promouvoir et encourager l'investissement dans le haut débit.

2 2010-572-UE : recommandation de la Commission du 20 septembre 2010 sur l'accès réglementé aux réseaux d'accès de nouvelle génération (NGA).

3 2013-466-UE du 11 septembre 2013.

4 Dans le cadre de la stratégie numérique pour l'Europe, les objectifs annoncés par la Commission européenne sont d'atteindre 100 % d'éligibilité à 30 Mbit/s et un taux de souscription à des offres à 100 Mbit/s de 50 % d'ici 2020.

5 Pour les cycles précédents, voir notamment les avis n° 05-A-03, 06-A-10, 06-A-21, 08-A-09, 09-A-53, 11-A-05, 11-A-08 et 13-A-10 rendus par le Conseil puis l'Autorité de la concurrence.

6 Pour rappel, la recommandation " marchés pertinents " de la Commission européenne de 2007 ne recense pas au titre des marchés pertinents le marché de gros des prestations du segment interurbain. Ainsi l'ARCEP a analysé, comme pour le précédent cycle d'analyse de marché, la pertinence de chacun des marchés de services identifiés sur les marchés de gros des services de capacité des segments interterritoriaux, regroupés par situation géographique.

7 Chiffres hors autoconsommation d'Orange et des opérateurs alternatifs.

8 Cette différentiation géographique des obligations sera mise en place à partir du 1er janvier 2015 compte tenu du temps nécessaire pour recueillir et fiabiliser les données nécessaires à la détermination des zones cuivre ou optique.

9 Il convient de noter que l'ARCEP propose dorénavant de réviser elle-même, de manière annuelle, le périmètre de ces zones pour prendre en compte l'extension du dégroupage.

10 Depuis [date], un second câble sous-marin, LION 2, relie l'île de La Réunion au [Kénya ?].

11 La Société Réunionnaise du Radiotéléphone (SRR), opérateur de communications électroniques présent à La Réunion et à Mayotte, est la filiale à 100 % de l'opérateur métropolitain SFR.

12 VDSL2 pour "Very High Speed Digital Subscriber line 2".

13 Pour rappel, une ligne en distribution directe correspond à une ligne qui est reliée directement au NRA. Par opposition, on parle d'une ligne en distribution indirecte lorsque la ligne passe par un point de réseau intermédiaire qui s'appelle le sous-répartiteur.

14 Un réaménagement de la boucle locale, qui peut prendre plusieurs formes, a pour objectif de créer un point d'injection du signal plus proche de l'abonné afin d'améliorer les débits proposés au niveau de la boucle locale cuivre. Dans le cadre d'une ligne directe (en particulier pour les lignes longues), il pourra s'agir de la création d'un nouveau point d'injection plus proche de l'abonné. Dans le cadre d'une ligne indirecte, il pourra s'agir de la transformation d'un sous-répartiteur en répartiteur.

15 L'IRU (Indefeasible Right of Use), ou Droit d'Usage Irrévocable, est un contrat de mise à disposition de la fibre initialement utilisé pour les câbles sous-marins transatlantiques et généralisé aux câbles terrestres. Le bénéficiaire d'un IRU reçoit du propriétaire des biens d'un droit irrévocable d'usage sur ces biens et le droit de les exploiter et de les gérer comme s'il en était lui-même propriétaire. Le droit de les vendre demeure lui entre les mains du propriétaire des câbles. Réglé en une seule fois à la livraison pour 10 ou 15 ans, l'IRU est un investissement incorporel pour le bénéficiaire et présente l'avantage de pouvoir être amorti comptablement.

16 Avis n° 13-A-10 du 28 mars 2013 relatif à une demande d'avis de l'ARCEP portant sur la prolongation de la régulation des marchés de services de capacités.

17 Si l'on tient compte de l'autoconsommation d'Orange.

18 Directive 2009-140-CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 modifiant les directives 2002-21-CE relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques, 2002-19-CE relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu'à leur interconnexion, et 2002-20-CE relative à l'autorisation des réseaux et services de communications électroniques.

19 Le cloud computing désigne un ensemble de processus qui consiste à utiliser la puissance de calcul et/ou de stockage de serveurs informatiques distants à travers un réseau généralement Internet.