CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 22 mai 2015, n° 11-19595
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Dr. Ing. H.C.F Porsche aktiengesellschaft
Défendeur :
PGO Automobiles (SA), Saint-Rapt & Bertholet (es qual.), Speedcab (SAS), Boyer (es qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Aimar
Conseillers :
Mmes Nerot, Guillaume
Avocats :
Mes Le Goff, André, Teytaud, Dubois, Coiffet, Tonnelier, fromentin, Marcus-Mandel
Vu les articles 455 et 954 du Code de procédure civile,
Vu le jugement du 6 mai 2011 rendu par le tribunal de grande instance de Paris (3e chambre 2e section),
Vu l'appel interjeté le 2 novembre 2011 par la société Dr. Ing. H.C.F Porsche aktiengesellschaft,
Vu les dernières conclusions de la société Dr. Ing. H.C.F Porsche aktiengesellschaft, appelante en date du 6 mars 2015,
Vu les dernières conclusions de la SA PGO Automobiles, de la SELARL de Saint-Rapt & Bertholet, es qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la société PGO Automobiles et de Maître Marc André, es qualités de représentant des créanciers de la société PGO Automobiles, intimés et incidemment appelants, en date du 18 mars 2015,
Vu les dernières conclusions de la SAS Speedcab et de monsieur Gilles Boyer es qualités de liquidateur amiable de la Speedcab en date du 13 juin 2012,
Vu l'ordonnance de clôture en date du 26 mars 2015,
Sur ce, la cour,
Il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures des parties,
Il sera simplement rappelé que :
La société de droit allemand Dr. Ing. H.C.F Porsche aktiengesellschaft ci-après dénommée la société Porsche, conçoit, fabrique et commercialise des automobiles et notamment des modèles de sport prestigieux.
Elle revendique la titularité des droits d'auteur sur un modèle divulgué en 1954 appelé "356 Speedster".
La société PGO Automobiles, ci-après dénommée PGO, fabrique et commercialise des automobiles qu'elle qualifie de "néo-rétro" avec une carrosserie polyester et des motorisations Peugeot. Elle a mis au point au cours des années 2001 à 2003 un modèle dénommé Speedster II dont la commercialisation a débuté en 2003.
La société PGO a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Alès du 31 mai 2005 et un plan de continuation a été adopté le 19 décembre 2006.
Par jugement réputé contradictoire du 18 février 2004, le tribunal de grande Instance de Paris a dit qu'en offrant à la vente et en vendant des voitures reproduisant les modèles "356" et "356 Speedster" créés par la société Porsche, la société PGO commet des actes de contrefaçon, dit que la société PGO est également responsable d'actes de concurrence déloyale et parasitaire, prononcé une mesure d'interdiction sous astreinte et de suppression de son site internet, avant dire droit sur le préjudice, ordonné une mesure d'expertise, condamné la société PGO à verser à la société Porsche une indemnité provisionnelle de 50 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire et 50 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon, ordonné la publication du dispositif du jugement devenu définitif, prononcé l'exécution provisoire des mesures d'interdiction, de provision et d'expertise et condamné la société PGO à verser à la société Porsche la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par arrêt du 1er juin 2005 la cour d'appel de Paris a infirmé ce jugement, rejeté l'exception d'incompétence territoriale soulevée par la société PGO, déclaré la société Porsche irrecevable pour défaut de qualité à agir en contrefaçon et concurrence déloyale et parasitaire à l'encontre de la société PGO, débouté la société PGO de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, ordonné la restitution des sommes versées par la société PGO à la société Porsche en exécution du jugement déféré et condamné la société Porsche à verser à la société PGO la somme de 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le 16 février 2006 la société Porsche a fait pratiquer une saisie-contrefaçon auprès d'un concessionnaire de véhicules de la société PGO, la société Speedcab, en vertu d'une autorisation présidentielle du 30 janvier 2006.
Selon actes d'huissier des 9 et 13 mars 2006 la société Porsche a fait assigner la société PGO et la société Speedcab devant le tribunal de Commerce de Paris en contrefaçon de droits d'auteur sur l'automobile "356 Speedster" et en concurrence déloyale, résultant de la fabrication, la commercialisation et l'offre à la vente et/ou la vente d'automobiles dénommées "Speedster II" et "Cévennes".
Par jugement du 26 janvier 2007, le tribunal de Commerce de Paris a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 1er juin 2005.
Par jugement du 3 octobre 2008 ce même tribunal a rejeté la demande de sursis à statuer formée par la société PGO du fait d'une procédure pénale en cours.
Par jugement du 20 février 2009 le tribunal de Commerce de Paris a déclaré irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par la société PGO.
Par arrêt du 2 juin 2009 la cour d'appel de Paris a infirmé en toutes ses dispositions ce jugement frappé de contredit et déclaré recevable l'exception d'incompétence soulevée par la société PGO, et les mandataires judiciaires de la société et a renvoyé le litige devant le tribunal de grande instance de Paris.
Parallèlement et selon acte d'huissier du 27 novembre 2008 la société PGO a fait assigner la société Porsche et monsieur Gilles Boyer, es qualités de liquidateur amiable de la société Speedcab devant le tribunal de grande instance de Paris en nullité de la saisie-contrefaçon pratiquée le 16 février 2006 sur le fondement de l'article L. 521 du Code de la propriété intellectuelle de l'époque pour ne pas avoir été suivie d'une assignation dans le délai requis.
