Cass. soc., 13 mai 2015, n° 13-28.376
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Eberhardt
Défendeur :
Beausoleil (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Vallée
Rapporteur :
Mme Aubert-Monpeyssen
Avocat général :
M. Liffran
Avocats :
SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Jovanovic a été engagée par la société Beausoleil en qualité de VRP exclusif ; qu'elle percevait en rémunération de son activité des commissions ; qu'ayant été licenciée en juin 2009, elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen : - Vu le principe selon lequel les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par l'employeur ; - Attendu, selon cette règle, que les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur, doivent lui être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition, d'une part, que cette somme forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionnée au regard du montant réel des frais engagés, et, d'autre part, que la rémunération proprement dite du travail reste chaque mois au moins égale au SMIC ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes tendant à obtenir un rappel de commissions en raison de l'abattement forfaitaire pour frais professionnels appliqué par l'employeur, ainsi que de dommages-intérêts pour réduction illicite des cotisations sociales, l'arrêt retient que l'accord interprofessionnel national du 3 octobre 1975 prévoit la déduction contestée pour les représentants relevant du statut des VRP et que l'accord de Mme Jovanovic n'était pas nécessaire pour autoriser la réduction pratiquée par son employeur ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs erronés, alors qu'il résultait de ses constatations que le contrat de travail ne prévoyait pas la prise en charge par le salarié des frais professionnels moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire, la cour d'appel a violé le principe susvisé ;
Et sur le second moyen : - Vu l'article L. 7313-13 du Code du travail ; - Attendu que pour débouter la salariée de sa demande tendant à obtenir le paiement d'une indemnité de clientèle, l'arrêt retient que si en l'absence de licenciement pour faute grave, la salariée recouvre son droit de réclamer à son ancien employeur une indemnité de clientèle, encore lui faut-il démontrer qu'elle a apporté, créé ou développé une clientèle, en nombre et en valeur, alors que l'intéressée se borne à produire de nombreux tableaux chiffrés, inintelligibles et donc inopérants ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle avait relevé que la salariée avait fourni un travail incontestable et incontesté, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ce travail n'avait pas accru en nombre et en valeur la clientèle apportée à l'employeur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs, Casse et Annule, mais seulement en ce qu'il déboute la salariée de ses demandes tendant à obtenir un rappel de commissions en raison de l'abattement forfaitaire pour frais professionnels appliqué par l'employeur et des dommages-intérêts pour réduction illicite des cotisations sociales, ainsi que de ses demandes au titre de l'indemnité de clientèle, l'arrêt rendu le 24 octobre 2013, entre les parties, par la Cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris.