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Décisions

CA Angers, ch. com. A, 5 mai 2015, n° 13-00515

ANGERS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Ollier

Défendeur :

2E (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Van Gampelaere

Conseillers :

Mmes Monge, Portmann

Avocats :

Mes Dufourgburg, Hordot, Tuffreau

T. com. Angers, du 16 janv. 2013

16 janvier 2013

FAITS ET PROCÉDURE

La société SA 2E gère, en collaboration avec la société Garem - groupement d'achat et de référencement Emeraude - le réseau de l'enseigne distribution Espace Emeraude, dont les magasins commercialisent des produits liés au jardinage et d'une manière générale, à la vie en milieu rural, selon des concepts de vente variant en fonction de l'importance des marchés en présence, allant de Rural Expert (400 m2) à un Espace Emeraude d'une taille de 1200 à 2200 m2 avec ou sans matériaux.

Courant 2005, M. Ollier, qui exploitait à Cusset (03), depuis 1990, un magasin de 200 m2 distribuant des produits de motoculture, et la société SA 2E se sont rapprochés pour envisager une éventuelle affiliation du premier dans le réseau Espace Emeraude.

Le 16 juin 2006 les parties ont signé un contrat d'affiliation Espace Emeraude et le magasin a ouvert ses portes mi-janvier 2008 dans un bâtiment construit par M. Ollier, <adresse>.

Compte tenu des résultats déficitaires constatés la première année, M. Ollier dénonçait le contrat d'affiliation par courrier du 12 décembre 2008 à effet du 16 juin 2009. La société SA 2E en faisait autant par une lettre portant la même date.

M. Ollier était, à sa demande, placé sous sauvegarde par un jugement du Tribunal de commerce de Cusset en date du 18 mars 2009.

Suivant exploit du 25 mai 2011, M. Ollier saisissait le Tribunal de commerce d'Angers afin de voir annuler le contrat souscrit avec la société SA 2E et voir engager la responsabilité de cette dernière.

Il était débouté par un jugement en date du 16 janvier 2013, lequel l'a également condamné à payer à son adversaire une somme de 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens.

M. Ollier a interjeté appel de cette décision le 19 février 2013.

Les parties ont toutes les deux conclu et l'ordonnance de clôture a été rendue le 12 janvier 2015.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement :

- du 16 septembre 2013 pour M. Ollier,

- du pour 15 juillet 2013 pour la société SA 2E,

qui peuvent se résumer comme suit.

M. Ollier demande à la cour :

A titre principal, vu les articles 1109, 1110, 1116, 1134 et 1382 du Code civil, L. 330-3 du Code de commerce :

- de dire et juger que la société SA 2E ne lui a pas apporté une information pré-contractuelle suffisante, de dire qu'elle était trompeuse et de nature à l'induire en erreur,

- de dire qu'il a commis une erreur substantielle sur la rentabilité de l'activité entreprise,

-d'annuler le contrat d'affiliation du 16 juin 2006,

A titre subsidiaire,

- de dire et juger que la société SA 2E ne lui a pas transmis de savoir-faire substantiel ni apporté une assistance technique et commerciale suffisante,

- de dire et juger que la société SA 2E a manqué à ses obligations contractuelles et a commis une faute engageant sa responsabilité,

En tout état de cause,

- de condamner la société SA 2E à lui verser les sommes suivantes :

159 346,46 euro en remboursement des frais et dépenses exposés pour intégrer le réseau Espace Emeraude,

523 718,62 euro TTC au titre du comblement des pertes subies dans le cadre de l'exécution du contrat d'affiliation,

150 000 euro au titre de la perte de bénéfices qu'il aurait réalisés sur trois ans s'il n'avait pas intégré le réseau Espace Emeraude,

5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- de débouter la société SA 2E de l'ensemble de ses demandes,

- de la condamner aux dépens de première instance et d'appel, les derniers étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Au soutien de sa demande de nullité, il fait valoir en premier lieu, que l'étude de marché réalisée par la société SA 2E était inadaptée, dans la mesure où elle concernait l'implantation d'un magasin Rural Expert, et non celle d'un Espace Emeraude, concepts différents du fait de leur superficie et de leur activité, les magasins Espace Emeraude étant plus généralistes et moins tournés vers la motoculture.