Le 7 janvier 2010 les deux instances ont été jointes dans le cadre de la mise en état. Suivant jugement du 6 mai 2011 dont appel, le tribunal a essentiellement :
- rejeté les exceptions d'incompétence soulevées par la société Dr. Ing. H.C.F Porsche Aktiengesellschaft,
- rejeté la demande de la société PGO Automobiles, de la SELARL de Saint-Rapt & Bertholet, es qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la société PGO Automobiles et de Maître Marc André, es qualités de représentant des créanciers de la société PGO Automobiles, tendant au sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale faisant suite à la plainte avec constitution de partie civile déposée le 15 mai 2007,
- déclaré irrecevables les demandes de la société Dr. Ing. H.C.F Porsche Aktiengesellschaft, formées à l'encontre de la société PGO Automobiles en raison de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 1er juin 2005,
- débouté la société Dr. Ing. H.C.F Porsche Aktiengesellschaft, de ses demandes formées à l'encontre de la société Speedcab,
- débouté la société PGO Automobiles de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- condamné la société Dr. Ing. H.C.F Porsche Aktiengesellschaft, à payer à la société PGO Automobiles la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires.
Par ordonnance du 11 avril 2013 le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable l'appel de la société PGO automobiles et de ses mandataires à l'encontre du jugement du tribunal de commerce du 26 janvier 2007. La Cour, a, sur déféré, confirmé cette ordonnance le 20 septembre 2013. Selon arrêt du 4 décembre 2014 la Cour de Cassation, deuxième chambre civile, a rejeté le pourvoi formé contre l'arrêt du 20 septembre 2013.
En cause d'appel la société Dr. Ing. H.C.F Porsche Aktiengesellschaft, appelante, demande essentiellement dans ses dernières écritures du 6 mars 2015 de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société PGO Automobiles et ses mandataires judiciaires de leurs demandes reconventionnelles,
- le réformer pour le surplus et statuant à nouveau,
- dire et juger la société Dr. Ing. H.C.F Porsche Aktiengesellschaft, recevable et bien fondée en ses demandes sur les livres I et III du Code de la propriété intellectuelle,
- rejeter les demandes d'annulation de l'ordonnance du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 16 février 2006,
- rejeter les demandes d'annulation de l'ordonnance aux fins de saisie du 30 janvier 2006 et du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 16 février 2006,
- dire et juger que les sociétés PGO Automobiles et Speedcab ont commis des actes de contrefaçon de droits d'auteur,
- dire et juger que les sociétés PGO Automobiles et Speedcab se sont également rendues coupables d'agissements parasitaires et déloyaux,
- dire et juger que la société PGO Automobile, la SELARL de Saint-Rapt & Bertholet, es qualités de commissaire à l'exécution du plan, Maître Marc André es qualités de représentant des salariés, la société Speedcab et monsieur Boyer es qualités de liquidateur amiable ont commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme,
Subsidiairement, à défaut de condamnation au titre du droit d'auteur, qualités de commissaire à l'exécution du plan, Maître Marc André es qualités de représentant des salariés, la société Speedcab et monsieur Boyer es qualités de liquidateur amiable à réparer le préjudice subi par la société Porsche AG du chef de la concurrence déloyale,
- en tout état de cause,
- condamner solidairement la société PGO Automobiles et ses mandataires judiciaires, la société Speedcab et son liquidateur amiable à lui payer la somme de 500 000 euros au titre des actes de contrefaçon et subsidiairement pour concurrence déloyale et ou parasitaires,
- condamner solidairement la société PGO Automobile et ses mandataires judiciaires et la société Speedcab et son liquidateur amiable à lui verser la somme de 200 000 euros au titre de la concurrence déloyale et parasitaire,
- ordonner des mesures d'interdiction, confiscation de matériel, confiscation des véhicules contrefaisants, de destruction des moules permettant la construction des véhicules contrefaisants, sous astreinte concernant les mesures d'interdiction,
- ordonner la publication de la décision,
- condamner solidairement l'ensemble des intimés à lui payer la somme de 30 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
- condamner solidairement l'ensemble des intimés aux entiers dépens qui comprendront les frais de saisie contrefaçon avec droit de distraction au profit de son conseil.
La SA PGO Automobiles, de la SELARL de Saint-Rapt & Bertholet, es qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la société PGO Automobiles et de Maître Marc André, es qualités de représentant des créanciers de la société PGO Automobiles, intimés s'opposent aux prétentions de l'appelante, et pour l'essentiel demandent dans leurs dernières écritures du 18 mars 2015 de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la société Porsche irrecevable à agir en raison de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 1er juin 2005,
- à défaut confirmer par substitution de motifs le jugement en raison du défaut de qualité à agir de l'appelante,
- subsidiairement, déclarer nuls l'ordonnance du 30 janvier 2006 et le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 16 février 2006,
- subsidiairement, débouter la société appelante de toutes ses demandes,
- très subsidiairement, limiter les éventuelles condamnations aux seuls modèles objets de la saisie contrefaçon,
- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société PGO Automobiles de sa demande reconventionnelles et statuant à nouveau, condamner la société appelante à lui payer la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- en tout état de cause, condamner la société appelante à lui payer la somme de 50 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
- condamner la société appelante aux dépens avec droit de distraction au profit de son conseil. La société Speedcab et monsieur Gilles Boyer, es qualités de liquidateur amiable de la société Speedcab, intimés demandent dans leurs dernières écritures du 13 juin 2012 de :
- les mettre hors de cause,
- subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la société Porsche irrecevable à agir,
- condamner tout succombant aux dépens.
