Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 27 mars 2015, n° 12-20286

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

ABP Informatique (SAS), Atlease Finance (SAS), Bourbouloux (ès qual.), Legras de Grandcourt (ès qual.)

Défendeur :

Clarins (SA), Cheops Technology France (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Touzery-Champion

Conseillers :

Mme Prigent, M. Richard

Avocats :

Mes Susini, Maupas Oudinot, Lindner, Bernabe, de la Grange

T. com. Nanterre, du 9 oct. 2012

9 octobre 2012

La société ABP Informatique (ABP) exerce une activité de prestation de services informatiques et de vente de matériels informatiques et est spécialisée dans l'architecture et le déploiement des systèmes d'information ; elle est référencée et autorisée par la société IBM France à commercialiser les produits, logiciels et serveurs de cette marque, les I-Series.

La société Atlease Finance (Atlease), constituée en 2003 à l'initiative de la société ABP, recherche pour le compte de ses clients des fournisseurs de matériels informatiques dont ils souhaitent s'équiper, le financement de ces matériels et assure le suivi technique et commercial du contrat de location pendant toute sa durée.

Ces deux sociétés ABP et Atlease ont d'abord fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ouverte par le Tribunal de commerce de Nanterre respectivement les 10 avril et 17 juillet 2012, Maître Bourbouloux ayant été nommée en qualité d'administrateur judiciaire, puis par jugement du 18 avril 2013 cette juridiction a arrêté un plan de redressement d'une durée de 9 ans, désignant Maître Bourbouloux comme commissaire à l'exécution du plan et mettant fin à sa mission d'administrateur judiciaire.

Les 16 janvier 2009, la société Clarins, spécialisée dans la fabrication de produits cosmétiques, a demandé à la société ABP, avec laquelle elle est en relation depuis 1998, l'établissement d'un devis pour mettre en place une solution de rationalisation de son système informatique pour sa filiale espagnole à rapatrier sur son siège social de Neuilly. Puis le 11 février 2009, elle a à nouveau sollicité la société ABP pour l'établissement d'un devis relatif à la consolidation et migration de son système d'information situé au Royaume-Uni vers ses installations de Neuilly et Pontoise. Enfin, le 1er juillet 2009, elle a exposé mener une réflexion plus large permettant de rapatrier l'informatique de ses filiales britannique, suisse, italienne et espagnole et a sollicité la société ABP pour la conception et la mise en œuvre de ce projet.

Le 9 octobre 2009, la société Clarins a annoncé à la société ABP qu'elle sollicitait un autre prestataire, la société Cheops Technology France (Cheops), référencée auprès d'elle depuis 2006, afin de disposer d'une offre concurrente dans le cadre de ce marché.

Le 29 octobre suivant la société Clarins a choisi la proposition de la société Cheops.

Par requête du 16 février 2010, les sociétés ABP et Atlease ont obtenu du Président du Tribunal de commerce de Paris, sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile, que soient ordonnés des mesures de communication de diverses correspondances électroniques, qui ont donné lieu à l'établissement de procès-verbaux de Maître Laval, huissier de justice les 19 mars et 2 avril 2010.

Contestant les conditions dans lesquelles le marché relatif à la consolidation des systèmes I-series a été attribué à la société Cheops, les sociétés ABP Informatique et Atlease Finance ont fait assigner les sociétés Clarins et Cheops devant le Tribunal de commerce de Nanterre lequel par jugement du 9 octobre 2012, assorti du bénéfice de l'exécution provisoire a :

- condamné solidairement les sociétés Clarins et Chéops à payer aux sociétés ABP et Atlease une somme de 50 000 € pour avoir commis des actes de concurrence déloyale,

- débouté les sociétés ABP et Atlease de leur demande pour rupture brutale des relations commerciales établies sur le fondement de l'article L. 442-6 I 5 du Code de commerce,

- débouté les sociétés Clarins et Cheops de leur demande reconventionnelle,

- condamné solidairement les sociétés Clarins et Chéops à payer à chacune des demanderesses la somme de 5 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les appels des sociétés ABP et Atlease du 12 novembre 2012, puis celui de la société Cheops Technology du 12 juin 2013 à l'encontre des sociétés ABP, Atlease, Maître Bourbouloux et Maître Legras de Grancourt en qualité de mandataire judiciaire et celui du 14 octobre 2013 de la société Cheops à l'encontre de la société Clarins ont fait l'objet d'une jonction.

Par conclusions signifiées le 13 janvier 2015 par RPVA, les sociétés ABP Informatique et Atlease Finance ainsi que Maître Bourbouloux en qualité de commissaire à l'exécution du plan des deux sociétés et Maître Legras de Grancourt en qualité de mandataire judiciaire des deux sociétés :

- demandent la mise hors de cause de Maître Bourbouloux en qualité d'administrateur judiciaire et la constatation de son intervention volontaire en qualité de commissaire à l'exécution du plan,

- estiment que le jugement entrepris n'est pas entaché de nullité,

- souhaitent la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu des actes de concurrence déloyale à leur égard commis par les sociétés Clarins et Cheops, mais l'infirmation sur le montant de dommages et intérêts alloués, et la condamnation de ces deux dernières sociétés à leur payer à ce titre la somme de 350 000 €,

- réclament l'infirmation du jugement querellé en ce qu'il les a déboutées de leur demande en dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies,

- considèrent que les sociétés Clarins et Cheops ont engagé leur responsabilité en procédant à la rupture brutale de leurs relations commerciales établies depuis respectivement 1998 et 2003,

- réclament leur condamnation à leur verser la somme de 2 000 000 € pour la société ABP et de 1 500 000 € pour la société Atlease,

- sollicitent la confirmation dudit jugement en ce qu'il a débouté les sociétés Clarins et Cheops de leur demande reconventionnelle et la condamnation de celles-ci solidairement ou l'une à défaut de l'autre à leur régler à chacun la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Suivant écritures signifiées le 14 janvier 2015 par RPVA la société Clarins réclame:

- l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- le rejet de toutes les prétentions des sociétés ABP et Atlease,

- à titre subsidiaire, si par impossible la Cour retenait une faute à son encontre la constatation de l'absence de lien de causalité entre cette faute et l'attribution du marché litigieux,

- l'infirmation du jugement en ce qu'il a alloué une somme de 50 000 € et à tout le moins une réduction des dommages et intérêts à une somme purement symbolique,

- en toute hypothèse la condamnation des sociétés ABP et Atlease à lui verser la somme de 20 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.

Selon conclusions signifiées le 16 décembre 2014 par RPVA, la société Cheops Technology France :

- fait valoir qu'aucun acte de concurrence déloyale ne lui est imputable de sorte que les prétentions des appelantes seront rejetées,

- estime que le comportement des sociétés ABP et Atlease à son encontre est fautif et souhaite leur condamnation in solidum ou solidairement à lui verser à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil les sommes de:

- 50 000 € en réparation du préjudice découlant du dénigrement,

- 50 000 € pour procédure abusive outre celle de 20 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, de leur argumentation et de leurs moyens.

Motifs de la décision

A titre liminaire, les sociétés ABP Informatique, Atlease Finance, Maître Legras de Grancourt et Maître Bourbouloux, ces derniers en leur qualité respective de mandataire judiciaire de ces deux sociétés et de commissaire à l'exécution du plan desdites sociétés souhaitent que la Cour statue sur la validité du jugement du 9 octobre 2012 en ce qu'il ne serait pas entaché de nullité.

Toutefois, il ne saurait être statué sur ce moyen tiré de la nullité de la décision susmentionnée, puisqu'aucune des autres parties ne le soulève ou ne l'a repris dans ses dernières écritures qui seules saisissent la Cour en application de l'article 954 du Code de procédure civile.

En premier lieu, les sociétés ABP Informatique, Atlease et les organes de la procédure collective reprochent, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, aux sociétés Clarins et Chéops d'avoir commis des actes de concurrence déloyale à leur égard ; à cet effet ils invoquent l'existence d'une collusion frauduleuse entre ces deux dernières sociétés, caractérisée par le fait que la société Clarins a transmis à la société Cheops leur offre technique afin que cette dernière puisse élaborer une offre concurrente, par la circonstance de l'apparition tardive de la société Chéops dans le processus d'appel d'offres, par le choix de la société Clarins qui a retenu immédiatement l'offre la plus coûteuse et la moins aboutie techniquement.