Il soutient en deuxième lieu que les chiffres qui y sont annoncés sont en contradiction avec les plaquettes d'information et erronés quant aux chiffres d'affaire et aux marges, lesquels n'ont jamais été atteints, ce qui l'a induit en erreur et a vicié son consentement. Il précise que contrairement à ce qu'a décidé le tribunal de commerce, il n'avait pas établi de prévisionnel prévoyant un résultat déficitaire la première année, et qu'il n'était pas en mesure d'apprécier les chiffres avancés par la société SA 2E, ne maîtrisant pas l'activité liée à la vente de produits en libre service.

Il prétend en troisième lieu que son consentement a également été vicié par le fait qu'à aucun moment il ne lui a été permis de se rendre compte du montant et du poids des charges induits par le contrat, ce qui est constitutif d'un dol.

Il fait valoir enfin que le document d'information pré-contractuel était entaché d'erreurs, notamment quant au nombre de résiliations intervenues au cours de l'année 2005.

S'agissant des manquements de la société SA 2E à ses obligations, M. Ollier fait valoir tout d'abord que l'intimée ne lui a pas fourni l'assistance technique et commerciale qu'elle lui devait, aucune solution concrète n'ayant pas exemple été mise en œuvre face au problème de surstockage qu'il connaissait.

Il soutient, en outre, qu'elle ne lui a transmis aucun savoir-faire substantiel, soulignant que les méthodes de gestion du magasin étaient dépourvues de toute originalité et que la marque Espace Emeraude, surtout connue dans l'ouest de la France, n'avait pas de caractère attractif dans la zone de Vichy Cusset.

Il ajoute que plusieurs autres commerçants ont dû dénoncer leur contrat et que certains ont été contraints de déposer le bilan et fait observer que les chiffres donnés par son adversaire concernent des magasins dont la plupart appartiennent au gérant de la société SA 2E et sont postérieurs à la période durant laquelle il a démarré son activité. Il souligne que l'équipe en place à l'époque a été licenciée par la société SA 2E.

En réponse à son adversaire, il entend préciser que seul un client a été mécontent de ses prestations, que la société SA 2E n'a pas satisfait à son obligation de l'assister pour l'ouverture du magasin, qu'il a fait de nombreuses dépenses de publicité pour le faire connaître et que toutes ses commandes ont été validées par la société SA 2E, de sorte qu'elle ne peut lui reprocher, sur ce point, des erreurs de gestion.

Il considère que son préjudice se compose :

- des frais et dépenses exposés pour ouvrir le magasin, d'un montant total de 159 346,46 euro,

- des pertes d'exploitation subies, soulignant qu'avant d'intégrer le réseau Espace Emeraude, il réalisait un bénéfice annuel de 50 000 euro, soit une perte de 150 000 euro en trois ans, outre la nécessité de rembourser son passif, s'élevant à 523 718,62 euro dans le cadre du plan de sauvegarde adopté à son profit.

La société SA 2E sollicite de la cour qu'elle confirme dans son intégralité le jugement entrepris et qu'elle condamne M. Ollier à lui payer une somme de 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, et à supporter les dépens.

Elle prétend tout d'abord qu'elle a donné une information pré-contractuelle complète, conforme à ce que prévoient les articles L. 330-1 et R. 330-1 du Code de commerce, laquelle portait bien sur l'ouverture d'un magasin à l'enseigne Espace Emeraude et non pas Rural Expert, indiquant au surplus que les deux concepts ne sont pas très différents.

Elle souligne que le contrat conclu entre les parties n'est pas un contrat de franchise mais un contrat d'affiliation, laissant à l'affilié une très grande liberté commerciale, de sorte que la jurisprudence rendue relativement aux franchises ne serait pas nécessairement transposable en l'espèce.

En tout état de cause, elle soutient qu'elle n'était tenue que d'une obligation de moyens quant aux prévisions comptables fournies à titre pré-contractuel, seule une information mensongère pouvant engager sa responsabilité, et ce d'autant plus que l'expérience professionnelle de M. Ollier lui permettait d'apprécier en connaissance de cause les prévisions données par elle à titre purement indicatif, faisant valoir que la motoculture constituait l'activité essentielle et dominante du magasin Espace Emeraude de Cusset.

