CA Besançon, 2e ch. civ., 3 mai 2013, n° 12-00260
BESANÇON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Ugova (SARL)
Défendeur :
Balestrat
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Deray
Conseillers :
MM. Theurey-Parisot, Hua
Avocats :
Mes Graciano, Vuillemin
Faits et prétentions des parties
Aux termes d'un contrat de vente à distance conclu le 13 septembre 2010, Raymond Balestrat a acquis auprès de la SARL Ugova un groupe électrogène 12 KW Diesel insonorisé et garanti deux ans, moyennant paiement d'une somme de 6 359 euro incluant les frais de transport d'un montant de 360 euro.
Par jugement du 7 décembre 2011, le Tribunal d'instance de Dole a :
- constaté l'existence d'un vice caché affectant le groupe électrogène,
- prononcé la résolution de la vente,
- condamné la SARL Ugova à venir chercher à ses frais le groupe électrogène dans un délai de 3 mois à compter de la signification du jugement sous astreinte de 10 euro par jour de retard,
- condamné la SARL Ugova à payer à Raymond Balestrat les sommes de :
- 6 359 euro au titre du prix,
- 700 euro au titre des dommages et intérêts,
assorties des intérêts au taux légal à compter du jugement,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné la SARL Ugova à payer à Raymond Balestrat la somme de 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Sur ce
Vu la déclaration d'appel déposée le 6 février 2012 par la SARL Ugova,
Vu les conclusions déposées le 12 septembre 2012 par l'appelante,
Vu les conclusions n° 2 déposées le 7 novembre 2012 par Raymond Balestrat,
auxquelles il est expressément référé pour l'exposé des moyens et des prétentions respectifs des parties, en application de l'article 455 du Code de procédure civile,
Vu les pièces du dossier,
Vu l'ordonnance de clôture du 12 décembre 2012,
Motifs de la décision
La société Ugova, non comparante en première instance, soutient qu'elle n'a pas eu connaissance de l'assignation et que l'huissier de justice n'a pas fait diligence pour lui remettre l'acte à personne.
A titre principal, elle sollicite la nullité de l'assignation. A titre infiniment subsidiaire, elle soutient que le service après-vente du groupe électrogène vendu à M. Balestrat ne lui incombe pas et qu'il doit être assuré par l'importateur.
Sur l'assignation
La remise de l'assignation doit se faire dans le respect des articles 654 et subsidiairement 655 et suivants du Code de procédure civile.
L'huissier a constaté que le destinataire de l'acte étant absent à l'adresse indiquée, <adresse> et que, n'ayant pu lors de son passage avoir aucune indication sur le lieu où rencontrer le destinataire, il a eu néanmoins confirmation du domicile par un voisin.
L'huissier, officier public et ministériel dont les actes soumis à un formaliste précis revêtent le caractère d'acte authentique, indique avoir accompli les formalités prescrites par les articles 655, 656 et 658 du Code de procédure civile. Il indique avoir laissé un avis de passage dans la boîte aux lettres de la société et adressé à celle-ci la lettre prévue à l'article 658 comportant les mêmes mentions que l'avis de passage et rappelant les mentions du dernier alinéa de l'article 656, avec copie de l'acte de signification dans le délai prescrit.
Faute pour l'appelante de rapporter la preuve que l'acte accompli par l'huissier constitue un faux, sa demande aux fins de nullité de l'assignation sera rejetée.
L'assignation délivrée, en tout point conforme aux textes précités, est parfaitement régulière.
Sur le fond
Selon l'article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un prix moindre s'il les avait connus.
De jurisprudence constante, cette responsabilité pèse sur tout vendeur professionnel, qu'il soit fabricant ou simple revendeur.
C'est en faisant une juste application des règles applicables en matière de preuve que le premier juge a relevé que la vente à distance a été régularisée le 13 septembre 2010 ; que le 31 décembre 2010, par courrier recommandé avec accusé de réception, l'acquéreur a fait part au vendeur d'une panne avec fuite d'eau, rendant l'appareil inutilisable ; que le délai très court écoulé entre la vente et la panne, ainsi que l'impossibilité de réparer le bien qui résulte des éléments du dossier, démontrent l'existence d'un vice rédhibitoire rendant l'appareil impropre à l'usage auquel l'acheteur le destinait.