La société Clarins objecte qu'elle pouvait, en vertu du principe du libre choix par le commanditaire de son fournisseur, choisir la société Chéops sans mise en concurrence, qu'elle ne voit pas son intérêt de choisir la solution la plus onéreuse et la moins efficace, que l'offre de la société ABP ne répondait pas à ses attentes dans la mesure où elle souhaitait obtenir une offre de financement alternative à la proposition de la société Atlease (qui ne faisait que renchérir le coût des contrats), ce que n'a jamais fait la société ABP, qu'elle-même s'est comportée loyalement en fournissant à chacun des concurrents les éléments techniques lui permettant d'établir leur offre, que lorsqu'elle a fait son choix le 29 octobre 2009 l'offre financière de la société Chéops était meilleure que celle de la société ABP. Elle conteste formellement avoir remis l'offre de cette dernière à sa concurrente.

De même, la société Chéops réplique que par le jeu normal de la concurrence la société Clarins lui a demandé une consultation pour la consolidation des environnements IBM I.Séries, parce que les propositions de la société ABP n'étaient pas satisfaisantes. Elle fait valoir qu'elle a pu répondre rapidement en raison des besoins exprimés clairement par la société Clarins et du fait de la compétence de ses techniciens, spécialistes certifiés par IBM.

Elle conteste avoir travaillé sur les données techniques de la société ABP, affirme ne s'être servie que des données techniques données par la société Clarins. Elle prétend qu'elle a proposé deux scénarios très différents, le scénario 2 étant une anticipation sur les besoins à venir, totalement différent de la solution proposée par la société ABP, lequel a d'ailleurs été retenu par la société Clarins.

A juste titre les premiers juges ont retenu que l'offre technique et financière de la société ABP, par nature confidentielle, a été transmise, à tout le moins verbalement, à sa concurrente la société Chéops par la société Clarins, avant même que cette dernière ne choisisse l'offre de la société Chéops le 29 octobre 2009. En effet, la teneur du mail du 27 octobre 2009 à 18h 55 envoyé par M. Delhoste, salarié de la société Cheops, à M. Fourmont, Directeur du département Systèmes d'information de la société Clarins démontre que la société Cheops connaissait non seulement le coût de l'offre de sa concurrente puisqu'elle s'emploie "suite à (notre) discussion et en off" à en expliquer l'écart avec son propre prix, mais également tous les détails techniques, puisqu'elle fait valoir à la société Clarins que :

- "pour les 4 disques de plus pour la partition italienne sur la machine de prod et sur la machine de backup" la société ABP a fait une erreur dans la collecte de l'information, que la solution de cette dernière sera manifestement insuffisante pour délivrer la puissance attendue,

- "le rack pour la machine de backup (Pontoise)" la société ABP a encore fait une erreur en ne proposant pas de rack pour le site de Pontoise,

- "la console de management pour chaque machine" que sa solution, si elle est plus coûteuse,est rattrapée par un différentiel sur le prix pratiqué sur les sauvegardes et le prix de l'installation légèrement inférieur.

Puis M. Delhoste vante son scénario 2 moins cher et qui correspond au mode de production de la société Clarins et termine son propos ainsi : "Pour un premier dossier I Séries sur Paris, tu nous as bien fait travailler et monter en compétences".

En outre, il ressort des pièces produites que ces commentaires n'ont été envoyés à la société Clarins que 14 minutes après que M. Gauthe, ingénieur commercial de la société Chéops, a adressé à la société Clarins son offre par mail du 27 octobre 2009 à 18 h 41, ce qui corrobore le fait que les sociétés Clarins et Chéops entretenaient des liens étroits et privilégiés.

Il apparaît ainsi que la société Clarins a recherché des informations de la société Chéops pour pouvoir choisir l'offre de cette dernière par rapport à celle de la société ABP et que la société Chéops n'a pu fournir des explications comparatives qu'en ayant connaissance de l'offre de son concurrent dont elle a été informée par la société Clarins ; ainsi par ses manœuvres, la société Clarins a favorisé l'une des deux sociétés qu'elle avait mis en concurrence pour opérer son choix entre les deux offres.