Elle ajoute que l'étude pré-contractuelle mentionnait bien les charges d'exploitation.

La société SA 2E soutient que son adversaire ne démontre pas l'existence de manœuvres caractéristiques d'une intention dolosive.

Elle prétend également que la nullité du contrat d'affiliation ne saurait pas plus être encourue sur le fondement de l'erreur, en présence d'un contrat nécessairement aléatoire quant aux résultats d'exploitation de l'affilié et stipulant expressément que les prévisionnels établis n'avaient qu'un caractère indicatif et hypothétique et qu'ils ne constituaient pas un élément déterminant du consentement.

La société SA 2E fait également valoir qu'elle n'a commis aucune faute. Elle soutient en effet qu'elle a tout mis en œuvre pour trouver une solution amiable aux problèmes rencontrés par M. Ollier (impayés, non livraisons), mais que ses interventions se sont avérées insuffisantes en raison du comportement réticent des époux Ollier et de leur fils, et qu'en tout état de cause, la faible durée de l'exploitation de l'enseigne n'a pas permis de redresser la situation.

Elle précise que l'enseigne est présente sur l'ensemble de la France et fait observer que Mme Lavenier, qui atteste pour son adversaire, est en conflit avec le cessionnaire de son fonds de commerce et n'a pas engagé d'action à son encontre. Elle ajoute que M. Ollier était libre de pratiquer les prix qu'il voulait et que l'originalité des produits et des méthodes de gestion n'est pas une condition de validité du contrat d'affiliation.

Elle conteste en tout état de cause tout lien de causalité entre les fautes qui lui sont reprochées et les pertes financières supportées par M. Ollier, soulignant que ce dernier a commis de nombreuses inexécutions contractuelles qui ont pu contribuer à l'échec de son commerce (attitude insultante et agressive de Mme Ollier et de son fils, non-paiement des fournisseurs).

Elle ajoute qu'elle ne saurait se voir tenue de régler le passif de la procédure collective de son affilié, lequel doit, conformément à l'article 8-6 du contrat, supporter seul les risques de son exploitation. Enfin, elle fait valoir qu'il est permis de s'interroger sur la pertinence de la comparaison faite par M. Ollier entre son ancien commerce et le nouveau, exercé dans un bâtiment plus grand qu'il avait fait construire à un autre endroit.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I - Sur la demande de nullité du contrat d'affiliation

Attendu qu'il est constant qu'en exécution de la convention signée le 16 juin 2006 par les parties, et dénommée " contrat d'affiliation ", la société SA 2E a mis à la disposition de M. Ollier la marque " Espace Emeraude " en exigeant de lui un engagement de quasi exclusivité pour l'exercice de son activité ;

Que par suite, la société SA 2E était, en application de l'article L. 330-3 du Code de commerce, tenue de remettre à M. Ollier un document donnant des informations sincères, qui lui permettent de s'engager en connaissance de cause ;

Attendu que l'intimée a effectivement remis à M. Ollier, qui en a accusé réception le 28 mai 2006, un document d'information précontractuelle contenant les informations figurant aux articles L. 330-1 et R. 330-1 du Code de commerce ;

Attendu que ces textes n'imposent pas que soit adressé au candidat à l'affiliation ou à la franchise un prévisionnel, mais seulement que le document d'information précise " la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l'exploitation ", celle-ci devant ensuite mettre à profit le délai de vingt jours qui lui est accordé par la loi pour vérifier si le projet est rentable ;

Attendu cependant, que lorsque la société établit un compte d'exploitation prévisionnel, elle doit donner des informations sincères et véritables, sérieuses, empreintes de réalisme et de prudence, sans que pèse sur elle une obligation autre que de moyens quant aux résultats escomptés ;

Attendu que le document d'information pré-contractuelle concerne, contrairement à ce que soutient M. Ollier, non pas un magasin " Rural Expert ", mais un commerce à l'enseigne " Espace émeraude " ;