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée
Aux termes de l'article 480 du Code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche. Le principal s'entend de l'objet du litige tel qu'il est déterminé par l'article 4.
En application de l'article 1351 du Code civil l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité.
En l'espèce, la société PGO Automobiles soutient que la société Dr. Ing. H.C.F Porsche Aktiengesellschaft, est irrecevable en ses demandes de contrefaçon et de concurrence déloyale en raison de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 1er juin 2005.
Dans cette instance, effectivement le litige opposait la présente société Porsche en sa qualité de constructeur automobile qui se présentait comme titulaire des droits d'auteur sur les caractéristiques des modèles automobiles Porsche 356 et 356 Speedster et la société PGO automobiles en sa qualité de constructeur automobile prétendue contrefacteur de ces modèles.
Le présent litige concerne les deux mêmes parties et les deux mêmes modèles automobiles prétendument contrefaits outre le distributeur de la société prétendument contrefactrice. Les demandes de la société Porsche portaient dans l'instance antérieure sur des mesures d'interdiction de commercialisation des véhicules de la société PGO automobiles relatifs aux modèles 356 Speedster II, Speedster, P2, Cévennes 180 ou toutes autres dénominations.
Les présentes demandes portent sur les mêmes types de modèles automobiles de la société PGO. Or, par cet arrêt la cour d'appel de Paris a jugé de façon devenue définitive, entre ces deux parties, que la société Porsche n'était pas titulaire de droits d'auteur sur le modèle 356 Speedster revendiqué et qu'elle est irrecevable à agir relativement à ce modèle et il est donc indifférent que les objets argués de contrefaçon de ce modèle soient différents puisque la société Porsche invoque des droits identiques sur le même modèle automobile qui ne lui ont pas été reconnus.
Cependant, le tribunal de commerce de Paris par jugement du 27 janvier 2007 n'a pas reconnu l'autorité de la chose jugée attachée à cette décision, s'agissant de faits de contrefaçon invoqués, postérieurs à cette décision.
Aussi ce jugement qui a rejeté, à juste titre ou non, la fin de non-recevoir soulevée par la société PGO a, contrairement à ce que soutient cette dernière, de ce chef, autorité de la chose jugée.
La société PGO n'est pas fondée à soutenir que rejeter cette fin de non-recevoir la priverait d'interjeter appel du jugement du 27 janvier 2007 car le tribunal de commerce n'a jamais statué au fond, puisque, de façon pertinente, la société Porsche fait valoir qu'en raison de l'unicité de l'instance qui s'est poursuivie devant le tribunal de grande instance de Paris et comme rappelé dans les motifs de l'arrêt de la cour de Cassation en date du 4 décembre 2014, elle avait la faculté d'interjeter appel de ce jugement de 2007 par voie incidente dans les conditions de l'article 550 du Code de procédure civile.
Il y a lieu en conséquence de réformer le jugement déféré qui ne pouvait statuer une deuxième fois sur ce point, en ce qu'il a déclaré que l'exception de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 5 juin 2005 recevable.
Il convient de déclarer en conséquence la société Porsche AG recevable à agir.
Sur la qualité de titulaire de droit d'auteur de la société Porsche sur le modèle revendiqué
La société Porsche AG soutient être titulaire de droits d'auteur sur le modèle automobile dénommé Porsche 356 Speeder créé en 1954, ce que conteste la société PGO soutenant que ce modèle aurait été créé par monsieur Erwin Komenda, designer de renom.
Sur la loi applicable
Aux termes de l'article 5.2 de la Convention de Berne du 9 septembre 1886, pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, l'étendue de la protection, ainsi que les moyens de droit garantis à l'auteur pour sauvegarder ses droits, se règlent exclusivement par la législation du pays où la protection est réclamée.
Selon ce texte, il est constant que la jouissance et l'exercice des droits d'auteur, qui ne sont subordonnés à aucune formalité, sont indépendants de l'existence de la protection dans le pays d'origine de l'œuvre. En l'espèce s'agissant de la protection en France droits d'auteurs à l'égard d'une société française devant un tribunal français, la loi française doit s'appliquer, ce que ne contestent pas les intimés.
Sur la titularité des droits d'auteur
L'article L. 111-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose que l'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous, comportant des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial.
Le droit de l'article susmentionné est conféré selon l'article L. 112-1 du même Code, à l'auteur de toute œuvre de l'esprit, quels qu'en soit le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination.
Aux termes de l'article L. 112-2 de ce Code sont considérées comme œuvre de l'esprit au sens du présent Code : 10° les œuvres des arts appliqués.
Il s'en déduit le principe de la protection d'une œuvre sans formalité et du seul fait de la création d'une forme originale. L'article L. 113-1 du même Code indique que la qualité d'auteur est présumée appartenir à celui ou ceux sous le nom de qui l'œuvre est divulguée.
En l'absence de toute revendication de la part de la ou des personnes physiques ayant réalisé l'œuvre dont s'agit les actes de possession de la société qui l'exploite sous son nom font présumer, que cette personne est titulaire sur l'œuvre, quelle que soit sa qualification du droit de propriété incorporelle de l'œuvre.
