Livv
Décisions

Cass. com., 7 juillet 2015, n° 14-18.823

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Technotrans (SA)

Défendeur :

Akriche, Navi Trade Forwarders (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocat général :

Me Pénichon

Conseillers :

Mmes Orsini, Riffault-Silk

Avocats :

Me Le Prado, SCP Lyon-Caen, Thiriez

Aix-en-Provence, du 27 mars 2014

27 mars 2014

LA COUR : - Sur le premier et le deuxième moyens, réunis : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 mars 2014), qu'après avoir démissionné, en décembre 2006, de la société Technotrans, commissionnaire de transports, M. Akriche a créé, en janvier 2007, la société Navi Trade Forwarders (la société NTF) ayant une activité concurrente ; qu'alléguant des actes de concurrence déloyale commis à son préjudice, la société Elite Logistic Consultants Association dite ELCA France (la société ELCA), dont M. Akriche était associé, a obtenu, le 25 octobre 2007, une ordonnance désignant un huissier de justice et un expert en informatique pour rechercher, dans les locaux de la société NTF, tous documents de nature à établir un détournement frauduleux de sa clientèle ; qu'un constat a été dressé le 3 décembre 2007 ; qu'à la requête de la société Technotrans, associée de la société ELCA, le même huissier a été désigné, par ordonnance du 26 mars 2008, aux fins d'extraire du procès-verbal de constat tous documents la concernant directement ou indirectement ; que se fondant, pour l'essentiel, sur les documents ainsi extraits selon procès-verbal de constat du 9 avril 2008, la société Technotrans a assigné la société NTF et M. Akriche en paiement de dommages-intérêts pour concurrence déloyale ;

Attendu que la société Technotrans fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable en justice la preuve résultant du constat dressé le 9 avril 2008 et de déclarer inopposable à la société NTF et à M. Akriche le constat du 3 décembre 2007 alors, selon le moyen : 1°) que le juge, qui doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut fonder sa décision sur des moyens relevés d'office, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs explications ; qu'en énonçant, pour dire irrecevable en justice la preuve résultant du constat d'huissier et du cd-rom qui y est annexé réalisé le 9 avril 2008 en exécution de l'ordonnance du 26 mars 2008, que la copie de la requête et de l'ordonnance du 26 mars 2008 n'avaient pas été remises à M. Akriche, sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs éventuelles observations à ce titre, la cour d'appel, qui s'est fondée sur un moyen qu'elle a relevé d'office, a méconnu le principe du contradictoire et ainsi violé l'article 16 du Code de procédure civile ; 2°) que l'huissier peut effectuer toutes constatations de fait en relation avec l'objet de sa mission ; qu'en se bornant, pour dire irrecevable en justice la preuve résultant du constat d'huissier et du cd-rom qui y est annexé réalisé le 9 avril 2008 en exécution de l'ordonnance du 26 mars 2008, à se fonder sur les seules circonstances selon lesquelles les quarante-quatre documents listés dans ce constat concernaient la société Technotrans, avaient été extraits des documents enregistrés sur cd-rom par l'expert Alexis lors du premier constat réalisé le 3 décembre 2007 en exécution de l'ordonnance du 25 octobre 2007, dans le cadre d'un litige concernant la société exposante non en tant qu'employeur de M. Akriche mais en tant qu'associé de la société ELCA France, n'avaient aucun rapport avec les clients de cette dernière société qui étaient l'objet de l'ordonnance du 25 octobre 2007 et qui figuraient sur la liste annexée à la requête du 25 octobre 2007, de sorte que l'enregistrement de ces documents, qui ne relevait pas de la mission donnée à l'huissier de justice, n'avait pas été autorisé par la première ordonnance du 25 octobre 2007, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'obtention déloyale des documents litigieux permettant de les déclarer irrecevables en justice et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 9 du Code de procédure civile ; 3°) que l'huissier peut effectuer toutes constatations de fait en relation avec l'objet de sa mission ; qu'en se contentant, pour dire inopposable à la société NTF et à M. Akriche le constat d'huissier et le cd-rom qui y est annexé du 3 décembre 2007 comme excédant la mission de l'huissier, de se fonder sur la seule circonstance que ce constat contenait des documents relatifs à la société Technotrans qui ne concernaient pas des clients de la société ELCA qui étaient l'objet de la première ordonnance présidentielle du 25 octobre 2007 et qui figuraient sur la liste annexée à la requête du 25 octobre 2007, la cour d'appel n'a pas caractérisé le dépassement par l'huissier des limites de sa première mission et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 9 du Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant relevé que le " cd-rom ", annexé au constat du 3 décembre 2007, contenait des documents n'ayant aucun rapport avec les clients de la société ELCA, seuls visés par l'ordonnance du 25 octobre 2007, et qui concernaient uniquement la société Technotrans, l'arrêt retient que l'enregistrement de ces documents n'avait pas été autorisé par cette ordonnance, faisant ainsi ressortir le dépassement par l'huissier de justice des limites de sa mission ;

Et attendu, en second lieu, qu'ayant constaté que les documents dont se prévalait la société Technotrans au soutien de sa demande en concurrence déloyale, listés dans le constat du 9 avril 2008, avaient été extraits des documents annexés au premier constat du 3 décembre 2007, l'arrêt retient que l'utilisation par la société Technotrans de ces documents, dans le litige l'opposant à son ancien salarié, constitue un procédé déloyal rendant irrecevable la preuve ainsi obtenue ; que, par ces seuls motifs, abstraction faite de ceux surabondants critiqués par la première branche, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le troisième moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.