Eludant ce débat, devant la cour, l'appelante tente de s'exonérer de sa responsabilité en invoquant une mention figurant sur la facture acquittée, mention aux termes de laquelle le service après-vente est assuré par l'importateur et non par ses soins. La SARL Ugova soutient que M. Balestrat devait s'adresser directement à cet importateur via un lien Internet figurant sur son site.
A cette fin, la SARL Ugova produit une pièce portant la mention imprimée en gros caractères "Facture acquittée" et sur laquelle figure un encart en bas de page, parfaitement lisible, contenant les modalités à mettre en œuvre pour bénéficier du service après-vente, à savoir se connecter sur un site repardurable.com.
Il est intéressant de relever que cette mention ne figure pas sur la facture portant le même numéro (F101228) remise à M. Balestrat portant, en revanche, le cachet et la signature de la société Ugova.
C'est avec raison que l'intimé souligne que l'existence de deux factures différentes portant le même numéro pour le même matériel pose question sur la véracité du document produit par l'appelante et sur la bonne foi du vendeur.
En tout état de cause, le vendeur professionnel est réputé connaître les vices cachés affectant la chose vendue et ne peut s'exonérer en insérant une telle clause tendant à faire croire au consommateur qu'il ne peut rechercher la responsabilité du professionnel en cas d'inexécution ou d'exécution défectueuse, partielle ou tardive de ses obligations ou de celles des prestataires auxquels il a recouru.
En l'espèce, les nombreux échanges de courriers entre Raymond Balestrat et la SARL Ugova, puis avec la responsable de la société Repardurable, Mme Le Cam, attestent de l'inaction de la SARL Ugova et de l'inefficacité des démarches entreprises.
S'agissant d'une vente à distance, les dispositions de l'article L. 121-20-3 du Code de la consommation instituent une responsabilité de plein droit du professionnel à l'égard du consommateur, que les obligations soient à exécuter par le professionnel qui a conclu le contrat ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
Il se déduit de ce texte, comme des faits de l'espèce, que la responsabilité de l'EURL Ugova est entière, et que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a constaté l'existence d'un vice caché, prononcé la résolution de la vente, condamné la SARL Ugova à enlever le matériel et à restituer le prix.
Sur les dommages et intérêts
Reconventionnellement, Raymond Balestrat sollicite la somme de 1 000 euro à titre de dommages et intérêts.
La somme fixée par le premier juge à hauteur de 750 euro, pour réparer le préjudice subi par les époux Balestrat du fait de l'absence d'électricité, sera confirmée en ce qu'elle constitue une juste évaluation du préjudice au vu des éléments soumis à l'appréciation du juge.
Sur la liquidation de l'astreinte
L'article L. 131-3 du Code des procédures civiles d'exécution dispose que l'astreinte, même définitive, est liquidée par le juge de l'exécution sauf si le juge qui l'a ordonnée reste saisi de l'affaire ou s'en est expressément réservé le pouvoir.
Il se déduit de ce texte que la cour d'appel ne peut liquider l'astreinte prononcée par le jugement qui lui est déféré par la voie de l'appel, seul le juge de l'exécution demeurant compétent en l'espèce.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
La SARL Ugova, qui succombe en son appel, supportera les dépens.
Elle devra en outre verser à Raymond Balestrat, en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et en équité, la somme de 1 200 euro.
Par ces motifs LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi, confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 7 décembre 2011 par le tribunal d'instance de dole, y ajoutant, déboute la SARL Ugova de ses demandes, se déclare incompétente pour liquider l'astreinte prononcée par le tribunal d'instance, déboute Raymond Balestrat du surplus de ses demandes, condamne la SARL Ugova à payer à Raymond Balestrat la somme de mille deux cent euros (1 200 euro) en application de l'article 700 du Code de procédure civile, condamne la SARL Ugova aux dépens, avec possibilité de recouvrement par Maître Maud Vuillemin dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.