CA Montpellier, 2e ch., 28 avril 2015, n° 13-07565
MONTPELLIER
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Analyse auto contrôle 11 (SARL)
Défendeur :
Contrôle auto Bilan Narbonnais (SAS), Coopérative nationale des entreprises de l'inspection technique des véhicules coopérative artisanale A-3S (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bachasson
Conseillers :
MM Olive, Bertrand
Avocats :
Mes Blanquer, Porte-Faurens, Chopin, Calvet, Benet
La société par actions simplifiée Contrôle Auto Bilan Narbonnais (la société Contrôle Auto Bilan) qui exploite à Narbonne, un centre de contrôle technique, a adhéré à la société coopérative artisanale A3S (la société A3S), le 1er décembre 2005. Cette société a pour objet de mettre en commun des moyens afin de développer au mieux l'activité, tels l'achat et la revente de matériel mécanique, de produits informatiques, la création de supports papiers et informatisés, la mise en 'œuvre de solutions techniques, les audits et formations et les démarches administratives nécessaires à l'obtention de la certification.
M. Laurent Nouira, embauché en qualité de contrôleur technique par la société Contrôle Auto Bilan, le 10 mai 2010, a créé, le 6 octobre 2011, la société Analyse Auto Contrôle 11 (la société AA11), dont le siège social est situé à Narbonne, zone industrielle La Coupe, à 1,2 km de celui de son ancien employeur.
La société AA11 a présenté à la société coopérative A3S une demande d'agrément qui a été acceptée le 7 novembre 2011.
M. Nouira a démissionné de son poste le 3 février 2012 et la société AA11 a commencé son activité de contrôle technique courant février 2012.
Estimant que la société AA11 avait été irrégulièrement affiliée à la société coopérative A3S et qu'elle avait commis des actes de concurrence déloyale en captant sa clientèle par détournement du fichier clients, la société Contrôle Auto Bilan a vainement mis en demeure cette dernière, par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 juillet 2012, de procéder à la radiation de la société concurrente. La société coopérative A3S n'a pas déféré à cette demande en faisant valoir que l'adhésion de la société AA11 était régulière.
Selon exploit d'huissier des 12 et 13 novembre 2012, la société Contrôle Auto Bilan a fait assigner à jour fixe la société AA11 et la société coopérative A3S devant le tribunal de commerce de Narbonne afin que la première soit exclue de la liste des adhérents de la seconde, sous astreinte, et qu'elles soient condamnées solidairement à lui payer une indemnité provisionnelle de 20 000 euros, à parfaire après expertise judiciaire.
Par jugement contradictoire du 24 septembre 2013, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal, après s'être déclaré compétent, a notamment :
- dit que la société Contrôle Auto Bilan n'a jamais donné son accord à l'installation de la société AA11 à 1 200 mètres de son siège social ;
- dit que la société A3S devra procéder à l'exclusion de la société AA11 de la liste de ses adhérents, dans un délai de trois mois à compter de la signification du jugement et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
- condamné solidairement les sociétés A3S et AA11 à payer à la société Contrôle Auto Bilan, la somme de 12 000 euros, à titre de dommages et intérêts ;
- condamné in solidum les sociétés défenderesses à payer à la société Contrôle Auto Bilan, la somme de 1 500 euros, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'à supporter sous la même solidarité la charge des dépens de l'instance.
