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Décisions

CA Reims, ch. civ. sect. 1, 14 avril 2015, n° 13-01911

REIMS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Eclipse Ardenne Incendie (SARL)

Défendeur :

Champagne Ardenne Sécurité Incendie (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Maillard

Conseillers :

Mme Simon-Rossenthal, M. Soin

Avocats :

Mes Harir, Guillaume

T. com. Sedan, du 11 juin 2013

11 juin 2013

La société Champagne Ardenne Sécurité Incendie (Casi) est une société par actions simplifiée crée en 1982, spécialisée dans la vente, la pose, l'entretien des équipements de lutte contre l'incendie et dans la formation du personnel à leur utilisation. Elle est concessionnaire exclusif du matériel de protection incendie Rot (extincteurs) son siège social se trouve [...] et elle dispose d'un établissement secondaire situé [...].

Elle comptait parmi ses salariés, Monsieur Gérard Mangeney, responsable opérationnel, embauché le 16 mai 1994, licencié le 17 janvier 2011, Monsieur Etienne Ninin, agent technico-commercial embauché le 1er novembre 2004 démissionnaire le 15 février 2011 et Monsieur Christophe Guibert, technicien, embauché le 1er juillet 2010, licencié le 14 mars 2011.

Le 28 février 2011, huit personnes, dont Monsieur Mangeney et Monsieur Ninin ont créé, par acte sous seing privé, une SARL dénommée 'Eclipse Ardenne Incendie', dont l'objet social est le négoce en gros et au détail de tous produits et équipements de sécurité en matière d'incendie, le conseil et l'audit en matière de sécurité et l'équipement de lutte contre l'incendie. Son siège social se trouve à [...].

Reprochant à la Société Eclipse Ardenne Incendie des actes de concurrence déloyale et notamment l'utilisation de son fichier client, l'utilisation d'une dénomination sociale proche de la sienne et d'un siège social à proximité du sien, la société Casi l'a, par acte du 29 décembre 2011, faite assigner à comparaître devant le tribunal de commerce de Sedan, aux fins d'obtenir réparation de son préjudice.

La société Eclipse Ardenne Incendie a contesté les agissements qui lui étaient reprochés et a conclu au débouté de la demande.

Par jugement du 11 juin 2013, le Tribunal de commerce de Sedan a :

- dit que la société Eclipse Ardenne Champagne Incendie a commis des actes de concurrence déloyale à l'égard de la société Casi,

- a condamné la société Eclipse Ardenne Champagne Incendie à lui payer la somme de 28 554,31 euro à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi, a débouté la société Casi de sa demande tendant à faire interdire à la société Eclipse Ardenne Incendie d'approcher, de démarcher, de prendre contact ainsi que toutes relations commerciales avec ses clients sous astreinte,

- l'a déboutée de sa demande tendant à faire interdire à la société Eclipse Ardenne Incendie, sous astreinte de 3 000 euro par infraction constatée, d'approcher, de démarcher, de prendre contact ainsi que toute relations commerciales avec ses clients;

- l'a déboutée de sa demande tendant à faire interdire à la société Eclipse Ardenne Incendie, sous astreinte de 5 000 euro par infraction constatée d'utiliser la dénomination Eclipse Ardenne Incendie ou de toute dénomination constituant la contrefaçon par reproduction et/ou imitation, de la dénomination sociale " Champagne Ardenne Sécurité Incendie ", de même que toute utilisation, quelle qu'en soit la forme, de cette dénomination et de toute autre dénomination similaire, et ce, sur tout support,

- a dit n'y avoir lieu à publication de la décision,

- a condamné la société Eclipse Ardenne Incendie à payer à la société Ardenne Champagne Sécurité Incendie la somme de 5 000 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens.

Il a retenu que l'implantation géographique du siège social n'était pas un acte de concurrence déloyale car il résulte du rachat d'un fonds de commerce, que la pratique de prix plus faibles que le concurrent n'est pas en soi une pratique déloyale, que le démarchage de la clientèle par les anciens salariés de la société Casi, qui ont créé la SARL Eclipse Ardenne Incendie ne constitue pas un acte de concurrence déloyale en l'absence de clause de non concurrence, d'exclusivité ou de confidentialité dans leur contrat de travail, que les associés et salariés de la SARL Eclipse Ardenne Incendie ont réalisé des actes de concurrence déloyale en tenant des propos mensongers auprès de la clientèle, que l'utilisation de l'accès à des données commerciales confidentielles afférentes à la clientèle caractérise un détournement déloyal de clientèle et enfin, que les deux dénominations sont suffisamment éloignées pour éviter tout risque de confusion auprès de la clientèle.

