ADLC, 13 février 2015, n° 15-DCC-11
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
Décision
Relative à la prise de contrôlée exclusif de la société La Mondiale Participations par le groupe AG2R La Mondiale
L'Autorité de la concurrence,
Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 12 janvier 2015, relatif à la prise de contrôle exclusif de la société La Mondiale Participations par le groupe AG2R La Mondiale, formalisée par une convention de cession d'actions du 23 novembre 2014 ;
Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;
Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l'instruction ;
Adopte la décision suivante :
I. Les entreprises concernées et l'opération
1. AG2R La Mondiale est un groupe paritaire de protection sociale (1) dont les orientations politiques et stratégiques sont déterminées par l'association sommitale AG2R La Mondiale Réunica (2). Ce groupe est principalement composé de l'association sommitale AG2R La Mondiale Réunica (3), de la SGAM AG2R La Mondiale, de la société d'assurances mutuelle La Mondiale, des institutions de prévoyance AG2R Prévoyance, Isica Prévoyance, INPCA, Réunica Prévoyance et Arpège Prévoyance, des groupements d'intérêt économique AG2R Réunica et La Mondiale Groupe, ainsi que d'une union de mutuelles, l'Association Générale des Mutuelles ou AG.Mut, à laquelle a adhéré la mutuelle ViaSanté (4). Le groupe AG2R La Mondiale exerce également un contrôle conjoint, avec le groupe Aegon, sur la société La Mondiale Participations et ses filiales. Il est principalement actif dans le secteur des assurances de personnes.
2. La Mondiale Participations est une société holding d'assurance contrôlée conjointement par la société d'assurance mutuelle La Mondiale et par Aegon International BV (5), qui détiennent respectivement 65 % et 35 % du capital de La Mondiale Participations et qui, en vertu des dispositions d'un accord cadre et d'un pacte d'actionnaires en date du 4 septembre 2002, exercent toutes deux une influence déterminante sur les décisions stratégiques de cette société. La Mondiale Participations contrôle les sociétés La Mondiale Partenaire, La Mondiale Europartner et Arial Assurances, qui sont actives dans le secteur des assurances de personnes (épargne, épargne retraite, prévoyance).
3. Aux termes de l'accord de cession d'actions du 23 novembre 2014, l'opération consiste en l'acquisition par la société d'assurance mutuelle La Mondiale de la participation détenue par Aegon International BV dans le capital de La Mondiale Participations, soit 35 % du capital de cette dernière. Au terme de l'opération, La Mondiale détiendra donc 100 % du capital de La Mondiale Participations.
4. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle exclusif de la société La Mondiale Participations par le groupe AG2R La Mondiale, l'opération constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.
5. Les entreprises concernées ont réalisé ensemble un chiffre d'affaires hors taxes consolidé sur le plan mondial de plus de 150 millions d'euros (groupe AG2R La Mondiale : 5,2 milliards d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2013 ; La Mondiale Participations et ses filiales : 4,9 milliards d'euros pour le même exercice). Chacune de ces entreprises a réalisé, en France, un chiffre d'affaires supérieur à 50 millions d'euros (groupe AG2R La Mondiale : 5,2 milliards d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2013; La Mondiale Participations et ses filiales : 3,9 milliards d'euros pour le même exercice). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, les seuils prévus par l'article 1, paragraphe 2, a) et b) du règlement (CE) n° 139-2004 du Conseil du 20 janvier 2004 sont atteints. Néanmoins, AG2R La Mondiale et La Mondiale Participations réalisant plus des deux tiers de leur chiffre d'affaires en France, l'opération ne relève pas de la compétence de l'Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l'article L. 430-2 du Code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.
II. Délimitation des marchés pertinents
6. Les parties à l'opération sont simultanément actives dans le secteur des assurances.
A. DELIMITATION DES MARCHES DE PRODUITS OU DE SERVICES
7. Les autorités nationales et européennes de concurrence distinguent les marchés de l'assurance de personnes, de l'assurance dommages et de la réassurance (6). En ce qui concerne les deux premières catégories de produits, les autorités de concurrence ont estimé qu'elles peuvent être segmentées en autant de marchés qu'il existe d'assurances couvrant les différents types de risques, dans la mesure où, du point de vue de la demande, les assurances couvrant ces risques différents ne sont pas substituables (7).