La société Analyse Auto Contrôle 11 a régulièrement interjeté appel de ce jugement, en vue de son infirmation demandant à la cour de débouter la société Contrôle Auto Bilan de ses demandes et de la condamner à lui payer une somme de 3 000 euros, en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle soutient que :
- son affiliation à la société coopérative A3S est régulière dans la mesure où dans le cadre de la procédure préalable, celle-ci a obtenu un avis favorable tacite de la société Contrôle Auto Bilan, conformément à l'article 5.1.2 du règlement intérieur ;
- M. Nouira n'a pas, comme il est prétendu, réceptionné et encore moins détruit le courriel du 3 août 2011 adressé par la société A3S à M. David, gérant de la société Contrôle Auto Bilan ;
- c'est à tort que le tribunal reproche à la société A3S de ne pas avoir adressé ce courriel à l'adresse électronique utilisée par M. David dans le cadre de l'exploitation d'une autre société qu'il dirige sous la franchise Feu Vert ;
- l'adhésion à la coopérative A3S n'offre aucun avantage concurrentiel dès lors qu'il n'y a pas de communication faite aux clients sur les avantages procurés par celle-ci ; l'affiliation permet une mise en commun de moyens au titre de la formation ou de l'aide au montage de dossiers pour obtenir des certifications administratives ; c'est un organisme technique sans intérêt pour la clientèle ;
- en exécution du jugement, elle a été exclue de la liste des adhérents de la coopérative dans le délai imparti et a été affiliée à une nouvelle centrale (la société Auto 'Nome), ce qui n'a emporté aucun effet sur la clientèle ;
- en toute hypothèse, il ne peut pas lui être reproché une quelconque violation des statuts de la société A3S ;
- l'action en concurrence déloyale fondée sur les articles 1382 et 1383 du Code civil qui suppose une faute, un préjudice et un lien de causalité ne repose pas sur une présomption de responsabilité ;
- il est constant que le simple fait pour un salarié d'aviser une clientèle de son départ et de la création d'une nouvelle société concurrente n'est pas constitutif d'actes de concurrence déloyale, étant précisé qu'il ne saurait être déduit de deux attestations isolées établies par M. Martini et Mlle Diaz une détention du fichier clientèle et surtout un démarchage systématique ;
- elle conteste avoir adressé un courrier à cette dernière qui a omis d'indiquer dans son attestation qu'elle était la nièce de M. David et qu'elle était salariée dans l'entreprise Feu Vert que celui-ci dirige ;
- elle a envoyé des lettres-types rappelant les obligations en matière de contrôle technique et informant les propriétaires de véhicules de son existence, à l'aide d'un fichier d'adresses postales de particuliers acquis auprès de la société PJMS ; M. Martini figure sur ce fichier ;
- si elle avait utilisé le fichier clientèle de la société Contrôle Auto Bilan, elle aurait adressé une lettre de rappel à tous les clients et aurait été plus précise en ce qui concerne le type de véhicule et la date du terme du contrôle technique, ce qui n'a pas été le cas ;
- elle a multiplié des opérations de publicité notamment par le biais d'internet pour développer son activité, ce qui n'est pas constitutif d'un procédé déloyal ;
- le contrat de travail de M. Nouira ne contenait aucune clause de non-concurrence et seul le démarchage systématique et déloyal des clients aurait pu engager sa responsabilité ;
- il n'est pas démontré qu'elle serait impliquée dans le vol de matériel informatique survenu dans la nuit du 26 au 27 novembre 2013 pour lequel M. David a porté plainte ;
- la baisse de chiffre d'affaires de la société Contrôle Auto Bilan qui est constante depuis 2009 s'explique par les difficultés du marché automobile et non par sa propre activité, étant précisé que cette société ne fait pas la distinction comptable entre les deux établissements qu'elle exploite (Narbonne et Carcassonne) et qu'elle a multiplié les réductions de prix sur ses prestations ;
- il semblerait également que le successeur de M. Nouira ait été moins investi et moins performant dans la gestion du contrôle technique (fermeture du centre en pleine journée, pas de lettre de relance aux clients) ; M. David s'occupant principalement du centre Feu Vert à Narbonne ;
- la demande en paiement d'une somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts, en cause d'appel, n'est pas davantage justifiée ainsi d'ailleurs que la prétendue vente du fonds de commerce à vil prix invoquée dans les dernières écritures de la société Contrôle Auto Bilan.