La société Eclipse Ardenne Incendie a interjeté appel.

Par conclusions du 20 mai 2014, elle demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a jugé la société Eclipse Ardenne Incendie responsable d'actes de concurrence déloyale et l'a condamnée à verser la somme de 28 554,31 euro en réparation du préjudice subi par la société Champagne Ardenne Sécurité Incendie, de débouter la société Casi de toutes ses demandes dirigées contre la société Eclipse Ardenne Incendie.

Subsidiairement, de dire que des demandes de la société Casi dirigées contre la société Eclipse Ardenne Incendie est justifiée uniquement du chef des deux marchés privés justifiés comme perdus (L'Hôtellerie Michel Nicole et le relais De Gonzague) et à hauteur seulement de 30,40 euro hors taxes pour l'année 2011 pour le second.

En tout état de cause, de débouter la société Casi de toutes demandes, fins ou conclusions plus amples ou contraires et notamment de son appel incident, de la condamner à verser à la société Eclipse Ardenne Incendie la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et de la condamner aux entiers dépens.

Elle explique qu'il n'y a ni détournement de fichiers clientèle, ni détournement par appropriation de supports, ni démarchage de clientèle dans des conditions déloyales, qu'aucune preuve d'un éventuel dénigrement ou transmission d'informations inexactes ou mensongères n'est apportée et qu'aucun lien de causalité n'est prouvé entre ces éventuelles manœuvres et les pertes de marchés, qu'il n'y a pas de risque de confusion pour les clients entre les deux sociétés car si l'emplacement du siège social de la SARL Eclipse Ardenne Incendie est proche de la celui de la société Casi, ce n'est pas en raison de manœuvres volontaires, mais en raison du rachat d'un fonds de commerce à cette adresse, et que le nom assez proche des deux sociétés n'entraîne pas de confusion dans l'esprit des clients, que les salariés ayant quittés la société Casi ne sont pas tenus d'une clause d'exclusivité, de confidentialité et de non concurrence, qu'ils pouvaient être embauchés par elle.

Par conclusions du 29 décembre 2014, la société Casi a formé appel incident, elle demande à la cour de constater, dire et juger que la société Eclipse Ardenne Incendie a commis des actes de concurrence déloyale à son égard par parasitisme, désorganisation, imitation et dénigrement, de rejeter purement et simplement les demandes reconventionnelles d'Eclipse Ardenne Incendie, de faire interdiction à la société Eclipse Ardenne Incendie sous astreinte de 3 000 euro par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt, d'approcher, de démarcher, de prendre contact et d'entrer en relation commerciale avec les clients de la société Champagne Ardenne Sécurité Incendie de lui faire interdiction sous astreinte de 5 000 euro par infraction constatée à compter de la signification du jugement, d'utiliser la dénomination Eclipse Ardenne Incendie ou toute dénomination constituant la contrefaçon par reproduction et/ou par imitation de la dénomination sociale "Champagne Ardenne Sécurité Incendie", de même que toute utilisation, quelle qu'en soit la forme, de cette dénomination et de toute autre dénomination similaire et ce sur tout support, de condamner la société Eclipse Ardenne Incendie à payer à la société Casi la somme de 100 000 euro à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice subi, d'ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans trois journaux au choix de la société Casi et aux frais de la société Eclipe Ardenne Incendie, sans que le coût de chaque insertion puisse excéder la somme de 4 000 euro, ainsi que sur la page d'accueil du site internet de la société Eclipse Ardenne Incendie accessible à l'adresse eclipse-ardenne-incendie.fr, dans la proportion de ? de cette page, pendant une durée de quatre mois à compter de la signification de la présente décision, de condamner la société Eclipse Ardenne Incendie à payer à la société Casi la somme de 8 000 euro en vertu des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et la condamner aux dépens.

Elle expose que la société Eclipse Ardenne Incendie s'est accaparée frauduleusement les données clients de la société Casi, qu'elle l'a désorganisée en démarchant et détournant illicitement sa clientèle par l'utilisation de mensonges et de données confidentielles et par le débauchage de salariés, qu'elle a imité la société Casi et créé un risque de confusion, notamment en prenant une dénomination sociale proche de celle de la société Casi, un objet social identique et un siège social près de ses locaux, qu'elle l'a dénigrée en affirmant que la société Casi était placée en liquidation judiciaire. Elle explique enfin que ces actes de concurrence déloyale ont créé un préjudice et entraîné la perte de nombreux clients.