Pour bénéficier de cette présomption simple, il appartient à la personne morale d'identifier précisément l'œuvre qu'elle revendique et de justifier de la date à laquelle elle a commencé à en assurer la commercialisation ; qu'il lui incombe également d'établir que les caractéristiques de l'œuvre qu'elle revendique sont identiques à celles dont elle rapporte la preuve de la commercialisation sous son nom.
Enfin, si les actes d'exploitation propres à justifier l'application de cette présomption s'avèrent équivoques, elle doit préciser les conditions dans lesquelles elle est investie des droits patrimoniaux de l'auteur.
Par ailleurs, est dite collective l'œuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale, qui l'édite, la publie, et la divulgue sous sa direction et son nom, et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé.
Aux termes de l'article L. 113-5 du même Code, l'œuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle est-elle divulguée. Cette personne est investie des droits d'auteur.
La société Porsche fait valoir que le véhicule Porsche 356 Speedster a été divulgué en Allemagne sous son nom et qu'à titre surabondant il s'agit d'une œuvre collective au sens de l'article L. 113-2 alinéa 3 du Code de la propriété intellectuelle lui permettant de se prévaloir des prérogatives patrimoniales de l'auteur.
Elle fait valoir à cet effet que le designer monsieur Erwin Komenda était le responsable de l'unité de création au sein de l'entreprise Porsche et non le créateur du modèle Porsche 356 Speedster et que monsieur Ferry Porsche, fils du créateur de l'entreprise a également pris une part active à la création de ce modèle. Elle précise que dans cette équipe y participaient plusieurs personnes dont monsieur Karl Rabe, messieurs Heinrich Klie, Franz Reimspiss, Ernst Fuhrmann et Leopold Schmidt. Elle ajoute que le modèle dont s'agit a été créé dans le cadre d'un travail collectif associant de nombreuses personnes dont le pouvoir d'initiative et de contrôle du processus de création jusqu'au produit finalisé appartenait à la société Porsche ; que les plans du véhicule comprenaient la cartouche Porsche montrant le rôle de direction et de contrôle de l'entreprise.
Elle indique que le contrat de travail de monsieur Komenda de 1931 organisait le transfert au profit de l'entreprise de la propriété de ses travaux comme suit "monsieur Komenda s'engage à mettre toutes ses capacités de travail à disposition de l'entreprise et accepte toutes les solutions élaborées pendant la durée du contrat dans le domaine de la motorisation et de la mécanique automobile, qu'elle soit susceptible d'être protégée ou non, sont la propriété exclusive de l'entreprise".
Elle poursuit en indiquant que ce véhicule a été divulgué au nom de la société Porsche KG et explicite les modifications de structures des sociétés qui sont intervenues depuis. Elle soutient que le véhicule automobile 356 créé par la société de droit autrichien Porsche Konstructionen Gesmbh est différent du modèle de véhicule 356 Speedster créé par la société Porsche KG en son sein.
La société PGO Automobiles et la Selarl De Saint-Rapt & Bertholet et Maître Marcs André, es qualités exposent de leur côte que le véhicule 356 Speedster était une réalisation du seul designer de Porsche KG Erwin Komenda qui s'était lui-même inspiré de modèles préexistants. Ils indiquent que celui-ci qui a rejoint la société Porsche dès sa création en 1931 à la demande de son fondateur Ferdinand Porsche et y a travaillé quasiment jusqu'à son décès en 1996.
Ils précisent que le contrat de travail de monsieur Komenda, non signé par celui-ci, qui mentionne "les solutions", ne vise que les inventions brevetables ou non et que la cession ne concerne pas le domaine de la carrosserie mais est limitée aux domaines de la motorisation et de la mécanique. Ils ajoutent que monsieur Erwin Komenda était l'auteur de la gamme "356" et que le modèle 356 Speedster n'est en réalité qu'un simple dérivé du modèle 356 réalisé spécialement pour le marché américain à la demande d'un importateur et que celui-ci a dessiné la Coccinelle de Volkswagen dont de nombreuses caractéristiques ont été reprises pour les voitures de la gamme 356 de la société Porsche.
Ils indiquent que le créateur du modèle litigieux étant parfaitement identifiable et n'ayant jamais cédé ses droits à la société qui ne démontre pas que d'autres personnes auraient apporté une contribution originale à la réalisation de celui-ci est irrecevable à prétendre détenir des droits d'auteur. Ils poursuivent en indiquant que l'œuvre litigieuse est directement dérivée de la Porsche 356 créée en 1948 en Autriche dans la ville de Gmünd au sein d'une société de droit autrichien et la société appelante ne justifie pas du transfert des droits d'auteur de la part de cette dernière société sur l'œuvre première.