La société Contrôle Auto Bilan Narbonnais a conclu à la confirmation du jugement sauf à lui allouer la somme de 40 000 euros, à titre de dommages et intérêts et à l'allocation de la somme de 5 000 euros, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle fait valoir que :
- le tribunal de commerce de Narbonne est compétent pour connaître du litige, nonobstant la clause attributive de compétence insérée dans le règlement intérieur de la société coopérative A3S, en application de l'article 42 du Code de procédure civile ; la société AA11 ne pouvait pas être attraite devant le tribunal de commerce de Marseille et le litige porte sur la violation des statuts de la société A3S mais également sur des actes de concurrence déloyale ;
- son action à l'encontre de la société coopérative A3S est recevable puisque, préalablement à la délivrance de l'assignation, elle a tenté de régler le litige par voie amiable (cf. courrier de son conseil en date du 26 juillet 2012) et qu'une réponse négative lui a été adressée le 2 août 2012 ; l'article 8 des statuts de la société coopérative ne prévoit aucun formalisme quant à la conduite de la tentative de règlement amiable et il ne s'agit pas d'une clause compromissoire, au sens de l'article 1443 du Code civil ;
- à titre subsidiaire, l'urgence justifiait l'absence de tentative de règlement amiable, en l'état d'une baisse de 40 % de son chiffre d'affaires depuis l'ouverture du centre AA11 ;
- elle peut solliciter judiciairement la radiation de la société AA11 suite à la violation des statuts et du règlement intérieur reprochée à la société A3S qui n'a pas respecté la procédure d'agrément préalable, prévue à l'article 5.1.2 du règlement ; aucune délibération du conseil d'administration de la société A3S n'est produite aux débats au titre de l'homologation de la candidature de la société AA11, ce qui n'est pas conforme à l'article 13 ;
- la société A3S ne peut donc pas se prévaloir de sa propre turpitude pour revendiquer la compétence exclusive de son conseil d'administration ou de l'assemblée générale ;
- la société A3S a exécuté le jugement en décembre 2013 ;
- son dirigeant, M. David, n'a pas reçu le courriel du 3 août 2011 dont se prévaut la société A3S qui lui a été envoyé à l'adresse électronique du centre de contrôle technique alors qu'habituellement ces e-mails sont transmis à l'adresse du centre Feu Vert qu'il dirige également ;
- M. Nouira qui gérait le centre au niveau technique et administratif a dû réceptionner ce courriel et le détruire ;
- la société A3S qui a agréé de manière fautive la société AA11 a contribué au dommage résultant de l'ouverture de ce centre à proximité immédiate de celui qu'elle exploitait ;
- M. Nouira qui s'est rendu complice de la violation des statuts de la société A3S, a conservé le fichier clients de la société pour les démarcher et capter irrégulièrement une partie de la clientèle ; plusieurs clients ont reçu deux lettres de rappel émanant des deux sociétés concurrentes ;
- M. Nouira n'a pas fait qu'utiliser ses connaissances sur la clientèle puisqu'il a détourné le fichier clients de son ancien employeur ;
- la société AA11 s'est placée dans son sillage en stationnant devant le garage Auto Feu Vert, dirigé par M. David, un véhicule comportant des publicités de son centre de contrôle technique, ce qui caractérise une offre concurrente ;
- de plus, elle a été victime en novembre 2013 du vol ciblé d'une tour centrale d'ordinateur et de trois clés USB ;
- elle a subi une baisse de chiffre d'affaires supérieure à 40 % en février 2012 et de 30 % les mois suivants ; l'établissement situé à Carcassonne est son siège social et non un établissement secondaire ;
- elle a été contrainte de céder son fonds de commerce à vil prix.