Sur ce, la cour :

Les premiers juges ont justement rappelé qu'en vertu du principe de la liberté du commerce et de l'industrie, les entreprises sont libres de rivaliser entre elles afin d'attirer la clientèle et de la retenir et le détournement par un commerçant des clients de son concurrent n'est pas en lui-même fautif lorsque les moyens utilisés sont conformes aux usages et ne sont pas déloyaux.

Les deux parties admettent que le fait pour d'anciens salariés d'entreprendre ou de rejoindre une activité concurrente à celle de leur ancien employeur, n'est pas en lui-même constitutif de concurrence déloyale, mais devient fautif lorsqu'il s'y ajoute un comportement abusif.

En vertu de l'article 1382 du Code civil tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer. L'action en concurrence déloyale est soumise aux conditions habituelles de la responsabilité civile et il appartient à celui qui l'invoque de prouver par tout moyen l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité.

La société Casi soutient qu'elle a suite à la création par ses anciens salariés, de la société Eclipse Ardenne Incendie, qui exerce la même activité qu'elle à proximité de son établissement secondaire, subi une perte de clientèle en raison du trouble créé dans l'esprit de la clientèle par cette installation.

Sur le parasitisme :

La société Casi fait valoir que la société Eclipse Ardenne Incendie a créé une confusion entre les sociétés des parties et l'a imitée dans le but de capter sa clientèle et a tiré parti de son travail et de ses efforts.

Elle explique essentiellement que ses anciens salariés, qui se sont installés à proximité de ses locaux et qui exercent la même activité, ont profité de la connaissance qu'ils avaient des clients et des dates auxquelles les vérifications devaient être faites chez ces derniers pour la devancer.

Il résulte des éléments du dossier que Monsieur Mangeney et Monsieur Ninin qui ont créé la société Eclipse Ardenne Incendie, ont été salariés de la société Champagne Ardenne Sécurité Incendie. Monsieur Mangeney avait une ancienneté de 17 ans, il était affecté à l'établissement secondaire se trouvant à Romery Saint Laurent à proximité duquel se trouve à présent le siège social de la société Eclipse Ardenne Incendie et occupait avant son licenciement un poste de responsable opérationnel. Monsieur Ninin était de même salarié de la société intimée depuis sept ans et occupait avant sa démission un poste de technico-commercial au sein de l'établissement secondaire de la société Casi situé à Romery Saint Laurent. Il était plus particulièrement chargé d'établir les plannings d'intervention auprès des clients.

La société Casi propose à ses clients, entre autres prestations, des vérifications annuelles des extincteurs détenus par des personnes morales et ce dans le cadre d'un abonnement quadriennal.

Elle présente en annexe les factures établies par ses soins pour 84 clients situés dans le département des Ardennes (08) au cours de l'année 2010 dans le cadre d'une vérification annuelle, les rapports de vérification effectués fixant une date pour la vérification devant intervenir au cours de l'année 2011. Bon nombre des rapports des visites d'entretien qui ont été effectués mentionnent le nom de Monsieur Ninin (pièce 36) de sorte qu'il est établi que ce dernier avait une parfaite connaissance des clients de son employeur, des prestations effectuées et des dates auxquelles ces clients devaient être revus. La société Casi explique que lorsqu'elle s'est présentée chez ses clients au cours de l'année 2011 pour procéder comme convenu à la vérification annuelle de leurs appareils, les clients lui ont annoncé que la vérification des extincteurs avait déjà été faite par la société Eclipse quelques jours plus tôt.

Elle verse aux débats dix lettres de résiliation, qui lui ont été adressées par des clients à partir du mois d'avril 2011, indiquant qu'ils s'adressaient à un autre prestataire; certains clients ont nommé la société Eclipse en précisant que cette dernière pratiquait des tarifs plus avantageux (pièces 14 à 24). Dans son attestation, Monsieur Leao salarié de la société Casi occupant les fonctions de responsable technique rapporte qu'après avoir pris rendez-vous avec son client un mois à l'avance, ce dernier lui a lors de son arrivée expliqué qu'il avait fait vérifier les extincteurs par la société Eclipse en précisant qu'il connaissait Monsieur Mangeney et que ce dernier connaissait ses installations. Monsieur Hami technico-commercial de la société Casi expose dans son attestation que la société Eclipse Ardenne Incendie démarchait ses clients en leur indiquant que la société Casi avait fait faillite ou avait disparu.

