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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 7 janvier 2015, n° 12-19391

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

BM Beauté (SARL)

Défendeur :

Josse (ès qual.), Alpha (Sté), Alpha Beauté (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Cocchiello

Conseillers :

Mmes Luc, Nicoletis

Avocats :

Mes Fanet, Quillardet, Gourdain

T. com. Paris, 19e ch., du 17 déc. 2010

17 décembre 2010

Le 12 avril 2005, la SARL BM Beauté a conclu avec la SARL Alpha, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le n° B 410 962 492, dont le siège est situé 30 rue des Mathurins à Paris, un contrat de franchise intitulé "contrat de franchise Alpha Beauté".

Par acte du 2 octobre 2007, la société BM Beauté a assigné la société Alpha puis, le 3 avril 2008, Maître Marie-José Josse ès qualités de liquidateur de la société Alpha, en résolution du contrat de franchise.

Le 3 décembre 2007, le Tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Alpha. La date de cessation des paiements a été fixée au 3 juin 2006 et Maître Josse a été désignée en qualité de liquidateur.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 25 janvier 2008, l'avocat de la société BM Beauté a demandé à Maître Josse de "notifier la résiliation du contrat de franchise" et déclaré sa créance pour un montant de "60 000 euro à titre de réparation des préjudices subis du fait des manquements aux obligations contractuelles de la société Alpha Beauté".

Par acte du 4 avril 2008, la société BM Beauté a assigné la SARL Alpha Beauté, inscrite au registre du commerce et des sociétés sous le n° B 492 115 225, sise 36 rue Laborde à Paris, puis, par acte du 15 juin 2009, Maître Josse, ès qualités de liquidateur de la société Alpha Beauté.

Par un jugement du 17 décembre 2010, le tribunal de commerce, qui a joint les causes, a:

- dit les demandes de la société BM Beauté à l'encontre de la société Alpha irrecevables,

- débouté la société BM Beauté de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Alpha Beauté et de Maître Josse, ès qualités de liquidateur de la société Alpha et de la société Alpha Beauté,

- condamné la société BM Beauté aux dépens.

La société BM Beauté a interjeté appel de ce jugement le 2 mars 2011.

Par ordonnance du 22 mai 2012 l'affaire a été radiée du rôle de la cour.

Par acte du 21 septembre 2012, la société BM Beauté a assigné Maître Josse, ès qualités, en reprise d'instance.

Vu les dernières conclusions, signifiées le 3 juin 2011, par lesquelles la société BM Beauté demande à la cour de :

- infirmer en toutes ces dispositions le jugement,

- fixer la créance au passif de la société Alpha Beauté et de la société Alpha ès qualités représentée par Me Josse, liquidateur judiciaire, une somme de 60 000 euro au titre de la réparation des préjudices subis du fait du manquements aux obligations contractuelles de la société Alpha Beauté et ce, solidairement avec la société Alpha,

- condamner Me Josse, ès qualités, en tous les dépens dont distraction au profit de la SCP Fanet Serra, avoué près la Cour d'appel de Paris, selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions, signifiées le 6 novembre 2012, par lesquelles Maître Josse, ès qualités de liquidateur des sociétés Alpha et Alpha Beauté, demande à la cour de :

Aux visas des articles L. 122-22 et L. 641-3 du Code de commerce,

- voir donner acte à Me Josse de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur la demande de la société BM Beauté visant à voir fixer sa prétendue créance au passif de la liquidation judiciaire des sociétés Alpha et Alpha Beauté,

- voir condamner la société BM Beauté à payer la somme de 1 500 euro à Me Josse ès qualités au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- voir condamner la société BM Beauté aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Pascal Gourdain, avocat et ce dans les termes des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Cela étant exposé, LA COUR,

Sur la demande de résolution du contrat de franchise :

Considérant que la société BM Beauté expose que le contrat de franchise n'a pas été respecté par le franchiseur, qu'il n'a jamais rempli les obligations figurant tant dans le contrat de franchise que dans le document d'informations précontractuelles (DIP), ainsi que dans l'ensemble des documents publicitaires ; que la société Alpha ne dispose pas des établissements et des enseignes figurant sur les documents publicitaires et le DIP, qu'elle n'a pas réalisé les objectifs escomptés, qu'aucune formation commerciale n'a été effectuée pour les salariés de l'appelante, que la société Alpha n'a aucune notoriété et n'a aucunement développé depuis la signature du contrat de franchise cette notoriété et cette marque, qu'aucune aide n'a été apportée pour l'obtention de marques importantes dans le magasin où pour les négociations importantes avec des distributeurs, qu'aucun plan marketing ne lui a été adressé ; que la société BM Beauté, s'estimant victime d'un abus de confiance, demande la résiliation du contrat de franchise aux torts de la société Alpha, qui ne disposait ni d'une notoriété suffisante, ni d'un savoir-faire ;

Considérant qu'au soutien de sa demande de résolution la société BM Beauté verse aux débats :

- la copie des pages 1 à 6, 24 à 35 du contrat de franchise signé le 12 avril 2005,