La société anonyme coopérative artisanale A3S, formant appel incident, a conclu, à titre principal, à l'incompétence de la cour au profit de la cour d'appel d'Aix en Provence, à titre subsidiaire, à l'irrecevabilité des demandes formées à son encontre par la société Contrôle Auto Bilan, et à titre très subsidiaire, au rejet de celles-ci. Elle sollicite le remboursement de la somme de 6 000 euros versée dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement ainsi que le paiement de la somme de 3 000 euros, en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle expose que :
- tant la société Contrôle Auto Bilan que la société AA11 étaient affiliées à la coopérative, ce qui obligeait la première à respecter la clause attributive de compétence insérée à l'article 8 du règlement intérieur et à délivrer assignation devant le tribunal de commerce de Marseille ;
- à titre subsidiaire, les clauses statutaires et le règlement intérieur qui constituent la loi des parties disposent que seul le conseil d'administration et l'assemblée générale des adhérents ont compétence pour statuer sur l'exclusion d'un sociétaire ; le tribunal de commerce a outrepassé ses pouvoirs en ordonnant cette exclusion et en s'immisçant ainsi dans le fonctionnement de la société coopérative ;
- en tout état de cause, elle a respecté la procédure d'agrément prévu par le règlement intérieur et les statuts en interrogeant, par courriel du 3 août 2011, la société Contrôle Auto Bilan sur la demande de création d'un centre de contrôle à 4 kms de celui qu'elle exploitait et en lui précisant que le défaut de réponse dans un délai de 8 jours équivaudrait à une réponse favorable ;
- aucune réponse ne lui étant parvenue, ce qui constituait un accord tacite, aucune violation de l'article 13 des statuts ne peut lui être reprochée quant à l'adhésion de la société AA11 qui pouvait être décidée par le conseil d'administration mais également par le directeur général ;
-il n'est justifié d'aucun lien de causalité entre la faute alléguée et le préjudice invoqué ;
- l'activité d'un centre de contrôle technique est soumise à l'agrément préfectoral pour l'installation de contrôle et du contrôleur et non de la coopérative A3S ;
- l'affiliation de la société AA11 est sans incidence sur la création du centre d'autant que si elle avait refusé, cette société aurait pu exploiter sous une autre enseigne ; la société Contrôle Auto Bilan connaît ce mécanisme puisqu'elle exploite sous l'enseigne Feu Vert et non sous une marque de la société A3S, notamment " Auto Securitas ".
C'est en cet état que la procédure a été clôturée par ordonnance du 3 mars 2015.
Motifs de la décision
Sur la compétence
L'article 8 du règlement intérieur de la société coopérative A3S contient une clause attributive de compétence dont la validité n'est pas contestée au regard des dispositions de l'article 48 du Code de procédure civile, aux termes de laquelle " tous les litiges auxquels les statuts et le règlement intérieur pourraient donner lieu à discussion notamment sur sa validité, son interprétation, son exécution, relèvent de la compétence du tribunal de commerce et/ou de grande instance de Marseille ou du lieu désigné par le conseil d'administration. "
Cette clause est opposable à la société Contrôle Auto Bilan et à la société AA11, qui étaient adhérentes de la société A3S, lors de la délivrance des assignations des 12 et 13 novembre 2012.
Pour autant, ces assignations délivrées à la requête de la société Contrôle Auto Bilan, si elles comportent une demande tendant à déclarer irrégulière l'affiliation de la société AA11 pour violation des statuts et du règlement intérieur de la société coopérative A3S, contiennent également une demande en réparation des actes de concurrence déloyale reprochés à la société AA11.
En présence de deux demandes, faites dans le cadre d'une même instance, reposant sur des fondements distincts, dont l'un ne relève pas du règlement intérieur et des statuts de la société A3S et ne peut, dès lors, entraîner la mise en œuvre de la clause attributive de compétence, c'est pertinemment que le premier juge a écarté l'application de ladite clause et a rejeté l'exception d'incompétence territoriale soulevée par la société A3S, conformément aux dispositions de l'article 42 du Code de procédure civile, qui dispose qu'en cas de pluralité de défendeurs, le demandeur saisit à son choix la juridiction du lieu où demeure l'un d'eux.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la violation des statuts et du règlement intérieur
En premier lieu, la société Contrôle Auto Bilan a respecté l'article 8 du règlement intérieur de la société A3S en adressant à celle-ci une lettre recommandée avec accusé de réception le 26 juillet 2012 valant expressément tentative de règlement amiable. Son action est donc recevable.
La société Contrôle Auto Bilan reproche à la société A3S de ne pas l'avoir préalablement consultée et de ne pas avoir obtenu un avis favorable sur la demande d'affiliation de la société AA11, en violation des articles 5.1.2 et 5.1.3 du règlement intérieur.