Ces propos sont confirmés par les attestations, dignes de foi quand bien même elles ne remplissent pas les conditions de forme prescrites par l'article 202 du Code de procédure civile, émanant de Monsieur Borwska, de Monsieur Cochaux et de Monsieur Gilbert salariés de la société Casi et par les lettres de deux clients mentionnant pour l'une, que l'employé de la société Eclipse qui s'est présenté lui a malgré son insistance indiqué que la société Eclipse avait repris les locaux de la société Casi, que cette dernière n'existait plus et était partie des Ardennes (Relais de Gonzague) et pour l'autre, que la personne qui s'est présentée n'a pas pris la peine d'indiquer qu'elle ne faisait plus partie de la société Casi avec laquelle ils avaient un contrat depuis de longues années (Hôtellerie Michel Nicolle Abbaye de 7 Fontaines).

Il est donc établi que la société Eclipse Ardenne Incendie a profité de sa connaissance des clients de la société Casi liés à cette dernière par un contrat d'entretien donnant lieu à une visite annuelle et des dates programmées pour ces visites au cours de l'année 2011, pour se présenter chez ces clients avant la date prévue pour l'intervention de la société Casi, en n'hésitant pas à dire faussement aux clients que la société Casi n'existait plus ou qu'elle avait quitté les Ardennes.

C'est en vain que la société Eclipse Ardenne Incendie soutient que Monsieur Ninin ne pouvait plus se souvenir des noms des clients de la société Casi et des dates d'intervention programmées pour l'année 2011 et ne justifie par aucune pièce que les clients ainsi démarchés se sont librement adressés à elle.

Il est démontré que la société Eclipse Ardenne Incendie a de manière déloyale profité du fichier client de la société Casi et du travail effectué par cette dernière, pour tenter de détourner les clients à son profit et utiliser ses données commerciales confidentielles, dont ses responsables avaient eu connaissance au cours de leur activité au sein de la société intimée. Elle a ce faisant indûment profité du travail effectué par la société Casi pour faire des économies, prendre un avantage commercial, proposer des prix plus avantageux pour capter sa clientèle.

Ce comportement fautif a causé préjudice à la société Casi et se trouve directement à l'origine de la perte de bon nombre de clients. C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont estimé que l'utilisation frauduleuse du fichier des clients de la société Casi, l'omission pour le technicien de préciser le nom de son employeur et les affirmations mensongères sur la disparition de la société Casi sont des actes de concurrence déloyale qui ont permis à la société Eclipse Ardenne Incendie, en usant de la connaissance de l'un de ses associés de détourner la clientèle de la société Casi par des moyens critiquables et contraires aux usages loyaux du commerce.

Sur la désorganisation de l'entreprise :

La société Casi qui comptait 26 salariés soutient de plus qu'elle a été désorganisée suite au débauchage par la société Eclipse Ardenne Incendie de salariés opérationnels. Il résulte toutefois du dossier que seul Monsieur Ninin a démissionné pour entrer immédiatement au service de la société Eclipse Ardenne Incendie dont il est l'un des associés. Ce seul départ faisant suite à celui de Monsieur Mangeney, qui a pour sa part fait l'objet d'un licenciement au cours du mois de janvier 2011 et suivi de celui de Monsieur Guibert qui a également été licencié pour faute grave au cours du mois de mars 2011, ne peut caractériser la volonté de la société Eclipse Ardenne Incendie de désorganiser la société Casi en débauchant son personnel. Aucune pièce ne démontre que la société appelante a effectué des manœuvres en vue d'attirer massivement le personnel de la société Casi pour profiter immédiatement de son expérience et de la connaissance de la clientèle et que la société Casi a été désorganisée par le départ de Monsieur Ninin.

Sur l'imitation et le risque de confusion :

La société Casi soutient que la société Eclipse tente d'introduire dans l'esprit de la clientèle une confusion entre les deux sociétés conduisant à attribuer aux sociétés Casi et Eclipse Ardenne Incendie une origine commune.

La cour observe à cet égard, tel que l'a relevé le tribunal, que la société Eclipse Ardenne Incendie a repris une structure qui avait la même activité que la société Casi, à savoir la société Eclipse Sécurité Protection et qui était, depuis l'année 2000, installée à Romery Saint Laurent dans la même rue que l'établissement secondaire de la société Casi. S'agissant de la reprise d'une structure existante ayant la même activité, la société Casi ne peut reprocher à la société Eclipse Ardenne Incendie de s'être installée à côté d'elle pour créer une confusion entre les deux structures.