Ils contestent le fait que lors des modifications de structure de la société Porsche en 1973 les droits d'auteur afférents au modèle 356 Speedster aient été transféré à la société Porsche AG car le bilan annexé à l'acte notarié portant transfert ne fait état parmi les éléments de l'actif transféré que des "cessions, droits de propriété industrielle et droits similaires ainsi que licence de ces droits" alors que les statuts de la société suite à la transformation ne visent que la valorisation des droits de propriétés industrielles et que la transmission des droits d'auteur intervenus ultérieurement en 2007 et 2009 postérieurement aux procédures introduites à l'encontre de la société PGO ne sauraient corriger cette absence initiale de transfert Ceci exposé, il convient de relever que l'auteur prétendu du véhicule automobile dont s'agit n'a jamais revendiqué de droits d'auteur sur celui-ci. D'ailleurs tous les travaux réalisés par monsieur Komenda étaient, en vertu de son contrat de travail, dont la réalité ne peut être contestée en regard des nombreuses années de présence au sein de la société, placés sous le contrôle de l'entreprise qui en était propriétaire exclusive. La loi allemande 65 organise d'ailleurs le transfert des droits de l'auteur salarié à son employeur par le contrat de travail.
Il est justifié que la réalisation de l'automobile Porsche 356 Speedster est le fruit dans le cadre d'un contexte comme le soulignent les intimés, très artisanal, de la contribution de plusieurs personnes formant une équipe au sein de l'entreprise Porsche, de cette automobile, monsieur Komenda responsable du département carrosserie, monsieur Leopold Schmidt, monsieur Karl Rabe, monsieur Frantz Reimspiss et Ernst Fuhrmann même si le rôle dans le dessin de la carrosserie de monsieur Komenda apparaît prépondérant, la réalisation de cette automobile est le fruit de l'apport de chacun de ces intervenants y compris le fils du créateur de la société.
D'ailleurs les plans de ce véhicule comportaient le cartouche Porsche manifestant la réalité du contrôle de l'entreprise sur cette réalisation.
Les intimés établissent que pour la première Porsche la partie extérieure a été réalisée par messieurs Max Schlosser, Friedrich Weber et Seebacher ce qui confirme le travail collectif usuel dans la réalisation, à cette époque, des automobiles.
Il s'agit en conséquence d'une œuvre collective dans la mesure où la contribution personnelle des différents intervenants dans l'élaboration de ce véhicule automobile, dont celle de monsieur Komenda, se fond dans un ensemble en vue duquel il a été conçu en tant que véhicule finalisé sous la mise au point et le contrôle de l'entreprise sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun des intervenants un droit distinct sur ce véhicule.
De plus, ce véhicule a été divulgué, dès l'origine en 1954, sous nom de l'entreprise Porsche qui était à cette époque la société en commandite Porsche KG et il est sans incidence sur ce modèle qu'un autre modèle ait été créé précédemment en Autriche et dont le transfert de droit est contesté, dès lors que ce modèle autrichien n'est pas opposé dans la présente procédure et qu'il n'est pas contesté que le modèle litigieux a été divulgué en Allemagne par la société Porsche KG.
Cependant, la commercialisation de ce modèle a cessé en 1958 et la société Porsche KG a disparu, il appartient en conséquence à la société appelante d'établir qu'elle est actuellement titulaire des droits patrimoniaux sur ce modèle de véhicule.
Il ressort des justificatifs communiqués portant sur l'ensemble des actes portant transformation, que la société en commandite Porsche KG a été transformée en 1973 en société anonyme Porsche AG et qu'à cette occasion l'intégralité des actifs de la société Porsche KG y compris l'ensemble des droits de propriété industrielle (droits de marque, de brevets ou des dessins et modèles) et droits assimilés, ont été transférés à la société Porsche AG nouvellement constituée alors que la précédente a disparu.
Les statuts de la société nouvellement créé qui prévoit la valorisation des droits de protection industrielle n'exclut pas, s'agissant d'une entreprise de création industrielle, les droits d'auteur attachés à ces réalisations industrielles qui ont été transférés à celles-ci comme droits assimilés, l'exclusion de ceux-ci allant dans le sens contraire de l'objet du transfert.
L'acte notarié portant transfert comprenant le procès-verbal du 25 novembre 1972 et les statuts de la nouvelle société mentionnent que les associés de la société Porsche KG ont apporté l'actif de celle-ci par voie de succession à titre universel à la société Porsche AG qui a poursuivi les activités commerciales de la précédente comprenant ainsi les droits de propriété intellectuelle. Par la suite, plusieurs opérations de restructuration sont intervenues.
Le 27 avril 2007 une opération de scission au sein de la société Porsche AG matérialisée par un acte notarié du 30 avril 2007 a été réalisée au bénéfice d'une société Porsche Vermöverwaltung AG devenue sa filiale. Dans le cadre de cette opération, la société Porsche AG a apporté l'intégralité de son activité commerciale et l'intégralité de l'actif et du passif associés à cette activité commerciale à sa filiale à 100% à la société Vermöverwalt AGH, inscrit au Registre du Tribunal de commence de Stuttgart le 13 novembre 2007.
Il a été également convenu dans l'acte du 27 avril 2007 qu'à l'issue de cette opération :
* que la société jusqu'alors dénommée Porsche AG conservant qu'une activité de holding, prendrait pour dénomination Porsche Automobil Holding AG et aurait pour vocation pour cette activité à transformer sa forme sociale en société européenne sous la raison sociale Porsche Automobil Holding SE,
* que la société jusqu'alors dénommée Porsche Vermöverwalt AGH prendrait la raison sociale AG et recueillerait l'actif commercial initiale de sa société mère et la totalité des actifs associés à l'activité commerciale de celle-ci,
Ces changements de dénominations ayant pris effet le 13 novembre 2007 date d'inscription au Registre du commerce.
