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Décisions

CA Besançon, 1re ch. civ. et com., 2 juin 2015, n° 13-01288

BESANÇON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

SMBI (SARL)

Défendeur :

Walker

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mazarin

Conseillers :

Mmes Lamboley-Cuney, Ecochard

Avocats :

Mes Graciano, Wiesike, Tournier

TGI Besançon, du 7 mai 2013

7 mai 2013

Faits et prétentions des parties

La société SMBI, grossiste de fournitures et équipements industriels, a conclu avec M. Fabien Walker un contrat de mandat d'agent commercial selon acte sous seing privé en date du 22 novembre 1999 avec, notamment, pour mission la vente de ses produits sur le secteur Franche-Comté (Doubs, Jura, Haute-Saône, Territoire de Belfort).

La société SMBI a par courrier en date du 26 avril 2010 résilié ce contrat sans préavis en reprochant à M. Fabien Walker des manquements graves que ce dernier a contestés par lettre recommandée en date du 10 mai 2010.

Par acte d'huissier en date du 16 décembre 2011 M. Fabien Walker a saisi le Tribunal de grande instance de Besançon en sollicitant le paiement par la société SMBI de commissions, d'indemnités de préavis et de cessation de contrat.

Selon jugement en date du 7 mai 2013 ce tribunal a statué comme suit :

Condamne la société SMBI à payer à M. Fabien Walker les sommes suivantes :

- 3 928,88 euro à titre de rappel de commissions impayées,

- 16 643,84 euro à titre d'indemnité de préavis,

- 133 150,72 euro à titre d'indemnité de fin de mandat,

Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision à concurrence de la moitié des condamnations prononcées,

Condamne la société SMBI à payer à M. Fabien Walker la somme de 2 500 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

La condamne aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP Boucher Stuckle conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

La société SMBI a, par courrier électronique adressé au greffe de la cour le 24 juin 2013, régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Dans ses conclusions déposées le 6 août 2014, la société SMBI demande à la cour de :

- infirmer le jugement du Tribunal de grande instance de Besançon en date du 7 mai 2013,

- juger que la résiliation du contrat d'agent commercial de Monsieur Fabien Walker est justifiée par les fautes graves commises par celui-ci créant un préjudice certain à la SARL SMBI qu'il ne cesse au demeurant de dénigrer,

- juger que Monsieur Fabien Walker a été réglé de l'ensemble des commissions qui lui étaient dues, eu égard à l'article 6 de son contrat d'agent commercial, le périmètre de son droit à commission étant parfaitement lisible,

En conséquence,

- débouter Monsieur Fabien Walker de l'ensemble de ses demandes,

- le condamner à lui payer la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Au soutien de la rupture des relations contractuelles la société SMBI invoque trois types de griefs, soit tout d'abord des manquements graves caractérisés par :

- la non prise en compte des consignes : elle réfute les diverses explications produites par M. Walker qui a n'a pas respecté le règlement intérieur en passant directement des commandes auprès des fournisseurs. Elle souligne que, contrairement à ce qui a été retenu par les premiers juges qui ont considéré que ces agissements ne portaient pas atteinte à la finalité du mandat, l'une des obligations principales du mandataire est la loyauté,

- le refus d'apporter les informations nécessaires au bon fonctionnement du réseau commercial de la société : elle relève que ces griefs ne sont pas contestés par M. Walker et que, contrairement à ce qui a été retenu par les premiers juges, le refus de rendre le moindre compte au mandant porte atteinte à la finalité du mandat,

- le désintérêt pour l'entreprise SMBI, notamment pour l'agence de Pontarlier,

- un comportement portant atteinte à l'image de la société SMBI, tel qu'il ressort des diverses attestations produites, qui démontrent la discourtoisie de l'intéressé à l'égard du personnel de la société mais aussi à l'égard des clients.