8. Concernant le marché des assurances de personnes, une segmentation supplémentaire peut être opérée entre les contrats d'assurance collective, conclus entre un assureur et un souscripteur distinct du bénéficiaire, et les contrats d'assurance individuelle où le souscripteur est également le bénéficiaire. De la même manière, concernant le marché des assurances de dommages, une segmentation supplémentaire peut être opérée entre les assurances à destination des particuliers et les assurances à destination des professionnels.
9. Au cas d'espèce, les parties à l'opération sont simultanément actives en matière d'assurance de personnes, et en particulier, sur les marchés (i) de la prévoyance collective (8), (ii) de la prévoyance individuelle (9), (iii) de l'épargne retraite collective (10), (iv) de l'épargne retraite individuelle (11), (v) de l'épargne collective (12), et (vi) de l'épargne individuelle (13), définis par la pratique décisionnelle.
10. Il n'y a pas lieu de remettre en cause ces délimitations à l'occasion de la présente opération.
B. DELIMITATION DES MARCHES GEOGRAPHIQUES
11. Il ressort de la pratique décisionnelle (14) qu'à l'exception de certaines assurances couvrant des risques de grande ampleur, les marchés de produits d'assurance sont considérés comme étant de dimension nationale compte tenu des préférences des consommateurs, de l'existence de législations et de contraintes fiscales nationales, de la structure actuelle de ces marchés ou encore des systèmes de régulation.
12. Il n'y a pas lieu de remettre en cause ces délimitations pour analyser les effets de l'opération.
III. Analyse concurrentielle
13. La partie notifiante a donné une estimation de la taille des marchés concernés en 2013 sur la base des données de l'Argus de l'assurance. Elle estime le marché total de la prévoyance individuelle à 6,5 milliard d'euros, celui de la prévoyance collective à 10,9 milliards d'euros, celui de l'épargne individuelle à 107 milliards d'euros, celui de l'épargne collective à 12 milliards d'euros, celui de la retraite individuelle à 6,2 milliards d'euros, celui de l'épargne retraite collective à 5,9 milliards d'euros, en 2013.
14. Sur la base de chiffres d'affaires réalisés en 2013, la part de marché de la nouvelle entité ne dépasserait pas [10-20] %, quel que soit le marché d'assurances de personnes (prévoyance collective, prévoyance individuelle, épargne individuelle, épargne collective, épargne retraite individuelle, épargne retraite collective). La part de marché de La Mondiale Participations est inférieure à [0-5] % sur tous les marchés concernés, à l'exception du marché de la retraite collective sur lequel elle atteint [5-10] %. En outre, la nouvelle entité sera confrontée sur ces marchés à la concurrence des principaux opérateurs du secteur de l'assurance de personnes (CNP, Axa, Malakoff Médéric, Allianz, Generali) ainsi que de groupes bancaires (Crédit Agricole, Société Générale ou BNP Paribas notamment).
15. Par conséquent, l'opération n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les différents marchés concernés de l'assurance de personnes.
DECIDE
Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 14-207 est autorisée.
Le président,
Notes :
1 Les groupes paritaires de protection sociale (" GPPS ") sont des ensembles structurés de personnes morales ayant entre elles des liens étroits et durables, créés en lien avec les organisations patronales et les syndicats (les " partenaires sociaux "). Un GPPS comporte au moins une institution de retraite AGIRC, une institution de retraire ARRCO et une institution de prévoyance, dans l'intérêt des entreprises et des salariés (formule du " guichet unique "). Il peut également être composé de mutuelle. Il est constitué d'une association sommitale " loi 1901 " qui est gérée paritairement et conduit la stratégie d'ensemble du GPPS. Une ou plusieurs associations de moyens humains, matériels et informatique, le plus souvent prenant la forme de Groupement d'Intérêt Économique permettent à ces groupes de fait de mettre en œuvre leurs activités concurrentielles et non concurrentielles. Voir à cet égard les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 11-DCC-215 du 29 décembre 2011 relative au rapprochement du groupe Humanis et du groupe Novalis Taitbout et n° 12-DCC-93 du 29 juin 2012 relative à la fusion du Groupe Mornay, du Groupe D&O et de la Fédération Mutualiste Interdépartementale de la Région Parisienne.