Si ces dispositions contractuelles imposent en effet à la société A3S d'informer le sociétaire opérationnel le plus proche du secteur d'installation du candidat à l'adhésion et de solliciter son avis, aucune forme n'est exigée dans le cadre de cette demande d'avis. De plus, la seule hypothèse où le conseil d'administration ne peut pas se prononcer favorablement sur une demande d'admission d'un centre de contrôle technique est celle dans laquelle il n'a pas obtenu un avis favorable du sociétaire le plus proche du secteur concerné par la création, la délocalisation ou l'extension d'un établissement secondaire, ce qui ne correspond pas au cas de l'espèce puisque la société AA11 a sollicité son affiliation dans le cadre de la création d'un établissement principal de contrôle technique.
Il s'ensuit, que si la société A3S doit informer et demander l'avis du sociétaire le plus proche, l'organe décisionnel peut accepter la demande d'admission d'un nouveau centre à condition qu'il s'agisse d'un établissement principal, nonobstant l'avis défavorable du sociétaire le plus proche.
La société A3S et pour elle son directeur général, a envoyé, le 3 août 2011 à 15h50, à l'adresse électronique de M. David, dirigeant de la société Contrôle Auto Bilan (david.autobilan@wanadoo) un courriel intitulé " demande avis de création Narbonne ", ainsi rédigé : " Depuis un mois, nous avons réceptionné une demande de création de centre de contrôle qui se situerait à environ 4 km de votre centre de contrôle de Narbonne. Par correction, je vous fais part de cette demande afin d'obtenir votre avis. Sachant que comme moi, vous êtes surchargé par votre travail et en l'absence de réponse sous huit jours, ceci équivaudrait à une réponse favorable (') ".
Aucune réponse n'a été apportée à ce courriel.
Les allégations de la société Contrôle Auto Bilan sur un détournement du message par M. Nouira ne sont pas étayées, étant observé que l'adresse électronique de M. David, en sa qualité de gérant de cette société, est bien celle figurant sur le message litigieux dont la réception et la lecture ont été confirmées le 3 août 2011 à 16h31. Le fait qu'un dénommé Eric Felten dont l'adresse électronique est " [email protected] " ait envoyé, le 14 mars 2012, à M. David à l'adresse " [email protected] " un courriel l'informant de la réception de deux cartons de matériels informatiques, ne suffit pas à démontrer que la société A3S adressait ces messages à cette adresse électronique durant l'année 2011 lorsqu'elle voulait communiquer avec M. David, en sa qualité de gérant de la société Contrôle Auto Bilan et non de gérant de la société Equip'Auto (Feu Vert).
En conséquence, il y a lieu de considérer que la société A3S a rempli son obligation d'information et de demande d'avis en adressant à la société Contrôle Auto Bilan le courriel du 3 août 2011.
Au demeurant, et à supposer que la société Contrôle Auto Bilan ait répondu en donnant un avis défavorable, le conseil d'administration pouvait donner l'agrément à la société AA11.
L'affiliation de la société AA11 est donc régulière et le jugement sera infirmé, de ce chef.
Il convient néanmoins de constater que la société A3S a procédé à l'exclusion de la société AA11, en exécution du jugement assorti de l'exécution provisoire.
Sur les actes de concurrence déloyale
Les actes constitutifs de concurrence déloyale fondés sur les dispositions des articles 1382 et 1383 du Code civil ne sauraient se déduire de simples présomptions.
En application du principe de la liberté du commerce et de l'industrie, l'installation en février 2012 d'un centre de contrôle technique par la société AA11 dans un secteur géographique éloigné de 1,2 km de celui où est implanté, depuis fin 2005, le centre de contrôle technique de la société Contrôle Auto Bilan, n'est pas en soi constitutif d'une faute, d'autant que M. Nouira, associé et gérant de la société AA11, n'était pas tenu au respect d'une clause de non concurrence.
