Cass. com., 10 février 2015, n° 13-24.399
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Sécurité Protection Feu (SAS)
Défendeur :
Société Incendie et Protection Générale (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Tréard
Avocat général :
Mme Pénichon
Avocats :
SCP Boré, Salve de Bruneton
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 6 mai 2013) et les productions, que M. Guarneri, qui était employé en qualité de VRP par la Société nationale de protection sécurité incendie, devenue la société Générale de protection et aux droits de laquelle vient la société Sécurité protection feu (la société SPF), spécialisée notamment dans la protection incendie et sécurité, a créé, à la suite de son licenciement survenu en juin 2010, la Société incendie et protection générale (la société SIPG) qui exerce la même activité ; que reprochant à cette dernière des actes de détournement de clientèle, de dénigrement et l'imitation de ses contrats, la société SPF l'a assignée en paiement de dommages-intérêts pour concurrence déloyale ; que la société SIPG a été mise en liquidation amiable, M. Guarneri étant désigné liquidateur ;
Sur le premier moyen : - Attendu que la société SPF fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen, que constitue un acte de concurrence déloyale le fait, pour une société créée par l'ancien salarié d'une société concurrente, de procéder immédiatement au démarchage ciblé et systématique de la clientèle de cette dernière, pour réaliser la quasi-totalité de son chiffre d'affaires ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il le lui était demandé, s'il ne résultait pas du procès-verbal de constat d'huissier du 27 mai 2011, que créée et gérée par M. Guarneri, qui venait d'être licencié par la société SPF, la société SIPG, qui avait immédiatement démarché et détourné 249 clients de cette société concurrente, représentant plus de 73 % de la totalité de son chiffre d'affaires, n'avait pas procédé à un démarchage systématique de cette clientèle et commis ainsi un acte de concurrence déloyale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu qu'en vertu du principe de la liberté du commerce et de l'industrie, le démarchage de la clientèle d'autrui, fût-ce par un ancien salarié ou représentant de celui-ci, est libre dès lors que ce démarchage ne s'accompagne pas d'un acte déloyal ; qu'ayant relevé que, si l'huissier de justice avait constaté dans le fichier de clientèle de la société SIPG la présence de deux-cent quarante-neuf anciens clients de la société SPF, le détournement de fichiers et le dénigrement allégués n'étaient pas démontrés, ni aucun acte déloyal qu'aurait commis M. Guarneri, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en sa cinquième branche : - Attendu que la société SPF fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, que constitue un acte de parasitisme tout comportement par lequel un agent économique s'immisce dans la sillage d'un autre afin de tirer profit de ses efforts et de son savoir-faire, sans rien dépenser ou en exposant des frais moindre que ceux auxquels il aurait dû faire face ; qu'en statuant de la sorte sans rechercher, comme elle y était invitée, si en imitant les documents contractuels de la société SPF, plutôt que de créer les siens, la société SIPG n'avait pas profité, sans bourse délier, de l'expérience de sa concurrente dans ce domaine, des investissements qu'elle avaient dû fournir en recourant à un service juridique pour les élaborer, de ses efforts et du temps passé pour conceptualiser leur mise en page, ce qui lui avait permis de proposer un contrat de vente à domicile éprouvé pendant des années par la société SPF auprès de sa clientèle, ce qui caractérisait un comportement parasitaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'une entreprise en profitant indûment de la notoriété acquise ou des investissements consentis ; que la société SPF, qui se bornait dans ses conclusions à invoquer la copie de documents contractuels, sans prétendre avoir consenti un quelconque investissement à ce titre, ne peut utilement reprocher à la cour d'appel d'avoir rejeté sa demande ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres griefs, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Par ces motifs, Rejette le pourvoi.