Ce seul fait - sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur la tardiveté de l'apparition de la société Cheops dans le processus de mise en concurrence ou sur la rapidité de l'offre émise par celle-ci, dans la mesure où ces éléments ne sont pas caractéristiques d'une concurrence déloyale - constitue un comportement déloyal à l'égard de la société ABP, dès lors que l'offre de cette dernière a bien été communiquée à sa concurrente par la société Clarins contrairement aux allégations de cette dernière et que la société Clarins a privilégié, à ce moment très précis la société Cheops en lui demandant son avis sur l'offre concurrente, et surtout que la société Clarins n'a fait le choix de l'offre de la société Chéops, qu'après avoir entendu les arguments de cette dernière valorisant sa propre offre et discréditant celle de sa concurrente ; ainsi la société Clarins en privilégiant un concurrent (en ce qu'elle lui a permis unilatéralement de s'expliquer sur la différence de prix et sur les différences techniques des deux offres) a commis un acte déloyal, qui doit être sanctionné par l'allocation de dommages et intérêts à la mesure du préjudice subi en lien de causalité avec la faute retenue.

Le dernier argument de la société ABP tiré de la qualité de son offre du 30 octobre 2009 meilleure techniquement et financièrement selon elle par rapport à celle de la société Chéops est inopérant, dans la mesure où cette dernière offre du 30 octobre ne peut être prise en compte puisque d'une part, elle n'a été transmise à sa cliente qu'après le résultat du choix opéré par la société Clarins le 29 octobre, et d'autre part, la solution choisie en définitive par la société Clarins porte sur un scénario alternatif non proposé par la société ABP, adapté aux besoins de sa cliente. Dès lors l'argument de la société ABP tiré du choix par la société Clarins d'une offre plus chère et la moins aboutie techniquement est sans portée.

La société Chéops s'est livrée à un acte de concurrence déloyale en donnant son avis sur l'offre concurrente qu'elle savait confidentielle, l'a sérieusement critiquée, et ce, avant même que la société Clarins ait annoncé son choix, faussant ainsi le jeu de la concurrence.

La société Atlease ne saurait être concernée par lesdits actes de concurrence déloyale dans la mesure où la volonté de la société Clarins était de ne pas contracter avec elle, raison pour laquelle elle avait souhaité vainement de la part de la société ABP la mise en concurrence d'autres prestataires financiers.

A bon droit, les premiers juges ont retenu qu'il ne peut être établi que si la société Clarins n'avait pas transmis l'offre de la société ABP à la société Chéops, la société ABP aurait été à coup sûr adjudicataire du marché dont s'agit ; son préjudice est constitué par une perte de chance d'attribution du marché que la Cour estime, eu égard aux éléments d'appréciation en sa possession et notamment à la solution retenue en définitive par la société Clarins, qui, si elle était moins élaborée techniquement était conforme aux attentes de sa cliente, à la somme de 40 000 € à verser in solidum par les sociétés Clarins et Chéops, ayant toutes deux faussé le jeu de la concurrence.

En second lieu, les sociétés ABP Informatique, Atlease et les organes de la procédure collective font grief à la société Clarins d'avoir rompu abusivement et brutalement des relations commerciales établies depuis 1998 avec la société ABP et depuis 2003 avec la société Atlease sur le fondement de l'article L. 442-6 I 5 du Code de commerce.

L'article L. 442-6, I du Code de commerce stipule que :

"Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait par tout producteur, commerçant industriel ou personne immatriculée au registre des métiers (...) de rompre brutalement, même partiellement une relation commerciale établie sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée inimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce par des accords interprofessionnels";

Il est constant que des relations commerciales étaient nouées depuis 1998 entre les sociétés Clarins et ABP, portant à la fois sur des contrats de vente de solutions informatiques dont la société Atlesase assurait le financement depuis 2003-2004 et sur des contrats de maintenance.