Les attestations émanant de Mlle Diaz, qui a omis de faire état de son lien de parenté et de subordination à M. David et de M. Martini, selon lesquelles la première précise " qu'elle ne comprend pas pourquoi elle a été contactée par le " contrôle AA11 " alors qu'elle n'a jamais été cliente de cet établissement " et le second indique " qu'il a reçu un courrier du contrôle technique AA11 pour la visite de son véhicule 207 n° 3206 QX11, auquel il n'a donné aucune suite puisque le contrôle technique est toujours effectué chez Feu Vert à Narbonne " n'établissent pas un détournement du fichier clients de la société Contrôle Auto Bilan et un démarchage systématique de sa clientèle.
Les nombreuses attestations de clients produites par la société appelante révèlent qu'ils ont appris l'ouverture d'un centre de contrôle technique exploité par M. Nouira soit incidemment soit par lui-même ou par les supports publicitaires et qu'ils ont décidé de le suivre en raison de ses compétences et de son sérieux professionnel. M. Chaumelle précise que n'ayant pas pu obtenir du préposé de la société Auto Bilan, qui l'avait accueilli de manière peu commerciale, la nouvelle adresse professionnelle de M. Nouira avec lequel il avait noué des relations de confiance du fait de son professionnalisme, il avait décidé de changer de centre de contrôle et avait retrouvé M. Nouira grâce à un panneau publicitaire.
Dès lors, le déplacement de clientèle lié à la réputation acquise par M. Nouira ne saurait caractériser l'existence de manœuvres établissant l'appropriation déloyale de celle-ci au profit de la société créée par ce dernier, étant rappelé que la clientèle est libre de choisir l'entreprise à qui elle veut confier son véhicule aux fins de contrôle technique.
La société AA11 a acquis auprès de la société PJMS des adresses postales de particuliers auxquels elle a envoyé des lettres-type de proposition de contrôle technique de leurs véhicules sans indiquer la date butoir du contrôle ni l'identification du véhicule concerné. Le fait que des clients de la société Contrôle Auto Bilan figurent sur cette liste (M. Martini par exemple) n'interdisait pas à la société AA11 de leur adresser de telles propositions.
Le stationnement d'un véhicule comportant des panneaux publicitaires de la société AA11, le 17 décembre 2012, sur une des aires de parking de la zone d'activités Croix Sud à Narbonne où sont localisés de très nombreuses enseignes commerciales et à proximité de l'établissement Feu Vert exploité par M. David et non du centre de contrôle technique de la société Contrôle Auto Bilan, ne saurait caractériser un acte parasitaire de nature à opérer une confusion dans l'esprit des clients.
En conséquence, les manœuvres déloyales ou parasitaires reprochées à la société AA11 ne sont pas démontrées.
La société Contrôle Auto Bilan sera déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts tant à l'encontre de la société AA11 que de la société A3S.
Le jugement sera infirmé de ce chef et également en ce qu'il a condamné ces deux sociétés au paiement d'une indemnité de procédure.
Sur les autres demandes
Le présent arrêt infirmatif constitue le titre ouvrant droit à restitution des sommes éventuellement versées en exécution du jugement du 24 septembre 2013, assorti de l'exécution provisoire.
Succombant en ses prétentions, la société Contrôle Auto Bilan sera condamnée à payer à la société AA11 et à la société A3S, la somme de 1 500 euros, à chacune, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, verra sa propre demande de ce chef rejetée et supportera les dépens de première instance et d'appel.
Par ces motifs : La Cour, statuant publiquement et contradictoirement, Infirme le jugement entrepris, sauf en ce que le tribunal s'est déclaré compétent ; Et statuant à nouveau, Dit que l'action de la société Contrôle Auto Bilan Narbonnais à l'encontre de la société A3S est recevable ; Déboute la société Contrôle Auto Bilan de l'ensemble de ses demandes ; Rappelle que le présent arrêt constitue le titre ouvrant droit à restitution des sommes éventuellement versées en exécution du jugement du 24 septembre 2013, assorti de l'exécution provisoire ; Condamne la société Contrôle Auto Bilan Narbonnais à payer à la société Analyse Auto Contrôle 11 et à la société coopérative A3S, la somme de 1 500 euros à chacune, en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne la société Contrôle Auto Bilan Narbonnais aux dépens de première instance et d'appel.