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Décisions

CA Aix-en-Provence, 2e ch., 18 décembre 2014, n° 14-11737

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Polopfans

Défendeur :

Laboratoires D'anjou (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Aubry-Camoin

Conseillers :

M. Fohlen, Prieur

Avocats :

Mes Joly, Crepeaux

T. com. Antibes, du 23 mai 2014

23 mai 2014

FAITS - PROCEDURE - DEMANDES

Madame Nathalie Polopfans s'est immatriculée le 7 avril 2009 au Registre spécial des Agents Commerciaux. Elle est devenue, à compter du 3 septembre 2012 et pour une durée indéterminée, agent commercial de la S.A.S. Laboratoires d'Anjou suivant contrat du 31 août fait à Paris et stipulant en cas de litige la compétence exclusive du Tribunal de commerce de Paris (article 12). Le 25 juin 2013 les Laboratoires d'Anjou ont résilié le mandat qui a pris fin le 26 juillet.

Le 12 décembre 2013 Madame Polopfans a fait assigner les Laboratoires d'Anjou en réclamant principalement l'indemnité légale de cessation de mandat ; le Tribunal de commerce d'Antibes, par jugement du 23 mai 2014 visant les articles 12 du contrat et 42 du Code de procédure civile ainsi que le fait que les Laboratoires d'Anjou ont leur siège à Paris :

A dit recevable et bien fondée l'exception d'incompétence soulevée par la défenderesse;

A s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de commerce de Paris ;

(...);

Dit qu'à défaut de contredit (...) l'affaire sera transmise à cette juridiction par les soins du Greffe;

A réservé tous droits, moyens et demandes, ainsi que les dépens.

Madame Nathalie Polopfans a régulièrement formé contredit le 3-4 juin 2014 en soutenant qu'elle n'a pas la qualité de commerçant ce qui rend non-écrite la clause attributive de compétence au profit du Tribunal de commerce de Paris. Par conclusions du 24 juillet 2014 elle expose en outre notamment que :

- l'article 46 du Code de procédure civile lui permet d'assigner son débiteur contractuel au lieu d'exécution de la prestation de services qu'en tant qu'agent commercial elle accomplit, clause attributive de compétence à son domicile professionnel de Cagnes sur Mer;

- l'indemnité de cessation de mandat ne constitue pas une obligation autonome du contrat relevant de la compétence de la juridiction du domicile du défendeur;

- le règlement CE n° 44-2001 du 22 décembre 2000 pose en matière contractuelle (article 5.1) la règle de la compétence du lieu de fourniture des services, et pour connaître de l'ensemble des demandes.

Madame Polopfans demande à la cour de :

- vu l'article 46 du Code de procédure civile réformer le jugement et dire et juger que le Tribunal de commerce d'Antibes était bien territorialement compétent pour connaître de la totalité de ses demandes;

- vu l'article 700 du Code de procédure civile condamner les Laboratoires d'Anjou à lui régler la somme de 2 000 euro au titre des frais irrépétibles.

Concluant le 12 septembre 2014 la S.A.S. Laboratoires d'Anjou répond notamment que :

- elle a rompu le contrat avant le terme probatoire de sa première année compte tenu de l'absence de résultats de Madame Polopfans ;

- le contrat d'agent commercial a été signé à Paris ;

- l'indemnité légale de cessation de mandat réclamée par Madame Polopfans ne concerne pas la livraison d'un bien ou l'exécution d'un service, et constitue une dette autonome de l'exécution du mandat et distincte de la prestation de service ;

- le règlement CE n° 44-2001 du 22 décembre 2000 ne règle que les demandes relatives à la fourniture de services, et ne s'applique qu'en cas de conflit intéressant 2 Etats européens ;

- seul est applicable l'article 42 du Code de procédure civile, qui pose le principe de la compétence de la juridiction du domicile du débiteur.

L'intimée demande à la cour, vu les articles 42, 46, 80 et suivants du Code de procédure civile, de confirmer le jugement et de :

- ordonner le renvoi de l'affaire devant le Tribunal de commerce de Paris ;

- débouter Madame Polopfans de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la même à lui payer la somme de 2 000 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

MOTIFS DE L 'ARRET :

L'article 48 du Code de procédure civile répute non écrite toute clause dérogeant aux règles de la compétence territoriale lorsqu'elle n'a pas été "convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant". Or l'agent commercial qu'est Madame Polopfans n'a pas la qualité de commerçant, tandis que le contrat d'agent commercial signé le 31 août 2012 avec les Laboratoires d'Anjou est de nature civile. Par suite la clause de l'article 12 de ce contrat attribuant au seul Tribunal de commerce de Paris la compétence pour tout litige ne respecte pas cet article, ce qui la rend non écrite.

Le règlement CE n° 44-2001 du 22 décembre 2000 invoqué par Madame Polopfans ne concerne pas le litige car il régit des plaideurs domiciliés sur plusieurs Etats européens, alors que cette personne comme les Laboratoires d'Anjou sont tous 2 domiciliés en France.

L'article 42 du Code de procédure civile pose le principe de la compétence de la juridiction du lieu où demeure le défendeur; mais en matière contractuelle l'article 46 retient également la compétence de la juridiction 'du lieu de l'exécution de la prestation de service'. L'objet du contrat d'agent commercial est une prestation de service de ce dernier qui est exécutée au domicile de l'intéressé où sont reçues les instructions de son mandant, soit pour Madame Polopfans à son domicile de Cagnes-sur-Mer situé dans le ressort du Tribunal de commerce d'Antibes.

L'indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi par Madame Polopfans du fait de la cessation des relations contractuelles décidée au 26 juillet 2013 par les Laboratoires d'Anjou, fondée sur l'article L. 134-12 du Code civil, n'est pas indépendante de l'exécution de ces relations, et par suite ressortit également de la compétence de la juridiction du domicile de cet agent commercial.

C'est donc à tort que le Tribunal de commerce a retenu la compétence du Tribunal de commerce de Paris.

Enfin ni l'équité, ni la situation économique des Laboratoires d'Anjou, ne permettent de rejeter la demande faite par Madame Polopfans au titre des frais irrépétibles.

DECISION

La Cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire, Infirme le jugement du 23 mai 2014 et juge le Tribunal de commerce d'Antibes compétent pour connaître des demandes formées par Madame Nathalie Polopfans contre la S.A.S. Laboratoires d'Anjou, Condamne en outre la S.A.S. Laboratoires d'Anjou à payer à Madame Nathalie Polopfans une indemnité de 2 000 euro au titre des frais irrépétibles, Rejette toutes autres demandes, Condamne la S.A.S. Laboratoires d'Anjou aux dépens du contredit