La société SMBI se prévaut par ailleurs du grief tiré de la baisse de résultat et du taux de marge de l'agent commercial et souligne, notamment, que M. Walker n'a jamais respecté le taux de marge minimum de 35 % du chiffre d'affaires en deçà duquel la bonne santé de l'entreprise est compromise, et qu'en dix années M. Walker ne peut présenter qu'une quinzaine d'ouvertures de comptes clients, dont la majorité représentait des clients préexistants dans un périmètre géographique restreint.

Enfin la société SMBI se prévaut du comportement déloyal de Monsieur Walker, et indique que l'intéressé a, entre 2008 et 2010, accentué la vente directe en se comportant comme un commerçant au détriment de la société, et que cette déloyauté rend impossible le maintien du lien contractuel et créé un préjudice certain résultant de la perte de clients et de résultats.

La société SMBI s'oppose aux prétentions de M. Walker au titre de commissions, et se rapporte aux termes du contrat d'agent commercial en vertu duquel l'intéressé n'a de droit à commission que pour les affaires traitées par lui, et non pour toutes les ventes passées directement auprès des salariés de la société.

Elle conteste les montants réclamés par M. Walker au titre de l'indemnité de clientèle et de préavis, en faisant valoir que la moyenne de rémunération retenue par les premiers juges inclut des commissions non dues.

Dans ses conclusions n° 3 déposées le 29 août 2014 M. Fabien Walker demande à la cour de confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Besançon le 7 mai 2013, de condamner la société SMBI à lui verser la somme de 4 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Boucher-Stuckle.

M. Fabien Walker soutient qu'au fil des années la société SMBI a embauché des salariés commerciaux, et qu'elle s'est donc séparée de l'ensemble des agents commerciaux ; il mentionne que le dirigeant M. Jouffroy a, dès la fin de l'année 2007, clairement évoqué sa volonté de se séparer de lui.

Il conteste les manquements retenus contre lui en faisant notamment valoir que :

- les directives et consignes sont incompatibles avec son statut, et le contrat d'agent commercial ne contient aucune obligation de quotas ni actions ciblées,

- les accusations de vente en son nom telles que formulées sont contestées : M. Walker fait notamment valoir qu'il a toujours agi en parfaite transparence, notamment à l'égard du client Geniferson,

- la modification des devis de réparation du technicien SAV ne concerne que deux cas uniques,

- le refus de faire remonter des informations est contesté par M. Walker, de même que le désintérêt total pour la société et le comportement prétendument agressif,

- le contrat d'agent commercial ne contient aucune obligation de résultat et aucun objectif chiffré : aucune obligation de marge minimale ne lui a été imposée au fil des années, et la légère baisse d'activité en 2009, qu'il explique notamment par l'adhésion de la société à un groupe d'achat, ne caractérise nullement une carence volontaire,

- le comportement déloyal en général et les ventes directes sont des griefs qui n'ont jamais été évoqués avant la procédure d'appel, et qui ne sont pas fondés.

En ce qui concerne l'indemnité de fin de contrat M. Walker prétend à une indemnité égale à deux fois la moyenne annuelle des trois dernières années, et un préavis d'une durée minimale de trois mois.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions susvisées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 septembre 2014.

Le 1er septembre 2014 la société SMBI a déposé des conclusions de procédure en demandant à la cour de juger irrecevables les conclusions notifiées au nom de Monsieur Walker le vendredi 29 août 2014, veille de clôture.

Monsieur Walker a transmis des conclusions de procédure en réponse le 24 septembre 2014, sollicitant à titre principal le débouté de la SARL SMBI de ses demandes, à titre subsidiaire si par impossible les conclusions notifiées au nom de M. Walker étaient déclarées irrecevables, de déclarer irrecevables comme ne respectant pas le principe du contradictoire et le principe de loyauté des débats, les conclusions notifiées le 6 août 2014 dans l'intérêt de la SARL SMBI.

Motifs de la décision

* Sur la procédure

Aux termes de l'article 15 du Code de procédure civile "les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense".

L'article 16 du même Code précise par ailleurs que "le juge doit en toutes circonstances, faire observer le principe de la contradiction" ; qu'il ne peut notamment "retenir dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement".