Que si l'étude de marché établie antérieurement par la société SA 2E porte l'encart " Rural Expert ", elle contient des informations générales quant à la situation géographie du projet, à l'attractivité des hyper et super, aux services du canton, au recensement agricole et à la zone de chalandise, s'appliquant quel que soit le genre d'enseigne à ouvrir ; qu'en outre, M. Ollier ne démontre pas que l'estimation du chiffre d'affaires, qui vise un magasin d'une surface de vente de 900 m2, n'avait pas vocation à s'appliquer à un magasin " Espace Emeraude ", les deux concepts ne variant, selon la plaquette produite par M. Ollier, que par l'importance de la surface exploitée, mais commercialisant les mêmes produits ;

Que l'étude produite faisait apparaître un chiffre d'affaires potentiel annuel de 1 311 710 euro, lequel n'est pas en contradiction avec celui de 2 500 000 euro annoncé dans les plaquettes d'information pour des magasins de taille nettement supérieure ;

Attendu en premier lieu, que le contrat signé le 16 juin 2006 mentionne que l'affilié " reconnaît que l'étude de marché, ainsi que le compte prévisionnel établis en collaboration avec la société SA 2E n'ont qu'une valeur indicative, étant précisé en ce qui concerne le compte prévisionnel que celui-ci est lié à l'environnement économique et commercial au jour de son élaboration et correspond à une hypothèse d'exploitation performante, hypothèse dont la réalisation reste par nature aléatoire. En aucun cas, l'affilié ne pourra dès lors tirer parti de ces documents en vue d'engager la responsabilité de la SA 2, reconnaissant que ceux-ci ne constituent pas un élément déterminant de son consentement au présent contrat " ; que cette clause fait donc obstacle à ce que M. Ollier invoque une erreur substantielle liée à ce que la rentabilité figurant sur l'étude de marché n'a pas été obtenue ;

Attendu en deuxième lieu, que le chiffre d'affaire atteint au 30 septembre 2008 a été de 739 000 euro ; que cependant, le magasin a ouvert le 16 janvier 2008, de sorte que le montant susvisé a été atteint en huit mois et demi, ce qui donne pour une projection sur douze mois, un chiffre d'affaire de 1 043 294 euro, soit un écart de seulement 20 % par rapport à celui annoncé par la société SA 2E, de sorte que ce dernier ne peut être considéré comme grossièrement erroné ou dépourvu de sérieux ; que les résultats de l'année suivante ne peuvent être retenus, dans la mesure où les parties avaient d'ores et déjà pris la décision de cesser leur relation, ce qui a pu se traduire par une certaine démobilisation de l'une et de l'autre ;

Attendu en troisième lieu, qu'il appartenait à M. Ollier, qui disposait d'une réelle expérience de commerçant, qui plus est dans le domaine de la motoculture de plaisir, ce qui a représenté 85 % du chiffre d'affaires réalisé les premiers mois - en ce sens étude effectuée le 28 avril 2008 par la société SA 2E - et qui connaissait le marché local pour y être implanté depuis 1990, de mettre à profit le temps de la négociation pour procéder à sa propre étude de rentabilité, ce qu'il a manifestement fait, puisqu'il a, en septembre 2007, soumis à son expert-comptable un compte de résultat prévisionnel sur trois ans faisant apparaître un chiffre d'affaire prévisionnel de 1 570 000 euro la première année ; que le cabinet Aresco lui a répondu que ce compte prévisionnel lui paraissait "cohérent dans sa construction"; qu'il ne peut dès lors soutenir que les chiffres qui lui avaient été annoncés étaient dépourvus de sérieux, puisque lui-même en a fait apparaître de plus élevés et n'a pas eu d'observation de la part de son expert-comptable ;

Attendu que le document pré-contractuel d'information ne contenait, tout comme l'étude de marché, aucune précision sur le taux de marge brute ; que la marge annoncée sur des plaquettes publicitaires, de 28/30 % n'était qu'un " objectif de résultat ", et ce de surcroît pour un magasin plus grand de 1200 m2 ; qu'il appartenait donc au candidat à l'affiliation de calculer le taux de marge réalisable ; qu'en outre, il n'est pas démontré que le taux susvisé n'a pas été atteint, les documents comptables établis par la société SA 2E suite à sa visite en avril 2008 faisant ressortir un taux de marge bien supérieur ;