De même, le changement de dénomination de cette société et l'adoption du nom Eclipse Ardenne Incendie, ne facilite nullement par sa consonance et par la modification opérée, la confusion entre les deux sociétés, alors que l'appelante a conservé le mot " Eclipse ", la rattachant à la société acquise et abandonné le mot 'sécurité' qui se trouve également dans le nom de la société Casi. L'emploi des mots incendie qui est un nom commun et du terme Ardenne, ne sont pas de nature à eux seuls à constituer un risque de confusion entre les noms des deux sociétés. Aucune pièce ne vient d'ailleurs démontrer que certains clients ont été induits en erreur et se sont adressés à la société Eclipse Ardenne Incendie en croyant s'adresser à la société Casi (Champagne Ardenne Sécurité Incendie).

Seuls les agissements de la société Eclipse Ardenne Incendie, dont les salariés ont, au cours de l'année 2011, démarché les clients de la société Casi qui attendaient la visite annuelle de vérification de celle-ci, en omettant de dire qu'ils n'appartenaient plus à cette société qui était leur ancien employeur, en utilisant des informations privilégiées dont ils disposaient et en indiquant faussement que la société Casi n'exerçait plus son activité et que la société Eclipse Ardenne Incendie l'avait remplacée.

Le jugement déféré sera confirmé en tant qu'il a constaté qu'il n'existe entre les deux sociétés aucun risque de confusion et que le nom de la société Eclipse Ardenne Incendie ne peut induire la clientèle en erreur.

Sur le préjudice :

La société Casi a formé appel incident et demande à la cour d'évaluer son préjudice à la somme de 100 000 euro. La société Eclipse Ardenne Incendie conclut au rejet de cette demande et à l'infirmation du jugement, en soutenant que la preuve du préjudice allégué n'est pas rapportée et que les deux sociétés qui se sont plaintes de ses agissements ont continué à faire appel à la société Casi de sorte que cette dernière n'a subi aucun préjudice.

La société Casi verse aux débats, outre les lettres de l'Hotellerie Michel Nicolle et du relais de Gonzague, dix lettres de résiliation de contrat émanant de divers clients qui ont mis un terme à leurs contrats au cours de l'année 2011 et qui indiquent pour certains qu'ils se fourniront à l'avenir auprès de la société Eclipse Ardenne Incendie. Elle justifie en outre de 85 prestations annuelles facturées au cours de l'année 2010, qu'elle n'a pas pu réaliser alors qu'elles auraient normalement dû se poursuivre en 2011. Les attestations de ses salariés établissent clairement les difficultés qu'ils ont rencontrées en se présentant chez les clients pour procéder à la vérification annuelle prévue et qui avaient reçu la visite des salariés de la société Eclipse Ardenne Incendie, qui n'avaient pas précisé qu'ils n'intervenaient plus pour la société Casi mais pour une société concurrente ou qui indiquaient faussement que la société Casi n'existait plus ou qu'elle avait déménagé.

Au vu de ces éléments les premiers juges ont justement évalué le préjudice de la société Casi à la somme de 28 554,31 euro hors taxes représentant la perte des 85 contrats produits (pièce 36).

La société Casi ne justifie pas de la perte d'autres prestations en relation avec les agissements déloyaux de la société Eclipse Ardenne Incendie ni de la baisse de son chiffre d'affaires.

Le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point.

Sur les mesures complémentaires :

La société Casi ayant obtenu réparation de son préjudice il n'y a pas lieu, en l'absence de toute preuve de la poursuite des agissements dénoncés et au vu du principe de la liberté du commerce, de prononcer une mesure d'interdiction à la société Eclipse Ardenne Incendie d'approcher ou de prendre contact avec les clients de la société Casi sous astreinte.

Il n'y a pas lieu de même en l'absence de tout risque de confusion des deux sociétés au vu de leur dénomination de faire interdiction à la société Eclipse Ardenne Incendie d'utiliser sa dénomination sociale et d'ordonner la publication du présent arrêt dans la presse ou sur la page d'accueil du site internet de la société appelante.

L'appel incident de la société Casi sera rejeté et le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile :

La société Eclipse Ardenne Incendie qui succombe principalement supportera les entiers dépens de l'instance d'appel et ses frais irrépétibles et paiera à la société Casi la somme de 1 500 euro en application de l'article 700 Code de procédure civile pour l'instance d'appel.

Par ces motifs, Statuant publiquement et contradictoirement, Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 11 juin 2013 par le Tribunal de commerce de Sedan, Et y ajoutant, Condamne la société Eclipse Ardenne Incendie à payer à la société Champagne Ardenne Sécurité Incendie la somme de 1 500 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Eclipse Ardenne Incendie aux entiers dépens de l'instance d'appel et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.