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Décisions

Cass. 2e civ., 25 juin 2015, n° 14-16.435

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

General Motors France (SAS)

Défendeur :

Cavallari automobiles (SAS), Automobiles du Val-de-Marne (SARL), Deruaz auto (SARL), Espace Défense automobiles (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Flise

Rapporteur :

Mme Pic

Avocat général :

M. Girard

Avocats :

SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, SCP Didier, Pinet

Paris, pôle 1 ch. 3, du 18 mars 2014

18 mars 2014

LA COUR : - Joint les pourvois n° 14-16.435 et 14-16.436 ; - Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris,18 mars 2014), que sur requêtes présentées par la SARL Automobiles du Val-de-Marne (AVM), la SARL Cavallari automobiles, la SARL Deruaz auto et la SA Espace Défense automobiles, distributeurs agréés de véhicules automobiles neufs de la marque SAAB (les sociétés du réseau SAAB), le juge des référés d'un tribunal de commerce a commis, par ordonnances du 28 novembre 2012, un huissier de justice afin de se rendre au siège social de la société General Motors France (la société GM) et rechercher, se faire remettre et/ou prendre copie de tous documents matériels ou électroniques concernant directement ou indirectement les relations commerciales entretenues entre SAAB automobiles SA, SAAB France d'une part et General Motors Company, General Motors Europe et General Motors France, d'autre part, entre le 1er janvier 2004 et le 30 juin 2011, dans le cadre de l'organisation et de la gestion du réseau de distribution de véhicules neufs de marque SAAB ; que les sociétés du réseau SAAB ont, après exécution de cette mission, assigné en référé la société GM pour voir confirmer la régularité de la mesure et de l'intervention et obtenir la communication de l'ensemble des éléments d'information ainsi recueillis et placés sous séquestre ; que, par ordonnance du 13 mars 2013, le juge des référés a joint les procédures, modifié la mission confiée à l'huissier de justice et rejeté la demande de rétractation formée par la société GM ; que par ordonnance du 30 mai 2013, le juge des référés a ordonné la levée partielle du séquestre de certaines des pièces recueillies par la SCP d'huissiers de justice, joint à son ordonnance la liste des pièces devant être communiquées et ordonné, pour les dernières pièces, soit leur conservation en séquestre, soit leur restitution à la société GM ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° 14-16.435 : - Attendu que la société GM fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de rétractation, alors, selon le moyen : 1°) que les mesures d'instruction légalement admissibles pouvant être ordonnées dans le cadre d'une expertise in futurum doivent être utiles et nécessaires, ce qui exclut la possibilité de solliciter des mesures relatives à des informations qui ont déjà été communiquées aux requérants et les mettent pleinement en mesure d'appréhender la situation en cause ; que la société GM faisait valoir, à l'appui de ses écritures, d'une part, qu'elle avait précisément informé les sociétés requérantes de l'évolution de leur situation à compter de février 2010, avant même la cession de la société SAAB automobiles AB, en leur indiquant qu'elle conservait la qualité de cocontractant des sociétés requérantes jusqu'en février 2010, et en qualité de mandataire de la société SAAB automobiles AB jusqu'en juillet 2010, et, d'autre part, qu'en tout état de cause, le 27 novembre 2012, date du dépôt des requêtes, aucun doute n'existait quant à la situation juridique des requérantes dans leurs rapports avec la société GM et la société SAAB automobiles AB, ce dont il résultait que les sociétés requérantes n'avaient en réalité rien à apprendre grâce aux mesures sollicitées, celles-ci étant dépourvues d'objet ou à tout le moins, hors de proportion avec le prétendu fait à prouver, si bien qu'en refusant de rétracter l'ordonnance litigieuse sans rechercher si l'attitude parfaitement transparente de la société GM à l'égard des sociétés distributeurs n'avait pas permis la pleine information de ces dernières ni si, en tout état de cause, à la date de la demande des mesures, aucun doute n'existait quant à la situation juridique des requérantes dans leurs rapports avec la société GM et la société SAAB automobiles AB, privant par suite les mesures sollicitées de toute utilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 145 du Code de procédure civile ; 2°) que toute mesure d'instruction in futurum devant nécessairement être proportionnée aux droits et intérêts respectifs des parties, elle doit strictement être limitée à la fois quant à son but et quant à son objet, et donc définir au moyen de critères précis les documents visés ; qu'est en revanche proscrite la mesure d'ordre général qui n'est pas suffisamment précise ni ajustée au fait à prouver en ce qu'elle conduit à appréhender des documents excédant le strict nécessaire pour atteindre le résultat recherché de sorte qu'en considérant qu'était légalement admissible la mesure conférant à l'huissier la mission d'appréhender, de façon très large, tous " les documents concernant directement ou indirectement les relations entretenues entre les sociétés SAAB automobiles AB, Saab France, d'une part, et celles du groupe General Motors, d'autre part " et, s'agissant des contrats passés entre ces sociétés, tous ceux afférents à la période allant du 1er juin 2004 jusqu'au 30 juin 2011, cette mesure ayant conduit à l'appréhension d'innombrables courriels sans aucun rapport avec le litige en prévision duquel la mesure avait été ordonnée, par le truchement d'une recherche par le mot-clé général " SAAB " au sein de la boîte de messagerie de la direction juridique de la société GM, la cour d'appel a violé l'article 145 du Code de procédure civile par fausse application ; 3°) que n'est pas légalement admissible au regard de l'article 145 du Code de procédure civile, texte de valeur réglementaire, la mesure consistant à conférer à un simple huissier de justice, opérant de surcroît sans le concours d'aucun officier de police judiciaire, une mission générale d'investigation et le pouvoir de procéder à une perquisition pour appréhender une masse de documents au siège d'une société si bien qu'en décidant qu'était admissible au regard de l'article 145 du Code de procédure civile la mesure consistant à détacher au siège social de la société GM France un huissier de justice accompagné d'un expert en informatique pour qu'il recherche et saisisse des documents qui plus est sur la base d'un critère vague lui permettant d'appréhender une masse d'éléments, au motif inopérant que lesdits documents seraient mis sous séquestre dans l'attente de leur examen et d'un débat contradictoire devant la juridiction des référés, la cour d'appel a violé l'article 145 du Code de procédure civile, ensemble l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

Mais attendu que l'arrêt retient que les pièces produites par les sociétés du réseau SAAB attestent d'éléments relatifs à la dissimulation de volonté, dès 2008, de General Motors de se séparer de la marque SAAB et au déficit d'informations et de conseils sur la situation de la marque et relève que la mission ordonnée a été strictement et exactement limitée dans le temps, porte sur les seuls documents concernant les relations entretenues entre les sociétés SAAB automobiles AB, SAAB France d'une part et celles du groupe General Motors, d'autre part, et qu'enfin les pièces et informations recueillies ont été mises sous séquestre et non communiquées aux parties adverses ;

Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, après avoir souverainement apprécié l'existence d'un motif légitime d'instituer une mesure d'instruction et sans être tenue de procéder à une recherche que ces éléments rendaient inopérante, a déduit à bon droit que la mesure ordonnée se bornait à des constats dont l'objet était circonscrit par l'ordonnance sans comporter aucune atteinte à une liberté fondamentale ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° 14-16.436, pris en sa première branche, tel que reproduit en annexe : - Attendu que la société GM fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance du 30 mai 2013 ;

Mais attendu que le pourvoi n° 14-16.435 ayant été rejeté, le moyen, en ce qu'il invoque une cassation par voie de conséquence, est sans portée ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les quatre dernières branches du moyen annexé qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Par ces motifs, Rejette les pourvois.