L'ensemble des droits de propriété intellectuelle ont été transférés à l'actuelle Porsche AG comme mentionné dans l'acte du 27 avril en son article 6.1.1.
Par acte du 25 novembre 2009 la société Porsche AG a fusionné avec la société Porsche Zwischenholding Gmbh ce qui a entraîné le transfert universel du patrimoine de la société absorbée Porsche AG au bénéfice de la société Porsche Zwischenholding Gmbh. Une scission dans cette société simultanément intervenue au profit de la société Porsche Fünfte Vermögensverwaltung AG qui a notamment recueilli tous les droits de propriété intellectuelle appartenant à la société Porsche Zwisholding Gmbh et cette société définitivement dénommée Dr. Ing. H. C. F. Porsche Aktiengesellschaft (Porsche AG) est inscrite au registre du commerce sous le numéro HRB 730623 présente à l'instance.
Cette dernière société est donc recevable à se fonder sur les droits d'auteurs qui lui ont été transmis. Il n'est pas établi par la société PGO que le véhicule automobile 356 créé par la société de droit autrichien Porsche Konstructionen Gesmbh est identique au modèle de véhicule 356 Speedster créé par la société Porsche KG de sorte qu'il n'y a pas lieu de rechercher s'il existe un transfert de droit de propriété intellectuelle sur ce modèle 356.
Sur le caractère original de l'œuvre
La société Porsche AG fait valoir que l'originalité du véhicule 356 Speedster se caractérise par les éléments suivants :
- un cabriolet aux formes arrondies tant au niveau de son avant et de son arrière qu'au niveau de la partie supérieure de ses deux portières et de ses ailes,
- un capot long à l'avant, plongeant et arrondi avec une poignée métallique au centre se terminant par l'incrustation du logo Porsche en forme d'écusson en couleur,
- des phares avant gros et ronds légèrement ovales sous lesquels apparaissent deux petits phares ronds,
- un pare-brise incliné, de hauteur relativement faible, avec des extrémités arrondies et présentant une ligne de séparation verticale en son milieu,
- l'arrière du véhicule présente quatre petits phares ronds, implantés par deux et côte à côte à l'extrémité aile,
- un petit coffre à l'arrière donnant accès à la mécanique n'occupant qu'une partie de l'arrière et présentant une grille métallique rectangulaire centrale implantée dans le sens de la hauteur,
- des pare-chocs avant et arrières arrondis faible largeur placés très bas, en prééminence et de même couleur que la carrosserie.
Elle fait également valoir que toutes les anciens modèles communiqués par la société PGO Coccinelle, Dannenhauer & Stauss, Denzel ne sont pas de nature à détruire l'originalité du modèle 356 Speedster.
Les intimés soutiennent que le modèle 356 Speedster ne remplit pas le critère d'originalité car il n'existe aucune différence majeure entre ces caractéristiques revendiquées et celles des modèles antérieures de la gamme 356 de la société Porsche puisque dans ses précédents modèles on retrouve la présence de formes arrondies tant à l'avant qu'à l'arrière, qu'au niveau de la partie supérieure des portières et des elles, un capot long et plongeant avec l'incrustation du logo Porsche, un pare-brise incliné de faible hauteur, la présence de phares avants ovales et de petits phares arrières, la présence d'un coffre à l'arrière comportant une grille métallique rectangulaire centrale dans le sens de la hauteur et donnant accès au moteur et de plus ces caractéristiques empruntent à un fond commun puisqu'elles se retrouvent dans de nombreux modèles d'autres constructeurs automobiles commercialisés antérieurement ou concomitamment à la divulgation de la 356 Speedster.
Ceci rappelé, il appartient à la société Porsche AG de spécifier en quoi le descriptif qu'elle fait du véhicule manifeste l'originalité de sa création.
Or, la société se contente de décrire les composants du véhicule sans s'expliquer sur ce dernier point alors que l'examen comparatif des véhicules 356 construits par Porsche comportent quasiment les mêmes caractéristiques et que les véhicules commercialisés antérieurement et à la même époque par d'autres constructeurs comportent les mêmes éléments avec la même forme BMW 328 Touting Spider de 1941, les Coccinelles, Drews de 1950, Simca 9 de 1951, Dannenhauer & Stauss de 1953, Hebmuller de 1947, Ferrari 212 de 1951, Lancia Aprilia faisant apparaître que les formes arrondies et les capots longs plongeants sont caractéristiques de cette époque et que de nombreux véhicules comportent des pare-chocs visibles de même couleur que la carrosserie et d'autres des phares ovales à l'avant ou de petits phares ronds implantés par deux côte à côte à l'extrémité de chaque aile et que d'autres n'ont qu'un caractère fonctionnel, poignée du coffre, coffre avec grille métallique ajourée de sorte que la société appelante, à qui la preuve incombe, n'établit pas le parti pris esthétique manifestant l'empreinte du créateur et ainsi du caractère original qu'elle invoque.
D'ailleurs, sur son site internet la société Porsche indique "à la fin des années 50, la 356...en dépit de toutes ses cures de"fitness" ne peut pas renier sa parenté avec la Coccinelle de Volkswagen". La société Porsche est en conséquence infondée à se prévaloir du bénéfice de la protection du droit d'auteur sur ce modèle.