2 Les membres de cette association sommitale sont des entités à forme paritaire (4 institutions de retraite et 3 institutions de prévoyance, représentées au sein du conseil d'administration de l'association sommitale par des représentants de syndicats de salariés et d'organisations patronales), ainsi que quatre entités à forme non paritaire (la société d'assurance mutuelle La Mondiale, l'union de mutuelles AG Mut, ainsi que les deux mutuelles Muta Santé et Réunica Mutuelle) ne disposant que d'une voix consultative au conseil d'administration de l'association sommitale AG2R La Mondiale Réunica.
3 Depuis la réalisation de la fusion du groupe AG2R La Mondiale et du groupe Réunica. Voir à ce sujet la décision de l'Autorité de la concurrence n° 14-DCC-161 du 5 novembre 2014 relative à la fusion des groupes AG2R La Mondiale et Réunica.
4 Décision de l'Autorité de la concurrence n° 14-DCC-149 du 13 octobre 2014 relative à la fusion du groupe AG2R La Mondiale et de la Mutuelle ViaSanté.
5 Voir la décision de la Commission européenne M.2971 du 13 décembre 2002, Aegon / La Mondiale / La Mondiale Participations.
6 Voir par exemple les décisions de la Commission européenne IV/M.862 AXA / UAP du 20 décembre 1996, COMP/M.2676 SAMPO / VARMA SAMPO / IF HOLDING / JV du 18 décembre 2001, COMP/M.3556 FORTIS / BCP du 19 janvier 2005, ainsi que les décisions de l'Autorité de la concurrence n° 09-DCC-16 du 22 juin 2009 relative à la fusion entre les groupes Caisse d'Épargne et Banque Populaire, n° 10-DCC-52 du 2 juin 2010 relative à la création d'une SGAM par la MACIF, la MAIF et la MATMUT, n°11-DCC-11 du 27 janvier 2011 relative au rapprochement du groupe Aprionis et du groupe Vauban Humanis, n°11-DCC-215 du 29 décembre 2011 relative au rapprochement du groupe Humanis et du groupe Novalis Taitbout, n° 14-DCC-20 du 17 février 2014 relative à l'affiliation de la Mutuelle des personnels Air France à la Société de Groupe d'Assurance Mutuelle Macif et n° 14-DCC-109 du 28 juillet 2014 relative à la prise de contrôle exclusif de la Mutuelle Myriade par Eovi-MCD Mutuelle.
7 Voir par exemple la décision de la Commission européenne COMP/M.5083 GROUPAMA / OTP GARANCIA du 15 avril 2008 ainsi que les décisions précitées.
8 Voir la décision de l'Autorité de la concurrence n°14-DCC-161 du 5 novembre 2014 relative à la fusion des groupes AG2R La Mondiale et Réunica, ainsi que la lettre du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi C2008-77 du 28 octobre 2008, aux conseils de la société Mutuelle Harmonie Mutualité, relative à une concentration dans le secteur des assurances santé complémentaire et de prévoyance.
9 Voir la décision de l'Autorité de la concurrence n°14-DCC-161 et la lettre du ministre de l'économie n°C2008-77 précitées.
10 Voir la décision de l'Autorité de la concurrence n°14-DCC-84 du 20 juin 2014 relative à la prise de contrôle conjoint du groupe Primonial par les sociétés Crédit Mutuel Arkéa et Primonial Management, ainsi que la lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'emploi C2007-49 du 21 août 2007, aux conseils de l'Institut de prévoyance AG2R Prévoyance et de la société La Mondiale, relative à une concentration dans le secteur de l'assurance prévoyance, santé et retraite.
11 Voir la décision de l'Autorité de la concurrence n°14-DCC-84 et la lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'emploi C-2007-49 précitées.
12 Voir la décision de l'Autorité de la concurrence n°14-DCC-84 et la lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'emploi n°C-2007-49 précitées, ainsi que la lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie n°C2005-51 du 23 novembre 2005, aux conseils des groupes MAAF et MMA, relative à une concentration dans le secteur de l'assurance.
13 Voir la décision de l'Autorité de la concurrence n°14-DCC-84 et les lettres du ministre de l'économie C-2007-49 précitées et C2005-51 précitées.
14 Voir les décisions précitées.