La cour rappelle que suite à la requête de la société appelante en date du 25 juin 2014, quelques jours avant l'ordonnance de clôture fixée au 1er juillet 2014, un report de clôture a été ordonné au 1er septembre 2014 afin de permettre à la société SMBI d'être destinataire du détail de la pièce adverse n° 51.

La cour relève que la société SMBI a déposé des conclusions le 6 août 2014 contenant de nouveaux griefs avec communication de nouvelles pièces nécessitant une réponse de son adversaire, et auxquelles la partie intimée a donné suite à brefs délais, de surcroît en période de congés d'été.

La cour retient que la société SMBI est donc malvenue à soulever la tardiveté des conclusions de l'intimé, que le principe du contradictoire a été respecté et qu'il n'y a pas lieu d'écarter les conclusions de M. Fabien Walker. La demande de la société SMBI sera donc rejetée.

* Sur le fond

Il est constant que la société SMBI, petite structure créée par M. Richard Jouffroy d'une part, et M. Fabien Walker qui était alors employé par l'un de ses concurrents d'autre part, ont le 22 novembre 1999 signé un contrat d'agent commercial qui a pris effet à compter du 3 janvier 2000 pour une durée indéterminée avec pour mission de "prospecter et vendre au nom et pour le compte de SMBI les produits distribués par celle-ci". Ce contrat se réfère expressément aux dispositions du décret du 23 décembre 1958 relatives au statut professionnel des agents commerciaux.

La société SMBI a, par une lettre recommandée en date du 26 avril 2010, mis un terme immédiat aux relations contractuelles en énonçant plusieurs griefs et retenant que "la répétition de manquements graves à vos obligations contractuelles, constitue une atteinte intolérable à la finalité commune du contrat qui nous lie".

Au regard des contestations émises par la société SMBI à hauteur d'appel concernant tant l'octroi par les premiers juges que le chiffrage des indemnités de fin de contrat, et des rappels de commissions qui ont été inclus dans la rémunération de référence, la cour s'attachera en premier lieu à examiner les prétentions de M. Walker à titre de rappels de commissions.

+ Sur le rappel de commissions

Monsieur Walker se prévaut des dispositions de l'article L. 134-6 du Code de commerce en vertu desquelles "pour toute opération commerciale conclue pendant la durée du contrat d'agence, l'agent commercial a droit à la commission définie à l'article L. 134-5 lorsqu'elle a été conclue grâce à son intervention ou lorsque l'opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre. Lorsqu'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminé, l'agent commercial a également droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée du contrat d'agence avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe".

M. Walker précise que pendant dix années il a toujours été commissionné sur l'ensemble des opérations réalisées par ses clients, y compris pour leurs achats directs en magasin.

A l'appui des montants sollicités Monsieur Walker reprend des ventes réalisées par 13 clients, et dont le chiffre d'affaires réalisé en magasin n'a pas été pris en compte dans le calcul de ses commissions.

La société SMBI conteste le bien-fondé de ces demandes en invoquant les stipulations contractuelles, et plus précisément l'article 6 qui prévoit qu' "en rémunération de ses services, Monsieur Fabien Walker recevra une commission sur toutes les affaires traitées par lui dans son secteur. Le droit à commission ne prendra naissance qu'après l'acceptation de la commande du client par SMBI".

Si la société SMBI interprète ces stipulations comme excluant les commissions en cas d'achat ou de commandes transmises au magasin et demandes d'étude, la cour relève que l'article 6 du contrat qui lie les parties détermine les modalités de calcul des commissions comme suit : "toutes les fins de mois, le chiffre d'affaires hors taxes facturé par SMBI et généré par les clients de Monsieur Fabien Walker, et le montant cumulé de la marge commerciale nette hors taxes rattachée à ce chiffre d'affaires feront l'objet d'un calcul visant à déterminer le pourcentage de marge réalisé par rapport au chiffre d'affaires concerné ; ce pourcentage donnera droit à un taux de commissions déterminé dans l'annexe 5...".