- la copie d'un document d'informations précontractuelles Alpha Beauté type

- des photocopies d'une plaquette publicitaire Alpha Beauté, non datée

- des photocopies d'un "plan marketing 2007"

Considérant que les pages 7 à 23 du contrat de franchise ne sont pas produites ; que le DIP produit comporte une liste de 16 magasins franchisés ; que les objectifs mentionnés dans le document publicitaire non daté de la société Alpha en termes de "boutiques" concernent les années 2007 et 2009, soit postérieurement à la signature du contrat de franchise ; que la société BM Beauté ne produit aucun document relatif à l'état du réseau Alpha Beauté en 2005 et postérieurement ; que l'appelante ne verse aux débats aucun document établissant que la société Alpha ne disposait pas des établissements dont elle se prévalait et n'a pas réalisé les objectifs escomptés en 2005 ;

Considérant que l'article 2.6 du contrat de franchise du 12 avril 2005 prévoit que "concomitamment à l'aménagement du magasin franchisé et en tout état de cause avant l'ouverture dudit magasin" le franchisé suivra une formation initiale d'une semaine ; que l'appelante, qui a ouvert son magasin en 2005, ne produit aucun élément permettant de supposer que le franchisé n'a pas suivi la formation initiale ; qu'aucune stipulation du contrat de franchise tronqué versé aux débats ne fait état de la formation des salariés du franchisé ; que l'article 5.7 du contrat de franchise type figurant dans le DIP mentionne que "la participation du franchisé et/ou de ses salariés aux modules de formation continue est facultative" et "que tous les frais liés à ladite formation sont à la charge du franchisé" ;

Considérant que l'appelante, qui ne produit aucun document relatif aux travaux d'aménagement de son magasin, ne produit aucun document démontrant que les tarifs contenus à l'annexe 2 du contrat de franchise "Devis Agencement et plans" étaient prohibitifs, ni que l'appelante lui a imposé le fournisseur chargé de l'aménagement en mobilier ;

Considérant que l'appelante, qui ne produit aucun document relatif à son activité, à ses relations avec les distributeurs ou à ses relations avec la société Alpha, reproche à la société Alpha de ne lui avoir apporté aucune aide pour l'obtention de marques importantes ou pour la négociation avec des distributeurs ; que, outre que l'annexe 3 du contrat de franchise "fournisseurs référencés" mentionne un "package de base d'une trentaine de marques à l'ouverture ...", comportant de nombreuses marques connues, que l'article 8.1 du contrat de franchise type figurant dans le DIP prévoit que "le franchisé s'engage à ne réaliser ses achats de produits, destinés à la vente et/ou utilisés en cabine, auprès du franchiseur ou des fournisseurs référencés auprès de la centrale d'achat que lui désignera le franchiseur" et que l'article 5.5.3 "négociation" du contrat type prévoit que le franchiseur s'engage à négocier avec les fournisseurs référencés, l'appelante ne justifie d'aucune demande d'assistance auprès du franchiseur pour négocier des contrats de distribution avec les distributeurs référencés ;

Considérant que la société BM Beauté, qui verse au débats une plaquette intitulée "Plan marketing 2007", ne produit pas les stipulations contractuelles relatives aux obligations du franchiseur en matière de marketing ; que le contrat de franchise type contenu dans le DIP ne prévoit pas l'envoi de plan marketing ; que la société BM Beauté, qui n'a adressé au franchiseur aucune lettre de réclamation, avant le courrier de son conseil du 25 janvier 2008, et qui ne payait plus ses redevances depuis le mois de juin 2006, ne démontre pas que la société Alpha n'a pas rempli ses obligations en matière de marketing ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la société Alpha, créée en 1997, avait développé un réseau de plusieurs magasins franchisés à travers la France et qu'elle a assisté la société BM Beauté pour s'installer et démarrer son activité, notamment pour agencer son magasin et accéder à un réseau de distributeur référencé ; que les grief d'absence de notoriété ou de savoir-faire ne sont pas fondés ;

Considérant que la liquidation judiciaire de la société Alpha en 2007 justifie la résiliation du contrat de franchise, mais pas sa résolution ; que la société BM Beauté qui ne rapporte pas la preuve des manquements qu'elle reproche à la société Alpha, doit être déboutée de sa demande de résolution du contrat de franchise ;

Considérant qu'en conséquence, l'appelante doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;

Sur les demandes dirigées contre la société Alpha Beauté :

Considérant que la société BM Beauté sollicite la condamnation solidaire de la société Alpha Beauté ; que le tribunal par des motifs pertinents a rejeté cette demande, les sociétés Alpha et Alpha Beauté étant des sociétés distinctes ; que le jugement doit être confirmé de ce chef d'autant que la société BM Beauté est déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;

Par ces motifs, Confirme le jugement sauf en sa disposition ayant dit irrecevables les demandes de la société BM Beauté à l'encontre de la société Alpha, Et statuant à nouveau, Déboute la SARL BM Beauté de toutes ses demandes, Condamne la SARL BM Beauté à verser la somme de 1 500 euro à Maître Marie-josé Josse, ès qualités de liquidateur de la société Alpha et Alpha Beauté, en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la SARL BM Beauté aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.