Sur l'action en contrefaçon
En l'absence de tout droit de droit d'auteur à opposer la société Porsche AG est infondée en son action en contrefaçon de droits d'auteur et doit être déboutée de ses demandes à ce titre et de ses demandes subséquentes.
Sur la validité de la saisie-contrefaçon du 16 février 2006
Le procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé par Maître Mazari, huissier de justice le 16 février 2006 en vertu de l'autorisation présidentielle du 30 janvier 2006 a été pratiquée en application de l'article L. 521-1 du Code de la propriété intellectuelle en sa rédaction de l'époque qui prévoit en son article 4 "A défaut par le requérant de s'être pourvu soit par la voie civile, soit par la voie correctionnelle dans le délai de quinzaine de la description ou de la saisie, est nulle de plein droit sans préjudice de dommages et intérêts.
Or, en l'espèce l'acte introductif d'instance est intervenu le 13 mars 2006 alors que la saisie contrefaçon pratiquée le 16 février 2006, soit postérieurement au délai de quinzaine prévu à peine de nullité.
Par ailleurs, les intimés reprochent à la société appelante d'avoir caché l'existence au juge des requêtes les termes de l'arrêt du 1er juin 2005 de la cour d'appel de Paris lui déniant tout droit d'auteur sur le modèle de véhicule objet de la demande de saisie contrefaçon et d'indiquer qu'elle avait découvert l'existence d'une société PGO Automobiles alors que les parties se trouvaient en procès quelques mois auparavant et ce depuis l'année 2003 relativement au même modèle de véhicule.
La société Porsche AG soulève l'irrecevabilité de ces exceptions de nullité qui n'ont pas été soulevées conformément aux dispositions de l'article 74 du Code de procédure civile avant toute défense au fond ou fins de non-recevoir ou simultanément mais après une demande de sursis à statuer, de confirmation du jugement déféré qui avait accueilli une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée et de contestation au fond sur la titularité des droits d'auteur de la société Porsche AG.
Subsidiairement elle fait valoir que c'est à la suite d'une erreur de plume que l'huissier a mentionné l'article L. 521-1 du CPI et que c'est de bonne foi qu'elle n'a pas fait état du précédent contentieux car dans son esprit ce précédent ne pouvait avoir pour effet de la priver définitivement de tout droit d'auteur sur le modèle Porsche 356 Speedster.
Effectivement, cette exception de nullité de la requête, de l'ordonnance et du procès-verbal subséquents n'a été soulevée que tardivement après une demande de sursis à statuer présentée dans des conclusions antérieures, une demande de confirmation du jugement qui a accueilli une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée et une contestation au fond sur la titularité des droits d'auteur de la société Porsche de sorte que cette exception est irrecevable
Sur l'action en concurrence déloyale
C'est à bon droit que le tribunal a indiqué que la concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce ce qui implique qu'un signe ou un produit qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle, puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce.
L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité, la notoriété de la prestation copiée.
Ainsi le principe est la liberté du commerce ce qui implique qu'un produit qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle peut être librement reproduit, sous réserve de l'absence de faute préjudiciable à un exercice paisible et loyal de la concurrence. Pour que la vente d'un produit identique constitue un acte de concurrence déloyale il convient de démonter que cette reproduction est fautive.
Le parasitisme économique est caractérisé par la circonstance selon laquelle une personne, à titre lucratif et de façon injustifiée, s'inspire ou copie la valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements.
La société Porsche AG qui se fonde sur le procès-verbal de saisie-contrefaçon et sur le constat établi par l'Agence pour la Protection des Programmes fait valoir que la société PGO a reproduit dans ses modèles commercialisés en 2006 aussi fidèlement que possible le modèle automobile 356 Speedster à moindre coût, qu'elle est un "répliqueur" assumé.
Elle ajoute que l'impression d'ensemble est identique sous réserves de quelques détails sans importance.
Il ressort de ces procès-verbaux et des photographies communiquées aux débats que le modèle Speedster II est un cabriolet aux formes arrondies comportant des phares presque ovales, des pare-chocs bombés et un pare-brise de faible hauteur. La reprise des phares ovales, pare-choc bombé, pare-brise de faible hauteur se retrouvent sur des véhicules construits à la même époque et relevant d'un patrimoine historique commun et le recours à une forme basse aérodynamique et la présence d'un petit pare-brise répondent à la destination d'une voiture de sport. De plus ce modèle a une physionomie propre résultant des nombreuses différences avec le véhicule Porsche : l'emplacement des roues arrières n'est pas identique, le véhicule est plus court et possède un empattement supérieur, le phare est complètement intégré à l'aile et non débordant, la ligne de caisse est plus basse au niveau du pare-brise, le capot arrière est plus haut, les lignes de carrosserie sont plus compactes, un pare-choc plus sobre intégré à la carrosserie, un arrière court et trapu, la présence de sièges baquets avec appui-tête proéminent, planche de bords avec de nombreux instruments....
Le modèle Cévennes est encore plus éloigné du modèle Porsche que le précédent car il est plus court en longueur, possède un empattement supérieur, des voies avant et arrière supérieures, les lignes de carrosserie sont plus compactes, les rétroviseurs sont implantés au niveau du pare-brise et non au niveau des ailes, les bas de caisse sont troués d'écope, absence de pare-chocs mais des boucliers, absence de poignée sur le capot, absence de grille de protection l'arrière est trapu formant un ovale sur la partie supérieure, présence d'une double grille ajourée, présence de six feux arrières dont quatre intégrés gros implantés deux par deux, double sortie d'échappement centrale intégrée à la carrosserie...