Ces stipulations contractuelles font expressément référence au chiffre d'affaires réalisé par les clients de M. Walker, et ne distinguent nullement les modalités de leurs achats comme critère de commissions.

De surcroît, le contrat renvoie expressément au statut de l'agent commercial, et par là-même aux règles ci-avant visées dont se prévaut M. Walker.

Aussi la cour retenant, comme les premiers juges, que M. Walker justifie que les clients en cause lui étaient attribués et se rapporte aux statistiques de vente à l'appui des rappels de rémunérations, fera également droit aux prétentions de l'agent commercial à hauteur de 3 928,88 euro de commissions impayées.

+ Sur la rupture du contrat d'agent commercial

La cour observe à titre préliminaire que les conditions contractuelles de l'exercice du mandat de M. Fabien Walker ont été définies comme suit :

"Monsieur Fabien Walker exerce son activité d'agent commercial de manière indépendante. Il prospecte la clientèle selon les moyens de son choix et organise ses tournées comme il l'entend ; il n'a pas à rendre compte périodiquement de son activité.

Toutefois il s'engage à rester dans la ligne commerciale de SMBI et à tenir compte des indications et recommandations de celle-ci.

Il peut effectuer des opérations pour son compte personnel ou accepter la représentation d'autres entreprises sans avoir à en référer ou à en obtenir l'autorisation de SMBI. Cependant il s'interdit, sauf accord préalable et écrit de SMBI, toute activité se rapportant à la fabrication ou à la commercialisation de tous produits ou services susceptibles de concurrencer ceux dont la représentation lui est ici confiée".

La cour rappelle que la faute grave, qui en vertu de l'article L. 134-13 du Code de commerce prive l'agent commercial des indemnités de fin de contrat, est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun qui rend impossible le maintien du lien contractuel ; elle implique des manquements de l'agent autres qu'une simple insuffisance de résultats, tels que le non-respect de son obligation de loyauté.

Avant de procéder, comme l'ont fait les premiers juges, à l'examen de chacun des manquements visés de la lettre de rupture, la cour relève que les relations entre M. Fabien Walker et la société SMBI étaient au moment de la rupture déjà dégradées depuis plusieurs années, au point que l'agent commercial avait, au cours du premier semestre 2008, été destinataire de plusieurs courriers recommandés émanant de M. Richard Jouffroy, gérant de la société SMBI, qui lui reprochait déjà des non-respects de directives et de consignes ; Monsieur Walker avait alors sollicité l'APAC (Association professionnelle des agents commerciaux) qui avait échangé plusieurs courriers avec le conseil de la société SMBI évoquant le statut d'agent commercial, impliquant l'exercice d'une activité indépendante sans avoir à rendre compte, notamment de ses activités personnelles, et impliquant une position autre que celle des commerciaux salariés de la société.

Cette dégradation ancienne des relations contractuelles est d'ailleurs évoquée à titre préliminaire par la société appelante dans ses écrits (page 7 de ses conclusions) comme suit : "le comportement de Monsieur Walker durant les dernières années de la relation contractuelle a été tel qu'il rendait impossible le maintien du lien contractuel".

A l'appui de la faute grave justifiant une rupture immédiate la société SMBI a reproché à M. Fabien Walker :

- la non prise en compte des directives et consignes :

Les premiers juges ont rappelé que si l'agent commercial exerce ses fonctions de manière indépendante, il doit respecter la ligne commerciale et les procédures mises en place par le mandant, et ce d'autant plus que la société SMBI pour laquelle M. Walker a exercé un mandat à compter de l'année 2000 a augmenté ses effectifs au fil des années, et a été amenée à modifier son organisation.

Les premiers juges ont justement retenu la réalité des griefs tenant au fait que M. Fabien Walker a contracté directement auprès de fournisseurs les 18 mars 2010 et 9 avril 2010 pour le même client Geniferson, et ce malgré une interdiction expresse formulée par le gérant lors d'une réunion le 29 janvier 2010, et tenant au fait que M. Fabien Walker a reconnu avoir modifié deux devis établis par le technicien SAV.