La société Clarins a, selon le principe de la liberté de commerce, mis légitimement en concurrence les sociétés Cheops et ABP, en en informant cette dernière qui ne l'a d'ailleurs pas contesté ; dès lors, la société ABP n'ignorait pas qu'elle pouvait perdre ce marché de la consolidation des environnements IBM I.Séries des filiales européennes de sa cliente, d'autant plus que cette mise en concurrence était due à l'insatisfaction de la société Clarins suite à ses diverses propositions qui ne correspondaient pas aux souhaits qu'elle avait exprimés et notamment celle d'une offre sans le financement de la société Atlease trop onéreux selon la société Clarins. La rupture était ainsi prévisible dès l'annonce de l'appel d'offres.

Par ailleurs si aux termes de sa lettre du 1er juin 2010, la société Clarins a signifié à la société ABP une rupture de leurs relations futures, eu égard au climat de défiance qui s'était instauré entre elles et l'a informée que cette lettre valait préavis au sens de l'article L. 442-6 I 5 du Code de commerce, en revanche elle lui a clairement notifié la poursuite des contrats en cours.

Conformément à cette annonce, la société Clarins par courrier du 7 février 2011 a demandé à la société ABP Informatique de lui adresser sa proposition de renouvellement de maintenance pour l'exercice 2011 à propos du matériel IBM I. Séries dans le cadre du contrat de location financière en cours, ce à quoi dans une correspondance du 8 mars 2011 cette dernière a opposé un refus, en se prévalant de la lettre de rupture de sa cliente du 1er juin 2010.

Or, contrairement à ce que soutient la société ABP, la société Clarins si elle avait annoncé une rupture des relations futures avec le principe d'un préavis, avait bien fait part de sa volonté de poursuivre les contrats en cours.

Il se déduit de l'échange de ces correspondances que la société Clarins avait ainsi accordé un préavis à la société ABP, qui selon la durée des relations de onze années aurait pu être d'une durée d'une année, mais que c'est en réalité la société ABP qui a refusé de poursuivre ses relations commerciales avec la société Clarins.

Dans ces conditions les sociétés ABP et Atlease ne sont pas fondées à se prévaloir d'une rupture des relations commerciales au sens de l'article L. 442-6 I 5 du Code de commerce dans la mesure où d'une part elles ont été informées d'une mise en concurrence avec une société tierce (puisque leurs diverses propositions commerciales d'août à octobre 2009 ne satisfaisaient pas leur cliente) d'autre part, les contrats de prestations informatiques conclus entre les parties sont très ponctuels (6 contrats en 9 ans : en date des 6 février 2002, 17 juin 2003, 27 octobre 2005, 17 décembre 2007 et 28 octobre 2009) sans aucun accord-cadre, sans garantie de chiffre d'affaires ou d'exclusivité ne correspondent pas à un véritable courant d'affaires, enfin le principe d'un préavis a été donné à la société ABP mais cette dernière a refusé de poursuivre ses prestations afférentes aux contrats de maintenance.

Les sociétés ABP et Atlease seront en conséquence déboutées de ce chef de demande et la décision des premiers juges sera confirmée.

Compte tenu de la solution donnée au litige, les demandes de la société Technology en dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du Code civil ou encore pour procédure abusive ne sauraient prospérer.

L'équité commande d'allouer à la société ABP une indemnité de 6 000 € complémentaire en appel sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, Met hors de cause Maître Bourbouloux en qualité d'administrateur judiciaire du redressement judiciaire des sociétés ABP et Atlease et constate son intervention volontaire en qualité de commissaire à l'exécution du plan desdites sociétés, Confirme le jugement rendu le 9 octobre 2012 par le Tribunal de commerce de Nanterre en toutes ses dispositions, hormis sur le quantum de la condamnation et la condamnation au profit de la société Atlease et la qualification de la condamnation, Statuant à nouveau de ce seul chef, Condamne in solidum les sociétés Clarins et Cheops à payer à la société ABP la somme de 40 000 € sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, Condamne in solidum les sociétés Clarins et Cheops à payer à la société ABP la somme complémentaire de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette le surplus des autres demandes, Condamne in solidum les sociétés Clarins et Cheops aux dépens avec droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.