Attendu qu'il s'en suit que la demande de nullité du contrat pour erreur sur les qualités substantielles doit être rejetée ;

Attendu s'agissant du dol, que M. Ollier prétend qu'il résulterait de ce que le poids des charges induites par le contrat de franchise lui a été caché ;

Attendu qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessous, la société SA 2E avait pour seule obligation, sur ce point, de préciser "la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l'exploitation" (article R. 330-1 in fine) ; qu'elle a évalué les travaux d'agencement du local à 60 000 euro HT et le stock permanent à 240 000 euro HT ; qu'elle a précisé la cotisation annuelle qui lui serait due par son affilié et a mentionné, dans l'étude de marché, qu'à terme, la structure comprendrait six personnes en énonçant les catégories socio professionnelles dont elles devaient relever ;

Que si les dépenses et investissements de départ ont été plus élevés, atteignant environ 100 000 euro, M. Ollier ne démontre pas que l'achat d'un logiciel proginov est spécifique à la marque, que cette différence de 40 000 euro a été déterminante de son consentement et qu'elle a été sciemment passée sous silence par la société SA 2E ;

Qu'il disposait de toutes les informations pour déterminer les charges de personnel, ce qui lui était d'autant plus facile qu'il avait déjà la qualité de commerçant et qu'il était en contact avec un expert-comptable ;

Que concernant le problème du stock, qui s'est révélé plus important (300 000 euro en avril 2008), la société SA 2E fait valoir qu'une partie de celui-ci a été créée à son insu, M. Ollier disposant contractuellement de la liberté d'acheter, à concurrence de 30 % , chez des fournisseurs de son choix ; que celui-ci ne démontre pas qu'il n'a pas usé de cette faculté et que par suite l'importance du stock qu'il a dû acheter est uniquement liée aux produits imposés par sa cocontractante ;

Attendu, enfin, que M. Ollier ne démontre pas que contrairement à ce qui est énoncé dans le document d'information, il n'y a pas eu une résiliation de contrats d'affiliation "Espace émeraude" en 2005 mais plus d'une vingtaine ;

Attendu que la preuve d'une réticence dolosive de l'intimée n'est donc pas non plus démontrée ;

Attendu, par suite, que le jugement du Tribunal de commerce d'Angers sera confirmé en ce qu'il a débouté M. Ollier de sa demande d'annulation du contrat conclu le 16 juin 2006 avec la société SA 2E ;

II - Sur la responsabilité de la société SA 2E

Attendu que l'article 7 du contrat d'affiliation met à la charge de la société SA 2E une obligation d'assistance, que ce soit dans l'agencement et la décoration du magasin, la réalisation du stock à constituer, le lancement du magasin, la gestion ainsi qu'une assistance commerciale ;

Que cet engagement de la société SA 2E doit être combiné avec la clause 8-6 qui prévoit : " L'affilié supporte seul les risques de son exploitation. Il agit en son nom personnel et sous sa seule responsabilité, dans ses rapports avec son personnel, sa clientèle et d'une façon générale, les tiers, de sorte que la responsabilité de la société SA 2E ne pourra être engagée du fait de l'exploitation commerciale de l'affilié, à quelque titre que ce soit et notamment en cas de non-respect des règles et normes applicables à son activité " ;

Attendu que M. Ollier reproche à la société SA 2E de ne pas l'avoir assistée, face aux difficultés qu'il rencontrait en raison d'un surcroît de stock ;

Attendu tout d'abord, que s'il établit qu'il a acheté pour 477 660 euro HT de produits entre décembre 2007 et février 2008, il ne démontre pas qu'il s'agissait là d'un stock, dans la mesure où des biens ont été vendus ;