Si la société SMBI ajoute à ces griefs que M. Walker a exercé du commerce sans autorisation, elle précise toutefois que "pour ne pas le pénaliser, sur sa demande, il avait été laissé la possibilité à Monsieur Walker de commercialiser les produits déréférencés par SMBI et qui concurrençaient les produits remplaçants référencés", précision qui est en parfaite cohérence avec les conditions contractuelles d'exercice du mandat d'agent commercial ci-avant rappelées.

La société SMBI évoque de façon nouvelle à hauteur d'appel une dimension plus grave de ces griefs comme affectant le lien de confiance entre mandant et agent commercial, et allègue qu'ils traduisent la déloyauté de M. Walker, alors que ces manquements étaient manifestement guidés par l'intérêt commun des parties, et que l'agent commercial a manifestement souhaité satisfaire ses clients ; le témoignage du gérant de la société Geniferson, bénéficiaire des diligences de M. Walker contraires aux consignes de la direction, indique d'ailleurs sa satisfaction quant aux prestations fournies par la société SMBI, et est d'autant plus objectif que cette société cliente l'est demeurée après le départ de l'agent commercial.

Aussi la cour reprend pour sienne l'appréciation qui a été faite par les premiers juges de ces griefs, qui n'ont pas pour effet de porter atteinte à la finalité du mandat.

- le refus d'apporter les informations nécessaires au bon fonctionnement du réseau commercial de la société SMBI :

Ce grief est illustré par la société appelante par le fait que M. Walker a passé une commande de disques au cours du mois de janvier 2010 à son nom (expliquée par l'agent commercial comme une précommande lui permettant d'être réactif aux demandes des clients), par l'absence de communication de la liste des clients ayant reçu le catalogue entreprise (que M. Walker indique avoir remis à ses clients) et par l'absence de la communication des devis remis aux clients : ce dernier point n'est pas contesté par M. Walker, qui mentionne avoir toujours rédigé ses devis seul depuis le début de son mandat et ne jamais les avoir transmis à la société, notamment pour éviter une confusion avec les commandes.

La cour retient comme les premiers juges que l'expérience qu'avait M. Walker du terrain et de sa clientèle lui permettait de faire preuve de discernement, et que ces reproches ne constituent pas des griefs sérieux d'autant qu'aucune des illustrations évoquées par la société appelante ne permet de retenir une quelconque déloyauté de la part de l'agent commercial à l'égard de la société SMBI ..

- le désintérêt de M. Walker pour l'entreprise et un comportement discourtois :

En ce qui concerne le comportement de l'agent commercial, si la société SMBI a, au cours de la procédure, réuni divers témoignages complétés à hauteur de cour émanant notamment de salariés et clients de l'entreprise, la cour relève que la lettre de rupture se limite à évoquer des attitudes fuyantes de M. Walker à l'égard du gérant et du directeur d'agence, M. Kassai. Si ces éléments confirment certes que la dégradation des relations entre M. Walker et son mandant a compromis la convivialité des saluts quotidiens, ils ne relèvent nullement d'un comportement fautif de l'agent.

Comme l'ont retenu les premiers juges, le contenu peu consistant de ce grief ajouté à celui relatif au désintérêt de M. Walker tel qu'il est détaillé par la société SMBI, qui évoque une réunion de formation en juin 2009 à laquelle M. Walker n'a pas assisté ainsi qu'une absence totale d'intérêt de l'agent commercial pour l'ouverture d'une agence de Pontarlier (que M. Walker précise être intervenue après la rupture de son contrat), ne permettent pas de caractériser des manquements fautifs de l'agent commercial portant atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun.

- la baisse de résultat et de marge :

La société SMBI a reproché à M. Walker une insuffisance de prospection avec une baisse de nouveaux clients, et, graphiques à l'appui relatifs aux années 2007 - 2008 - 2009 et aux mois de janvier - février - mars 2010, une baisse de marge et du taux de marge (de 32,50 % à 30,50 %), évolution inverse aux chiffres de la société.