L'examen des modèles de véhicule Speedster II et Cévennes de la société PGO automobiles avec le modèle 356 Speedster de la société Porsche fait apparaître que si les premiers s'inscrivent dans la fabrication et la commercialisation des véhicules des années 1940 et 1950, ce que les intimés revendiquent, ils ne produisent toutefois pas, en l'absence de la même combinaison des caractéristiques revendiquées par la société Porsche, une impression d'ensemble de nature à conduire l'acquéreur de ces véhicules qui ne sont pas de consommation courante mais s'adressent à un consommateur avisé, à les confondre avec le véhicule de la société Porsche.
Par ailleurs, la société Porsche AG ne démontre pas avoir commercialisé le véhicule 356 Speedster sur le territoire français.
La société Porsche AG soutient également que la société PGO Automobiles s'est rendue coupable d'actes de parasitisme en adoptant la dénomination Speedster reproduite en lettres en relief chromées et reprenant le graphisme retenu par la société Porsche en relief et métal coupé apposées sur la partie supérieure de son modèle de voiture Speedster II.
Toutefois ce terme "Speedster" signifie en langue anglaise "bolide" et revêt un caractère descriptif qui ne peut être approprié par un seul opérateur automobile. Cette dénomination ayant été employée par certains constructeurs antérieurement à la société Porsche comme pour l'Auburne Speedster produite dans les années 30 et par des constructeurs actuels tels que Opel qui utilise ce terme. Concernant le graphisme de cette dénomination apposée sur les véhicules, celui de la société PGO est exclusivement en lettres majuscules ouvertes, reliées entre elles alors que celui de la société Porsche est en petites lettres sans empattement dans une police différente.
L'apposition de cette dénomination ne peut dans ces circonstances revêtir pas un caractère de parasitisme . Il ne peut être reproché à la société PGO la présence au sein de la société Speedcab de blousons sur lesquels sont apposés la marque et l'écusson Porsche dès lors que la participation de cette première société à ces actes n'est pas établie.
Concernant la société Speedcab la présence dans ses locaux de trois blousons acquis à raison de dix sur internet au prix de 501 euros portant la marque Porsche et l'écusson Porsche constitue un acte de parasitisme à l'égard de la société Porsche en s'appropriant indûment sa notoriété. Il convient en réparation du préjudice subi à ce titre de lui allouer la somme de 4 000 euros et, eu égard aux circonstances de l'espèce et de l'ancienneté des faits, de rejeter les demandes d'interdiction, confiscation, destruction et de publication.
Sur la demande reconventionnelle
La société PGO Automobile, la SELARL de Saint-Rapt & Bertholet, es qualités de commissaire à l'exécution du plan, Maître Marc André es qualités de représentant des créanciers, demandent que la société Porsche AG soit condamnée à leur payer la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts au motif que la présente procédure a été engagée de façon malveillante dans le but de nuire à la société PGO.
Cependant la présente procédure ne revêtant pas en regard des circonstances de l'espèce, de caractère manifestement abusif, la société Porsche ayant été précédemment déboutée sur un défaut de preuve sur la titularité de ses droits reconnus par le présent arrêt, mais ne constituant que l'exercice normal d'un droit, la demande en paiement de dommages et intérêts, formée à ce titre, non fondée sera rejetée.
Sur les autres demandes
Il y a lieu de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile et d'allouer à la société PGO en la présence de la SELARL de Saint-Rapt & Bertholet es qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la société PGO automobiles et de Maître Marc André, es qualités de représentant des créanciers de la société PGO Automobiles la somme de 40.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et de rejeter la demande formée à ce titre par la société appelante.
Les dépens resteront à la charge de la société appelante qui succombe principalement et qui seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Par ces motifs, La Cour : Réforme le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 6 mai 2011, sauf en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts formée par la société PGO Automobiles, Rejette la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 1er juin 2005, formée par les sociétés intimées, Dit que la société Dr. Ing. H.C.F Porsche aktiengesellschaft est recevable à agir en qualité de titulaire des droits d'auteur sur le modèle de véhicule 356 Speedster, Déclare irrecevable l'exception de nullité de la requête en saisie-contrefaçon et des actes subséquents, Rejette les demandes formées aux titres de la contrefaçon, de la concurrence déloyale et parasitaire à l'encontre de la société PGO Automobiles, de la société Speedcab et de monsieur Gilles Boyer, es qualités de liquidateur amiable, Dit que la société Speedcab a commis des actes de parasitisme envers la société Dr. Ing. H.C. F. Porsche aktiengesellschaft, En conséquence, Condamne la société Speedcab, en la personne de son liquidateur, à payer à la société Dr. Ing. H.C.F Porsche aktiengesellschaft la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette le surplus des demandes de la société appelante à l'égard de la société Speedcab, Rejette la demande reconventionnelle en paiement pour procédure abusive, Condamne la société appelante à payer à la société PGO Automobiles, en présence de la SELARL DE Saint-Rapt & Bertholet, es qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation, Maître Marc André, es qualités de représentant des créanciers, la somme de 40 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette la demande formée sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile par la société appelante, Condamne la société appelante aux entiers dépens qui seront recouvrés par les avocats de la cause dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.