Qu'ensuite, il ne démontre pas que tout a été commandé avec l'aval de la société SA 2E, qui, dans le rapport de visite du 28 avril 2008, déplore que ce n'ait pas été le cas en raison de l'absence du conseiller en ouverture et de l'empressement des dirigeants à ouvrir le magasin ; qu'il n'établit pas non plus qu'il se devait de constituer un stock aussi important pour faire face aux demandes en lien avec les publicités diffusées, la cour observant que celles-ci ne visent que quelques produits à chaque fois ; qu'en outre, s'agissant des prix à pratiquer, le contrat prévoyait expressément que les tarifs communiqués par la société SA 2E sont purement indicatifs et que l'affilié pourra librement déterminer les prix de vente ; que si, pour les produits visés par les catalogues, cette liberté ne peut qu'être relative, il convient de relever, à ce sujet encore, qu'ils sont peu nombreux par rapport à la gamme offerte par l'affilié ;

Attendu qu'il n'est pas contesté que face aux problèmes rencontrés par M. Ollier peu de temps après son ouverture, et en particulier le non-paiement de certains fournisseurs, la société SA 2E a dépêché deux personnes sur place ; qu'elles sont restées dans les lieux trois jours, à savoir les 21,22 et 23 avril 2008 ; qu'elles ont proposé les solutions suivantes :

- renégociation des délais de paiement sur les plus grosses échéances fournisseur,

- reprise de marchandise par certains fournisseurs dès lors que les quantités sont jugées trop importantes par la société SA 2E,

- favoriser le destockage par certains magasins du réseau,

- veiller rapidement à l'embauche d'un responsable de magasin, possédant les compétences nécessaires,

Attendu que M. Ollier ne démontre pas que la société SA 2E n'a mis en œuvre aucune de ces mesures ; qu'au contraire, cette dernière établit par la production d'emails que des demandes de report d'échéances ou de reprises de stocks ont été faites par la société SA 2E auprès de fournisseurs (pièces 2 à 5 de celle-ci) et que les démarches de ces derniers ont été rendues complexes par l'attitude de M. Ollier ou de ses proches ;

Que ce premier grief ne peut donc qu'être rejeté ;

Attendu concernant le défaut de transmission d'un savoir-faire, que le contrat précise à ce sujet, que préalablement à la conclusion de celui-ci, la société SA 2E a porté à la connaissance de l'affilié le guide des normes " Espace Emeraude ", lequel est notamment constitué :

- d'un guide des normes d'installation du local, de la présentation des produits, de la réalisation des services,

- d'une charte graphique,

- d'un listing de la PLV,

- d'un fichier répertoriant les fournisseurs agréés par la société SA 2E et des conditions d'approvisionnement auprès de ceux-ci,

- des différents documents " Espace émeraude " (factures, garanties...),

Attendu que le règlement 330-2010 (article 1er g) relatif à aux restrictions verticales, définit le savoir-faire comme " un ensemble secret, substantiel et identifié d'informations pratiques non brevetées, résultant de l'expérience du fournisseur et testées par celui-ci " ;

Qu'en l'espèce, ce savoir-faire est matérialisé par les formations de l'affilié (article 6-2 du contrat) destinées à la transmission du savoir-faire nécessaire à l'exploitation de la boutique et par la transmission de l'ensemble des documents contenant la description et le fonctionnement du réseau ;

Attendu au surplus, qu'il n'est pas sérieusement contestable, que l'enseigne " Espace émeraude ", présente sur l'ensemble du territoire national, est associée à une série de signes distinctifs, notamment à une standardisation de l'image, et s'intègre à un vaste réseau, de sorte qu'elle crée un effet de chaîne qui lui donne une indéniable notoriété ; qu'en outre, elle est associée à une marque spécifique de produits, distribués sous le nom d'Eden parc ;

Attendu que par suite, ce second grief doit également être écarté ;

Attendu que le jugement du Tribunal de commerce d'Angers sera donc confirmé en ce qu'il a écarté la responsabilité de la société SA 2E ;

III - Sur les demandes accessoires

Attendu que la décision entreprise sera également confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens ;

Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la société SA 2E la charge de ses frais non répétibles exposés en cause d'appel ; que par suite, la demande qu'elle a présentée à ce titre sera rejetée ;

Attendu que partie succombante, M. Ollier supportera les dépens d'appel ;

Par ces motifs LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Confirme le jugement rendu le 16 janvier 2013 par le Tribunal de commerce d'Angers, Y ajoutant, Rejette les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne M. Ollier aux dépens d'appel.