La cour relève que la société SMBI procède cependant par affirmation lorsqu'elle allègue que M. Walker n'effectuait pas les diligences raisonnables pour prospecter et développer son chiffre d'affaires, et que le chiffre d'affaires de M. Walker est demeuré relativement stable entre les années 2007 (587 716 euro pour 170 clients), 2008 (593 214 euro pour 173 clients), et 2009 (531 690 euro pour 172 clients), celui de janvier à avril 2010 étant de 134 458 euro ; si les performances commerciales de M. Walker pour l'année 2009 ont légèrement fléchi, cette période a été évoquée lors de la réunion du 29 janvier 2010 comme offrant "un marché plutôt difficile".

Quant au taux de marge de M. Walker, si comme l'ont relevé les premiers juges l'annexe 5 de son contrat mentionne que le pourcentage de marge inférieur à 35 % doit être exceptionnel, il apparaît que ce taux a, entre 2003 et 2010, varié entre 29,94 % (2006) et 32,73 % (2004), qu'en 2009 il était de 30,32 % et que M. Walker n'a jamais eu de remarques particulières sur le montant du taux pratiqué jusqu'à la réunion du 29 janvier 2010.

La société SMBI ne démontre donc pas une insuffisance de résultat de M. Walker portant atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun.

- sur le comportement déloyal de M. Fabien Walker :

Ce grief formulé en dernier lieu par la société SMBI n'était pas invoqué dans la lettre de rupture et n'a d'ailleurs pas été évoqué devant les premiers juges.

Au demeurant en l'état des documents produits aux débats par l'appelante, notamment les divers échanges intervenus entre les parties avant la rupture, à aucun moment il n'a été évoqué par la société SMBI de reproches mettant en cause la loyauté de M. Walker notamment par l'exercice d'une activité commerciale concurrente ou préjudiciable à la société SMBI.

En conséquence la société SMBI ne démontre pas à hauteur de cour que Monsieur Walker a commis des manquements constitutifs de faute grave.

Le jugement déféré sera dès lors confirmé en ce qu'il a fait droit aux prétentions de M. Walker au titre de l'indemnité de préavis et de l'indemnité de fin de contrat.

Etant observé que selon l'usage l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 134-12 du Code de commerce est évaluée à deux années de commissions brutes calculées sur la moyenne des trois dernières années d'exécution du mandat (soit en l'espèce une moyenne de 66 575,36 euro), et qu'en application de l'article L. 134-11 du même Code Monsieur Walker a droit à une indemnité de préavis de trois mois au regard de la durée de son mandat commercial, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a alloué à l'intéressé 133 150,72 euro à titre d'indemnité de fin de contrat et 16 643,84 euro à titre d'indemnité de préavis.

* Sur l'application de l'article 700 du Code de procédure civile et sur les dépens

Les dispositions du jugement déféré relatives à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile en faveur de Monsieur Walker seront confirmées, de même que celles relatives à la condamnation de la société SMBI aux dépens ;

Il est inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Fabien Walker ses frais irrépétibles exposés à hauteur d'appel. Il y a lieu de lui allouer une somme de 3 000 euro à ce titre.

La SARL SMBI succombant, sa demande au titre de ses frais irrépétibles sera rejetée, et elle sera condamnée aux dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP Boucher-Stuckle.

Par ces motifs LA COUR, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et après en avoir délibéré, Rejette la demande de la société SMBI tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions de Monsieur Walker déposées le 29 août 2014, Confirme le jugement rendu le 7 mai 2013 par le tribunal de grande instance de Besançon dans toutes ses dispositions. Y ajoutant, Déboute la SARL SMBI de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et la condamne, sur ce même fondement, à payer à Monsieur Fabien Walker la somme de trois mille euro (3 000 euro). Condamne la SARL SMBI aux dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP Boucher-Stuckle conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.